ARRÊT N° /2022
SS
DU 04 OCTOBRE 2022
N° RG 22/00182 - N° Portalis DBVR-V-B7G-E5CM
Pole social du TJ de REIMS
20/00275
17 décembre 2021
COUR D'APPEL DE NANCY
CHAMBRE SOCIALE
SECTION 1
APPELANT :
Monsieur [M] [F]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Sami GATTOUFI de la SELARL SG AVOCATS CONSEIL, avocat au barreau de REIMS
Dispensé de comparaitre
INTIMÉE :
CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PRÉVOYANCE ET D' ASSURANCE VIEILLESSE (C.I.P.A.V.) prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Stéphanie PAILLER de la SELEURL CABINET STEPHANIE PAILLER AVOCAT, avocat au barreau de PARIS
Dispensée de comparaitre
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats, sans opposition des parties
Président :Mme BUCHSER-MARTIN
Siégeant en conseiller rapporteur
Greffier :Madame TRICHOT-BURTE (lors des débats)
Lors du délibéré,
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 07 Septembre 2022 tenue par Mme BUCHSER-MARTIN, magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Guerric HENON, président, Dominique BRUNEAU et Catherine BUCHSER-MARTIN, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 04 Octobre 2022 ;
Le 04 Octobre 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
FAITS ET PROCÉDURE :
Monsieur [M] [F] a été affilié à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (ci-après dénommée la CIPAV) du 1er avril 2011 au 31 décembre 2016 au titre d'une activité de conseil.
Par courrier recommandé du 8 juin 2019 reçu le 4 juillet 2019, la CIPAV l'a mis en demeure de lui régler la somme de 7 048,40 € au titre des cotisations et majorations de l'année 2016.
Le 23 septembre 2019, la CIPAV a émis une contrainte n° C32019021818, , signifiée le 21 octobre 2019 selon procès-verbal de recherches, à l'encontre de monsieur [M] [F], relative aux cotisations et contributions sociales exigibles au titre de l'année 2016 pour un montant total de 7 048,40 €.
Le 30 octobre 2020, maître [P] [H], huissier de justice en charge de l'exécution de la contrainte, a notifié à monsieur [M] [F] un avis avant reprise de l'exécution forcée de ladite contrainte.
Par courrier recommandé expédié le 3 décembre 2020 monsieur [M] [F] a formé opposition à cette contrainte auprès du pôle social du tribunal judiciaire de Reims.
Par jugement du 17 décembre 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Reims a :
- déclaré irrecevable pour cause de forclusion l'opposition à la contrainte émise par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse le 23 septembre 2019 pour le recouvrement de la somme de 7 048,40 euros au titre des cotisations et majorations de retard de l'année 2016 et signifiée à monsieur [M] [F] le 21 octobre 2019,
- constaté que cette contrainte comporte tous les effets d'un jugement ;
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné monsieur [M] [F] aux dépens de l'instance.
Par acte du 24 janvier 2022, monsieur [M] [F] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.
L'affaire a été plaidée à l'audience du 7 septembre 2022, à laquelle la CIPAV a été dispensé de comparaître.
PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Monsieur [M] [F], représenté par son avocat, a repris ses conclusions reçues au greffe le 5 septembre 2022 et a sollicité ce qui suit :
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire pôle social de Reims en date du 17 décembre 2021,
Et,
Statuant à nouveau,
- juger que l'opposition à contrainte est recevable en la forme,
- juger que la mise en demeure en date du 08 juin 2019 est dépourvue de tout effet juridique,
- juger que la contrainte est de plein droit nulle en ce qu'elle n'a pas été précédée par l'envoi au cotisant d'une mise en demeure,
- juger que la CIPAV est définitivement prescrite en son action de recouvrement des cotisations au titre de l'année 2016,
A titre infiniment subsidiaire,
- juger que l'opposition à contrainte est bien fondée,
Dans tous les cas,
- condamner la CIPAV à lui payer la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du C.P.C.,
- condamner la CIPAV aux entiers dépens.
Par conclusions reçues au greffe le 10 août 2022, La caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse a sollicité ce qui suit :
- confirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de REIMS du 17 décembre 2021,
A titre principal,
- déclarer le recours irrecevable pour forclusion,
A titre subsidiaire,
- valider la contrainte délivrée le 21 octobre 2019 pour la période du 1 janvier 2016 au 31 décembre 2016 en son montant réduit s'élevant à 2.812,43 € représentant les cotisations (2.286,50€) et les majorations de retard (525,93 €),
A titre infiniment subsidiaire,
- valider la contrainte délivrée le 21 octobre 2019 pour la période du 1 janvier 2016 au 31 décembre 2016 en son montant réduit s'élevant à 385,46 € représentant les majorations de retard,
En tout état de cause,
- condamner monsieur [M] [F] à lui régler la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- débouter monsieur [F] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;
- condamner monsieur [M] [F] au paiement des frais de recouvrement, conformément aux articles R133-6 du code de la sécurité sociale et 8 du décret du 12 décembre 1996.
Pour l'exposé des moyens des parties, il convient de faire référence aux conclusions sus mentionnées, reprises oralement à l'audience par monsieur [M] [F] et régulièrement communiquées avant l'audience par la CIPAV
L'affaire a été mise en délibéré au 4 octobre 2022 par mise à disposition au greffe par application des dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR :
Sur la recevabilité de l'opposition :
Aux termes de l'article R133-3 alinéa 3 du code de la sécurité sociale, le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la notification ou de la signification. L'opposition doit être motivée ; une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe.
Aux termes de l'article 659 du code de procédure civile, lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.
Est nulle la signification sur le fondement de l'article 659, dès lors que le domicile réel du débiteur était connu du créancier qui a fait signifier, de manière malicieuse, en un lieu où il savait que le débiteur ne résidait pas (Civ. 2e 21 décembre 2000 n°99-13.218 P).
-oo0oo-
En l'espèce, monsieur [M] [F] fait valoir qu'il avait communiqué son adresse à [Localité 6] à la CIPAV par mail du 5 août 2019, alors que l'huissier de justice chargé de la signification de la contrainte le 21 octobre 2019 s'est rendu à [Localité 5]. Il ajoute qu'il a eu connaissance de cette contrainte pour la première fois le 30 octobre 2020, et qu'il a posté l'opposition à contrainte le 12 novembre 2020. Il indique que l'acte de signification ne fait état d'aucune vérification de son adresse. Il précise qu'il a fait constater par huissier de justice l'expédition du mail qu'il a adressé à la caisse le 5 août 2019. Il ajoute qu'il importe peu que la caisse n'y ait pas répondu, qu'elle ne conteste pas avoir reçu les documents comptables annexés à ce mail, mais qu'elle communique ce mail après l'avoir tronqué de toutes les mentions écrites par lui, notamment sa nouvelle adresse.
Il fait également valoir que s'il a effectué une démarche relative à son adresse via son espace cotisant le 24 novembre 2019, c'est parce qu'il avait constaté que la caisse n'avait pas tenu compte de son mail du 5 août 2019. Il ajoute qu'une erreur technique l'a empêché de mettre à jour son adresse et qu'il a transmis son adresse à la caisse par la messagerie. Il précise que le courrier de la caisse du 26 novembre 2019, confirmant prendre en compte la modification de ses coordonnées, mentionne une adresse à [Adresse 3], qui n'est pas la sienne.
La CIPAV fait valoir que la contrainte ayant été signifiée le 21 octobre 2019 par huissier de justice et que l'acte de signification mentionnait expressément le délai de forclusion, de telle sorte que l'adhérent avait jusqu'au 5 novembre 2019 pour saisir le tribunal judiciaire de Reims, alors qu'il a formé opposition à la contrainte le 3 décembre 2020.
-oo0oo-
La contrainte litigieuse a été signifiée à monsieur [F] le 21 octobre 2019 par un acte d'huissier de justice selon les dispositions de l'article 659 du code de procédure civile.
Cet acte mentionne l'ensemble des diligences effectuées par l'huissier mandaté (vérification de la sonnette, la boite aux lettres, vérification auprès des voisins etc) et est régulier à cet égard.
Par ailleurs, monsieur [F] prétend avoir notifié à la CIPAV son changement d'adresse par un mail du 5 août 2019, par lequel il lui a en outre transmis des documents comptables.
Si la CIPAV produit aux débats la copie d'un mail qui lui a été adressé par monsieur [F] le même jour, ce mail ne comporte cependant aucun texte, de telle sorte que l'authenticité de ces pièces est mise en cause.
Monsieur [F] a dès lors saisi un huissier de justice, qui a effectivement constaté qu'un mail, destiné à [Courriel 7], dans lequel il mentionnait sa nouvelle adresse, se trouvait bien dans les éléments envoyés de sa boite mail, à 17h18'12''. Cependant, l'huissier n'a effectué aucune vérification quant à une éventuelle modification de ce mail, de telle sorte que son constat n'apporte pas la preuve de son authenticité.
Cela est d'autant plus vrai que monsieur [F] produit, dans son annexe 1, le même mail, qui mentionne cependant une autre heure d'expédition (16h57'35'').
Dès lors, monsieur [F] n'apporte pas la preuve du contenu du mail du 5 août 2019 et il n'établit pas qu'il a effectivement notifié sa nouvelle adresse à la CIPAV avant la signification de la contrainte.
De plus, monsieur [F] reconnaît s'être connecté à son espace cotisant le 24 novembre 2020, afin de modifier son adresse.
La CIPAV lui a adressé un courrier en réponse le 26 novembre 2019, confirmant la prise en compte des modifications de ses coordonnées postales, courrier envoyé à l'adresse [Adresse 3]. Si monsieur [F] prétend que cette adresse n'a jamais été la sienne, c'est bien à cette adresse que la mise en demeure lui a été adressée le 8 juin 2019, et que l'avis avant reprise d'exécution forcée lui a été notifié le 30 octobre 2020, avis suite auquel il a formé opposition à la contrainte.
Au vu de ce qui précède, monsieur [F] n'apporte pas de preuve suffisante ni de son adresse au jour de la signification de la contrainte, ni de la communication préalable de cette adresse à la CIPAV.
Enfin, il n'est pas contesté que l'acte de signification de la contrainte mentionne les délais et voies de recours.
Dès lors, la signification de la contrainte est régulière, et il sera en outre relevé que monsieur [F] ne sollicite pas l'annulation de l'acte de signification, alors que la seule sanction de l'irrégularité d'un acte de signification est sa nullité.
Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que les premiers juges ont déclaré l'opposition irrecevable et le jugement sera confirmé.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Aux termes de l'article R133-6 du code de la sécurité sociale, les frais de signification de la contrainte faite dans les conditions prévues à l'article R133-3, ainsi que de tous actes de procédure nécessaires à son exécution, sont à la charge du débiteur, sauf lorsque l'opposition a été jugée fondée.
Monsieur [M] [F] succombant, il sera condamné aux dépens de la procédure d'appel incluant les frais de signification de la contrainte et, le cas échéant, les frais de son exécution forcée, et débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la charge de la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse l'intégralité des frais irrépétibles exposés de telle sorte que la somme de 800 euros lui sera allouée à ce titre.
PAR CES MOTIFS,
La cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,
CONFIRME le jugement du 17 décembre 2021 du pôle social du tribunal judiciaire de Reims en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE monsieur [M] [F] à verser à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse la somme de 800 euros (huit cents euros) au titre des frais irrépétibles de l'instance d'appel,
CONDAMNE monsieur [M] [F] entiers dépens d'appel incluant les frais de signification de la contrainte et, le cas échéant, les frais de son exécution forcée.
Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Et signé par monsieur Guerric HENON, président de chambre et par madame Clara TRICHOT-BURTÉ, greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Minute en six pages