La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2022 | FRANCE | N°21/01661

France | France, Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 19 septembre 2022, 21/01661


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile



ARRÊT N° /2022 DU 19 SEPTEMBRE 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01661 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EZS6



Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL,

R.G.n° 19/01107, en date du 31 mai 2021,



APPELANT :

Monsieur [E] [U] [X] [I]

né le 30 Septembre 1970 à [Localité 8] (PORTUGAL)


domicilié [Adresse 3]

Représenté par Me Frédérique MOREL, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant et par Me Pierre-André BABEL, avocat au barreau d'EPINAL, avoc...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

------------------------------------

COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile

ARRÊT N° /2022 DU 19 SEPTEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01661 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EZS6

Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire d'EPINAL,

R.G.n° 19/01107, en date du 31 mai 2021,

APPELANT :

Monsieur [E] [U] [X] [I]

né le 30 Septembre 1970 à [Localité 8] (PORTUGAL)

domicilié [Adresse 3]

Représenté par Me Frédérique MOREL, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant et par Me Pierre-André BABEL, avocat au barreau d'EPINAL, avocat plaidant

INTIMÉS :

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE LA [Adresse 7] 2

sis [Adresse 4]

représenté par son syndic, la SAS BIGAUT ET ASSOCIES (FONCIA), prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social,

sis [Adresse 2]

Représentée par Me Virginie GERRIET de la SELARL CHOPIN AVOCATS, substituée par Me Aurélie SAMPIETRO, avocats au barreau d'EPINAL

S.A. WAKAM, anciennement dénommée LA PARISIENNE, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 1]

Représentée par Me François-Xavier WEIN de l'AARPI CHAPEROT - WEIN, avocat au barreau d'EPINAL, substitué par Me Joëlle FONTAINE, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Juin 2022, en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller,

Madame Mélina BUQUANT, Conseiller, chargée du rapport,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;

--------------------------------------------------------------------------------------------------------

Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

--------------------------------------------------------------------------------------------------------

A l'issue des débats, le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2022, en application de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile. Puis, à cette date, le délibéré a été prorogé au 19 Septembre 2022.

ARRÊT : contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 19 Septembre 2022, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Madame CUNIN-WEBER, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ;

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte authentique du 13 mars 2002, Monsieur [E] [X] [I] et Madame [O] [Y] ont acquis en indivision différents lots dont un appartement dans la copropriété ' [Adresse 7] ' situé au [Adresse 5]. Le syndicat des copropriétaires est assuré auprès de la SA La Parisienne Assurances, devenue la SA Wakam.

Au mois de mars 2016, Monsieur [X] a dénoncé une forte humidité avec la présence de moisissures au sol de son appartement.

Un rapport d'intervention a été rédigé le 22 mars 2016 par la société ARDF Est, mandatée par le syndicat des copropriétaires, qui a relevé que les dégradations provenaient d'infiltrations dues au débordement du chéneau au droit des dégâts, celui-ci étant obstrué de déchets végétaux.

Les chéneaux ont été nettoyés suivant facture du 12 avril 2016 de la société DDC Cordist, qui a préconisé le changement de la couverture et de la zinguerie afin de protéger la charpente. En mai 2016, des éléments de la toiture sont tombés au sol. La réparation de la toiture a été effectuée le 10 octobre 2016 et depuis, Monsieur [X] ne constate plus de dégât.

Parallèlement, l'assureur a fait diligenter une expertise par le cabinet Elex, lequel a attribué le sinistre à 1'encombrement et au refoulement de la gouttière d'évacuation des eaux pluviales de l'immeuble, l'eau coulant dans la chambre et causant des dommages aux doublages BA 13 isolants. L'assureur a accepté de prendre en charge le sinistre à hauteur de 1277,10 euros (dont 255,42 euros d'indemnité différée après réalisation des travaux) correspondant à la dépose et la pose d'un nouveau placo.

Le 30 août 2016, il a établi un chèque de 1021,68 euros à l'ordre du syndicat des copropriétaires qui a informé Monsieur [X] [I] du montant alloué par l'assureur, puis lui a adressé un chèque du même montant le 3 mars 2020.

Faisant valoir que l'origine des dégâts des eaux provenait exclusivement de la toiture de l'immeuble et que l'indemnisation proposée ne correspondait pas à la réalité du préjudice subi, Monsieur [X] [I] a fait assigner en avril 2017 le syndicat de copropriété et la SA La Parisienne Assurances en référé aux fins de désignation d'un expert.

Par ordonnance du 24 mai 2017, le juge des référés a fait droit à cette demande et désigné Monsieur [B] [S] en qualité d'expert, lequel a déposé son rapport le 15 novembre 2018.

Par actes des 22 et 24 mai 2019, Monsieur [X] [I] a fait assigner le syndicat de copropriété ' [Adresse 7] [Adresse 4] ' et la SA La Parisienne Assurances devant le tribunal de grande instance d'Epinal aux fins de les condamner au paiement de sommes au titre des travaux de réparation de son appartement et de la perte de loyers.

Par jugement contradictoire du 31 mai 2021, le tribunal judiciaire d'Epinal a :

- condamné in solidum le syndicat de copropriété [Adresse 7] [Adresse 4] ' et la SA la Parisienne Assurances à payer à Monsieur [X] [I] la somme de 255,42 euros au titre de la réparation des dégâts matériels de son lot,

- condamné le syndicat de copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4] ' à payer à Monsieur [X] [I] la somme de 1500 euros au titre de la réparation du préjudice subi suite au retard de versement de l'indemnité d'assurance,

- débouté les parties de leurs demandes au titre des frais de défense,

- condamné le syndicat de copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' à [Localité 6] et la SA La Parisienne aux dépens qui comprendront ceux de la procédure de référé et le coût de l'expertise,

- dit que Monsieur [X] [I] ne sera pas dispensé de participation à la dépense commune des frais de procédure,

- ordonné l'exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé que Monsieur [X] [I] ne produit aucun élément justifiant que le sinistre survenu en 2014 a pour origine une humidité présente dans les parties communes. Par contre, le tribunal a retenu que le sinistre de 2016 avait pour origine des parties communes, les rapports établis en 2016 (ARDF et Elex) attribuant les désordres de la chambre de l'appartement de Monsieur [X] [I] au débordement du chéneau de l'immeuble encombré par des déchets végétaux, les désordres n'étant pas réapparus depuis les opérations de nettoyage. Le tribunal a précisé que le sinistre n'est pas dû à la condensation exclue par le contrat de l'assureur mais présente un caractère accidentel relevant de sa garantie. Le tribunal a retenu le chiffrage des travaux réalisé par la société Elex retenant les dommages immobiliers causés par l'infiltration et a rejeté le chiffrage réalisé par l'expert concernant des travaux d'isolation, de fourniture et de pose d'un dressing qui ne sont pas la suite du sinistre de 2016. Le tribunal précise que Monsieur [X] [I] a perçu la somme de 1021,68 euros en cours de procédure et qu'il convient de condamner le syndicat de copropriété et son assurance au paiement de la somme de 255,42 euros.

Le tribunal a condamné le syndicat de copropriété au paiement de la somme de 1500 euros en réparation du retard de versement de la somme mais a rejeté toute indemnisation de la perte de loyer car, selon le tribunal, bien que le versement de la somme a pris du temps, sa faible importance ne pouvait avoir pour effet de retarder la réalisation des travaux.

Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 30 juin 2021, Monsieur [X] [I] a relevé appel de ce jugement.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 28 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [X] [I] demande à la cour, au visa de l'article 14 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel,

- déclarer recevables mais mal fondés les appels incidents du Syndicat de Copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' et de la SA Wakam,

- débouter Le Syndicat de Copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam de l'intégralité de leurs demandes à son encontre,

- infirmer le jugement du 31 mai 2021 en ce qu'il a :

* condamné in solidum le syndicat de copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA La Parisienne Assurances à payer à Monsieur [X] [I] la somme de 255,42 euros au titre de la réparation de dégâts matériels de son lot,

* condamné le syndicat de copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' à payer à Monsieur [X] [I] la somme de 1500 euros au titre de la réparation du préjudice subi suite au retard de versement de l'indemnité d'assurance,

* débouté les parties de leurs demandes au titre des frais de défense,

* dit qu'il ne sera pas dispensé de participation à la dépense commune des frais de procédure,

Statuant à nouveau,

- condamner in solidum ou solidairement le Syndicat de Copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam à lui payer la somme de 7838,69 euros au titre des travaux de réparation de son appartement,

- condamner in solidum ou solidairement le Syndicat de Copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam à lui payer la somme de 19570 euros au titre de ses pertes de loyer,

- condamner in solidum ou solidairement le Syndicat de Copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam à lui payer la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais de première instance et d'appel,

- dire qu'il sera exonéré, en sa qualité de copropriétaire, de sa quote-part dans les dépens, frais et honoraires exposés par le syndicat dans la procédure, au titre des charges générales d'administration, conformément aux dispositions de l'article 10-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965,

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

- condamner in solidum ou solidairement le Syndicat de Copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam aux dépens d'appel.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 21 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, le syndicat de copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' demande à la cour, au visa de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* condamné le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 7] à verser à Monsieur [X] [I] une somme de 1500 euros en réparation du préjudice subi suite au retard de versement de l'indemnité d'assurance,

* condamné le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 7] aux dépens qui comprendront ceux de la procédure de référé et le coût de l'expertise,

Statuant à nouveau,

- dire et juger n'y avoir lieu à indemniser Monsieur [X] [I],

- condamner Monsieur [X] [I] aux entiers dépens et qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire,

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus, et par conséquent,

- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires formulées à l'encontre du syndicat des copropriétaires ' [Adresse 7] [Adresse 4] ',

À titre subsidiaire, s'il était fait droit aux demandes de Monsieur [X] [I],

- condamner la compagnie d'assurance La Parisienne à garantir le syndicat des copropriétaires '[Adresse 7] [Adresse 4]' de toutes condamnations qui seraient mises à sa charge,

En tout état de cause, y ajoutant,

- condamner Monsieur [X] [I] à verser au syndicat des copropriétaires '[Adresse 7] [Adresse 4]' une somme de 6000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, s'agissant des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

- condamner Monsieur [X] [I] aux entiers dépens et qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire,

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 29 novembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA Wakam demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné La Parisienne, ancienne dénomination de Wakam, au montant des dépens,

Statuant à nouveau,

- rejeter toutes demandes à son encontre au titre des dépens,

- confirmer le jugement pour le surplus,

- rejeter toutes autres demandes émises à son encontre,

Y ajoutant,

- condamner tout succombant à lui payer la somme de 4000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner tous succombants au paiement des entiers dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 3 mai 2022.

L'audience de plaidoirie a été fixée le 13 juin 2022 et le délibéré au 12 septembre 2022, puis il a été prorogé au 19 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Vu les dernières conclusions déposées par Monsieur [X] [I] le 28 février 2022, par le syndicat de copropriété '[Adresse 7] [Adresse 4]' le 21 décembre 2021 et par la SA Wakam le 29 novembre 2021 et visées par le greffe, auxquelles il convient de se référer expressément en application de l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu la clôture de l'instruction prononcée par ordonnance du 3 mai 2022 ;

L'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 énonce que le syndicat des copropriétaires 'a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires'.

* Sur les dégâts de l'appartement de Monsieur [E] [X] [I] et les redevables de l'indemnisation

Selon le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [S] et les pièces versées au dossier, le dégât des eaux dans l'une des chambres de l'appartement de Monsieur [E] [X] [I] a été constaté en mars 2016 après que celui-ci, en raison des plaintes de sa locataire, a ôté des lames de planchers de son appartement. Le 10 mai 2016, un bandeau de la toiture a chuté, la toiture a été bâchée et les recherches se sont orientées vers un problème de gouttière et de chéneau de toiture. Les travaux de réfection du bandeau de toiture ont été réalisés le 10 octobre 2016.

En outre, l'expert judiciaire précise, comme cela avait été déjà noté par un expert privé précédemment intervenu, que la chambre, située à l'aplomb d'une terrasse, est particulièrement mal isolée. L'expert relève également que l'entretien de l'immeuble est minimal, que le manque d'isolation certain est à l'origine de ponts thermiques et de points de condensation.

L'expert ne se prononce pas plus avant sur le sinistre de 2016 dans la mesure où le chéneau tombé a déjà été repris.

En revanche, il considère qu'il y a lieu de reprendre l'isolation du bâtiment.

Il ressort du rapport d'intervention d'ARDF, missionné par le syndicat des copropriétaires pour une recherche de fuite effectuée le 21 mars 2016, que dans l'angle de la chambre en cause, le sol était humide selon les relevés effectués (138,7 graduations), alors qu'il était sec au plafond qui présente des traces de dégradations (77,4 graduations). Il précise qu'au delà de 50 graduations pour le bois et 80 graduations pour les autres matériaux, ceux-ci sont considérés comme humides et qu'au delà de 200 graduations, les matériaux sont saturés en eau. Le professionnel a également constaté sur le mur pignon de l'immeuble des traces de ruissellement d'eau en façade, au droit des dégâts et l'inspection visuelle de la toiture a permis de constater que le chéneau était obstrué de déchets végétaux (photographies jointes au rapport) ce dont il a déduit que lors de fortes précipitations, le chéneau se met en charge et déborde, provoquant les dégâts observés. Il préconisait un nettoyage des chéneaux (pièce 4 appelant).

L'expert privé désigné par l'assureur est parvenu aux mêmes conclusions (pièce 18 appelant).

Ces rapports ont été communiqués à l'expert judiciaire qui n'a émis aucune observation les concernant.

Les pièces versées caractérisent le fait que si l'immeuble en cause présente une mauvaise isolation à l'origine d'un phénomène de condensation, les dégâts constatés en 2016 dans la chambre de l'appartement de Monsieur [E] [X] [I] résultent non d'une condensation d'eau, mais d'un dégât des eaux subi du fait de l'engorgement du chéneau de toiture par lequel de l'eau s'est écoulée sur le mur pignon à l'aplomb des dégâts. Le rapport d'ARDF et les photographies jointes permettent de constater que les dégâts sont localisés dans un angle de la pièce et que le plafond a séché, présentant un taux très proche de celui permettant de retenir une humidité anormale du matériau (77,4 graduations pour 80).

Contrairement à ce qui est soutenu par l'assureur, le dégât n'est pas la résultante d'un phénomène de condensation qui aurait eu des conséquence généralisées, mais bien la conséquence du débord des chéneaux, une partie commune, ce qui engage la responsabilité du syndicat des copropriétaires envers Monsieur [E] [X] [I] pour les dommages causés ainsi à celui-ci.

Il y a lieu par ailleurs de relever, s'agissant du sinistre de 2014 à la suite duquel Monsieur [E] [X] [I] a procédé au changement de ses menuiseries extérieures, qu'il concernait la présence d'eau dans le logement situé à l'étage inférieur que l'expert a attribué à une mauvaise étanchéité des fenêtres de Monsieur [E] [X] [I] après des tests avec des substances colorées. Or les éléments à la procédure ne font état ni de nouvelles plaintes du propriétaire du logement de l'étage inférieur, ni de nouveaux dégâts semblables à ceux de l'appartement de Monsieur [E] [X] [I] dans l'appartement du dessous, de telle sorte que les deux sinistres apparaissent totalement indépendants l'un de l'autre.

Il ressort des conditions générales versées par l'assureur que l'exclusion figurant à la clause 1.1.2.2. pour les dommages provenant de l'humidité, la condensation et la buée d'une part et pour les frais de dégorgement, de réparation ou de remplacement des biens à l'origine du sinistre d'autre part, concerne la garantie des biens de l'assuré alors que l'assureur est recherché au titre de la garantie de responsabilité civile que le syndicat des copropriétaires encourt à l'égard de Monsieur [E] [X] [I]. Ces exclusions ne sont donc pas applicables en l'espèce.

L'origine du sinistre ne consistant ni dans un défaut d'isolation de l'immeuble, ni dans un vice de construction ou un désordre de nature décennale, les exclusions générales de garantie à ces titres ne sont pas plus mobilisables.

S'agissant du défaut d'aléa soulevé, certes les rapports font état d'un entretien a minima, mais cela n'équivaut pas à un défaut d'aléa qui n'est en l'espèce pas démontré.

Le syndicat des copropriétaires doit donc répondre du préjudice subi par Monsieur [E] [X] [I] en raison du dégât des eaux et la SA Wakam lui doit sa garantie au titre de la police souscrite.

** Sur l'étendue du préjudice de Monsieur [E] [X] [I]

En vertu de l'article 9 du code de procédure civile, 'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention'.

Un rapport d'expertise non judiciaire ne peut pas être exclu des débats au motif qu'il a été réalisé à la demande d'une des parties, dès lors qu'il est régulièrement versé aux débats ; en revanche, même discuté contradictoirement, il ne permet de fonder à lui seul une décision et il doit être corroboré par d'autres éléments pour établir les faits et motivations techniques qui y sont rapportés (Chambre mixte, 28 septembre 2012, n°11-187.10 ; Civile 1, 26 juin 2019 n°18-12.226 ; Commerciale, 5 mai 2021, n°20-11.021).

Il apparaît que le syndicat des copropriétaires a fait procéder au nettoyage des chéneaux en avril 2016 puis aux travaux de confortement de la toiture fin 2016 (facture du 18 octobre 2016).

Le préjudice matériel subi par Monsieur [E] [X] [I] se décompose entre :

* la nécessité de reprendre l'intérieur de son appartement,

* la perte de sa locataire ; en effet, selon contrat du 9 août 2015, Monsieur [E] [X] [I] a donné à bail son appartement à compter du lendemain, pour un loyer de 515 euros (pièce 19 appelant) et la locataire l'a résilié par courrier recommandé du 5 octobre 2016, expliquant son départ exclusivement par les conséquences du sinistre de février 2016, auxquelles il n'avait pas été remédié et notamment au caractère inutilisable d'une des chambres, avec un mois de préavis (pièce 12 appelant).

S'agissant du premier point, la remise à neuf de la chambre doit se limiter à une remise en état à l'identique. Il sera relevé qu'il ressort du rapport d'expertise judiciaire que l'ensemble de la pièce, qui comprend un placard intégré, doit être reprise.

Le chiffrage du cabinet Elex à 1277,10 euros (pièce 18 appelant) résulte du travail de cet expert désigné par la compagnie d'assurance, il n'est pas étayé par des devis de professionnels et il n'a d'ailleurs pas été retenu par l'expert judiciaire, bien qu'il lui ait été soumis (annexe 17). Outre que n'étant corroboré par aucun autre élément, il ne peut fonder à lui seul la décision, d'autant plus qu'en l'espèce, la ventilation fait apparaître qu'il est particulièrement incomplet, ne prévoyant que la dépose et la pose de placoplatre et d'un doublage et d'une toile de verre et ne comprenant aucune prestation pour le sol, pour le plafond et pour le placard intégré, notamment. Le protocole souscrit entre l'assureur et le syndicat des copropriétaires arrêtant l'indemnisation du sinistre à la somme de 1277,10 euros (pièce 3 assureur) n'est pas opposable à Monsieur [E] [X] [I].

Les devis présentés par Monsieur [E] [X] [I] à l'expert n'ont fait l'objet d'aucune observation de sa part, il s'avère néanmoins qu'ils comprennent des prestations relatives à l'isolation (isolation sous dalle, isolation des murs extérieurs), qui ne sont pas la résultante du dégât des eaux mais de la nécessité, sans rapport, de procurer à l'appartement une meilleure isolation ou qu'ils font doublon sur certaines prestations. S'agissant du devis Platroptima (réfection de la chambre - pièce 10 appelant), il convient d'exclure les postes 'doublage des isolés extérieurs' (510,90 euros HT), la pose d'un produit étanche à l'eau sur les murs extérieurs et le sol (513,54 euros HT), le doublage 'optima' (337,19 euros HT). En revanche, la dépose et le remplacement de la laine de verre, des aménagements intérieurs en bois (placards ...), du parquet flottant, des cloisons intérieures et du plafond, endommagés par le dégât des eaux, sont dus à Monsieur [E] [X] [I] au titre de l'indemnisation de son préjudice, de même que les frais de chantiers (protection de l'espace de travail, nettoyage de fin de chantier...), soit un total de 3460,96 euros, outre les taxes. Sur le devis Alsebat (fourniture du placard - pièces 24 et 25 appelant), il convient d'exclure la dépose de l'existant qui figure déjà au devis Platroptima et la prise en charge doit être limitée à 2150 euros, outre les taxes.

Le préjudice subi par Monsieur [E] [X] [I] s'élève en conséquence à 5610,96 euros, outre les taxes.

Le jugement sera en conséquence réformé en ce sens.

S'agissant du deuxième point, le syndicat des copropriétaires, qui avait perçu le 30 août 2016 de son assureur 1021,68 euros (pièce 4 assureur), a transmis l'indemnisation le 3 mars 2020 à Monsieur [E] [X] [I] (pièce 35 appelant). Celui-ci était dans l'impossibilité de réaliser les travaux dans son logement le temps que les travaux sur les parties communes soient réalisés, puis dans la mesure où l'indemnité - qui lui a certes été versée tardivement par le syndicat des copropriétaires - est en tout état de cause insuffisante pour financer les travaux de reprise nécessaires.

C'est l'absence de ceux-ci qui empêche la location des lieux (lors des constats faits sur place en juillet 2017, la pièce n'avait pas été reprise et l'appartement n'est pas louable) et le départ de la locataire a été exclusivement motivé par l'absence de solution mise en place pour y remédier. Or l'absence de réalisation des travaux nécessaires est la résultante du manquement du syndicat des copropriétaires et de son assureur à assumer spontanément l'intégralité de l'obligation de réparation.

Le préjudice subi par Monsieur [E] [X] [I] entre novembre 2016 et mars 2020 suite à la perte de sa locataire et à l'impossibilité de louer son logement s'élève donc à 19570 euros (perte mensuelle de 515 euros) ainsi qu'il le réclame.

Il convient également d'infirmer le jugement sur le quantum alloué et sur l'exclusion de l'assureur au paiement alors que la minoration de l'indemnité qu'il a proposée a été à l'origine de l'absence de réalisation des travaux.

L'assureur sera tenu de garantir le syndicat des copropriétaires de toutes les condamnations prononcées à son encontre.

*** Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné le syndicat des copropriétaires et l'assureur aux dépens de première instance et d'expertise et qui a dit que Monsieur [E] [X] [I] ne serait pas dispensé de participer à la dépense commune des frais de procédure.

Il convient de condamner le syndicat des copropriétaires et son assureur aux dépens d'appel au regard du sens de la décision, sous la même réserve concernant la participation à la dépense commune.

Il y a lieu d'infirmer le jugement qui a refusé de faire droit à la demande de Monsieur [E] [X] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de lui allouer 1000 euros pour les dépens exposés en première instance.

Il lui sera en outre alloué 2000 euros pour les frais exposés à hauteur d'appel et les intimés seront déboutés de leur propre demande.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a statué sur les dépens,

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam à payer à Monsieur [E] [X] [I] :

* remise en état de la chambre ayant subi le dégât des eaux : 5610,96 euros (cinq mille six cent dix euros et quatre-vingt-seize centimes) hors taxe, taxes en sus,

* perte de loyers : 19570 euros (dix-neuf mille cinq cent soixante dix euros),

* 1000 euros (mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant,

Dit que la SA Wakam devra garantir le syndicat des copropriétaires ' [Adresse 7] [Adresse 4] ' ;

Condamne la SA Wakam à garantir le syndicat des copropriétaires '[Adresse 7] [Adresse 4]' des condamnations mises à sa charge ;

Condamne le syndicat des copropriétaires '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam aux dépens d'appel ;

Dit que Monsieur [E] [X] [I] ne sera pas dispensé de participer à la dépense commune des frais de procédure ;

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam à payer à Monsieur [E] [X] [I] 2000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en appel ;

Déboute le syndicat des copropriétaires '[Adresse 7] [Adresse 4]' et la SA Wakam de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. PERRIN.- Signé : N. CUNIN-WEBER.-

Minute en onze pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01661
Date de la décision : 19/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-19;21.01661 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award