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29/09/2022 | FRANCE | N°21/02506

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 29 septembre 2022, 21/02506


ARRÊT N° /2022

PH



DU 29 SEPTEMBRE 2022



N° RG 21/02506 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3NV







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGWY

F 20/00114

04 octobre 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANT :



Monsieur [R] [J]

[Adresse

1]

[Localité 3]

Représenté par Me Patrice BUISSON de la SCP BUISSON BRODIEZ, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉE :



S.A.S. LONGWY ESPACE AUTOMOBILE actuellement dénommée KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE, prise en la personne de son représentant légal, domicilié audit siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représen...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 29 SEPTEMBRE 2022

N° RG 21/02506 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E3NV

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGWY

F 20/00114

04 octobre 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANT :

Monsieur [R] [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Patrice BUISSON de la SCP BUISSON BRODIEZ, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S. LONGWY ESPACE AUTOMOBILE actuellement dénommée KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE, prise en la personne de son représentant légal, domicilié audit siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean-luc HAUGER de l'AARPI LEGALIS, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : STANEK Stéphane,

WILLM Anne-Sophie

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 16 Juin 2022 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 29 Septembre 2022 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 29 Septembre 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

M. [R] [J] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée par la société LONGWY ESPACE AUTOMOBILE désormais dénommée KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE, exploitant une concession automobile RENAULT, à compter du 17 juillet 2006, en qualité de vendeur affecté à la commercialisation des véhicules d'occasion.

Par requête du 14 décembre 2020, M. [R] [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Longwy aux fins de harcèlement moral.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Longwy rendu le 4 octobre 2021, lequel a :

- déclaré recevables mais non fondées toutes les demandes de M. [R] [J],

- débouté M. [R] [J] de sa demande de 90 000 euros au titre du harcèlement moral,

- débouté M. [R] [J] de sa demande de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [R] [J] à verser à la société LONGWY ESPACE AUTOMOBILE les sommes suivantes :

- 5 000  euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- 5 000 euros à titre d'amende civile en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [R] [J] aux entiers frais et dépens de l'instance.

Vu l'appel formé par M. [R] [J] le 18 octobre 2021 ;

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de M. [R] [J] déposées sur le RPVA le 1er décembre 2021, et celles de la société KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE déposées sur le RPVA le 25 janvier 2022 ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 18 mai 2022 ;

M. [R] [J] demande :

- d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Longwy le 4 octobre 2021 (RG 20/00114),

Statuant à nouveau

- condamner la SAS LONGWY ESPACE AUTOMOBILE à lui payer la somme de 90 000 euros de dommages et interêts pour harcèlement moral,

- condamner la SAS LONGWY AUTOMOBILE à lui payer la somme de 2 400 euros d'article 700,

- la condamner aux dépens.

La société KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE demande :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Longwy le 4 octobre 2021,

Y ajoutant

- condamner M. [R] [J] à lui verser la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [R] [J] aux entiers frais et dépens de l'instance, en ceux compris l'intégralité des frais qui devraient être exposés pour assurer l'exécution de l'arrêt à intervenir.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant de M. [R] [J] le 1er décembre 2021, et de la société KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE le 25 janvier 2022.

1. Sur la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral

M. [R] [J] fait valoir qu'il a été victime de harcèlement moral et de discrimination se manifestant notamment par une différence de traitement de salaires et des refus de prime.

Il rappelle avoir saisi le conseil de prud'hommes de Longwy en janvier 2011 et que par un arrêt de la cour d'appel de Nancy du 27 novembre 2015, la société LONGWY AUTOMOBILE avait été condamnée à lui payer un rappel de salaire, les congés payés y afférents et des dommages et intérêts pour préjudice moral, précisant que la cour avait retenu l'existence d'un harcèlement et d'une discrimination au revenu et aux primes. Il fait également valoir que l'employeur avait été condamné pour faute inexcusable par un arrêt du 14 juin 2019 de la chambre sociale de la cour d'appel de Nancy. Il renvoie sur ce point en pièce N°2, à l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 27 novembre 2015.

Il mentionne qu'après la reprise de son travail suite à un arrêt maladie, il a de nouveau été confronté à des faits de harcèlement moral de son employeur.

Il indique se trouver depuis en arrêt maladie du fait de l'employeur, et soutient que sa santé, qui s'est dégradée, a eu des répercussions sur sa famille.

Il sollicite en conséquence une indemnisation à hauteur de 90 000 euros en réparation de son préjudice pour harcèlement moral.

Motivation :

Aux termes des dispositions de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 du code du travail dispose quant à lui que lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Sur l'isolement du salarié par l'employeur et le refus de lui laisser les clés de la concession après avoir changé les serrures

M. [R] [J] soutient avoir été isolé des autres vendeurs et que les clés de la concession ne lui ont pas été remises, alors que les serrures avaient été changées.

Il est cependant constaté que ces faits ne sont justifiés et corroborés par aucun élément du dossier de M. [R] [J].

Sur la réduction des primes d'objectifs de ventes et les commissions

M. [R] [J] fait valoir qu'alors qu'il avait atteint les objectifs fixés, il n'a pas perçu l'intégralité des primes et commissions dues. Il indique que pour percevoir la prime de 200 euros, il devait répondre à un objectif de pénétration supérieur à 45%, alors que pour les autres vendeurs, le taux minimum n'était que de 42 %. Il renvoie sur ce point à ses pièces N° 3, 4 et 5.

Il fait en outre valoir que la somme qu'il devait percevoir sur le premier véhicule vendu pour le mois de janvier 2018, soit 25 euros, avait été ramenée à 20 euros en mars 2018, et qu'il était donc traité différemment que les autres vendeurs.

Sur ce :

Les pièces N°3 et 4 sont relatives aux conditions d'attribution de la prime « objectif VO », de la prime « animation financement et TGA », de la prime « animation VO » et de la commission « animation spécifique sur les ex auto école » pour les vendeurs VO composés de M. [J] et de M. [Y], relativement aux mois de janvier et mars 2018.

La pièce N° 5 se rapporte aux conditions d'attribution de ces mêmes primes et commission pour les vendeurs VN relativement aux mois de janvier et février 2018.

Il est cependant constaté que M. [R] [J] compare ses objectifs avec ceux fixés pour des vendeurs d'une classification différente de la sienne, à savoir des vendeurs VN alors que le salarié est vendeur de véhicules d'occasion (VO).

Il est en outre remarqué qu'il n'existe aucune différence de traitement entre M. [R] [J] et l'autre salarié vendeur VO, savoir M. [Y].

Il est enfin observé que la baisse invoquée par M. [R] [J] de la somme allouée pour le premier véhicule VO vendu au titre du mois de mars 2018 s'applique également à M. [Y], la fiche d'objectifs étant la même pour les deux vendeurs VO (pièce N°4).

Sur la privation de prime d'objectifs

M. [R] [J] soutient avoir été privé de prime alors qu'il avait dépassé les objectifs fixés.

Il se réfère à un mail qu'il mentionne avoir adressé à l'employeur le 16 mai 2018 et auquel il renvoie en citant sa pièce N°5 (il s'agit en réalité de la pièce N°6 1er feuillet).

Dans son mail du 16 mai 2018, M. [R] [J] demande à l'employeur que la « prime objectif manquante » soit complétée.

L'employeur produit en pièce N°60 la fiche d'objectif de M. [R] [J] pour le mois de mai 2018 qui fixe un objectif mensuel de 14 véhicules vendus.

L'employeur verse également en pièce N°61 le bulletin de paie du mois de mai de M.[R] [J] qui mentionne, conformément aux modalités de rémunération variable des vendeurs VO indiquées sur la fiche d'objectif :

- une commission VO de 1 850 euros,

- une commission financement VO de 270 euros,

- une commission accessoires VO de 209,87 euros,

- une prime diverse service VO de 40 euros,

- une prime animation de 235 euros.

Il ressort de cet élément, que M. [R] [J] ne conteste pas, qu'il a été rémunéré de ses primes.

Sur l'absence de considération et le refus de participer au challenge des vendeurs

M. [R] [J] fait valoir qu'alors qu'il demeurait l'un des meilleurs vendeurs, il n'était jamais complimenté par la direction comparativement aux autres vendeurs.

Il soutient également qu'il s'est vu refuser de participer au challenge des vendeurs du groupe.

Il est constaté qu'aucun des faits invoqués par le salarié ne sont justifiés et corroborés.

Sur le retrait de l'ancienneté des fiches de paie

M. [R] [J] explique que l'employeur lui a retiré son ancienneté de ses fiches de paie de décembre 2016 et janvier 2017, et mentionne avoir été contraint d'écrire pour qu'il soit procédé à la rectification.

Il renvoie à ses pièces N° 6 et 7.

La pièce N°6 (2ème feuillet) est un courrier de M. [R] [J] du 14 novembre 2018 adressé à la société LONGWY ESPACE AUTOMOBILE aux termes duquel il indique avoir découvert sur son bulletin de salaire de janvier 2017 qu'il ne bénéficiait pas de l'ancienneté et demande « de bien vouloir rectifier cette erreur qui s'est glissée » sur sa « fiche de paie ».

Sur ce point, la société KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE indique qu'il n'a pas été procédé à un retrait de l'ancienneté sur les bulletins de paie, mais à une rectification. Elle explique avoir changé de logiciel de paie en janvier 2017 et précise qu'à la différence de l'ancien logiciel qui comptabilisait pour un mois d'ancienneté le mois de l'entrée en fonction, le nouveau ne comptabilise un mois d'ancienneté qu'après un mois de présence effective. Elle indique que M. [R] [J] étant entré en fonction le 17 juillet 2006, l'ancien logiciel avait comptabilisé à tort un mois d'ancienneté au titre du mois de juillet 2006, et que l'erreur s'était reproduite de mois en mois de sorte qu'en décembre 2016, le bulletin de paie mentionnait 10 ans et 6 mois d'ancienneté au lieu de 5 mois d'août à décembre 2006. Elle ajoute que le nouveau logiciel a corrigé l'erreur, de sorte que bulletin de paie de janvier 2017 est juste, et précise que cette rectification a concerné tous les salariés, renvoyant sur ce point à sa pièce N°56 qui montre effectivement que pour les salariés [L] [X] et [O] [T], leur bulletin de paie de janvier 2017 mentionne la même ancienneté que celle inscrite pour le mois de décembre 2016.

Le fait invoqué par le salarié n'est en conséquence pas établi.

Sur le non-paiement de ventes

M. [R] [J] fait valoir que certaines ventes réalisées par lui ont été indemnisées et payées à d'autres vendeurs.

Il explique à ce titre que la vente effectuée à Mme [M] ne lui a pas été rémunérée en commission, renvoyant à sa pièce N°8.

Il est constaté que la pièce produite par le salarié sur ce point est en réalité sa pièce N°9 constituée d'un document intitulé « bon de commande ».

Il est observé que si ce document mentionne M. [R] [J] en qualité de vendeur, il ne comporte aucune signature permettant d'établir la réalité de la vente, étant remarqué que la seule date qui y figure est celle de son édition, soit le 14 avril 2018.

Le fait invoqué par le salarié n'est pas établi.

Sur ce :

Il est constaté que la matérialité d'éléments de fait précis et concordants qui pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée.

La demande de dommages et intérêts relative au harcèlement moral sera en conséquence rejetée, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.

2. Sur la demande reconventionnelle

La société KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE sollicite la confirmation du jugement en ses dispositions condamnant M. [R] [J] au paiement des indemnités qu'elle avait sollicitées à titre reconventionnel.

M. [R] [J] ne concluant pas sur ce point, le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [R] [J] à payer à l'employeur :

- la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- la somme de 5 000 euros au titre de l'amende civile.

3. Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [R] [J] à payer la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles de la société KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE.

M. [R] [J] sera en outre condamné à payer à la société KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et il sera débouté de sa demande formée à ce titre.

M. [R] [J] sera également condamné aux dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Longwy du 4 octobre 2021 en toutes ses dispositions ;

Y AJOUTANT

Condamne M. [R] [J] à payer à la société KEOS LONGWY BY AUTOSPHERE la somme de 3 500 euros (trois mille cinq cents euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [R] [J] aux dépens de l'instance d'appel ;

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Clara TRICHOT-BURTE, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en huit pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/02506
Date de la décision : 29/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-29;21.02506 ?
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