République Française
Au nom du peuple français
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Cour d'appel de Nancy
Chambre de l'Exécution - Surendettement
Arrêt n° /22 du 13 juin 2022
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02251 - N° Portalis DBVR-V-B7F-E24B
Décision déférée à la Cour : jugement du juge des contentieux de la protection statuant en matière de surendettement du tribunal judiciaire de VAL DE BRIEY, R.G.n° 11.20.0068, en date du 12 juillet 2021,
APPELANT :
Monsieur [F] [I]
sis au 7 Quartier Bel-Air - 54910 VALLEROY
comparant
INTIMÉES :
RCI BANQUE, dont le siège social se situe au Chez CA CONSUMER FINANCE ANAP - AGNECE 923 - 77213 AVON CEDEX
non représentée
BANQUE REVILLON, dont le siège social se situe au Chez NEUILLY CONTENTIEUX 143 Rue Anatole France - 92300 LEVALLOIS-PERRET
non représentée
COFIDIS, dont le siège social se situe au Chez SYNERGIE - CS 14110 - 59899 LILLE CEDEX 9
non représentée
BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, dont le siège social se situe au Chez NEUILLY CONTENTIEUX - 143 Rue Anatol France - 92300 LEVALLOIS PERRET
non représentée
S.A. CA CONSUMER FINANCE, dont le siège social se situe au ANAP-Agence 923 BDF - BP 50075 - 77213 AVON CEDEX
non représentée
BANQUE ADVANZIA BANK, dont le siège social se situe au Service Clients - TSA 34231 - 77438 MARNE LA VALLEE CEDEX 2
non représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 2 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Fabienne GIRARDOT, Conseillère chargée d'instruire l'affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Francis MARTIN, président de chambre,
Madame Nathalie ABEL conseillère
Madame Fabienne GIRARDOT, Conseillère
Greffier, lors des débats : Monsieur Ali ADJAL ;
ARRÊT : réputé contradictoire, prononcé publiquement le 13 juin 2022, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile ;
signé par Monsieur Francis MARTIN, président de chambre, et par Monsieur Ali ADJAL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire ;
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Copie exécutoire délivrée le à
Copie délivrée le à
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EXPOSE DU LITIGE
Le 10 décembre 2019, la commission de surendettement des particuliers de Meurthe et Moselle a déclaré M. [F] [I] recevable au bénéfice de la procédure de surendettement.
Les mesures imposées par la commission ont été élaborées le 3 mars 2020, tendant à l'apurement total de l'endettement évalué à hauteur de 100 777,24 euros sur une durée de 43 mois sans intérêts, sur la base d'une capacité de remboursement retenue à hauteur de 2 439 euros.
M. [F] [I] a contesté les mesures imposées par la commission de surendettement au motif que le montant de la mensualité de remboursement était trop élevé et que son salaire allait diminuer, et a proposé de régler une somme mensuelle de 500 à 700 euros adaptée à sa situation, faisant état d'une partie variable de son salaire aléatoire (PVC) et deux primes payées en avril et mai de chaque année (intéressement et participation).
Par jugement en date du 12 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Val de Briey a ordonné un plan de rééchelonnement des créances sur la durée de 84 mois sans intérêts sur la base d'une capacité de remboursement mensuelle évaluée à 1 297,11 euros.
Le premier juge a évalué les ressources de M. [F] [I] à 2 937,47 euros (moyenne des dix derniers mois de salaire) pour faire face à des charges mensuelles de 1 640,36 euros, incluant une participation aux charges du logement dans lequel il était hébergé caractérisée par le paiement du loyer de 887,36 euros.
Le jugement a été notifié à M. [F] [I] suivant courrier recommandé avec avis de réception retourné signé le 10 septembre 2021.
Par courrier recommandé avec demande d'avis de réception posté le 20 septembre 2021, M. [F] [I] a interjeté appel du jugement en indiquant notamment que sa compagne avait une fille qui percevait le RSA avec deux jeunes enfants à charge (6 et 12 ans) et qu'il devait les aider, de même que ses enfants, et qu'il fallait déduire de ses salaires les impôts prélevés à la source à hauteur de 300 euros, expliquant que la part variable de son salaire (étant commercial) diminuait régulièrement. Il a sollicité un effacement total ou partiel de ses créances.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 2 mai 2022.
M. [F] [I] comparaît et indique qu'il vit dans une maison avec sa compagne qui est en retraite, et qu'il doit faire face aux charges courantes et à l'aide de sa famille ou de celle de sa compagne avec un salaire qui présente une part variable en constante diminution et deux primes qui sont versées deux fois par an, ce qui ne permet pas de fixer des mensualités constantes sur cette base.
Par courrier reçu au greffe le 30 mars 2022, le GEIE Synergie, mandaté par Cofidis, a sollicité la confirmation de la décision du tribunal judiciaire.
Les autres créanciers n'ont pas formulé d'observations. Aucun créancier n'a comparu.
L'affaire a été mise en délibéré pour être rendue le 13 juin 2022.
MOTIFS
1) sur la fixation du montant de la capacité de remboursement
L'article L. 711-1 du code de la consommation dispose que la procédure de surendettement est destinée à traiter la situation de surendettement des personnes physiques de bonne foi caractérisée par l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de leurs dettes non professionnelles exigibles ou à échoir ainsi qu'à l'engagement qu'elles ont donné de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société.
Il résulte des pièces du dossier que M. [F] [I] perçoit des ressources évaluées à 2 708,82 euros (moyenne du salaire net fiscal) et doit faire face à des charges fixées à hauteur de 1 840,36 euros (forfait charges courantes pour une personne -670€-, charges de chauffage -83€-, essence -200€- et loyer -887,36€-). Son endettement est de l'ordre de 110 777,24 euros.
En effet, il y a lieu de considérer à l'instar du premier juge que dans la mesure où la compagne de M. [F] [I] perçoit une pension de retraite de 743,48 euros pour le mois d'avril 2022, celui-ci doit prendre en charge ses propres dépenses de charges courantes et de chauffage du logement dans lequel il réside, outre le paiement du loyer.
Il résulte de ces éléments que M. [F] [I] se trouve dans l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir, et qu'aucun élément ne permet de remettre en cause la bonne foi du débiteur.
Il ressort des débats et des pièces produites que la situation financière de M. [F] [I] permet de dégager une capacité de remboursement mensuelle évaluée à hauteur de 868,46 euros.
Dès lors, il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé sa capacité de remboursement à hauteur de 1297,11 euros.
2) sur la fixation du montant des créances
En vertu de l'article L. 733-12 alinéa 3 du code de la consommation, il convient de s'assurer de la validité et du montant des titres de créance.
Au vu des renseignements recueillis par la commission et le premier juge, ainsi que des courriers adressés par certains créanciers, il y a lieu de retenir les montants suivants :
3) sur les mesures de traitement de la situation de surendettement
L'article L.733-3 du code de la consommation précise que la durée totale du rééchelonnement ne peut excéder sept ans, à l'exception des prêts contractés lors d'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale, dans le but d'éviter la cession.
Il apparaît que compte tenu de l'importance de l'endettement, les mesures de traitement de la situation de surendettement définies par l'article L. 733-3 du code de la consommation sont insuffisantes.
Or, si la situation le permet, la commission recommande tout ou partie des mesures prévues à l'article L. 733-1 du code de la consommation. Si les débiteurs demeurent insolvables, elle recommande par une proposition spéciale et motivée, l'effacement partiel des créances, éventuellement combiné avec les mesures de l'article L. 733-1, en application des dispositions de l'article L.733-7 (2°).
Dans le contexte personnel et financier évoqué, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.733-7, 2°, du même code, en effaçant partiellement certaines créances à l'issue du rééchelonnement qui sera prévu sur la durée maximale de 84 mois. En outre, la réduction des taux d'intérêts à zéro s'impose afin de permettre l'apurement des créances en leur principal et le redressement de la situation financière de M. [F] [I].
La capacité de remboursement, sera répartie entre tous les créanciers, en prenant notamment en considération l'ancienneté de la créance, la connaissance que pouvait avoir chacun des prêteurs, lors de la conclusion des contrats, de la situation de surendettement de M. [F] [I], de la nature des différentes créances et de la volonté de conciliation de chacun des créanciers.
Il convient de se reporter au dispositif du présent jugement pour les modalités de répartition de la capacité de remboursement.
Pour permettre la réalisation de la présente décision, il convient de suspendre toutes les voies d'exécution en cours et de rappeler qu'aucune nouvelle mesure d'exécution ne pourra être mise en 'uvre.
Pendant l'exécution des mesures de redressement, il ne sera pas permis à M. [F] [I] de contracter de nouvelles dettes, ni d'accomplir des actes de dispositions relatifs au patrimoine, sous peine de déchéance des dispositions de la présente décision.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant en audience publique et par arrêt réputé contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
INFIRME partiellement le jugement déféré en ce qu'il a fixé la capacité de remboursement de M. [F] [I] à hauteur de 1 297,11 euros et établi un plan de rééchelonnement sur cette base,
Et statuant à nouveau,
FIXE la capacité de remboursement de M. [F] [I] à 868,46 euros,
FIXE comme suit le montant des dettes
:
DIT que M. [F] [I] s'acquittera de ses dettes selon les modalités suivantes :
:
PRONONCE l'effacement partiel des créances à hauteur de la somme restant due après le délai d'exécution du présent plan, soit 84 mois,
DIT que les premiers versements devront intervenir avant le 15 de chaque mois et pour la première fois le 15 du mois suivant la notification du présent arrêt avec un taux d'intérêts à zéro,
DIT qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité et après une mise en demeure restée infructueuse, la totalité de la dette deviendra exigible selon les stipulations contractuelles,
DIT que les débiteurs sont tenus de :
- d'affecter entièrement toute augmentation de ressources au paiement des dettes dans les proportions définies par le plan,
- de s'abstenir jusqu'à la fin du règlement des dettes visées par le présent arrêt d'effectuer des actes qui aggraveraient sa situation financière et notamment de recourir à un nouvel emprunt ou achat à crédit,
- de ne pas exécuter d'actes de disposition étrangers à la gestion normale de son patrimoine,
RAPPELLE que le présente décision s'impose tant aux créanciers qu'au débiteur, et qu'ainsi toutes autres modalités de paiement, tant amiables que forcées, sont suspendues pendant l'exécution de ce plan,
DIT qu'en cas de retour à meilleure fortune, M. [F] [I] devra saisir impérativement la commission de surendettement,
DIT qu'en cas de changement significatif de situation nécessitant une révision des mesures ordonnées, le débiteur pourra déposer, à tout moment, un nouveau dossier,
CONFIRME le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
LAISSE les dépens à la charge du Trésor Public.
Le présent arrêt a été signé par M. Francis MARTIN, Président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par M. ADJAL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Minute en huit pages.