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19/09/2022 | FRANCE | N°21/02988

France | France, Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 19 septembre 2022, 21/02988


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile



ARRÊT N° /2022 DU 19 SEPTEMBRE 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02988 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E4PY



Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de SARREGUEMINES, R.G.n° 19/00266, en date du 12 janvier 2021,



APPELANTE :

Madame [E] [T]

née le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 8] (57)

domiciliée [Adresse 5]

Représentée par Me Sonia RODRIGUES, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant

Plaidant par Me Grâce FAVREL, avocat au barreau de PARIS

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile

ARRÊT N° /2022 DU 19 SEPTEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02988 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E4PY

Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de SARREGUEMINES, R.G.n° 19/00266, en date du 12 janvier 2021,

APPELANTE :

Madame [E] [T]

née le [Date naissance 2] 1968 à [Localité 8] (57)

domiciliée [Adresse 5]

Représentée par Me Sonia RODRIGUES, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant

Plaidant par Me Grâce FAVREL, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

Maître [Y] [V]

avocat

domicilié [Adresse 3]

Représenté par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY

S.A. AXA FRANCE IARD, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 7]

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY

Maître [G] [N], ès qualité d'administrateur ad hoc de Maître [I] [D], domiciliée à l'Ordre des avocats de PARIS, Bureau Service SACAEE - [Adresse 4]

Représentée par Me Frédéric BARBAUT de la SELARL MAITRE FREDERIC BARBAUT, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant et par Me Florence ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, substituée par Me BARBAUT

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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S.A.S. AON FRANCE, ès qualité d'assureur des avocats du barreau de PARIS, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 6]

Représentée par Me Frédéric BARBAUT de la SELARL MAITRE FREDERIC BARBAUT, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant et par Me Florence ACHACHE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, substituée par Me BARBAUT

S.C.P. BTSG, ès qualité de mandataire liquidateur de Maître [I] [D], prise en la personne de Maître [F] [K], domicilié [Adresse 1]

Non représentée, bien que la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante lui aient été signifiées par acte de Maître [Z] [O], Huissier de justice à [Localité 9], par acte en date du 1er juin 2021, par dépôt à étude

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Juin 2022, en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller, chargé du rapport,

Madame Mélina BUQUANT, Conseiller,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2022, en application de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

ARRÊT : défaut, rendu par mise à disposition publique au greffe le 19 Septembre 2022, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Madame CUNIN-WEBER, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ;

EXPOSÉ DU LITIGE

Considérant subir un harcèlement moral dans le cadre de son activité professionnelle exercée à l'EHPAD [10], Madame [E] [T] a confié la défense de ses intérêts à Maître [Y] [V], avocat inscrit au barreau de Metz, puis à Maître [I] [D].

Leur reprochant notamment de ne pas avoir introduit d'action devant le tribunal administratif, ni devant le tribunal correctionnel, Madame [T] a souhaité engager leur responsabilité. Ainsi, par actes des 22, 28 et 29 janvier 2019 et du 6 février 2019, Madame [T] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Sarreguemines Maître [V], la SCP BTSG prise en la personne de Maître [F] [K] ès qualités de liquidateur de Maître [D], en présence de Maître [G] [N] ès qualités d'administrateur ad hoc de Maître [D], la SA Axa France IARD et la SAS Aon France, aux fins notamment de condamnation de Maître [V] et Maître [D] à lui payer les sommes de 40000 euros au titre de son préjudice matériel et 25000 euros au titre de son préjudice moral, de fixation de sa créance à la liquidation judiciaire de Maître [D] aux mêmes montants, de condamnation de la SCP BTSG à inscrire la créance à intervenir au passif de la liquidation judiciaire de Maître [D], de garantie des condamnations à intervenir par les compagnies d'assurance Aon France et le cabinet Morel, de déclaration d'opposabilité du jugement à intervenir à Maître [S] ès qualités d'administrateur ad'hoc de Maître [D].

Par jugement du 12 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Sarreguemines a :

- condamné Maître [V] à payer à Madame [T] 10000 euros in solidum avec Axa IARD pour 7000 euros et in solidum avec Maître [D] pour 10000 euros (créance à fixer dans la liquidation judiciaire de Maître [D]),

- condamné Maître [V], Axa IARD et Maître [D] in solidum aux dépens,

- condamné Maître [V] in solidum avec Axa IARD et Maître [D] à payer à Madame [T] 3000 euros d'indemnité pour frais irrépétibles,

- ordonné l'exécution provisoire sauf dépens.

Pour statuer ainsi, le premier juge a relevé qu'aucun recours contentieux n'a été intenté dans les deux mois du rejet de la demande d'indemnisation amiable par l'EHPAD le 22 octobre 2013, et qu'aucune plainte pénale n'a été déposée dans les trois ans de la prescription, Maître [V] n'ayant pas informé Madame [T] qu'elle devait prendre position sur l'option du recours contentieux dans les deux mois et ne l'ayant pas non plus invitée à déposer plainte.

Il a ajouté que Maître [D], à laquelle le dossier a été confié fin 2014/début 2015, n'avait fait non plus aucune production utile avant d'être placée en liquidation judiciaire.

Il a indiqué que le conseil concernant la procédure administrative et pénale, facile à donner pour un professionnel du droit de niveau normal, ne l'avait jamais été, et que Madame [T] n'avait apparemment jamais récupéré les documents qu'elle avait donnés.

Il en a conclu que la faute des avocats était évidente et grave.

Il a mentionné que les auteurs multiples d'un préjudice unique étaient chacun responsable du tout et que la responsabilité in solidum de Maître [V], de son assureur Axa, sous réserve d'une franchise de 3000 euros, et de Maître [D] était bien fondée.

S'agissant de l'indemnisation, le tribunal a indiqué que le harcèlement moral était difficile à prouver et que le préjudice de Madame [T] ne tenait donc pas 'en première ligne' dans la perte d'une chance de gagner son procès en harcèlement, mais dans le défaut de conseil, d'accompagnement et de loyauté de la part de ses avocats, lui ayant fait perdre du temps, fait croire à des choses fausses, lui donnant finalement une impression de mépris ayant pour conséquence un doute sur la justice. Il lui a alloué la somme de 10000 euros et a condamné à ce titre in solidum Maître [V], la société Axa IARD à hauteur de 7000 euros et Maître [D], s'agissant d'une fixation de créance dans la liquidation judiciaire pour cette dernière.

Selon jugement du tribunal judiciaire de Sarreguemines du 16 février 2021, il a été ordonné la rectification de l'erreur matérielle affectant le jugement du 12 janvier 2021 relative à l'identité de l'avocat plaidant de la SAS Aon France.

Par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de Metz le 20 février 2021, Madame [T] a relevé appel de ce jugement.

Bien que la déclaration d'appel lui ait été régulièrement signifiée le 1er juin 2021, en l'étude, la SCP BTSG n'a pas constitué avocat.

Madame [T] a sollicité l'application des dispositions de l'article 47 du code de procédure civile en raison de l'exercice de la profession d'avocat de Maître [V] au sein du ressort de la cour d'appel de Metz, ce dernier étant inscrit au barreau de Metz.

Par ordonnance contradictoire du 13 décembre 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Metz a ordonné le dessaisissement de la cour d'appel de Metz et le renvoi de la procédure devant la cour d'appel de Nancy, dit n'y avoir lieu à statuer sur le surplus, n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et que les dépens suivront le sort de la procédure au fond devant la cour d'appel de Nancy.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 25 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Madame [T] demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1240 du code civil, de :

- rejeter les appels incidents de Maître [N], ès qualités d'administrateur ad hoc de Maître [D], ainsi que de Maître [V] et de la compagnie d'assurance Axa France IARD,

- débouter Maître [V] de toutes ses demandes,

- débouter Maître [N] de toutes ses demandes,

- débouter la SAS Aon de toutes ses demandes,

- déclarer son appel recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement entrepris,

- dire et juger que Maître [V] et Maître [D] ont manqué à leurs obligations dans le devoir de conseil et diligence à son égard,

- dire et juger que ces manquements ont causé :

* un préjudice économique,

* une perte de chance d'obtenir une indemnisation pour le harcèlement moral,

* une perte de chance d'éviter une mise en retraite pour invalidité ou à titre subsidiaire une perte de chance d'obtenir une rente pour invalidité,

* un préjudice moral résultant de la perte de confiance en la justice,

- dire et juger que Maître [V] et Maître [D] sont responsables solidairement de ses préjudices,

En conséquence,

- condamner Maître [V] à lui payer la somme de 104500 euros pour les montants suivants:

- 2000 euros au titre du préjudice économique,

- 30000 euros au titre de la perte de chance d'obtenir une indemnisation pour les faits de harcèlement dont elle a été victime,

- 2500 euros au titre de la perte de chance d'obtenir le remboursement des sommes indûment perçues par l'EHPAD [10],

- 50000 euros au titre de la perte de chance d'éviter la mise à la retraite d'office pour invalidité,

- 10000 euros au titre du préjudice moral résultant dans la perte de confiance en la justice,

- 10000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

À titre subsidiaire,

- condamner Maître [V] et Maître [D] à lui payer la somme de 89500 euros pour les montants suivants :

- 2000 euros au titre du préjudice économique,

- 30000 euros au titre de la perte de chance d'obtenir une indemnisation pour les faits de harcèlement dont elle a été victime,

- 2500 euros au titre de la perte de chance d'obtenir le remboursement des sommes indûment perçues par l'EHPAD [10],

- 35000 euros au titre de la perte de chance d'obtenir une rente d'invalidité,

- 10000 euros au titre du préjudice moral résultant dans la perte de confiance en la justice,

- 10000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixer sa créance à l'égard de Maître [D], en liquidation judiciaire, à la somme de 104500 euros pour les montants suivants :

- 2000 euros au titre du préjudice économique,

- 30000 euros au titre de la perte de chance d'obtenir une indemnisation pour les faits de harcèlement dont elle a été victime,

- 2500 euros au titre de la perte de chance d'obtenir le remboursement des sommes indûment perçues par l'EHPAD [10],

- 50000 euros au titre de la perte de chance d'éviter la mise à la retraite d'office pour invalidité,

- 10000 euros au titre du préjudice moral résultant dans la perte de confiance en la justice,

- 10000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

À titre subsidiaire,

- fixer sa créance à l'égard de Maître [D], en liquidation judiciaire, à la somme de 89500 euros pour les montants suivants :

- 2000 euros au titre du préjudice économique,

- 30000 euros au titre de la perte de chance d'obtenir une indemnisation pour les faits de harcèlement dont elle a été victime,

- 2500 euros au titre de la perte de chance d'obtenir le remboursement des sommes indûment perçues par l'EHPAD [10],

- déclarer la mise en cause de la SCP BTSG ès qualités de 'mandataire liquidateur' recevable,

- condamner la SCP BTSG, prise en la personne de Maître [F] [K], d'avoir à inscrire la créance de Maître [D] à intervenir au passif de la liquidation judiciaire de Maître [D],

- déclarer la mise en cause de la SAS Aon recevable,

- déclarer la mise en cause de la SA Axa France IARD ès-qualités d'assureur recevable,

- dire et juger que la compagnie d'assurance Axa France IARD et la compagnie d'assurance du barreau de l'ordre des avocats de Paris seront tenues de garantir les condamnations à intervenir,

- déclarer la mise en cause de Maître [N] ès-qualités d'administrateur ad hoc de Maître [D] recevable,

- dire et juger le jugement à intervenir opposable à Maître [N], ès qualités d'administrateur ad hoc de Maître [D],

- condamner Maître [V] et Maître [D] conjointement en tous les frais et dépens de la procédure, y compris ceux exposés pour l'exécution de la décision à intervenir.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 10 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Maître [V] et la SA Axa France IARD demandent à la cour de :

À titre principal,

- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a jugé que Maître [V] avait engagé sa responsabilité civile professionnelle,

Et statuant à nouveau,

- débouter Madame [T] de l'intégralité de ses demandes en ce qu'elle ne rapporte pas la preuve que Maître [V] aurait manqué à son devoir d'information et de conseil,

- débouter Madame [T] de l'intégralité de ses demandes en ce qu'elle ne rapporte pas la preuve que Maître [V] aurait manqué à son obligation de diligence,

À titre subsidiaire,

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a débouté Madame [T] de ses demandes au titre d'une perte de chance d'obtenir une décision favorable,

À titre plus subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Axa et Maître [V] au paiement de la somme de 10000 euros et 7000 euros pour Axa,

Et, statuant à nouveau,

- débouter Madame [T] de l'intégralité de ses demandes en ce qu'elle ne justifie ni du principe ni du montant du préjudice qu'elle allègue avoir subi,

À titre infiniment subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné solidairement Maître [V], Axa et Maître [D] au paiement de la somme de 10000 euros et 7000 euros pour Axa,

Et statuant à nouveau,

- débouter Madame [T] de sa demande de condamnation solidaire à l'encontre des parties intimées,

En tout état de cause,

- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé qu'Axa est bien fondée à opposer sa franchise contractuelle d'un montant de 3000 euros tant à l'encontre de Madame [T] qu'à l'encontre de tout tiers qui se prévaudrait du bénéfice de la police,

- condamner Madame [T] à leur payer une somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Madame [T] aux entiers dépens d'instance.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 6 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Maître [N] et la SAS Aon France demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé leur mise hors de cause,

- et statuant à nouveau, prononcer leur mise hors de cause,

- déclarer recevable et bien fondée Maître [N] en son appel incident, en sa qualité d'administrateur ad hoc, et infirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu une faute à l'encontre de Maître [D],

- statuant à nouveau, débouter Madame [T] de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre de Maître [D], les conditions de la responsabilité civile professionnelle n'étant pas réunies,

- condamner Madame [T] à payer à titre de dommages et intérêts pour appel abusif la somme de 6000 euros à Aon et la somme de 6000 euros à Maître [N],

- condamner Madame [T] à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 6000 euros à Aon et la somme de 6000 euros à Maître [N],

- condamner Madame [T] aux entiers dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 7 juin 2022.

L'audience de plaidoirie a été fixée le 20 juin 2022 et le délibéré au 19 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LES DEMANDES PRINCIPALES

Sur les demandes présentées à l'encontre de Maître [D]

Maître [G] [N], ès qualités d'administrateur ad hoc de Maître [D], fait valoir que, Maître [D] ayant fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire, Madame [T] ne peut d'une part solliciter sa condamnation solidaire avec d'autres parties à l'instance, et d'autre part demander la fixation de sa créance sans justifier de la déclaration de sa créance. Elle en conclut que ses demandes doivent être déclarées irrecevables.

En vertu du principe d'arrêt des poursuites individuelles posé par l'article L.622-21 du code de commerce, le jugement d'ouverture interdit toute action en justice de la part des créanciers tendant à la condamnation du débiteur en liquidation judiciaire au paiement d'une somme d'argent.

Le créancier devant se soumettre à la procédure de vérification des créances, une telle demande serait irrecevable.

En l'espèce, Madame [T] a engagé son action devant le tribunal de grande instance de Sarreguemines par actes des 22, 28 et 29 janvier 2019 et du 6 février 2019, soit postérieurement à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de Maître [D], prononcée par jugement du 8 février 2018.

Il en résulte que Madame [T] ne pouvait pas engager cette action à l'encontre de Maître [D], même en fixation de sa créance, car elle devait impérativement se soumettre à la procédure de vérification des créances.

Compte tenu de ce qui précède, le jugement sera infirmé en ce qu'il a prononcé la condamnation in solidum de Maître [D] avec Maître [V] au titre de l'indemnisation de Madame [T].

Statuant à nouveau, les demandes de Madame [T] tendant à la fixation de sa créance d'indemnisation à l'encontre de Maître [D] seront déclarées irrecevables.

Madame [T] sera donc déboutée de sa demande tendant à la condamnation de la SCP BTSG, ès qualités de liquidateur de Maître [D], d'avoir à inscrire sa créance au passif de la liquidation judiciaire de Maître [D].

Sur les demandes présentées à l'encontre de Maître [V]

Pour obtenir les différentes indemnisations qu'elle sollicite, Madame [T] doit rapporter la preuve d'une faute commise par Maître [V], du préjudice qu'elle allègue, et d'un lien de causalité entre cette faute et ce préjudice.

Selon l'article 9 du code de procédure civile, 'Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention'. Dès lors, si la preuve de l'un quelconque des trois éléments rappelés ci-dessus fait défaut, la demande d'indemnisation qui s'y rapporte doit être rejetée.

Sur la demande d'indemnisation du préjudice économique

Madame [T] expose avoir réglé la somme de 1913,60 euros qui, selon elle, n'a donné lieu à aucune prestation, ainsi qu'une facture de 287 euros. Elle ajoute s'être rendue à plusieurs reprises à l'étude de Maître [V]. Elle sollicite la somme globale de 2000 euros.

Madame [T] produit en pièce n° 1 une facture du 16 janvier 2013 d'un montant de 287,04 euros se rapportant à une consultation de deux heures le 10 janvier 2013 et, en pièce n° 2, une facture du 18 janvier 2013 d'un montant de 1913,60 euros relative à des 'honoraires pour la procédure devant le tribunal administratif de Strasbourg'.

Il est tout d'abord constaté que, si elle produit ces factures, Madame [T] ne communique aucun justificatif de leur paiement effectif, malgré la critique qui lui en est faite.

Ensuite, elle n'explique pas pour quelle raison elle pourrait solliciter l'indemnisation de la consultation de deux heures au titre de laquelle elle aurait versé la somme de 287,04 euros.

Enfin, elle ne peut prétendre que la seconde facture ne correspond à aucune prestation, alors qu'elle produit elle-même, en pièce n° 4, un courrier recommandé du 11 septembre 2013 adressé par Maître [V] à l'EHPAD [10], comportant 5 pages, et sollicitant une indemnisation au moyen d'éléments circonstanciés.

À supposer que Madame [T] ait effectivement réglé cette facture, ce qu'elle ne démontre pas, il est relevé qu'elle n'a pas contesté le montant de ces honoraires selon la procédure appropriée.

Compte tenu de ce qui précède, Madame [T] ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle allègue et elle sera déboutée de cette demande.

Sur la demande d'indemnisation de la perte de chance d'obtenir une indemnisation pour les faits de harcèlement moral

Madame [T] soutient avoir été maintenue à l'écart par sa hiérarchie, ne pas avoir participé aux journées infirmières, être restée des semaines sans venir dans l'établissement, avoir travaillé lorsque personne ne le souhaitait, fréquemment les week-ends, en juillet et août, les 24, 25 et 26 décembre, avoir été empêchée de participer à des réunions. Elle fait état d'une grave dégradation de son état de santé psychologique, que la fiche médicale d'aptitude du 20 juin 2011 la déclare apte à la reprise d'un poste adapté dans un autre établissement que l'EHPAD [10]. Elle ajoute avoir fait l'objet de moqueries incessantes, ne jamais avoir disposé de local pour son activité syndicale, avoir été appelée au pied levé pour remplacer des collègues, s'être vu refuser des congés, avoir été utilisée comme accompagnatrice de résidents sur ses deniers personnels, qu'une infirmière moins expérimentée a été choisie pour le poste d'infirmière en chef, que lors de sa réintégration, elle a été rétrogradée à un poste à 60 %. Elle affirme qu'elle avait une chance d'obtenir une indemnisation qui aurait pu atteindre 75000 euros, dont 40000 euros au titre du préjudice patrimonial (perte de gains professionnels, absence d'évolution de carrière, dépenses de santé), 10000 euros au titre du préjudice moral (atteinte à sa réputation, isolement social au sein de son village, départ de son compagnon) et 30000 euros au titre de la dégradation de son état de santé (dépression). Elle réclame à ce titre la somme de 30000 euros.

Il convient tout d'abord de rappeler que seule constitue une perte de chance réparable la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable.

En outre, il incombe à l'agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement.

En application des principes rappelés ci-dessus, pour obtenir l'indemnisation qu'elle sollicite, Madame [T] doit rapporter la preuve de ses affirmations relatives aux faits qui seraient selon elle constitutifs d'un harcèlement.

Madame [T] indique avoir perdu beaucoup de documents par la faute de Maître [D], mais elle estime que les pièces versées à la procédure permettent néanmoins d'établir la vraisemblance des faits de harcèlement.

Les seules pièces produites par Madame [T] qui seraient susceptibles d'établir l'existence d'un harcèlement consistent en des certificats médicaux, un courrier à l'Agence régionale de santé, des plannings de l'année 2012, une 'communication informelle', des attestations, ainsi qu'une fiche médicale d'aptitude.

Si les certificats médicaux mentionnent un état anxio-dépressif de Madame [T], le lien fait entre cet état et son activité professionnelle ne résulte que des propos de cette dernière.

S'agissant de l'Agence régionale de santé, elle a classé la plainte de Madame [T] au vu des éléments fournis par l'EHPAD [10], qu'elle a jugés satisfaisants.

Pareillement, les plannings de l'année 2012, sur lesquels Madame [T] a porté des annotations manuscrites, ne permettent nullement d'établir les faits de harcèlement qu'elle allègue.

Quant à la 'communication informelle' produite par Madame [T] en pièce n° 17, qui aurait été affichée 'à un endroit où l'infirmière fait des piluliers', il y est seulement indiqué : 'Il est décidé qu'une toilette doit être réalisée par les IDE obligatoirement. C'est dans la fiche de poste de l'infirmière du matin. Merci beaucoup. Me Barbe'. Cette note, qui n'est d'ailleurs pas uniquement adressée à Madame [T], ne constitue pas davantage des faits de harcèlement.

Concernant les attestations, elles ne font que rapporter des propos tenus par Madame [T] et ne présentent donc pas un caractère suffisamment probant.

S'agissant enfin de la fiche médicale d'aptitude du 20 juin 2011, il y est mentionné : 'Apte à la reprise d'un poste adapté dans un autre établissement que l'EHPAD [10]'. Cependant, cette indication ne peut nullement permettre de conclure à la réalité des faits de harcèlement allégués par Madame [T], mais seulement de constater que le médecin du travail a tenu compte des propos de cette dernière afin que sa reprise ait lieu dans les meilleures conditions possibles.

Au regard des développements qui précèdent, Madame [T] ne rapporte pas la preuve d'éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Aucune perte de chance d'obtenir une indemnisation à ce titre n'est donc caractérisée et cette demande sera rejetée.

Sur la demande d'indemnisation de la perte de chance d'obtenir le remboursement des sommes indûment perçues par l'EHPAD [10]

Madame [T] sollicite la somme de 2500 euros au titre de la perte de chance d'obtenir le remboursement des sommes indûment prélevées sur son salaire entre 2012 et 2014, se fondant sur l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984. Elle explique que par la faute de Maître [D], elle n'est plus en possession des pièces relatives à son placement en congé longue maladie, mais que dans un mémoire introductif d'instance de 2014, Maître [D] faisait état d'un indu de 5729,98 euros.

Cependant, Madame [T] ne produit aucune pièce de nature à établir que des sommes auraient été indûment prélevées sur son salaire, et en particulier aucun bulletin de paie.

Quant au fait que, dans un mémoire, Maître [D] ait mentionné un indu de 5729,98 euros, il ne s'agit que d'une prétention de Madame [T] présentée par son avocat, qui ne saurait constituer une preuve à cet égard.

En conséquence, en l'absence de démonstration de ce préjudice, Madame [T] sera également déboutée de cette demande.

Sur la demande d'indemnisation de la perte de chance d'éviter la mise à la retraite d'office pour invalidité

Madame [T] soutient que, si elle avait été informée des conséquences pouvant découler d'un placement en congé longue durée, elle 'aurait probablement demandé à réintégrer son service bien avant et ne se serait probablement pas mise en congé maladie en décembre 2012'. Elle prétend que Maître [V] lui a conseillé de ne plus retourner travailler avant d'avoir engagé des démarches pour faire reconnaître les faits de harcèlement, et qu'il lui a ainsi fait courir le risque d'être placée en congé longue maladie et de se voir mettre d'office à la retraite pour invalidité. Elle reproche à Maître [V] de ne pas l'avoir alertée sur ce risque. Elle ajoute que Maître [D] n'a effectué aucune diligence devant la commission de réforme hospitalière et ne l'y a pas assistée.

Elle expose avoir perdu des revenus professionnels importants, de 155993,16 euros en se basant sur son salaire après rétrogradation, et de 305244 euros si elle avait pu obtenir sa réintégration sans rétrogradation. Elle fait valoir un préjudice moral consistant dans le fait d'avoir perdu sa mutuelle, d'avoir dû contracter un prêt à la consommation et de s'adresser à des associations pour subvenir à ses besoins. Elle sollicite la somme de 50000 euros au titre de la perte de chance.

Toutefois, Madame [T] ne rapporte pas la preuve de ce que Maître [V] lui aurait conseillé de ne pas retourner travailler avant d'avoir engagé des démarches pour faire reconnaître les faits de harcèlement.

Quoi qu'il en soit, Madame [T] n'est pas fondée à reprocher à Maître [V] de s'être 'mise en congé maladie en décembre 2012' et de ne pas avoir 'demandé à réintégrer son service bien avant'. Un congé maladie est motivé par un état de santé, l'arrêt de travail est prescrit par un médecin et ne résulte pas en principe du choix du patient, et moins encore de celui de son avocat. Dès lors, si le médecin de Madame [T] lui a prescrit des arrêts de travail, c'est qu'il estimait que son état de santé le nécessitait, ce que Madame [T] considérait également puisqu'elle a remis ces arrêts de travail. Dès lors, ce congé maladie est imputable à Madame [T] et son médecin, et non à Maître [V].

Quant à l'affirmation de Madame [T] selon laquelle Maître [D] n'a effectué aucune diligence devant la commission de réforme hospitalière et ne l'y a pas assistée, il est rappelé qu'aucune demande n'est recevable à l'encontre de Maître [D]. Quoi qu'il en soit, ces éventuels manquements ne sauraient être reprochés à Maître [V].

Compte tenu de ce qui précède, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de Maître [V] et Madame [T] sera déboutée de cette demande.

Sur la demande subsidiaire d'indemnisation de la perte de chance d'obtenir une rente viagère d'invalidité

Madame [T] prétend que les fautes de Maître [V] et Maître [D] ont empêché la reconnaissance de faits de harcèlement et, ce faisant, que son invalidité soit reconnue comme étant d'origine professionnelle, la privant ainsi du bénéfice de la rente viagère d'invalidité.

Elle fait valoir un taux d'incapacité de 40 % et une perte de gain de 301000 euros et sollicite à ce titre la somme de 35000 euros au titre de sa perte de chance.

S'agissant des éventuelles fautes commises par Maître [D], il est rappelé qu'aucune demande n'est recevable à l'encontre de cette dernière.

Quant à Maître [V], il résulte des développements qui précèdent que Madame [T] ne rapporte pas la preuve d'éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. En l'absence de perte de chance d'obtenir une décision reconnaissant l'existence d'un harcèlement moral, Madame [T] ne peut donc pas davantage reprocher à Maître [V] la non-reconnaissance de l'origine professionnelle de son invalidité.

En conséquence, cette demande sera également rejetée.

Sur la demande d'indemnisation du préjudice moral résultant de la perte de confiance en la justice

Madame [T] sollicite à ce titre la confirmation du jugement lui ayant octroyé la somme de 10000 euros. Elle expose qu'elle 'n'a pas pu trouver de réponse à ses questions et n'a pas eu l'opportunité d'interpeller les dirigeants de l'EHPAD [10] en raison des fautes commises par Me [V] et Me [D]'.

Cependant, Madame [T] n'explicite pas à ce sujet 'les fautes' en lien avec ce préjudice moral allégué. Elle ne fait que rappeler la motivation du jugement en écrivant : 'on lui a fait croire à des choses fausses donnant finalement une impression de mépris ayant pour conséquence un doute sur la justice', en se référant au 'défaut de conseil, d'accompagnement et de loyauté de ses avocats' retenu par le premier juge.

Force est de constater que ces seules explications ne permettent pas à la cour de déterminer quelles fautes précises seraient à l'origine du préjudice moral spécifique consistant en une perte de confiance en la justice.

Or, en vertu des principes rappelés ci-dessus, c'est à Madame [T], demanderesse à l'indemnisation, qu'il incombe de rapporter la preuve d'une faute et d'un lien de causalité en rapport avec le dommage pour lequel elle demande réparation.

Toutefois, dans ses conclusions, Madame [T] a tout d'abord procédé à la description des différentes fautes commises selon elle par Maître [V], puis par Maître [D], pour ensuite exposer les différents préjudices qu'elle soutient avoir subis, dont celui résultant de la perte de confiance en la justice, et enfin, dans un paragraphe intitulé 'Sur le lien de causalité', écrire uniquement ce qui suit :

'Le lien de causalité entre les fautes de Me [V] et [D] et les préjudices subis par Madame a été développé amplement ci-avant.

En conséquence, Mme [T] sollicite de la Cour qu'elle confirme le jugement de première instance en ce qu'il a reconnu un lien de causalité entre les fautes commises par Mes [V] et [D] et son préjudice'.

En procédant de la sorte, Madame [T] n'a nullement explicité quelles fautes seraient selon elle à l'origine d'une perte de confiance en la justice. Et en raison de l'irrecevabilité des demandes présentées à l'encontre de Maître [D], ne peuvent être envisagés à ce sujet que les manquements reprochés à Maître [V].

Or, il résulte des conclusions de Madame [T], ainsi que de ses courriers produits dans ses pièces, que ce sont davantage les manquements qu'elle reproche à Maître [D] qui auraient pu causer une perte de confiance en la justice.

En effet, Madame [T] a confié la défense de ses intérêts à Maître [V] au mois de janvier 2013 et, après une consultation, ce dernier a adressé une demande d'indemnisation à l'EHPAD [10] au mois de septembre 2013. Maître [V] manquant de temps pour suivre ce dossier, il a présenté Madame [T] à Maître [D], qui lui a succédé en octobre 2014.

C'est Maître [D] qui, selon Madame [T], aurait perdu une grande partie des pièces qu'elle lui avait remises et qui, contrairement à ce qui était convenu entre elles, n'aurait pas engagé de procédure devant le tribunal administratif, ne se serait pas occupée de la demande d'aide juridictionnelle, ne l'aurait pas représentée devant la commission de réforme hospitalière à la fin de l'année 2015 et n'y aurait fourni aucune observation pour son compte, Maître [D] ayant seulement envoyé deux courriers à l'EHPAD [10].

Compte tenu de ce qui précède, Madame [T] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre les manquements qu'elle impute à Maître [V] et le préjudice de perte de confiance en la justice qu'elle allègue.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné Maître [V] à lui payer la somme de 10000 euros, in solidum avec la SA Axa IARD à hauteur de 7000 euros.

Statuant à nouveau, Madame [T] sera déboutée de l'ensemble de ses demandes d'indemnisation, cette mention ne figurant pas expressément dans le dispositif du jugement.

Sur les demandes de mise en cause et de mise hors de cause, et la demande de dommages et intérêts pour appel abusif

Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de Madame [T] tendant à ce que la mise en cause de la SCP BTSG, ès qualités de liquidateur de Maître [D], et celle de la SA Axa France IARD soient déclarées recevables, celles-ci n'étant pas contestées.

S'agissant de Maître [N], Madame [T] fait valoir qu'en vertu du décret du 27 novembre 1991, l'administrateur ad hoc remplace l'avocat administré dans toutes ses fonctions, y compris en matière de responsabilité civile professionnelle.

Cependant, étant relevé qu'aucune condamnation n'est sollicitée à son encontre, il résulte de la décision de désignation du bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris du 1er février 2018 que Maître [N], en tant qu'administrateur ad hoc du cabinet de Maître [D], a pour mission 'd'assurer la gestion administrative du cabinet' et qu'elle est autorisée, 'dans la mesure du possible', à notamment 'Gérer les éventuelles réclamations'. Dès lors, Maître [N] n'a nullement qualité pour représenter Maître [D] en justice et sa mise en cause sera donc déclarée irrecevable, cette irrecevabilité n'apparaissant pas dans le dispositif du jugement.

Concernant la SAS Aon France, cette dernière fait valoir qu'elle n'est pas une compagnie d'assurances, mais le courtier de l'Ordre des avocats de Paris.

Madame [T] rétorque que si la SAS Aon France intervient en qualité de courtier, elle propose également en qualité d'assureur des assurances aux avocats du barreau de Paris.

Force est de constater que Madame [T] ne produit aucune pièce pour démontrer cette affirmation et la mise en cause de la SAS Aon France sera donc déclarée irrecevable, cette irrecevabilité n'apparaissant pas dans le dispositif du jugement.

Au soutien de leur demande de dommages et intérêts pour appel abusif, Maître [N] et la SAS Aon France allèguent un acharnement procédural de Madame [T].

Cependant, ces mises en cause procèdent d'une confusion de Madame [T] entre courtier et assureur d'une part, et entre mandataire ad hoc et représentant d'autre part.

Aucun abus n'est caractérisé et la demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.

Enfin, il n'appartient pas à la cour de statuer sur les demandes tendant à ce qu'il soit 'dit que', 'constaté que' ou 'donné acte que' qui ne sont pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

SUR LES DÉPENS ET L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Compte tenu des développements qui précèdent, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné in solidum Maître [V], la SA Axa France IARD et Maître [D] aux dépens, et à payer à Madame [T] 3000 euros d'indemnité pour frais irrépétibles.

Statuant à nouveau et y ajoutant, Madame [T] sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

La situation économique de Madame [T] et l'équité commandent de rejeter toutes les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu'en appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut, et en dernier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Sarreguemines le 12 janvier 2021 en ce qu'il a :

- condamné Maître [Y] [V] à payer à Madame [E] [T] 10000 euros in solidum avec la SA Axa France IARD pour 7000 euros et in solidum avec Maître [I] [D] pour 10000 euros (créance à fixer dans la liquidation judiciaire de Maître [I] [D]),

- condamné in solidum Maître [Y] [V], la SA Axa France IARD et Maître [I] [D] aux dépens,

- condamné in solidum Maître [Y] [V], la SA Axa France IARD et Maître [I] [D] à payer à Madame [T] 3000 euros d'indemnité pour frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau sur ces chefs de décision infirmés et y ajoutant,

Déclare irrecevables les mises en cause de la SAS Aon France et de Maître [G] [N], ès qualités d'administrateur ad hoc de Maître [I] [D] ;

Déclare irrecevables les demandes de Madame [E] [T] tendant à la fixation de sa créance d'indemnisation à l'encontre de Maître [I] [D] ;

Déboute Madame [E] [T] de sa demande tendant à la condamnation de la SCP BTSG, ès qualités de liquidateur de Maître [I] [D], d'avoir à inscrire sa créance au passif de la liquidation judiciaire de Maître [I] [D] ;

Déboute Madame [E] [T] de toutes ses demandes d'indemnisation présentées à l'encontre de Maître [Y] [V], au titre du préjudice économique, de la perte de chance d'obtenir une indemnisation pour les faits de harcèlement, de la perte de chance d'obtenir le remboursement de sommes perçues par l'EHPAD [10], de la perte de chance d'éviter la mise à la retraite d'office pour invalidité, de la perte de chance d'obtenir une rente d'invalidité, ainsi que du préjudice moral résultant de la perte de confiance en la justice ;

Déboute la SAS Aon France et Maître [G] [N], ès qualités d'administrateur ad hoc de Maître [I] [D], de leur demande de condamnation de Madame [E] [T] à leur payer des dommages et intérêts pour appel abusif ;

Déboute toutes les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu'en appel ;

Condamne Madame [E] [T] aux dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. PERRIN.- Signé : N. CUNIN-WEBER.-

Minute en quinze pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/02988
Date de la décision : 19/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-19;21.02988 ?
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