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08/09/2022 | FRANCE | N°21/01263

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 08 septembre 2022, 21/01263


ARRÊT N° /2022

PH



DU 08 SEPTEMBRE 2022



N° RG 21/01263 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EYXZ







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F19/00128

23 avril 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



Madame [N] [B]

[Adresse 1]>
[Localité 4]

Représentée par Me Adrien PERROT de la SCP PERROT AVOCAT, avocat au barreau de NANCY







INTIMÉE :



S.A.S. [E] Prise en la personne de son Représentant Légal pour ce domicilié audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER, avoca...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 08 SEPTEMBRE 2022

N° RG 21/01263 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EYXZ

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

F19/00128

23 avril 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Madame [N] [B]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Adrien PERROT de la SCP PERROT AVOCAT, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S. [E] Prise en la personne de son Représentant Légal pour ce domicilié audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseiller : STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 12 mai 2022 tenue par Raphaël WEISSMANN, Président, et Stéphane STANEK , conseiller, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en ont rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN, président, Stéphane STANEK et Anne-Sophie WILLM, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 07 juillet 2022, puis à cette date le délibéré a été prorogé au 08 septembre 2022;

Le 08 septembre 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Madame [N] [B] a été engagée sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société NOIROT, devenue société [E], à compter du 01 décembre 1998, en qualité de secrétaire vendeuse.

Le contrat de travail est régi par la convention collective nationale des distributeurs conseils hors domicile.

A compter du 01 mars 2011, Madame [N] [B] a occupé des fonctions d'employée administrative expérimentée, puis de technicienne logistique depuis le 01 décembre 2014, sur le site de [Localité 5] de la société [E].

A compter du 01 octobre 2018, Madame [N] [B] a été mutée sur le site de [Localité 6] de la société [E].

Madame [N] [E] a été placée en arrêt de travail à compter du 22 octobre 2018.

Par courrier du 23 novembre 2021, Madame [N] [B] a été licenciée pour inaptitude avec dispense de reclassement.

Par requête du 15 mars 2019, Madame [N] [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins de reconnaissance de sa qualification de cadre, niveau V, échelon 3 en application de la convention collective nationale des distributeurs conseils hors domicile, de constatations des heures supplémentaires effectuées pour les années 2016, 2017 et 2018, de constatations des heures supplémentaires réalisées au-delà du contingent annuel conventionnel, de paiement de rappels d'heures supplémentaires et d'indemnités afférentes, de remise des documents de fin de contrat et des bulletins de salaires rectifiés.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 23 avril 2021, lequel a :

- dit que la demande de classification cadre présentée par Madame [N] [B] n'est pas fondée,

- dit que la demande de rappel d'heures supplémentaires présentée par Madame [N] [B] n'est pas fondée

- en conséquence,

- débouté Madame [N] [B] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société [E] de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Madame [N] [B] aux entiers dépens, y compris ceux liés au présent jugement.

Vu l'appel formé par Madame [N] [B] le 20 mai 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Madame [N] [B] déposées sur le RPVA le 09 mars 2022, et celles de la société [E] déposées sur le RPVA le 25 mars 2022.

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 27 avril 2022.

Madame [N] [B] demande :

- de dire et juger que ses demandes sont recevables et bien fondées,

- d'infirmer le jugement intervenu en ce qu'il a :

- dit que sa demande de classification cadre n'est pas fondée,

- dit que sa demande de rappel d'heures supplémentaires n'est pas fondée

- l'a débouté de l'ensemble de ses demandes,

- l'a condamné aux entiers dépens, y compris ceux liés au présent jugement,

- de le confirmer pour le surplus,

- statuant à nouveau,

- de dire et juger qu'elle a effectué des heures supplémentaires durant les années 2016 et 2017 qui ne lui ont pas été rémunérées,

- de dire et juger qu'elle aurait dû bénéficier de la classification de responsable logistique, niveau V échelon 3, du site de [Localité 5] sur la période de mars 2016 à septembre 2018,

- de condamner la société [E] au paiement des sommes suivantes :

- 11 475,00 euros bruts à titre de rappel de salaire sur classification

- 1 147,50 euros bruts au titre des congés payés sur rappel de salaire,

- 21 333,31 euros bruts à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires,

- 2 133,33 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- à titre subsidiaire, 18 247,74 euros bruts à titre de rappel sur les heures supplémentaires,

- à titre subsidiaire, 1 824,77 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 11 926,58 euros bruts à titre d'indemnité pour repos compensateur non pris,

- à titre subsidiaire, 10 190,38 euros bruts à titre d'indemnité pour repos compensateur non pris,

- 4 705,48 euros nets au titre du reliquat sur l'indemnité de licenciement,

- à titre subsidiaire, 2 055,85 euros nets au titre du reliquat sur indemnité de licenciement,

- 2 000,00 nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

- 3 000,00 euros nets au titre de l'article 700 en appel,

- de dire et juger que l'ensemble des condamnations à intervenir portera intérêt au taux légal en vigueur à compter de la saisine du conseil de prud'hommes de Nancy,

- d'ordonner la remise de ses bulletins de paie et de ses documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant à compter de la notification de la décision à intervenir,

- de débouter la société [E] de l'intégralité de ses demandes.

La société [E] demande :

- de recevoir en la forme l'appel interjeté par Madame [N] [B] à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 23 avril 2021,

- de rejeter l'appel de Madame [N] [B] à l'encontre dudit jugement,

- de confirmer, sans réserve, l'intégralité du jugement ainsi entrepris,

- en conséquence,

- de débouter Madame [N] [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- de condamner Madame [N] [B] au paiement d'une indemnité d'un montant de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Madame [N] [B] aux entiers frais et dépens de l'instance.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant de l'employeur le 25 mars 2022, et en ce qui concerne le salarié le 09 mars 2022.

Sur la classification

Mme [N] [B] expose avoir été classée au poste de technicienne logistique niveau III échelon 1 de la convention collective à compter du mois de décembre 2014, mais que dans les faits, elle a réalisé des missions relevant d'un poste de responsable logistique classé au niveau V échelon 3, de décembre 2014 à septembre 2018, sur le site de [Localité 5].

Elle liste ses tâches en pages 7 et 8 de ses écritures, dans les domaines du management du personnel, gestion du matériel, gestion des stocks et approvisionnements, et comptabilité.

Elle précise qu'elle avait la charge du fonctionnement global du site de [Localité 5] ; son supérieur hiérarchique, M. [O], n'était pas présent ; elle a ainsi occupé les fonctions d'un responsable logistique relevant de l'intitulé conventionnel « directeur logistique ».

Elle souligne qu'elle menait les entretiens individuels des collaborateurs sur le site, et que les compte-rendus d'entretien la mentionnent comme adjointe au responsable logistique.

La société [E] fait valoir que Mme [N] [B] a accepté sans remarque ni réserve le dernier avenant en date du 1er octobre 2018 qui spécifiait qu'elle était technicienne logistique, et estime que cela clôt le débat.

Elle affirme qu'elle ne disposait d'aucun pouvoir de direction, de sanction, de gestion et d'administration, et qu'elle était placée sous la responsabilité d'un responsable d'exploitation.

Mme [N] [B] renvoie aux pièces suivantes :

- 12-1 : document unique d'évaluation des risques du 1er septembre 2016 ; ce document porte son nom en qualité de signataire

- 12-2 : tableau de suivi de validité des permis de conduire et visite médicale ; ce document mentionne le nom de neuf salariés

- 12-3 : tableau de gestion des congés payés, absences maladie et accident du travail 2017-2018

- 12-5 : 11 compte-rendus d'entretien professionnel ; le nom de Mme [N] [B] figure comme « personne chargée de l'entretien » ; il est indiqué, la concernant : « poste occupé : adjoint responsable logistique » et « lien hiérarchique avec le salarié : responsable » ; dans la partie renseignements concernant le salarié, il est indiqué : « responsable hiérarchique : [O] [D] »

- 12-6 : demandes de rendez-vous auprès de la médecine du travail ;

- 12-7 : courriers de transmission du règlement intérieur à l'inspection du travail et au conseil des prud'hommes ; ces courriers ne mentionnent aucune identité d'expéditeur

- 12-19 : un mail de Mme [N] [B] adressé à M. [D] [O], le 04 août 2017 ; ce mail est envoyé en réponse à un mail que lui a adressé le même jour M. [D] [O] : « Bonjour [N], je serai mercredi prochain sur le site de [Localité 5]. Vous préparez les différents points à voir. (...) » ; Mme [N] [B] répond : « (') Les différents points à traiter : il faut absolument revoir le dossier heures supplémentaires 2016 (voir fichier joint avec récap et 1 onglet par salarié avec le détail des pointages) ; besoins en matériel (diable) et le dossier de l'auto-laveuse (') et éventuellement les besoins 2018 (') mais surtout aborder le plus important, l'état des camions ; gestion des stocks et des ruptures fournisseurs ; la visite prochaine d'un ergonome pour démarrer une étude de poste de chauffeur livreur à la demande du médecin du travail, il vient faire une première visite sur le site le 24/08 ; j'ai eu des soucis avec l'alarme ces derniers temps, un technicien passera sur le site ce mardi 08/08 au dépôt ; mon poste de travail (...) »

- 12-4 :tableau de suivi de l'entretien des camions ;

- 12-8 : un « powerpoint » « Organisation [Localité 5] » ;

- 12-9 : un compte-rendu de vérification périodique des extincteurs, en date du 06 avril 2017 ; le document précise que le contrôle a été fait « en présence de Mme [B] » ;

- 12-13 : un mail du 16 mars 2017 de Mme [N] [B] relatif à une prise de rendez-vous pour un salarié auprès du médecin du travail ;

- 12-18 : un mail de Mme [N] [B] adressé à M. [D] [O], en date du 31 mai 2017, par lequel elle lui adresse un devis de travaux électriques à réaliser sur le dépôt ;

- 12-20 : un mail de Mme [N] [B] adressé à M. [D] [O], en date du 15 février 2018 , par lequel elle lui adresse un devis pour l'achat d'une balayeuse ;

- 12-21 : un mail du 05 mars 2018 relatif à un devis de réparation de Fenwick ;

- 12-10 : des mails de Mme [N] [B] de 2016 au sujet de livraisons

- 12-11 : des mails de Mme [N] [B] de 2017 au sujet d'articles en catalogue

- 12-12 : un mail de Mme [N] [B] en date du 05 juillet 2016, adressé à plusieurs destinataires, relatif à des consignes à appliquer quant aux réservations de matériels auprès du service logistique

- 12-14 : un mail de Mme [N] [B] du 24 mars 2017, adressé à plusieurs destinataires, ayant pour objet : « manquants livraison du 27/03 »

- 12-15 : mail du 13 avril 2017, également relatif à des manquants

- 12-16 : mail de Mme [N] [B] du 31 mars 2017, relatif à une livraison

- 12-17 : un mail de M. [D] [O] du 22 mai 2017, adressé à Mme [N] [B] : « Bonjour [N], je vous signale l'attention particulière sur le niveau de stock, l'objectif à fin mai vsn-1 doit être impérativement

Mme [N] [B] produit en pièce 13 l'annexe classifications à la convention collective applicable.

Le poste d'adjoint à directeur logistique y est ainsi défini : « cadre ayant les connaissances nécessaires pour assister le directeur logistique dans ses fonctions au besoin le suppléer » ; le poste de directeur logistique est ainsi défini : « cadre prenant toutes les initiatives nécessaires au bon fonctionnement des services qui lui sont confiés et, le cas échéant, de l'entreprise ».

La société [E] produit en pièce 8 un extrait de la synthèse de la convention collective des Editions Législatives ; les descriptifs sont les suivants :

« - techniciens et agents de maîtrise :

niveau III : dans le cadre d'instructions de travail qui définissent les limites, les moyens et les méthodes, le salarié est en mesure de choisir des modes opératoires et d'émettre des diagnostics simples sur des dysfonctionnements détection/alerte.

Animation et coordination d'un groupe sur un objectif simple, précis, sans responsabilité hiérarchique.

Relations externes dans un cadre déterminé et structuré. Circulation d'informations pouvant être transversales.

niveau IV : Le salarié agit dans le cadre de directives générales pouvant être liées aux résultats. Les procédures, moyens et méthodes sont définis, toutefois le salarié recherche les modes opératoires pertinents face aux situations imprévues.

Le salarié peut animer des groupes de par son expertise technique. Il peut avoir une responsabilité hiérarchique sur une équipe homogène.

Relations externes de l'ordre de l'influence ou de la négociation engageant l'entreprise dans le périmètre de sa fonction. Création et diffusion d'informations en interne.

- ingénieurs et cadres :

niveau V : Le salarié peut participer à l'élaboration des objectifs, des méthodes et des moyens. Il élabore les modes opératoires et organise les moyens pour les mettre en 'uvre. La responsabilité se mesure par la nature de l'impact des activités et des décisions prises sur l'organisation de son service, la cohésion et l'activité de l'entreprise.

Sur son périmètre d'activité, le salarié assure la responsabilité hiérarchique, déclinaison d'objectifs, diffusion d'instructions, administration, animation, formation, accompagnement et développement.

Le salarié assure et assume toutes les relations nécessaires à la réalisation de ses objectifs dans le cadre de ses fonctions. »

Compte tenu des pièces précitées, décrivant l'activité de Mme [N] [B], étant souligné que l'employeur n'a produit aucune pièce relative à l'exercice de ses fonctions par la salariée, le poste occupé par Mme [N] [B] répondait à la définition précitée d'un poste de niveau V ; en effet, il résulte de ces pièces que Mme [N] [B] jouissait d'une autonomie et exerçait des responsabilités correspondant davantage à l'échelon V, plutôt qu'à l'échelon IV, et ou encore à l'échelon III, c-dessus décrits.

Il résulte des conclusions des parties et des bulletins de paie produits par Mme [N] [B] en pièces 6 qu'elle était classée, et rémunérée, au niveau III.

Il sera dès lors fait droit à sa demande de reclassification, et au rappel de salaire subséquent, ainsi qu'à l'indemnité de congés payés afférents, le calcul des sommes réclamées n'étant pas discuté.

Sur les heures supplémentaires

L'article L. 3171-4 du code du travail dispose qu' en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction.

Il ressort de cette règle que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties mais que le salarié doit appuyer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Mme [N] [B] fait valoir que la société [E] appliquait une répartition de la durée du travail sur l'année, sans qu'elle ait eu connaissance de la programmation indicative annuelle, prévue par l'article 7 de la convention collective.

Elle indique produire ses relevés de pointage.

La société [E] estime que les relevés de pointage de Mme [N] [B] sont fantaisistes, établis sur une base déclarative. Elle ajoute que la salariée ne justifie pas de son activité au soutien de sa demande.

Les dispositions de la Convention collective nationale des distributeurs conseils hors domicile, en matière d'heures supplémentaires, sont les suivantes :

« Chapitre VII : Durée du travail, congés

Durée du travail ' Heures supplémentaires

Article 7.0

a) La durée du travail et la rémunération des heures supplémentaires des salariés sont fixées, dans chaque entreprise, conformément aux lois et règlements en vigueur.

L'étalement de la durée hebdomadaire de travail pourra s'effectuer sur 5 jours et demi.

b) Le contingent annuel d'heures supplémentaires est de 130 heures.

c) Il est précisé que les heures de travail effectuées au-delà de la durée hebdomadaire moyenne donnent lieu aux majorations légales.

d) Conversion de la rémunération des heures supplémentaires sous forme de repos.

Par dérogation aux dispositions du code du travail, relatives au paiement des heures supplémentaires, les établissements donneront priorité à la prise de repos compensateur de remplacement par rapport à tout ou partie des heures supplémentaires, quel que soit le régime juridique de l'horaire (référence hebdomadaire ou annualisation).

Dans cette hypothèse, les établissements détermineront, après consultation des représentants du personnel s'il en existe :

' le caractère individuel ou collectif de la conversion en temps de repos ;

' la ou les périodes de l'année pendant lesquelles les heures supplémentaires seront converties en temps de repos, l'année entière pouvant être retenue, éventuellement, le nombre minimum d'heures supplémentaires qui seront converties en temps de repos.

Ces heures supplémentaires rémunérées sous forme de repos, ouvriront droit, en outre, au repos compensateur dans les conditions et limites légales, mais ne s'imputeront pas sur le contingent annuel conventionnel d'heures supplémentaires.

(')

Annualisation du temps de travail

Article 7.7

En vigueur étendu

1. L'annualisation du temps de travail peut concerner l'ensemble des salariés d'un établissement ou d'une entreprise.

2. Définition et conditions de mise en 'uvre

Les présentes dispositions ont pour objet de permettre une répartition de la durée du travail sur tout ou partie de l'année.

Cette répartition devra faire l'objet d'adaptation par accord d'entreprise ou sera mise en 'uvre directement dans les conditions prévues dans cet accord de branche après consultation des représentants du personnel.

3. Période d'annualisation

L'annualisation s'apprécie usuellement, soit sur l'année civile, soit sur l'année de l'exercice comptable.

4. Calendrier ' Programmation indicative

L'annualisation est établie par écrit selon une programmation indicative devant faire l'objet d'une communication préalable aux délégués syndicaux d'entreprise ou d'établissement et d'une consultation des représentants du personnel, ainsi qu'un affichage sur les tableaux de la Direction.

Cette programmation peut être modifiée suivant la même procédure.

Si tel est le cas, les salariés en sont avisés au moins 3 jours ouvrés à l'avance pendant les périodes saisonnières, 7 jours ouvrés en période hors saison.

5. Modalités de mise en 'uvre

La durée quotidienne de travail pourra atteindre 12 heures de travail effectif pendant les périodes saisonnières, selon les limites fixées par la convention collective.

La limite supérieure de l'amplitude de l'annualisation est fixée à 44 heures par semaine, étant précisé que les périodes de basse activité pourront comporter des semaines dont l'horaire de travail ne devra pas être habituellement inférieur à 24 heures hebdomadaires, sauf semaines dites « de récupération » ou de repos ramenées par exception à horaire 0. Le travail par relais et roulement est autorisé.

Les variations d'horaires enregistrées dans les limites de l'annualisation fixées ci-dessus ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires, tel que défini au présent accord : elles ne donnent lieu ni à majoration pour heures supplémentaires, ni à repos compensateur.

6. Durée moyenne de travail

Lorsque les établissements optent pour la mise en place de l'annualisation des horaires de travail, la durée moyenne annuelle de travail de référence ne devra pas dépasser 1 607 heures par période annuelle incluant la journée de solidarité.

Les heures effectuées au-delà de cette durée ouvrent alors droit à une majoration de salaire ou à un repos compensateur dans les conditions fixées au code du travail.

7. Contingent annuel d'heures supplémentaires

En cas d'annualisation, le nombre d'heures effectuées pendant les semaines de haute activité dépassant l'horaire hebdomadaire normal déterminera le contingent annuel conventionnel d'heures supplémentaires octroyé pour la période de référence. Ce contingent est ainsi fixé :

Nombre d'heures par semaine (haute activité)Contingent

Au-delà de 35 et jusqu'à 39130

40110

4190

4270

4350

4430

Le contingent sera donc précisé lors de la présentation de la programmation annuelle et ne pourra être changé au cours de l'exercice considéré.

8. Lissage de la rémunération (1)

Compte tenu des fluctuations d'horaires inhérentes à l'application de l'annualisation, la rémunération mensuelle de base sera indépendante du nombre d'heures réellement travaillées et établie sur la base mensuelle (à l'identique de la mensualisation) correspondant à l'horaire effectif moyen hebdomadaire, hors gratifications conventionnelles.

En cas de période non travaillée, mais donnant lieu à indemnisation par l'employeur, cette indemnisation est calculée sur la base de la rémunération régulée ; la même règle est appliquée pour le calcul de l'indemnité de licenciement et pour le calcul de l'indemnité de mise ou de départ en retraite.

Lorsqu'un salarié n'aura pas accompli la totalité de la période d'annualisation (embauche ou départ en cours de période), sa rémunération devra être régularisée sur la base de son temps réel de travail. Si le décompte fait apparaître un trop versé, celui-ci sera compensé sur les salaires dus lors de la dernière échéance de paye. Un rappel de salaires sera effectué dans le cas contraire, étant précisé que ce rappel se fera conformément au point 6.

9. Garanties collectives

Indépendamment des dispositions relatives à l'intervention consultative des représentants du personnel pour la mise en 'uvre du calendrier de l'annualisation de l'horaire de travail, l'entreprise devra, lors d'une réunion annuelle des représentants du personnel, faire le bilan de l'application du dispositif d'annualisation d'horaire.

(1) Le point 8 est étendu sous réserve qu'un accord d'entreprise précise les modalités de décompte des heures supplémentaires en cas de période de référence incomplète ainsi que l'impact d'une absence en cours de période sur la rémunération du salarié, conformément au 3° de l'article L. 3121-44 du code du travail.

(Arrêté du 29 avril 2019 - art. 1) »

Indiquant répondre à un argument de l'employeur, Mme [N] [B] précise ne pas avoir eu connaissance d'une annualisation du temps de travail, et ajoute avoir demandé à la partie adverse d'en justifier, en vain.

Mme [N] [B] présente une demande de paiement d'heures supplémentaires, sur la base d'heures qu'elle dit avoir accomplies au-delà du contingent annuel de 1607 heures par an.

Elle renvoie à ses relevés de pointage en pièces 8.

La société [E] ni n'explicite ni ne justifie l'organisation du temps de travail au sein de l'entreprise.

Les relevés de pointage produits par Mme [N] [B] en pièces 8 et suivantes mentionnent jour par jour sur chaque année concernée par la réclamation l'horaire de début de travail et l'horaire de fin, et le nombre d'heures supplémentaires par semaine.

Ces documents sont suffisamment précis sur les horaires de travail et les heures supplémentaires revendiqués pour permettre à l'employeur d'y répondre.

La société [E] fait simplement valoir l'absence de mention de pause déjeuner et le fait qu'il n'a jamais été demandé à Mme [N] [B] de « rester après ses heures de travail, seule dans l'entrepôt, si d'aventure elle y est restée », mais ne produit aucun document relatif à ses horaires de travail, alors que le décompte des heures de travail incombe à l'employeur.

Dès lors, il sera fait droit à la demande, dont le détail du calcul n'est pas critiqué.

Sur la demande au titre des repos compensateurs

Mme [N] [B] réclame des dommages et intérêts pour les repos compensateurs dont elle n'a pas bénéficié, correspondant au nombre d'heures supplémentaires dépassant le quota annuel prévu dans la convention collective.

La société [E] soutient que la salariée doit être déboutée de cette demande puisqu'elle n'a pas accompli d'heures supplémentaires.

En l'absence de contestation à titre subsidiaire des calculs présentés dans ses conclusions par Mme [N] [B], sur le volume d'heures supplémentaires accomplies au-delà de la limite conventionnelle, et sur la valorisation des repos compensateurs, il sera fait droit à sa demande.

Sur la demande de rappel d'indemnité de licenciement

Mme [N] [B] sollicite le paiement de la différence entre ce qu'elle a perçu à ce titre et ce qu'elle estime devoir percevoir, sur la base de la requalification à l'échelon V ; elle précise ses calculs en page 23 et 24 de ses conclusions.

La société [E] s'oppose à la demande, en faisant valoir que l'appelante doit être déboutée de sa demande au titre de la requalification.

Etant fait droit à la demande de requalification, en conséquence de laquelle Mme [N] [B] sollicite un rappel d'indemnité de licenciement, et les calculs n'étant pas critiqués par l'intimée, il sera fait droit à la demande de Mme [N] [B] à hauteur de ce qu'elle réclame en conséquence de sa requalification au niveau V.

Sur la demande d'intérêts au taux légal

Il sera fait droit à la demande d'intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil des prud'hommes, en application de l'article 1231-7 du code civil, sauf en ce qui concerne le rappel d'indemnité de licenciement, cette demande n'ayant été formulée qu'à hauteur d'appel.

Sur la demande de documents de fin de contrat

En application des articles L1234-19 et R1234-9 du Code du travail, il sera fait droit à la demande, à l'exception de la demande d'astreinte, celle-ci n'apparaissant pas justifiée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant à l'instance, la société [E] sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Elle sera également condamnée à payer à Mme [N] [B] 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance, et 2000 euros pour la procédure en appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 23 avril 2021, sauf en ce qu'il a débouté la société [E] de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

Dit que Mme [N] [B] relevait de la classification de responsable logistique, niveau V échelon 3, du site de [Localité 5] sur la période de mars 2016 à septembre 2018 ;

Condamne la société [E] à payer à Mme [N] [B]:

- 11 475 euros (onze mille quatre cent soixante quinze euros) à titre de rappel de salaire sur classification

- 1 147,50 euros (mille cent quarante sept euros et cinquante centimes) au titre des congés payés sur rappel de salaire,

- 21 333,31 euros (vingt et un mille trois cent trente trois euros et trente et un centimes) à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires,

- 2 133,33 euros (deux mille cent trente trois euros et trente trois centimes) au titre des congés payés afférents,

- 4 705,48 euros (quatre mille sept cent cinq euros et quarante huit centimes) au titre du reliquat sur l'indemnité de licenciement ;

Dit que les sommes qui précèdent sont assorties des intérêts au taux légal, à compter du 15 mars 2019, sauf pour la condamnation au titre du rappel d'indemnité de licenciement ;

Condamne la société [E] à délivrer à Mme [N] [B] les documents de fin de contrat, établis en conformité avec le présent arrêt ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Y ajoutant,

Condamne la société [E] à payer à Mme [N] [B], au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 1000 euros (mille euros) pour la procédure de première instance et 2000 euros (deux mille euros) pour la procédure d'appel ;

Condamne la société [E] aux dépens de première instance et d'appel.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en treize pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/01263
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;21.01263 ?
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