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05/09/2022 | FRANCE | N°21/00287

France | France, Cour d'appel de Nancy, 1ère chambre, 05 septembre 2022, 21/00287


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile



ARRÊT N° /2022 DU 05 SEPTEMBRE 2022





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00287 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EWU3



Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de NANCY,

R.G.n° 18/002470, en date du 11 décembre 2020,



APPELANT :

Monsieur [R] [Y]

né le 19 août 1963 à [Localité 14]

domicilié

[Adresse 6]

Représenté par Me Alain CHARDON, avocat au barreau de NANCY



INTIMÉS :

S.A.S. EIFFAGE CONSTRUCTION LORRAINE, venant aux droits de la SAEE RAMELLI, prise en l...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

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COUR D'APPEL DE NANCY

Première Chambre Civile

ARRÊT N° /2022 DU 05 SEPTEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00287 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EWU3

Décision déférée à la Cour : jugement du tribunal judiciaire de NANCY,

R.G.n° 18/002470, en date du 11 décembre 2020,

APPELANT :

Monsieur [R] [Y]

né le 19 août 1963 à [Localité 14]

domicilié [Adresse 6]

Représenté par Me Alain CHARDON, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉS :

S.A.S. EIFFAGE CONSTRUCTION LORRAINE, venant aux droits de la SAEE RAMELLI, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 1]

Représentée par Me Grégoire NIANGO de la SELARL NIANGO, substitué par Me Pierre CATHALA, avocats au barreau de NANCY

SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BÂTIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (SMABTP), es qualité d'assureur de la SAS EIFFAGE CONSTRUCTION LORRAINE, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 8]

Représentée par Me Barbara VASSEUR de la SCP VASSEUR PETIT, avocat au barreau de NANCY

S.A.S. [X] [Z] ET FILS, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 7]

Non représentée, bien que la déclaration d'appel lui ait été régulièrement signifiée par acte de Me [B] [V], Huissier de justice à [Localité 11], par acte en date du 1er avril 2021 délivré à personne morale

S.A. AXA FRANCE IARD, es qualité d'assureur de la SAS [X] [Z] ET FILS, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 5]

Représentée par Me Carole CANONICA substituée par Me Nicole VILMIN de la SCP VILMIN CANONICA REMY ROLLET, avocats au barreau de NANCY

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Copie exécutoire délivrée le à

Copie délivrée le à

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SYNDICAT DES COPRORIÉTAIRES DE LA RÉSIDENCE LES [Adresse 12]

[Adresse 2]

représenté par son syndic en exercice la SAS MICHEL ET NEUMAYER,

pris en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 4]

Représenté par Me Hervé MERLINGE de la SCP JOUBERT, DEMAREST & MERLINGE, avocat au barreau de NANCY

S.A.R.L. ECONOMIE TECHNICITE INGENIERIE COORDINATION (ETICO), prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 9]

Représentée par Me Aubin LEBON de la SCP LEBON & ASSOCIÉS, avocat au barreau de NANCY

Désistement partiel à son égard par ordonnance n°556/21 du 07 décembre 2021

S.A.M.C.V. CAISSE D'ASSURANCE MUTUELLE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (CAMBTP), ès qualité d'assureur de la SARL ETICO, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié [Adresse 10]

Représentée par Me Aubin LEBON de la SCP LEBON & ASSOCIÉS, avocat au barreau de NANCY

Désistement partiel à son égard par ordonnance n°556/21 du 07 décembre 2021

Société [H] [L] PROMOTION, prise en la personne de son représentant légal, pour ce domicilié au siège social, sis [Adresse 13]

Représentée par Me Raoul GOTTLICH de la SCP D'AVOCATS RAOUL GOTTLICH PATRICE LAFFON, avocat au barreau de NANCY

Désistement partiel à son égard par ordonnance n°556/21 du 07 décembre 2021

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 Mai 2022, en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Nathalie CUNIN-WEBER, Président de Chambre,

Monsieur Jean-Louis FIRON, Conseiller,

Madame Mélina BUQUANT, Conseiller, chargée du rapport,

qui en ont délibéré ;

Greffier, lors des débats : Madame Céline PERRIN ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que l'arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe le 05 Septembre 2022, en application de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

ARRÊT : réputé contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 05 Septembre 2022, par Madame PERRIN, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

signé par Madame CUNIN-WEBER, Président, et par Madame PERRIN, Greffier ;

EXPOSÉ DU LITIGE

La société civile immobilière (SCI) Les [Adresse 12] représentée par la société anonyme (SA) [H] [L] Promotion a, en qualité de maître de l'ouvrage, entrepris la construction d'un immeuble à usage d'habitation dénommé ' Les [Adresse 12] ' situé [Adresse 3], composé de 29 logements.

L'immeuble a par la suite été cédé et placé sous le statut de la copropriété, de telle sorte que le syndicat des copropriétaires de la résidence 'les [Adresse 12]' est venu aux droits de la SCI Les [Adresse 12] vis-à-vis des intervenants à la construction.

Les travaux ont été réalisés entre 2006 et 2008. Sont notamment intervenus à l'opération de construction :

- Monsieur [R] [Y], architecte exerçant au sein du cabinet B2H, maître d''uvre,

- la société à responsabilité limitée (SARL) Economie Technicité Ingénierie Coordination (ETICO), chargée d'une mission « ordonnancement, pilotage et coordination », assurée par la Caisse d'assurance Mutuelle Du Bâtiment et des Travaux Publics (CAMBTP),

- la société Eiffage Construction Lorraine venant aux droits de la Saee Ramelli, chargée du lot « gros 'uvre et VRD » et assurée par la société Mutuelle d'assurances du Bâtiment et Travaux Publics (ci-après SMABTP),

- la SAS [X] [Z] et Fils, chargée du lot « couverture zinguerie » et assurée par la SA Axa France Iard.

Les travaux ont été réceptionnés sans réserve le 12 février 2008.

Constatant des infiltrations d'eau généralisées affectant les balcons de l'immeuble, les copropriétaires de l'immeuble « Les [Adresse 12] » ont, lors d'une assemblée générale tenue le 22 février 2016, mandaté leur syndic pour obtenir par voie de référé la désignation d'un expert judiciaire et pour désigner un huissier de justice afin de dresser un procès-verbal de constatation - établi en l'espèce le 20 juin 2016 par Maître [V].

Par ordonnance du 27 septembre 2016, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire confiée à Monsieur [B] [C].

L'expert a rendu son rapport le 16 mars 2018, lequel :

- relève l'existence de quatre types de désordres : traces d'humidité sur les balcons ; trace d'humidité à l'intérieur d'un appartement ; joints de dilatation des allèges de balcons ouverts ; affaissement des balcons ;

- précise qu'à l'exception du deuxième désordre qui compromet la destination de l'immeuble, aucun de ces désordres ne compromet la solidité ou la destination de l'immeuble ;

- impute d'une part les traces d'humidité sur les balcons au choix du siphon de sol et à sa pose et d'autre part les désordres liés aux joints à l'absence de couvre-joints et d'un joint en silicone qui se désagrège, il s'agit pour ces deux points de vice de conception et d'exécution ;

- chiffre à 43356 euros les travaux de reprise des siphons et à 1468,80 euros ceux des joints ;

- répartit les responsabilités concernant les traces d'humidité à 16,66 % pour Monsieur [Y] (choix du siphon) et à 41,66 % chacune pour les sociétés Eiffage (pose du siphon et absence de colle du siphon) et [X] (raccordement des siphons et absence de collage du siphon) ; et concernant les joints à 50 % pour Monsieur [Y] (prescription du type de joint et absence de contrôle) et pour la société Eiffage (mise en oeuvre des joints de dilatation).

Par acte du 13 juillet 2018, le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Nancy Monsieur [Y], la société Eiffage Construction Lorraine et la SAS [X] [Z] et Fils aux fins d'obtenir leur condamnation à la reprise des désordres.

Par actes des 17, 18, 22 et 24 juin 2019, Monsieur [Y] a fait assigner en intervention forcée la SMABTP, assureur de la société Eiffage Construction Lorraine, la SA Axa France IARD, assureur de la SAS [X] [Z] et Fils, la SARL [H] [L] Promotion, la SARL ETICO et son assureur, la CAMBTP, aux fins d'obtenir leur garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui.

Les deux instances ont été jointes par ordonnance en date du 5 septembre 2019.

Par jugement contradictoire du 11 décembre 2020, le tribunal judiciaire, a :

- rejeté le moyen tiré de la prescription de l'action en responsabilité engagée par le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]',

- déclaré irrecevable la demande d'indemnisation du syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' au titre des infiltrations dans le logement de Madame [U] pour défaut de qualité à agir,

- dit que les désordres au niveau des siphons et de la descente d'eaux pluviales étaient apparents au moment de la réception,

En conséquence,

- débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' de ses demandes contre la société Eiffage Construction Lorraine et la SAS [X] [Z] et Fils au titre de ces désordres,

- condamné Monsieur [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 41360 euros TTC à titre de dommages et intérêts,

- débouté Monsieur [Y] de ses appels en garanties,

- déclaré Monsieur [Y] responsable du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons à hauteur de 30%,

- déclaré la société Eiffage Construction Lorraine responsable du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons à hauteur de 70%,

- condamné Monsieur [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 440,64 euros TTC,

- condamné la société Eiffage Construction Lorraine à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 1028,16 euros TTC,

- dit que la SMABTP, assureur de la Eiffage Construction Lorraine, garantit ce dommage,

- dit que la SMABTP n'est toutefois tenue que dans les limites et condition de la police d'assurance souscrite, laquelle prévoit une franchise contractuelle opposable erga omnes,

- condamné in solidum Monsieur [Y] et la société Eiffage Construction Lorraine à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 4500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Monsieur [Y], la société Eiffage Construction Lorraine, ainsi que son assureur, la SMABTP, aux entiers dépens, en ce compris ceux de la procédure de référé incluant les frais d'expertise,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision

Pour statuer ainsi, après avoir écarté la prescription et retenu que le syndicat des copropriétaires ne pouvait agir pour les désordres constatés dans un lot privatif, le tribunal s'est référé au rapport d'expertise qui a relevé des infiltrations dans la dalle et des coulures en sous-face, avec remontées d'humidité au niveau des évacuation des eaux pluviales dues à un défaut d'étanchéité des siphons de sol des balcons. Or les pièces établissant que la maîtrise d'oeuvre avait connaissance du désordre depuis novembre 2007, en avait imputé la responsabilité aux sociétés Eiffage et [X] et avait encore demandé des travaux de reprise les 8, 15 et 18 janvier 2008 et que l'architecte avait demandé à la société Eiffage d'être présente pour procéder à un essai le 22 janvier 2008, ce désordre était apparent lors de la réception. Le tribunal a noté que le promoteur avait été destinataire en copie de la télécopie du 18 janvier 2018 adressée par l'architecte à Eiffage et il en a déduit qu'il ne pouvait ignorer ce désordre, de telle sorte que le syndicat des copropriétaires qui venait à ses droits ne pouvait plus agir contre les entrepreneurs.

En revanche, le tribunal a estimé que les désordres liés aux joints - l'absence de couvre joints entraînant la dégradation du joint de type silicone - n'étaient pas apparents lors de la réception.

Sur les responsabilités relatives aux traces d'humidité et infiltrations au niveau des siphons de sol et des descentes d'eaux pluviales, le tribunal a considéré que seule la responsabilité de Monsieur [Y] pouvait être recherchée de par ses obligations de moyen comme architecte en vertu du contrat signé le 6 avril 2005 lors de la réception de l'ouvrage et a exclu la responsabilité de la société ETICO.

Le tribunal a relevé qu'il ne justifiait pas s'être assuré des suites réservées à sa demande d'intervention sur les siphons, qu'il n'en avait pas informé la maître d'oeuvre pas plus que de la nécessité d'émettre des réserves et qu'il avait ainsi par sa faute empêché le maître d'ouvrage de réclamer la reprise des désordres aux entrepreneurs. En conséquence, il devait indemniser le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' venant aux droits du maître d'ouvrage du préjudice subi.

Le tribunal a estimé que le préjudice subi consistait en l'absence de reprise des désordres par les entrepreneurs, soit le montant total des travaux de reprise. Il a retenu le devis de l'entreprise [J] et [M] en raison du caractère complet des prestations - prévoyant notamment un échafaudage, la repose des carrelages après travaux, la reprise des murs et plafonds endommagés par les infiltrations et coulures mais en opérant une déduction des siphons/descente d'eaux pluviales - en limitant néanmoins le nombre d'emplacements à modifier à 16 et non 20 comme figurant au devis, soit un montant de 41360 euros (37600 euros HT, majoré d'une TVA à 10 %), dans la mesure où seuls 4 étages et non 5 étaient concernés.

Le tribunal a rejeté la demande de garantie de Monsieur [Y] estimant qu'il est le seul responsable des dommages subis par le syndicat des copropriétaires.

Concernant les infiltrations au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons, le tribunal a relevé un défaut de mise en 'uvre de ceux-ci par l'entreprise de gros 'uvre Eiffage Construction Lorraine qui n'avait pas réalisé de couvre-joints, même si cette prestation n'était pas prévue au contrat, dès lors qu'en sa qualité de professionnel de la construction, il lui appartenait de la proposer pour éviter tout dommage. Le tribunal a aussi retenu la responsabilité de Monsieur [Y] qui aurait dû prescrire dans le cahier des clauses techniques particulières, la réalisation de couvre-joints.

Contrairement à l'avis de l'expert judiciaire retenant un partage égalitaire des responsabilités, le tribunal a estimé que la responsabilité de l'entrepreneur pouvait être évaluée à 70 % puisqu'en raison de son devoir de conseil, il se devait de prévoir le couvre-joint nécessaire.

L'indemnisation a été fixée à la somme de 1468,80 euros figurant au devis de la société Fast'Renov, non discuté par les parties.

La clause d'exclusion de solidarité dans le contrat d'architecte du 6 avril 2005 ne permettant pas une condamnation solidaire de Monsieur [Y] et de la société Eiffage Construction Lorraine, le tribunal a mis 30 % de ce montant à la charge de l'architecte et 70 % à la charge de l'entrepreneur. Le tribunal a rappelé que la garantie de l'assureur de celui-ci n'est pas contestée et qu'elle s'applique dans les termes et limites de la police souscrite, laquelle prévoit l'application de franchises dont les montants sont fixés aux termes des conditions particulières.

Enfin, le tribunal a rejeté la demande d'indemnisation de la société [H] [L] envers Monsieur [Y], cette dernière ne justifiant pas d'un abus de droit de sa part dans la procédure mise en 'uvre.

Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 2 février 2021, Monsieur [Y] a relevé appel de ce jugement.

Par ordonnance du 7 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement et l'extinction de l'instance à l'égard de la société [H] [L] Promotion, de la SARL Economie Technicité Ingénierie Coordination (ETICO) et de la SAMCV Caisse d'assurance Mutuelle du Bâtiment et des Travaux Publics (CAMBTP).

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 7 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [R] [Y] demande à la cour, au visa des article 1792 et suivants, 1101 et suivants et 1240 et suivants du code civil, de :

- dire que le maître de l'ouvrage, la société [H] [L], professionnel de la construction était parfaitement à même de formuler une réserve au moment de la réception,

- dire qu'il ne peut lui être reproché, de son côté, un défaut à son obligation de conseil alors que les faits étaient connus de tous,

Par conséquent,

- infirmer le jugement du 11 décembre 2020 du tribunal judiciaire de Nancy en ce qu'il a condamné Monsieur [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 41360 euros TTC à titre de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

- débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' représenté par son syndic en exercice de ses demandes, fins, moyens et conclusions à son encontre,

- débouter l'ensemble des parties adverses de leurs demandes et appels en garantie dirigés contre lui ainsi que de leurs appels incidents,

À titre subsidiaire,

- infirmer le jugement du 11 décembre 2020 du tribunal judiciaire de Nancy en ce qu'il a dit que les désordres au niveau des siphons et de la descente d'eaux pluviales étaient apparents au moment de la réception,

En conséquence,

- débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' de ses demandes contre la société Eiffage Construction Lorraine et la SAS [X] [Z] et Fils au titre de ces désordres,

- condamner Monsieur [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 41360 euros TTC à titre de dommages et intérêts,

- débouter Monsieur [Y] de ses appels en garanties,

Statuant à nouveau,

- dire que les désordres de siphons et de la descente des eaux pluviales n'étaient pas apparents au moment de la réception,

- condamner in solidum la société Eiffage Construction Lorraine, la société [X] et Fils, la SMABTP en tant qu'assureur de la société Eiffage Construction Lorraine, la société AXA en tant qu'assureur de la société [X] [Z] et Fils à le garantir intégralement de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre lui en principal, frais, intérêts et accessoires sur la base de la responsabilité délictuelle,

À défaut,

- prononcer en partage de responsabilité tel que retenu par l'expert judiciaire, à savoir :

16,66% pour l'architecte,

41,67% pour la société Eiffage Construction Lorraine,

41,67% pour la société [X] [Z] et Fils,

- condamner la société Eiffage Construction Lorraine, la société [X] [Z] et Fils, la SMABTP en tant qu'assureur de la société Eiffage Constructeur Lorraine, la société Axa en tant qu'assureur de la société [X] [Z] et Fils à le garantir intégralement de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre lui en principal, frais, intérêts et accessoires, sur la base de la responsabilité délictuelle, en fonction du partage des responsabilités retenues,

- débouter les parties adverses de l'ensemble de leurs demandes et appels en garantie dirigés contre lui ainsi que de leurs appels incidents,

En tout état de cause,

- confirmer le jugement du 11 décembre 2020 en ce qu'il a retenu le montant de 41360 euros TTC au titre des travaux de réparation des siphons,

- rejeter l'application de la solidarité,

- dire mal fondés les appels incidents formés par l'ensemble des parties adverses,

- débouter l'ensemble des parties adverses de leurs demandes de condamnation et appels en garantie dirigés contre lui ainsi que de leurs appels incidents,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

* condamné in solidum Monsieur [Y] et la société Eiffage Construction Lorraine à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 4500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné in solidum Monsieur [Y], la société Eiffage Construction Lorraine, ainsi que son assureur, la SMABTP, aux entiers dépens, en ce compris ceux de la procédure de référé incluant les frais d'expertise,

En cas d'infirmation du jugement notamment conformément au titre subsidiaire,

- condamner in solidum la société [X] [Z] et Fils et son assureur la société Axa avec les parties succombantes au paiement de l'indemnité de procédure, ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris ceux de la procédure de référé incluant les frais d'expertise, en faveur du syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]',

- condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' représenté par son syndic en exercice et toute(s) autre(s) partie(s) succombante(s) in solidum, le cas échéant à payer à Monsieur [Y] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' représenté par son syndic en exercice et toutes parties succombantes in solidum le cas échéant aux frais et dépens de la procédure d'appel.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 21 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' demande à la cour, au visa de l'article 1147 du code civil, de :

À titre principal,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 11 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Nancy, sauf en ce qu'il a limité à 41360 euros la condamnation de Monsieur [Y] au profit du syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' au titre des désordres relatifs aux siphons de sol des balcons et aux descentes d'eaux pluviales,

- l'infirmer de ce seul chef et statuant à nouveau,

- condamner Monsieur [Y] à lui payer au titre de ce désordre la somme de 48356 euros à titre de dommages et intérêts,

Y ajoutant,

- condamner Monsieur [Y] à lui payer la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- le condamner encore aux entiers dépens d'appel,

À titre subsidiaire,

- infirmer le jugement rendu le 11 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Nancy en ce qu'il a retenu l'existence d'un désordre apparent sur les siphons de sol des balcons et les descentes d'eaux pluviales au moment de la réception et l'a débouté de ses demandes à l'encontre de la société Eiffage Construction Lorraine et [X] [Z] et Fils,

Statuant à nouveau sur ce point,

- condamner in solidum Monsieur [Y], la société Eiffage Construction Lorraine et la société [X] [Z] et Fils à lui payer :

- 48356 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la réfection des désordres relatifs aux siphons de sol des balcons et aux descentes d'eaux pluviales,

- 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- les condamner encore in solidum aux entiers dépens d'appel,

- confirmer le jugement rendu le 11 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Nancy pour le surplus.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 12 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA Eiffage Construction Lorraine demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy le 11 décembre 2020 sauf en ce qu'il a :

* déclaré la société Eiffage Construction Lorraine responsable du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons à hauteur de 70%,

* condamné in solidum Monsieur [Y] et la société Eiffage Construction Lorraine à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 4500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté la société Eiffage Construction Lorraine de ses demandes de garantie,

Statuant à nouveau,

À titre principal,

- débouter l'ensemble des parties de leurs demandes formées à son encontre,

En toutes hypothèses,

- dire que la société [X] [Z] et Fils et Monsieur [Y] devront intégralement la garantir de toute condamnation prononcée contre elle,

- condamner Monsieur [Y] et la société [X] [Z] et Fils à lui régler une somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et assumer les entiers dépens de la procédure en ce compris les frais d'expertise.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 6 janvier 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SMABTP en sa qualité d'assureur de la SAS Eiffage Construction Lorraine demande à la cour, au visa des articles L. 112-6 et L. 124-3 du code des assurances et de l'article 1147 ancien du code civil, de :

I. Sur les désordres consistant en des traces d'humidité et infiltrations au niveau des siphons de sol et des descentes d'eaux pluviales

À titre principal : sur la confirmation du jugement de première instance et le rejet de l'intégralité des demandes formées à son encontre,

- déclarer l'appel principal formé par Monsieur [Y], de même que les appels incidents formés par toute autre partie à l'instance, irrecevables et en tout état de cause mal fondés en tant que dirigés à son encontre,

Par conséquent

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy en ce qu'il a :

* rejeté le moyen tiré de la prescription de l'action en responsabilité engagée par le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]',

* dit que les désordres au niveau des siphons et de la descente d'eaux pluviales étaient apparents au moment de réception,

En conséquence,

* débouté Monsieur [Y] de ses appels en garantie,

- débouter Monsieur [Y], et toute autre partie à l'instance, de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions en tant que dirigées à son encontre au titre de ces désordres,

À titre subsidiaire, si par exceptionnel la cour devait infirmer le jugement de première instance

- déclarer les appels en garantie formés par la SMABTP recevables et bien fondés.

Par conséquent,

- condamner in solidum Monsieur [Y], la société [X] [Z] et Fils aux côtés de son assureur, la compagnie AXA, à la relever et la garantir de l'intégralité des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre,

II. Sur les désordres consistant en des infiltrations au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons,

À titre principal : sur l'infirmation du jugement de première instance

- juger son appel incident recevable et bien fondé.

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy en ce qu'il a :

* déclaré Monsieur [Y] responsable du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons à hauteur de 30%,

* déclaré la société Eiffage Construction Lorraine responsable du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons à hauteur de 70%,

* condamné Monsieur [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 440,64 euros TTC,

* condamné la société Eiffage Construction Lorraine à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 1028,16 euros TTC,

* dit que la SMABTP, assureur de la société Eiffage Construction Lorraine, garantit ce dommage,

*condamné in solidum Monsieur [Y], la société Eiffage Construction Lorraine, ainsi que son assureur, la SMABTP, aux entiers dépens, en ce compris ceux de la procédure de référé incluant les frais d'expertise,

Statuant à nouveau,

- juger l'intégralité des demandes formées à son encontre au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons irrecevables et en tout état de cause mal fondées,

Par conséquent

- débouter Monsieur [Y], et toute autre partie à l'instance, de l'intégralité de leurs demandes formées à son encontre au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons,

À titre subsidiaire, si d'aventure la Cour devait entrer en voie de condamnation à son encontre,

- limiter la quote-part de responsabilité à la charge de la société Eiffage Construction Lorraine à hauteur de 30%,

- limiter la condamnation à son égard, ès qualités d'assureur de la société Eiffage Construction Lorraine, à concurrence de la part de pourcentage de responsabilité mise à la charge de son assurée,

III. En tout état de cause

- juger l'intégralité des demandes formées à son encontre irrecevables et en tout état de cause mal fondées,

- condamner Monsieur [Y], et toute partie succombante, à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [Y], et toute partie succombante, aux entiers frais et dépens de l'instance, y compris ceux de la procédure de référé et de l'expertise judiciaire.

Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour d'appel sous la forme électronique le 3 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA Axa France Iard demande à la cour de :

À titre principal,

- confirmer le jugement rendu en date du 11 décembre 2020 en ce qu'il a dit que les désordres au niveau des siphons et de la descente d'eaux pluviales étaient apparents au moment de la réception,

- confirmer le jugement rendu en date du 11 décembre 2020 en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes contre la société Eiffage Construction Lorraine et la société [X] [Z] et Fils,

- confirmer le jugement rendu en date du 11 décembre 2020 en ce qu'il a débouté Monsieur [Y] de ses appels en garantie,

- confirmer le jugement rendu en date du 11 décembre 2020 en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité de la société [X] [Z] et Fils au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges des balcons,

- confirmer le jugement rendu en date du 11 décembre 2020 en ce qu'il n'a prononcé aucune condamnation à l'encontre de la société Axa France, prise en sa qualité d'assureur de la société [X],

En conséquence,

- débouter Monsieur [Y] et/ou toutes autres parties de toutes demandes de garantie telles que dirigées à son encontre,

- débouter toutes parties de toutes demandes, fins et conclusions telles que dirigées à son encontre,

- condamner in solidum Monsieur [Y] et/ou tout succombant au versement d'une somme de 4000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum Monsieur [Y] et/ou tout succombant aux entiers dépens,

À titre subsidiaire,

- juger que les désordres allégués par le syndicat des copropriétaires ne relèvent pas de la garantie décennale des constructeurs,

- juger que la garantie facultative au titre des désordres intermédiaires n'a pas été souscrite par la société [X] auprès d'elle,

En conséquence,

- juger que ses garanties n'ont en l'espèce pas vocation à trouver application,

- prononcer la mise hors de cause de la Société Axa France Iard,

- débouter Monsieur [Y] et/ou toutes autres parties de toutes demandes de garantie telles que dirigées à son encontre,

- débouter toutes parties de toutes demandes, fins et conclusions telles que dirigées à son encontre,

- condamner in solidum Monsieur [Y] et/ou tout succombant au versement d'une somme de 4000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum Monsieur [Y] et/ou tout succombant aux entiers dépens,

A titre infiniment subsidiaire,

- juger la société Axa France Iard recevable et bien fondée en ses demandes,

Y faisant droit,

- juger que Monsieur [Y] et la société Eiffage Construction Lorraine engagent leur responsabilité,

En conséquence,

- condamner in solidum Monsieur [Y], la Société Eiffage Construction Lorraine solidairement avec son assureur, la SMABTP, à la relever et la garantir de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre en principal, dommages et intérêts, intérêts, frais et dépens,

- débouter toutes parties de toutes demandes de garantie telles que dirigées à son encontre,

- réformer le jugement en ce qu'il a alloué au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' la somme de 41360 euros TTC à titre de dommages et intérêts au titre des désordres au niveau des siphons et de la descente d'eaux pluviales,

Statuant à nouveau,

- juger que le quantum des dommages et intérêts qui pourrait être alloué au syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' ne saurait excéder la somme de 12500 euros HT,

- débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]' du surplus de ses demandes, fins et conclusions,

- juger que les condamnations qui seraient susceptibles d'être prononcées à son encontre le seraient à concurrence de la part de responsabilité qui serait mise à la charge de la société [X],

- juger que les condamnations qui seraient susceptibles d'être prononcées à son encontre le seraient dans les limites et conditions de son contrat, et en particulier déduction faite du montant de sa franchise contractuelle, laquelle est opposable erga omnes,

- débouter toutes parties de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

- condamner in solidum toutes parties succombantes à lui verser la somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner toute autre partie aux entiers dépens, en ce compris les dépens des procédures de référé et les frais d'expertise judiciaire.

Par acte du 1er avril 2021, la déclaration d'appel a été signifiée à la SAS [X] et Fils, laquelle n'a pas constitué avocat.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 17 mai 2022.

L'audience de plaidoirie a été fixée le 30 mai 2022 et le délibéré au 5 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Vu les dernières conclusions déposées le 7 février 2022 par Monsieur [R] [Y], le 21 février 2022 par le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Les [Adresse 12]', le 12 juillet 2021 par la SA Eiffage Construction Lorraine, le 6 janvier 2022 par la SMABTP, et le 3 mai 2022 par la SA Axa France Iard et visées par le greffe auxquelles il convient de se référer expressément en application de l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu la clôture de l'instruction prononcée par ordonnance du 17 mai 2022 ;

* Sur la garantie décennale pour les désordres liés au défaut d'emboîtement des siphons de balcon

Vu les articles 1792, 1792-1, 1792-4 du code civil,

Il ressort du rapport d'expertise et des pièces versées aux débats que les désordres liés aux infiltrations dans la dalle et des coulures en sous-face, avec remontée d'humidité au niveau des évacuations des eaux pluviales mis en évidence par l'expert et expliqués par celui-ci par un défaut d'étanchéité des siphons de sol des balcons, avaient été signalés par le promoteur, maître de l'ouvrage, et avaient été évoqués à la réunion de chantier du 4 décembre 2007. Le compte-rendu de réunion de chantier du 15 janvier 2008 précise que le maître d'oeuvre, Monsieur [R] [Y], mentionnait, pour tous les logements, une reprise de l'étanchéité autour des siphons des balcons. Par télécopie du 18 janvier 2008 - avec copie adressée au maître de l'ouvrage, il précisait avoir constaté que les emboîtements continuaient à fuir et convoquait la société Eiffage construction le 22 janvier 2008 pour procéder à un essai. Il n'est pas contesté que la reprise des siphons réclamée n'a pas été effectuée et que les travaux ont été réceptionnés sans réserve le 12 février 2008.

Il s'ensuit que, dans les rapports entre le maître de l'ouvrage et les entrepreneurs, les désordres de nature décennale en cause étaient apparents lors de la réception. Aucune réserve n'ayant été faite lors de la réception, celle-ci a eu un effet de purge les concernant et la responsabilité des constructeurs ne peut plus être recherchée sur le fondement de la garantie décennale ou sur un autre fondement.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a déclaré les désordres apparents et a rejeté les demandes du syndicat des copropriétaires contre les sociétés Eiffage construction Lorraine et [X] [Z] et Fils. Les appels subsidiaires incidents des sociétés Axa IARD France, Eiffage construction Lorraine et SMABTP sont dès lors sans objet.

** Sur la responsabilité de l'architecte au titre de son devoir de conseil dans le cadre de l'assistance au maître de l'ouvrage lors de la réception

Vu l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable au contrat,

Il ressort du contrat d'architecte du 6 avril 2005 que Monsieur [R] [Y] s'est engagé vis-à-vis du promoteur la SCI Les [Adresse 12], aux droits duquel se trouve aujourd'hui le syndicat des copropriétaires, pour une mission de maîtrise d'oeuvre comprenant notamment la direction des travaux et l'assistance aux opérations de réception.

Or les manquements au devoir de conseil de l'architecte commis à l'occasion de l'assistance aux opérations de réception, qui lui sont concomitants, ne sont pas couverts par la réception sans réserve des travaux de construction.

Le fait que la SCI co-contractante était l'émanation d'une société commerciale spécialisée dans la promotion immobilière - la SA [H] [L] Promotion qui en était d'ailleurs la gérante - n'est pas de nature à dispenser le maître d'oeuvre des obligations contractuelles qu'il avait souscrites. Si la responsabilité de Monsieur [R] [Y] ne peut être recherchée pour n'avoir pas attiré l'attention du maître de l'ouvrage sur les effets de la réception sans réserve dont celui-ci avait nécessairement connaissance du fait de sa qualité de professionnel du domaine concerné, en revanche, il se devait, au titre de l'assistance dans les opérations de réception, de lui donner connaissance de la non-réalisation des travaux de reprise réclamés aux entrepreneurs.

Il n'est donc pas contradictoire de constater que les vices étaient apparents lors des opérations de réception tout en retenant que la responsabilité de l'architecte est engagée à raison d'un manquement au devoir de conseil lors des opérations de réception, pour n'avoir pas averti le maître de l'ouvrage que les travaux de reprise de désordres qu'il avait signalés n'avaient pas été effectués et le laisser ainsi réceptionner les travaux sans émettre de réserve, le privant ensuite de la possibilité d'obtenir la reprise des désordres.

En s'abstenant en l'espèce de porter à la connaissance de la SCI Les [Adresse 12] que les travaux de reprises qu'il avait réclamés n'avaient pas été réalisés - alors que le promoteur était fondé à croire qu'ils l'avaient été compte tenu des courriels portés à sa connaissance pour information - et en contre-signant une réception sans réserve malgré la persistance de désordres dont il avait connaissance et sans en avertir son contractant, Monsieur [R] [Y] a privé par sa faute le maître de l'ouvrage de sa faculté d'émettre lors de la réception les réserves qui s'imposaient.

Le tribunal a justement relevé que le préjudice résultant du défaut de conseil correspondait à l'absence de reprise des désordres par les entrepreneurs dont la responsabilité ne peut plus être recherchée, c'est-à-dire le montant des travaux de reprise.

Le tribunal a retenu le chiffrage opéré par le devis [J] et [M] et non le devis Fast'renov habitat au motif que le premier était plus complet, ce qui est établi par le rapport de l'expert à qui les deux devis ont été soumis et ce qui a d'ailleurs été admis par Monsieur [R] [Y].

En revanche, il a limité le montant de dommages-intérêts accordés en retenant que le devis concernait les balcons de 5 niveaux alors que seuls 4 étages étaient concernés. Or il y a lieu de reprendre non seulement les siphons des 4 étages, mais également ceux du rez-de-chaussée, de telle sorte que le devis prévoit à raison une intervention sur 5 niveaux.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement sur le montant de la somme allouée en réparation et de la fixer, conformément au devis du 8 février 2018, à 43960 euros hors taxe, soit 48356 euros toutes taxes comprises.

*** Sur la garantie décennale pour les désordres liés aux joint de dilatation des allèges de balcons

Vu les articles 1792, 1792-1, 1792-4 du code civil,

La société Eiffage Construction Lorraine réclame le rejet des demandes formées à ce titre à son encontre, estimant prépondérante la responsabilité de l'architecte et sollicite le cas échéant la garantie de Monsieur [R] [Y] et de la société [X]. Elle reproche également un défaut d'entretien des joints qui serait à l'origine des désordres.

Son assureur fait valoir qu'elle n'est pas à l'origine du sinistre, s'agissant d'une faute de conception, et conteste l'arbitrage des fautes retenu par le premier juge.

Le caractère décennal de ces désordres n'est pas remis en cause.

L'expert a relevé qu'en l'absence de pose d'un couvre-joint, les joints en silicone se désagrègent, ce qui constitue un désordre de nature décennale qui n'était pas apparent lors de la réception, du selon lui à une faute de contrôle de l'exécution relevant de la maîtrise d'oeuvre pour 50 % et à une faute de mise en oeuvre des joints de dilatation par l'entreprise de gros oeuvre, la SA Eiffage Construction Lorraine pour 50 %.

S'agissant du défaut d'entretien des joints - la norme AFNOR citée par la société intimée, non obligatoire comme mentionné dans le document produit (pièce 14 de la SA Eiffage Construction Lorraine page 4) préconisant uniquement une surveillance annuelle (page 13 du document) -, l'expert n'a relevé aucun manquement à ce titre et a imputé la désagrégation des joints à la seule absence de couvre-joint, à l'exclusion de tout problème d'entretien (page 30 du rapport). Le moyen soulevé par la SA Eiffage Construction Lorraine, qui ne verse aucune autre pièce à ce propos que la norme AFNOR, ne peut donc prospérer.

Le devis de reprise de la société Fast rénov du 12 décembre 2017 de 1224 euros hors taxe (1468,80 euros toutes taxes comprises) n'est pas contesté.

C'est à juste titre que le premier juge a retenu que l'entrepreneur était tenu à une obligation de résultat à laquelle il a failli en ne posant pas de couvre-joint afin d'éviter la désagrégation des joints, quand bien même cette prestation n'était pas contractuellement prévue dès lors qu'il lui appartenait de la proposer, en sa qualité de professionnel, pour éviter tout dommage.

Le maître d'oeuvre a également commis une faute en ne prescrivant pas la pose de couvre-joint.

Il résulte de ce qui précède que ces deux opérateurs à la construction ont chacun commis une faute dont aucune n'est prépondérante et que, comme l'a estimé l'expert, leurs fautes respectives ont concouru à égalité dans la survenue du dommage.

Il convient dès lors d'infirmer le jugement qui a opéré un partage de responsabilité à hauteur de 70 % pour l'entrepreneur et de 30 % pour l'architecte.

Compte-tenu de la clause d'absence de garantie, étant observé que le syndicat des copropriétaires ne conteste pas la répartition conjointe et non solidaire opérée par le premier juge, il y a lieu de condamner Monsieur [R] [Y] et la SAS Eiffage construction Lorraine à payer chacun la somme de 734,40 euros au syndicat des copropriétaires.

La SMABTP, assureur de la SAS Eiffage construction Lorraine, doit sa garantie dans les limites contractuellement prévues, comme l'a justement retenu le premier juge dont la décision sera confirmée sur ce point.

**** Sur les demandes de garantie et d'absence de solidarité

S'agissant des vices apparents au moment de la construction, Monsieur [R] [Y] ne peut rechercher la garantie des sociétés Eiffage construction Lorraine et [X] [Z] et fils et de leurs assureurs respectifs la SMABTP et la société Axa, dans la mesure où la réception sans réserve exonère les constructeurs de toute responsabilité pour les désordres apparents de construction.

S'agissant de la réparation des conséquences d'une faute lors de l'assistance aux opérations de réception dont il est l'auteur unique, il est seul tenu de la réparer, sans incidence de la clause d'absence de solidarité prévue au contrat.

Concernant les joints de dilatation, la clause d'absence de solidarité a été appliquée. Monsieur [R] [Y] et la société Eiffage construction Lorraine étant chacun condamné à n'indemniser le syndicat des copropriétaires que des conséquences de sa propre faute dans la survenue du dommage, ils ne peuvent ni l'un, ni l'autre obtenir la garantie de l'autre opérateur pour les sommes mises à la charge respective de chacun d'eux.

La société Eiffage construction Lorraine, dont la responsabilité n'est retenue que pour l'absence de couvre-joint, ne peut prétendre à la garantie de la société [X] [Z] et fils qui n'est pas intervenue sur les joints et dont la garantie n'est pas engagée pour les désordres relatifs à la désagrégation de ceux-ci.

Monsieur [R] [Y] a été débouté de ces appels en garantie par le premier juge dont la décision sera confirmée sur ce point et, y ajoutant, la société Eiffage construction Lorraine de ses propres demandes de garantie.

Enfin, il n'appartient pas à la cour de statuer sur les demandes tendant à ce qu'il soit 'dit que', 'constaté que' ou 'donné acte que' qui ne sont pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

***** Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il y a lieu de confirmer le jugement de première instance qui a fait une juste appréciation pour les condamnations aux dépens et au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient de condamner Monsieur [R] [Y], qui succombe en son recours, aux dépens d'appel.

Il sera débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, en revanche, condamné à payer sur ce fondement :

- 2500 euros au syndicat des copropriétaires,

- 1500 euros à la SMABTP,

- 1500 euros à la SA Axa France Iard,

- 1500 euros à la SA Eiffage construction Lorraine.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 11 décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Nancy sauf en ce qui concerne le montant alloué au syndicat des copropriétaires en réparation des manquements de l'architecte lors de l'assistance aux opérations de réception et le partage de responsabilité opéré pour les désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons,

Statuant à nouveau dans cette limite,

Condamne Monsieur [R] [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence ' les [Adresse 12] ' la somme de 48356 euros (quarante-huit mille trois cent cinquante-six euros) toutes taxes comprises,

Déclare Monsieur [R] [Y] et la SA Eiffage construction Lorraine responsables du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires de la résidence ' les [Adresse 12] ' au titre des désordres au niveau des joints de dilatation des allèges de balcons à hauteur de 50 % chacun,

En conséquence,

Condamne Monsieur [R] [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'les [Adresse 12]' la somme de 734,40 euros (sept cent trente-quatre euros et quarante centimes),

Condamne la SA Eiffage construction Lorraine à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence 'les [Adresse 12]' la somme de 734,40 euros (sept cent trente-quatre euros et quarante centimes),

Rappelle que la SMA BTP doit sa garantie pour ce dommage dans les termes du dispositif du premier jugement,

Y ajoutant,

Déboute la SA Eiffage construction Lorraine de ses demandes de garantie,

Condamne Monsieur [R] [Y] aux dépens de la procédure d'appel,

Le déboute de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [R] [Y] à payer en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés à hauteur d'appel :

- 2500 euros (deux mille cinq cents euros) au syndicat des copropriétaires de la résidence ' les [Adresse 12] ',

- 1500 euros (mille cinq cents euros) à la SMA BTP,

- 1500 euros (mille cinq cents euros) à la SA Eiffage construction Lorraine,

- 1500 euros (mille cinq cents euros) à la SA Axa France Iard.

Le présent arrêt a été signé par Madame CUNIN-WEBER, Présidente de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame PERRIN, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Signé : C. PERRIN.- Signé : N. CUNIN-WEBER.-

Minute en dix-huit pages.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/00287
Date de la décision : 05/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-05;21.00287 ?
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