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19/09/2022 | FRANCE | N°21/02024

France | France, Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 19 septembre 2022, 21/02024


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile



ARRÊT N° /2022 DU 19 SEPTEMBRE 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02024 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E2MP



Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de VAL DE BRIEY,

R.G.n° 18/01233, en date du 15 juin 2021,





APPELANTS :

Monsieur [U] [B]

né le 19 septembre 1959 à [Localité 4] (54)<

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domicilié [Adresse 3]

Représenté par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY



Madame [P] [F]

née le 7 juill...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile

ARRÊT N° /2022 DU 19 SEPTEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02024 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E2MP

Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de VAL DE BRIEY,

R.G.n° 18/01233, en date du 15 juin 2021,

APPELANTS :

Monsieur [U] [B]

né le 19 septembre 1959 à [Localité 4] (54)

domicilié [Adresse 3]

Représenté par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY

Madame [P] [F]

née le 7 juillet 1966 à [Localité 6] (54)

domiciliée [Adresse 1]

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉS :

Monsieur [C] [L] [G]

né le 12 avril 1962 à [Localité 5] (ROYAUME-UNI)

domicilié [Adresse 2]

Représenté par Me Stéphanie GERARD, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant

Plaidant par Me Luc TOULEMONDE, avocat au barreau de NANCY

Madame [M] [Y]

née le 1er janvier 1964 à FEZ (MAROC)

domiciliée [Adresse 2]

Représentée par Me Stéphanie GERARD, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant

Plaidant par Me Luc TOULEMONDE, avocat au barreau de NANCY

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Juin 2022, en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller,

Madame Mélina BUQUANT, Conseiller, chargée du rapport,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2022, en application de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 19 Septembre 2022, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Madame CUNIN-WEBER, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ;

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte notarié du 11 avril 2016, Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] ont vendu à Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] une maison à usage d'habitation sis [Adresse 2].

Par ordonnance du juge des référés en date du 27 mars 2017, une expertise judiciaire a été ordonnée, le rapport a été déposé le 25 mai 2018.

Par actes du 16 novembre 2018 et 10 décembre 2018, Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Val de Briey Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] aux fins de condamner in solidum Monsieur [B] et Madame [F] à leur payer la somme de 68190,50 euros au titre de leur manquement à l'obligation de délivrance et à titre subsidiaire en restitution d'une partie du prix d'acquisition, et également aux sommes de 7000 euros en réparation du préjudice de jouissance et 3000 euros au titre du préjudice moral outre les dépens et la somme de 5000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 15 juin 2021, le tribunal judiciaire de Val de Briey a :

- débouté Monsieur [G] et Madame [Y] de leur demande fondée sur l'obligation de délivrance,

- jugé que le bien immobilier fait l'objet de vices cachés concernant uniquement l'installation électrique,

- déclaré nulle la clause du contrat dite d'éviction de responsabilité,

- condamné solidairement Monsieur [B] et Madame [F] à payer à Monsieur [G] et Madame [Y] la somme de 62390,50 euros au titre de la garantie des vices cachés,

- condamné solidairement Monsieur [B] et Madame [F] à payer à Monsieur [G] et Madame [Y] la somme de 5000 euros au titre du préjudice de jouissance,

- condamné solidairement Monsieur [G] et Madame [Y] à payer à Monsieur [B] et Madame [F] la somme de 1230,66 euros au titre du prorata de la taxe foncière due et ce avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamné Monsieur [B] et Madame [F] aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maitre [K] [E],

- condamné Monsieur [B] et Madame [F] à payer à Monsieur [G] et Madame [Y] la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [B] et Madame [F] à payer à Monsieur [G] et Madame [Y] les frais d'expertise avancés par ces derniers,

- débouté l'ensemble des parties du surplus,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à hauteur de 70 % des condamnations.

Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 13 août 2021, Monsieur [B] et Madame [F] ont relevé appel de ce jugement.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 3 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] demandent à la cour, au visa de l'article 1641 du code civil, de :

- déclarer recevable et bien fondé leur appel,

Y faire droit,

- déclarer recevable mais mal fondé l'appel incident interjeté par Monsieur [G] et Madame [Y],

- le rejeter,

En conséquence,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Val De Briey le 15 juin 2021 en ce qu'il a :

* jugé que le bien immobilier fait l'objet de vices cachés concernant uniquement l'installation électrique,

* déclaré nulle la clause du contrat dite d'éviction de responsabilité,

* condamné solidairement Monsieur [B] et Madame [F] à payer à Monsieur [G] et Madame [Y] la somme de 62390,50 euros au titre de la garantie des vices cachés,

* condamné solidairement Monsieur [B] et Madame [F] à payer à Monsieur [G] et Madame [Y] la somme de 5000 euros au titre du préjudice de jouissance,

* condamné Monsieur [B] et Madame [F] aux entiers dépens de l'instance,

* condamné Monsieur [B] et Madame [F] à payer à Monsieur [G] et Madame [Y] la somme de 3000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné Monsieur [B] et Madame [F] à payer à Monsieur [G] et Madame [Y] les frais d'expertise avancés par ces derniers,

Statuant à nouveau de ces chefs,

À titre principal,

- déclarer irrecevables les demandes formées par Monsieur [G] et Madame [Y] sur le fondement de l'obligation de délivrance conforme,

A défaut,

- les déclarer mal fondées et les rejeter,

- dire et juger que le bien immobilier n'est affecté d'aucun vice caché,

- débouter Monsieur [G] et Madame [Y] de l'ensemble de leurs demandes,

A titre subsidiaire, si l'existence d'un vice caché était retenue,

- dire et juger qu'il n'est pas justifié du préjudice subi par Monsieur [G] et Madame [Y],

En conséquence,

- débouter Monsieur [G] et Madame [Y] de leurs demandes tous chefs de préjudice confondus,

En tout état de cause,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* débouté Monsieur [G] et Madame [Y] de leur demande fondée sur l'obligation de délivrance,

* jugé que le bien immobilier fait l'objet de vices cachés concernant uniquement l'installation électrique,

* débouté Monsieur [G] et Madame [Y] de leurs demandes de dommages-intérêts au titre d'un préjudice moral et au titre de la mauvaise foi de Monsieur [B] et Madame [F],

* condamné solidairement Monsieur [G] et Madame [Y] à payer Monsieur [B] et Madame [F] la somme de 1230,66 euros au titre du prorata de la taxe foncière due, et ce à intérêts à taux légal à compter du jugement,

- débouter Monsieur [G] et Madame [Y] de l'ensemble de leurs conclusions, fins et prétentions,

- condamner in solidum Monsieur [G] et Madame [Y] à leur verser la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum Monsieur [G] et Madame [Y] aux entiers dépens en ce compris les dépens de la procédure de référé et les frais d'expertise.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 27 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [G] et Madame [Y] demandent à la cour de :

- dire et juger recevable mais mal fondé l'appel des consorts [B] et [F],

En conséquence,

- les en débouter, ainsi que de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires,

- dire et juger recevable et bien fondé l'appel incident de Monsieur [G] et Madame [Y],

En conséquence,

- infirmer le jugement dont appel rendu le 15 Juin 2021 par le tribunal judiciaire de Briey,

Et statuant à nouveau,

- condamner in solidum les consorts [B] et [F] à leur payer la somme de 62390,50 euros,

- condamner in solidum, sur le fondement de la garantie des vices cachés, les consorts [B] et [F] à leur payer la somme de 61358 euros et ce pour les travaux de reprise des enduits/crépis de façade,

Si par extraordinaire, le fondement de la garantie des vices cachés n'était pas retenu,

- condamner, subsidiairement, sur le fondement de l'obligation de délivrance, les consorts [B] et [F] à leur payer la somme de 61358 euros et ce pour les travaux de reprise des enduits/crépis de façade,

En tout état de cause,

- condamner in solidum, les consorts [B] et [F] à leur payer :

* 7000 euros pour le préjudice de jouissance dont les intimés ont été victimes,

* 3000 euros pour le préjudice moral dont les intimés ont été victimes,

* 7000 euros pour le préjudice dont les intimés ont été victimes pour mauvaise foi des

vendeurs,

- débouter les consorts [B] et [F] de leur demande de condamnation au paiement de la somme de 1230,66 euros au titre du prorata du paiement de la taxe foncière,

pour le surplus,

- entériner en toutes ses dispositions pour l'installation électrique le rapport de Monsieur l'Expert [K] [E] du 25 mai 2018, et pour une partie son rapport sur l'état et la pose des enduits (et crépis) de façade comme pour partie et seulement dans son estimation de coût pour une remise en l'état de ces derniers,

- confirmer le jugement dont appel rendu le 15 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Briey et en ce qu'il a reçu les acheteurs au titre de leurs prétentions se rapportant à l'installation électrique défectueuse des vendeurs, à savoir :

pour la somme de 58209,10 euros au titre de la garantie des vices se rapportant aux défauts et à la reprise de l'installation électrique,

pour la somme de 4181,40 euros pour le coût des dégâts occasionnés par les défauts de l'installation électrique ;

- confirmer le jugement dont appel rendu le 15 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Briey dans ses dispositions au titre de la première instance et au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de la condamnation des vendeurs en première instance et ce pour 3000 euros,

- confirmer le jugement dans ses dispositions au titre de la première instance et au titre de l'obligation des appelants à payer et rembourser aux intimés les frais d'expertise acquittés par ces derniers,

- condamner in solidum les consorts [B] et [F] à leur payer la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et ce pour la procédure devant la cour d'appel de Nancy.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 7 juin 2022.

L'audience de plaidoirie a été fixée le 20 juin 2022 et le délibéré au 19 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les dernières conclusions déposées par Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] le 3 mai 2022 et par Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] le 27 mai 2022 et visées par le greffe auxquelles il convient de se référer expressément en application de l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu la clôture de l'instruction prononcée par ordonnance du 7 juin 2022 ;

* Sur le reliquat de taxe foncière

Vu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable,

L'acte authentique de vente du 11 avril 2016 prévoyait la clause suivante : ' l'acquéreur acquitte à compter de l'entrée en jouissance, toute les charges fiscales afférentes au bien. Concernant les taxes foncières, l'acquéreur s'engage irrévocablement à régler le montant du prorata à première demande du vendeur, directement sur le compte qu'il lui communiquera à ce moment', l'entrée en jouissance étant stipulée au jour de l'acte.

Les appelants versent un avis qui concerne non la taxe foncière, mais la taxe d'habitation 2016 (pièce 9 appelants) laquelle ne faisait l'objet d'aucune disposition dans l'acte de vente, de telle sorte que les vendeurs ne peuvent exiger un remboursement au prorata des sommes réglées par eux à l'administration fiscale à ce titre.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a fait droit à la demande des appelants.

** Sur les vices cachés allégués

Les intimés appuient leur demande principale sur la garantie des vices cachés et subsidiairement sur l'obligation de délivrance conforme. En la matière, la seule interdiction est celle qui s'impose à la juridiction de jugement de cumuler les deux fondements, ce qui ne fait pas obstacle à la possibilité qu'a une partie d'invoquer à l'appui d'une demande en résolution les deux fondements alternatifs. Il convient donc d'examiner, conformément aux conclusions des intimés, en premier lieu leurs prétentions fondées sur l'existence de vices cachés et, en cas de rejet, d'apprécier l'obligation de délivrance.

En vertu de l'article 1641 du code civil, 'Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus'.

Pour que Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] puissent invoquer la garantie des vices cachés, ils doivent rapporter la preuve de l'existence des vices cachés qu'ils allèguent, ce qui suppose la démonstration de quatre éléments.

Il est tout d'abord nécessaire d'établir l'existence d'un vice, c'est-à-dire d'une anomalie, qui se distingue d'un défaut de conformité mais aussi d'une usure normale de la chose.

Il est ensuite nécessaire de démontrer que le vice était caché. Cette condition découle de l'article 1641 du code civil, précité, et de l'article 1642 du même code selon lequel 'Le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même'. L'appréciation du caractère occulte du vice doit être faite en fonction des connaissances que devait avoir l'acquéreur et il ne peut être exigé d'un particulier de se faire assister d'un homme de l'art pour l'éclairer sur les éventuels défauts de la chose.

L'acheteur doit en outre démontrer que le vice atteint un degré suffisant de gravité. Ainsi, l'article 1641 du code civil exige que les vices rendent la chose 'impropre à l'usage auquel on la destine, ou diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus'. Il n'est donc pas exigé que la chose soit inutilisable, mais seulement que l'acquéreur ne l'aurait pas acquise à ce prix s'il en avait eu connaissance.

Enfin, selon l'interprétation donnée du texte, il est exigé que le vice caché soit antérieur à la vente, ou plus exactement au transfert des risques. Il est cependant admis que ce vice caché pouvait n'exister qu''en germe' au moment de la vente, sa manifestation n'étant apparue qu'ultérieurement.

- Sur le système électrique

L'expert a procédé aux constatations suivantes, dont il ressort que le système électrique mis en place dans la construction de Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] ne respecte pas une grande partie du chapitre 7-771 de la norme NF C15.100 du fait des points suivants :

* sur la terre :

. la valeur de la prise de terre générale de l'immeuble a été mesurée à 240 Ohms, soit une valeur excédant largement le maximum admis de 100 Ohms supérieur. Pour les circuits dépourvus de protection différentielle, la tension peut s'élever à de plus de 120 V avant le déclenchement du disjoncteur principal,

. la mise à la terre de plusieurs masses métalliques et d'équipement (sur plus de 100 points) n'est pas raccordée et donc non conforme,

* sur les conducteurs :

. les fils utilisés comme neutre n'ont pas la couleur réglementaire bleue (ou ne sont pas numérotés 1 pour les câbles de plus de 5 conducteurs), de même que les conducteurs. Certains conducteurs bleus (réservé pour le neutre) sont raccordés avec des conducteurs noirs et rouges (réservés pour la phase). L'inversion au niveau des points d'utilisation risque de ne pas permettre le fonctionnement correct de la protection magnétothermique du disjoncteur,

. plusieurs conducteurs ne sont pas raccordés ou isolés (fils dénudés ou non flottants à l'air libre à leur extrémité)

. les câbles multiconducteurs sont conformes à la norme CE et à la norme allemande VDE mais pas à la norme NF,

* sur l'armoire électrique et les schémas :

. il n'existe pas de schéma des différentes armoires électriques, il est impossible d'identifier les circuits et de permettre une intervention d'urgence ou de maintenance en sécurité,

. le repérage et l'identification des protecteurs (fusibles/disjoncteurs - concernant les locaux et installations qu'ils desservent) sur l'armoire électrique sont absents, il est impossible d'identifier les circuits et de permettre une intervention d'urgence ou de maintenance en sécurité,

. les armoires ne sont pas terminées et réalisées correctement, notamment il est impossible de les fermer et d'avoir le degré de protection prévu à la norme,

. les disjoncteurs ne sont pas conformes à la NF,

. alors que sur la coupure générale tous les contacts de tous les pôles doivent être couplés mécaniquement pour s'ouvrir et se fermer ensemble, chaque phase et le neutre ont une coupure indépendante, de telle sorte que l'installation peut passer à 410 V (au lieu de 230 V), tension qui ne peut pas être supportée par les équipements branchés sur les prises ou en fixe (frigidaire, télévision, cafetière, éclairage, chaudière ...) et conduit à leur destruction ;

* sur les prises :

. les prises mises en places sont de type F, conformes aux normes CE et standards allemands, mais non conforme à la NF qui prévoit des prises de type E (la présentation du modèle est différente, au lieu d'avoir trois fiches positionnées de manière triangulaire comme le prévoit la NF, elles sont alignées)

. dans la salle de bain, une prise et un interrupteur sont positionnés trop près d'un point d'eau (douche), ce qui est formellement interdit car une projection d'eau pourrait créer un accident.

L'expert a ainsi précisé que les points suivants de la norme française NF C15.100 ne sont pas respectés et notamment :

- plusieurs circuits spécialisés dédiés n'existent pas (chaque appareil ménager de forte puissance (par exemple lave-linge et lave-vaisselle et quatre circuits spécialisés doivent a minima être prévus) doit être alimenté par un circuit dédié),

- les points lumineux ne sont pas équipés de dispositif de connexion pour luminaire,

- la valeur des prises de terre n'est pas conforme (la résistance de la prise de terre doit être au plus égale à 100 Ohms ; or elle a été mesurée à 240 Ohms),

- les conducteurs de protection ne sont pas raccordés (la mise à terre n'est pas raccordée ; les conducteurs ne sont ni raccordés, ni isolés),

- chaque circuit ne dispose pas d'un dispositif de sectionnement,

- les circuits ne sont pas identifiés (chacun des circuits doit être repéré par une indication appropriée, correspondant aux besoins de l'usager, identifiant les locaux desservis et la fonction, restant visible après installation du tableau et compréhensible sans recours à des documents),

- les schémas n'existent pas (remise à l'utilisateur de schémas précisant la nature et le type des dispositifs de protection et de commande, la puissance prévisionnelle, la nature des canalisations pour les circuits extérieurs, le nombre et la section des conducteurs, les applications, le local desservi),

- la gaine technique logement (GLT) n'existe pas (la gaine technique de logement doit contenir le tableau de contrôle s'il est placé à l'intérieur du logement, le tableau de répartition principal, le tableau de communication, deux socles de prises de courants protégés par un circuit dédié pour alimenter les appareils de communication placés dans la GLT, les autres applications de communications prévues),

- le tableau de communication n'existe pas (équipement minimal d'un socle de prise de communication par pièce principale et deux dans la cuisine, desservi par une canalisation venant du tableau de communication de la gaine technique logement),

- les prises de courant au niveau de la GTL, inexistante, n'existent pas,

- l'ensemble du réseau de communication n'existe pas,

- l'emplacement des prises n'est pas conforme.

L'expert relève que l'ensemble du réseau a été réalisé hors norme, avec un risque important pour la sécurité des personnes et pour les biens (électrocution, incendie, dégradations et destructions des équipements qui ne supportent pas la tension de 410 V à la place de 230 V), rendant impossible une intervention en urgence ou de maintenance.

Il s'ensuit qu'une partie des non-conformités soulevées s'explique par l'utilisation de matériels allemands qui bien que respectant la norme CE ne sont pas adaptés au réseau français et aux équipements électriques vendus en France (notamment l'emplacement de la fiche de terre sur les branchements destinés à alimenter des équipements tels que les sèche-cheveux, cafetière, ordinateur, bouilloire ... qui ne peuvent donc être reliés sur les prises de courant en toute sécurité) ; il n'en reste pas moins que le matériel employé n'est pas conforme aux normes françaises et que l'installation, soumise aux normes françaises, est dangereuse.

L'autre partie des non-conformités, est imputable aux choix de réalisation de l'installation (emplacement des prises, tableau électrique sans aucune identification des fusibles/disjoncteurs, absence de circuits dédiés obligatoires, résistance et voltage de l'installation inadapté au réseau français, raccordements effectués de manière aléatoire ou inexistants, absence d'identification des phases et du neutre ...).

Il est ainsi établi que l'installation est source de dangers nombreux et réels.

L'existence de vices rendant l'immeuble vendu impropre à son usage est ainsi établie.

S'agissant du caractère caché de ces vices, que les vendeurs contestent en raison du diagnostic électrique communiqué aux acquéreurs lors de la vente, l'expert a pris le soin de relever que ce diagnostic est entaché d'erreur (en notant que l'installation électrique est antérieure à 1949 alors que l'extension a été réalisée en 2010), qu'il n'a pas vérifié le respect des normes applicables lors de la délivrance du permis de construire et qu'il n'a mis en évidence qu'une partie des anomalies révélées par l'expertise (prise de terre et installation de mise à terre, matériels électriques présentant des risques de contacts directs et conducteurs non protégés mécaniquement). Il doit d'ailleurs être ajouté que, dans le cadre des négociations précontractuelles, le coût des travaux de remise aux normes de l'installation électrique était évalué à 6000 euros (pièce 3 appelants - 12 intimés) alors que l'expert les chiffre à près de 60000 euros, ce qui établit que les vices affectant l'installation n'étaient connus ni dans leur totalité, ni dans leur ampleur et par la même ni dans leur dangerosité.

S'agissant du caractère apparent relatif aux prises et au défaut d'identification des tableaux électriques, les acquéreurs, profanes en la matière, n'étaient pas en capacité de prendre conscience de ces vices et de la dangerosité qui en résultait.

Enfin, le repérage de l'absence de circuits dédiés, de l'absence de connexion de la terre, de l'absence de mécanisme de sécurité liant la terre et les phases, des problèmes liés au raccordement et aux fils et des difficultés liées à la résistance et au voltage de l'installation nécessitaient le démontage de l'installation et/ou des tests et vérifications que seul un professionnel était en capacité de réaliser.

Il est ainsi établi que l'installation électrique était affectée de vices cachés dont les acquéreurs n'avaient pas connaissance lors de la vente.

- Sur le crépi

L'enduit appliqué sur la façade de l'extension se dégrade à l'entrée du garage et sur une poutre. L'expert précise qu'il n'a a priori pas été appliqué une sous-couche d'accrochage, qu'ainsi l'eau s'est infiltrée dans les murs et a fait décoller l'enduit. L'enlèvement de la couvertine entre les deux réunions d'expertise a aggravé les désordres, néanmoins, il est établi par la photographie versée aux débats par les appelants (pièce 8) que l'immeuble n'était pas revêtu d'une couvertine lors de sa vente et qu'elle a été installée par la suite par les acquéreurs. Il s'ensuit que la dégradation du crépis est sans lien avec les travaux réalisés par ceux-ci (mise en place puis enlèvement de la couvertine).

Or la dégradation de l'enduit n'assure pas la protection nécessaire au mur qui présente des infiltrations d'eau, ce qui constitue un vice rendant l'immeuble vendu impropre à son usage.

S'agissant du caractère caché du vice, la photographie des vendeurs montre que l'enduit se décollait sur une très petite surface, ce qui laissait à penser à un phénomène de dégradation très localisé, n'affectant pas la totalité de l'enduit.

Or il s'avère qu'il s'agissait en réalité de la première manifestation d'un phénomène qui s'est ensuite généralisé, dans la mesure où il est causé par un problème dans la pose de l'enduit qui concerne la totalité du mur ; en conséquence, les acquéreurs ne pouvaient avoir conscience de la nature et de l'étendue du vice lors de la vente.

Il est ainsi établi l'existence d'un deuxième vice caché.

- Sur la clause d'éviction de la garantie des vices cachés

L'acte de vente contient une clause d'exclusion de la garantie des vices cachés. Néanmoins, la mise en oeuvre d'une telle clause est assujettie au fait que le vendeur ignorait les vices de la chose vendue, ce qui n'est pas le cas du vendeur qui cède l'immeuble qu'il a conçu ou construit.

Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F], qui ont la qualité de constructeur, ne pouvaient donc ignorer les vices de l'immeuble qu'ils cédaient et ne sont donc pas fondés à se prévaloir de la clause d'éviction de la garantie des vices cachés stipulée à l'acte notarié.

- Sur les conséquences de l'existence des vices cachés

En application de l'article 1644 du code civil, les acquéreurs sont en droit d'obtenir la résolution du contrat s'ils n'auraient pas acquis la chose ou une indemnité compensant le prix moindre qu'ils auraient accepté de payer en connaissance du vice.

Le rapport d'expertise chiffre le coût de la remise aux normes de l'installation électrique à 58209,10 euros et de la réfection de l'enduit à 5800 euros.

Le premier montant ressort d'un devis qui a été soumis à l'expert, qui l'a d'ailleurs complété par des prestations obligatoires n'y figurant pas. En outre, le rapport a été précédé d'un pré-rapport suivi de dires des parties auxquels l'expert a répondu, de sorte que le défaut de contradictoire invoqué par les appelants n'est pas démontré.

Néanmoins, il est établi par les pièces versées aux débats par les deux parties qu'elles avaient déjà convenu d'une baisse du prix de 6000 euros en raison du diagnostic électrique. Dès lors, le prix auquel l'acquéreur aurait accepté d'acheter le bien s'il avait connu l'ampleur et la consistance exactes des vices du réseau aurait été diminué de 52209,10 euros (58209,10-6000).

S'agissant de l'enduit, les appelants versent aux débats des devis de 61358,84 euros pour l'un et de 81583,42 euros pour l'autre.

Or il convient de relever d'une part qu'un premier devis avait été soumis à l'expert qui l'avait apprécié et avait d'ailleurs retenu un prix légèrement inférieur, ce qui n'est pas le cas des deux autres devis produits devant la cour par les intimés ; d'autre part alors que l'expert précise que l'enduit doit être refait sur une surface de 40 m², le devis du 17 septembre 2019 concerne une intervention de nettoyage pour 721 m² et de réfection d'enduit pour 633 m² et celui du 21 septembre 2019 est relatif à la mise en place d'un revêtement plastique sur 450 m². Il s'agit donc de prestations qui excèdent la simple réfection de l'enduit à laquelle les appelants sont tenus.

Si les acquéreurs avaient eu connaissance de l'ampleur et de la consistance exactes du vice, ils auraient accepté de payer un prix diminué de 5800 euros, comme retenu dans l'expertise.

Au regard de ce qui précède, il convient de condamner les appelants à verser aux intimés la somme de 58009,10 euros ; le jugement sera infirmé en ce sens.

L'article 1645 du code civil ajoute que le vendeur qui avait connaissance du vice est également tenu de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Il ressort du rapport d'expertise que les dysfonctionnements de l'installation électrique et notamment la rupture du neutre ont endommagé plusieurs équipements (canapé électrique, réfrigérateur, vélo électrique ...) pour lesquels le prix de remplacement s'élève à 8618 euros, sur lequel leur assureur leur a versé 4436,60 euros, il reste à leur charge 4181,40 euros dont ils sont bien fondés à demander l'indemnisation.

S'agissant du préjudice de jouissance, les acquéreurs vivent depuis 12 ans dans une maison dont l'installation électrique est dangereuse, ce qui a évidemment une répercussion sur leur tranquillité d'esprit, au regard des risques graves ainsi créés tant pour les biens que pour les personnes et qui empêche une jouissance normale des équipements habituels qui doivent être reliés au réseau électrique (lave linge, sèche linge, sèche cheveux, ordinateur, petit électroménager, four, plaque de cuisson, téléviseur ...).

En outre, l'expert a précisé que la durée des travaux pour la reprise de l'enduit est de deux mois et celle pour la reprise de l'électricité de trois mois, durant lesquels ils subiront les nuisances liées au travaux.

Le trouble de jouissance doit être apprécié au regard de l'intensité des troubles qui vient d'être décrite et de la valeur des lieux, en l'espèce acquis au prix de 560000 euros.

Ce préjudice sera exactement indemnisé par l'allocation de 7000 euros de dommages-intérêts ; le jugement sera donc infirmé concernant le montant alloué.

Les acquéreurs sollicitent également la réparation d'un préjudice moral résultant de l'abus de confiance subi et de la trahison ressentie et d'un préjudice lié à la mauvaise foi des vendeurs. Ces deux demandes tendent à sanctionner une faute et un préjudice identique.

Néanmoins, les intimés ne détaillent pas et ne démontrent pas le préjudice qu'ils allèguent avoir ainsi subi.

Il convient dès lors de débouter les intimés de leur demande dans le présent arrêt, le jugement motivant à juste titre un rejet qui n'est pas repris dans son dispositif.

Les intimés sollicitent une condamnation in solidum des appelants, le jugement sera en conséquence infirmé en ce sens, la cour étant tenue par cette demande déjà présentée en première instance et ne pouvant donc confirmer la solidarité ordonnée par le premier juge.

Enfin, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de 'dire et juger' ou 'constater' qui ne constituent pas des demandes au sens du code de procédure civile.

*** Sur les dépens et les frais irrépétibles

Il convient de confirmer les dispositions du jugement sur les dépens, les frais d'expertise et l'article 700 du code de procédure civile.

Les appelants, qui succombent en leur recours, seront condamnés aux dépens d'appel.

Il convient de les condamner à payer une somme qu'il est équitable de fixer à 3000 euros pour les frais irrépétibles exposés par les intimés à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 15 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Val-de-Briey en ce qu'il a statué sur les dépens, les frais d'expertise et l'article 700 du code de procédure civile et a refusé d'appliquer la clause d'éviction de responsabilité,

L'infirme pour le surplus,

Condamne in solidum Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] à payer à Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] au titre de la garantie des vices cachés la somme de 58009,10 euros (cinquante-huit mille neuf euros et dix centimes) ;

Condamne in solidum Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] à payer à Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] la somme de 4181,40 euros (quatre mille cent quatre-vingt-un euros et quarante centimes) en réparation des équipements endommagés en raison des dysfonctionnements du circuit électrique ;

Condamne in solidum Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] à payer à Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] la somme de 7000 euros (sept mille euros) en réparation du préjudice de jouissance ;

Déboute Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] de leur demande au titre du remboursement du prorata de la taxe foncière ;

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] de leurs demandes d'indemnisation en réparation du préjudice moral et du préjudice 'pour mauvaise foi des vendeurs' ;

Condamne Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] aux dépens d'appel ;

Condamne in solidum Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] à payer à Monsieur [C] [L] [G] et Madame [M] [Y] la somme de 3000 euros (trois mille euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Déboute Monsieur [U] [B] et Madame [P] [F] de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Le présent arrêt a été signé par Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. PERRIN.- Signé : N. CUNIN-WEBER.-

Minute en quatorze pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/02024
Date de la décision : 19/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-19;21.02024 ?
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