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25/05/2022 | FRANCE | N°21/00859

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 25 mai 2022, 21/00859


ARRÊT N° /2022

PH



DU 25 MAI 2022



N° RG 21/00859 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EX3K







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

18/00501

12 mars 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANT :



Monsieur [Z] [R]

[Adresse 2]

[A

dresse 2]

Représenté par Me Anne GRANDIDIER, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉE :



S.A.S. LA MACHINE A VAPEUR , immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de NANCY sous le numéro 793 411 828, représentée par son Président en exercice pour ce domicilié audit siège.

[Adresse 1]

[Adresse 1] / FRANCE...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 25 MAI 2022

N° RG 21/00859 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EX3K

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

18/00501

12 mars 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANT :

Monsieur [Z] [R]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Anne GRANDIDIER, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S. LA MACHINE A VAPEUR , immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de NANCY sous le numéro 793 411 828, représentée par son Président en exercice pour ce domicilié audit siège.

[Adresse 1]

[Adresse 1] / FRANCE

Représentée par Me Marine CHOLLET de la SELARL FRÉDÉRIC VERRA ET MARINE CHOLLET, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : STANEK Stéphane,

[I] [G],

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 17 Mars 2022 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 12 Mai 2022 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 25 mai 2022;

Le 25 Mai 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Monsieur [Z] [R] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société LA MACHINE A VAPEUR, à compter du 01 août 2015, en qualité de serveur, classification Employé, Niveau 1, Echelon 1 selon la convention nationale collective des Hôtels, Cafés, Restaurants qui s'applique au contrat.

A compter du 18 mai 2016, Monsieur [Z] [R] a été nommé Directeur Général de la société LA MACHINE A VAPEUR.

A compter du 26 septembre 2017, le contrat de travail a fait l'objet d'une rupture conventionnelle.

Par requête du 24 octobre 2018, Monsieur [Z] [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy, aux fins de paiements de rappels de salaires et indemnités afférentes, ainsi que de requalification de sa classification.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 12 mars 2021, lequel a :

- débouté Monsieur [Z] [R] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société LA MACHINE A VAPEUR,

- débouté la partie défenderesse de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les entiers dépens seront à la charge exclusive de Monsieur [Z] [R].

Vu l'appel formé par Monsieur [Z] [R] le 02 avril 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Monsieur [Z] [R] déposées sur le RPVA le 22 décembre 2021, et celles de a société LA MACHINE A VAPEUR déposées sur le RPVA 03 mars 2022,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 09 mars 2022,

Monsieur [Z] [R] demande :

- de dire et juger recevable et bien fondé son appel,

-en conséquence, d'infirmer le jugement rendu le 12 mars 2021 par le conseil de prud'hommes de Nancy en toutes ses dispositions,

- statuant à nouveau,

- à titre principal :

- de dire et juger que les fonctions exercées par Monsieur [R] au sein de la société LA MACHINE A VAPEUR justifient la reconnaissance à son égard d'une classification au niveau V échelon 3 de la convention collective des Hôtels, Cafés, Restaurants,

- en conséquence, de condamner la société LA MACHINE A VAPEUR à lui payer les sommes de :

- 55 622,26 euros bruts à titre de rappel de salaire sur la période d'août 2015 à septembre 2017 au regard des minimas attachés par la convention collective à cette classification,

-5 562,23 euros bruts au titre des congés payés sur ce rappel de salaires,

- à titre subsidiaire :

- de dire et juger que les fonctions exercées par Monsieur [R] au sein de la société LA MACHINE A VAPEUR justifient la reconnaissance à son égard a minima d'une classification au niveau V échelon 2 de la convention collective des Hôtels, Cafés, Restaurants,

- en conséquence, condamner la société LA MACHINE A VAPEUR à lui payer :

- 32 548,70 euros bruts à titre de rappel de salaires sur la période d'août 2015 à septembre 2017 au regard des minimas attachés par la convention collective à cette classification pour une durée du travail de 151,67 heures mensuelles,

- 3 254,87 euros bruts au titre de congés payés sur ce rappel de salaires,

- 36 444 euros bruts au titre des heures supplémentaires effectuées sur la période de novembre 2015 à mai 2017,

3 644,40 euros bruts au titre des congés payés sur les heures supplémentaires,

- en tout état de cause :

- de condamner la société LA MACHINE A VAPEUR à lui payer à une somme de 8 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'il a subi du fait du non-paiement des salaires qui lui étaient dus,

- d'ordonner la rectification du certificat de travail, des bulletins de salaire et de l'attestation PÔLE EMPLOI conformément à la décision à intervenir,

- de condamner la société LA MACHINE A VAPEUR à lui payer une somme de 4 000euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société LA MACHINE A VAPEUR aux entiers dépens de l'instance.

La société LA MACHINE A VAPEUR demande :

- de constater que la pièce 67 produite par Monsieur [Z] [R] a été établie et communiquée en violation du secret professionnel auquel était astreint Maître Nicolas SOUKATCHOFF, avocat,

- en conséquence, d'écarter des débats la pièce 67 produite par Monsieur [Z] [R],

- à titre principal,

- le conseil de prud'hommes de Nancy ayant omis de se prononcer sur ce moyen, de constater que Monsieur [Z] [R] n'a pas valablement dénoncé le reçu pour solde de tout compte signé par lui dans un délai de six mois,

- de constater que le reçu pour solde de tout compte est libératoire pour les sommes qui y sont mentionnées,

- de constater que le reçu pour solde de tout compte mentionne les « salaire », « indemnité de congés payés », « indemnité compensatrice de congés »,

- en conséquence, de déclarer que les demandes de rappel de salaires, d'heures supplémentaires et d'indemnités de congés payés présentées par Monsieur [Z] [R] irrecevables,

- à titre subsidiaire,

- de constater que Monsieur [Z] [R] a perçu l'ensemble de ses salaires pour les mois travaillés,

- de constater que Monsieur [Z] [R] n'a pas réalisé les heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées,

- de constater que Monsieur [Z] [R] était Directeur Général de la société,

- de constater que Monsieur [Z] [R] ne peut prétendre à aucune reclassification ni en Niveau V Echelon 3 à titre principal, ni en Niveau V Echelon 2 à titre subsidiaire,

- en conséquence de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy en date du 12 mars 2021 en ce qu'il a :

- débouté Monsieur [Z] [R] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société LA MACHINE A VAPEUR,

- dit que les entiers dépens seront à la charge exclusive de Monsieur [Z] [R],

- en tout état de cause,

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy en date du 12 mars 2021 en ce qu'il a :

- débouté Monsieur [Z] [R] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société LA MACHINE A VAPEUR,

- dit que les entiers dépens seront à la charge exclusive de Monsieur [Z] [R],

- de débouter Monsieur [Z] [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- de condamner Monsieur [Z] [R] à verser à la société LA MACHINE A VAPEUR la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- de le condamner aux dépens.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant de l'employeur le 03 mars 2022, et en ce qui concerne le salarié le 22 décembre 2021.

Sur demande d'écarter la pièce 67 de M. [Z] [R]

La société LA MACHINE A VAPEUR estime que l'attestation produite en pièce 67 par l'appelant, et rédigée par Maître [U], avocat, et faisant état des travaux qu'il a préparé pour la société, concernant M. [Z] [R], a été établie en violation du secret professionnel.

M. [Z] [R] estime que la cour n'a pas compétence pour retenir une violation du secret professionnel, faisant valoir qu'il appartenait le cas échéant à l'intimée de saisir la juridiction pénale pour faire reconnaître l'infraction ou le Bâtonnier de l'ordre pour faire sanctionner la violation alléguée de l'obligation déontologique.

Aux termes de l'article 4 du décret du 12 juillet 2005 relatif à la déontologie des avocats, "Sous réserve des strictes exigences de sa propre défense, devant toute juridiction et des cas de déclaration ou de révélation prévues ou autorisées par la loi, l'avocat ne commet, en toute matière, aucune divulgation contrevenant au secret professionnel'.

Le règlement intérieur national (RIN) de la profession d'avocat, en son article 2, dispose :

« 2.1 L'avocat est le confident nécessaire du client. Le secret professionnel de l'avocat est d'ordre public. Il est général, absolu et illimité dans le temps. Sous réserve des strictes exigences de sa propre défense devant toute juridiction et des cas de déclaration ou de révélation prévues ou autorisées par la loi, l'avocat ne commet, en toute matière, aucune divulgation contrevenant au secret professionnel.

2.2 Etendue du secret professionnel :

Le secret professionnel couvre en toutes matières, dans le domaine du conseil ou celui

de la défense, et quels qu'en soient les supports, matériels ou immatériels (papier,

télécopie, voie électronique...) :

- les consultations adressée par un avocat à son client ou destinées à celui-ci ;

- les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses

confrères, à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention officielle ;

- les notes d'entretien et plus généralement toutes les pièces du dossier, toutes les

informations et confidences reçues par l'avocat dans l'exercice de la profession ».

Il n'est pas contesté que l'attestation litigieuse émane de l'avocat qui a travaillé sur un protocole d'accord entre le salarié et la société, et fait état d'informations reçues à cette occasion.

Cette pièce sera donc écartée des débats comme ne respectant pas le secret professionnel.

Sur la recevabilité des demandes de l'appelant

La société LA MACHINE A VAPEUR estime que M. [Z] [R] n'ayant pas dénoncé dans les six mois son reçu pour solde de tout compte, il ne peut réclamer de rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires, ni au titre d'une requalification.

Elle soutient que le reçu de l'espèce est libératoire pour toutes les sommes prévues à titre de salaire, et conteste qu'il porte la mention « salaire pour le mois de septembre 2017 ».

M. [Z] [R] fait valoir avoir dénoncé le reçu pour solde de tout compte, par courrier du 22 décembre 2017. Il ajoute l'avoir dénoncé oralement lors de l'assemblée générale de la société le 22 décembre 2017.

Il indique par ailleurs que les sommes qu'il réclame ne sont pas visées par le solde de tout compte, ce dernier précisant qu'il « devient libératoire pour l'employeur pour les sommes mentionnées sur mon dernier bulletin de salaire » c'est-à-dire celui de septembre 2017.

Il résulte des dispositions de l'article R1234-8 du code du travail que le reçu pour solde de tout compte doit être dénoncé par lettre recommandée.

L'article L1234-20 du même code dispose que le solde de tout compte, établi par l'employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l'inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail.

Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délia au-delà duquel il devient libératoire pour l'employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.

En l'espèce, le reçu pour solde de tout compte, produit en pièce 19 par l'intimée, indique :

« (') Je soussigné Monsieur [R] [O] (')

reconnais avoir reçu de LA MACHINE A VAPEUR la somme de 2380, 32 euros (').

Cette somme m'est versée, pour solde de tout compte, en paiement des salaires, accessoires du salaire, remboursements de frais et indemnités de toute nature dus au titre de l'exécution et de la cessation de mon contrat de travail.

Le détail des sommes versées lors de la rupture de mon contrat de travail se décompose comme suit : (')

[suivent deux tableaux indiquant des sommes au titre de :

salaire

indemnité compensatrice repas

déduction Entrée/Sortie (heures)

absence congés payés

congés payés 01/09/17 au 26/09/17

indemnité congés payés

indemnité compens. congés payés

solde 15 j au 26/09/2017

ind. Rupture conv. non soumise]

En application de l'article L1234-20 du code du travail, ce reçu peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature. Passé ce délai, ce reçu devient libératoire pour l'employeur pour les sommes mentionnées sur mon dernier bulletin de salaire. (...) »

Il résulte des dispositions du code du travail précitées et des mentions portées sur le reçu pour solde de tout compte que ce dernier n'a d'effet libératoire que pour les sommes qu'il liste, sous réserve qu'elles soient reprises dans le dernier bulletin de paie.

Il résulte des conclusions des parties que ce bulletin de paie est celui de septembre 2017 ; il est produit en pièce 14 par M. [Z] [R] ; il comprend les intitulés et les sommes au titre de ces rubriques, indiqués dans le reçu pour solde de tout compte.

Ce dernier est donc libératoire pour les sommes qu'il mentionne.

M. [Z] [R] forme des demandes de rappels de salaire au titre d'heures supplémentaires et au titre d'une requalification,

Aucune somme n'étant mentionnée à ces titres par le reçu, les demandes de M. [Z] [R] sont recevables.

Sur la requalification

M. [Z] [R] demande une classification niveau V échelon 2, si la cour estime qu'il n'avait à assumer que des fonctions visant à participer à l'organisation de l'établissement, sans que ne lui soient dévolues ni large autonomie, ni prise de décisions, ni responsabilités propres ; s'il était placé sous le contrôle et l'encadrement permanent d'une personne de niveau supérieur.

Il demande une classification au niveau V échelon 3 si la cour estime qu'il disposait d'une autonomie et de responsabilités réelles.

M. [Z] [R] indique avoir été embauché pour gérer et manager l'établissement, et pour ce faire s'est vu laisser par son employeur une autonomie quasi-totale.

Il conteste que ses attributions de gestion et de management auraient été accomplies au titre de son mandat social.

Il précise que les missions qu'il a accomplies en qualité de salarié sont celles tenant au management et à la gestion du fonctionnement courant de l'établissement ; qu'à compter du mois de mai 2016, il a accompli en plus des missions inhérentes à son mandat social de directeur général.

Il souligne que s'agissant des fonctions exercées en sa qualité de salarié, un lien de subordination était caractérisé à l'égard de M. [F].

Il fait valoir que pour pouvoir soutenir qu'il aurait assumé des missions de management et de gestion de l'établissement au titre de son mandat social de directeur général, et que son contrat de travail l'aurait cantonné à des attributions de serveur il aurait fallu à tout le moins qu'il occupe des fonctions de serveur à hauteur d'un temps plein de 35 heures par semaine, ce qui n'a jamais été le cas.

Il souligne qu'alors que ce n'est que le 18 mai 2016 qu'il est investi d'un mandat social, c'est depuis son embauche en août 2015 qu'il assumait les attributions de responsable de l'établissement.

M. [Z] [R] indique qu'avant d'intégrer la société LA MACHINE A VAPEUR il était lui-même chef d'une entreprise qu'il a créé en 2010 ; il souligne qu'il n'avait besoin dès lors d'aucune formation pour pouvoir assumer le rôle de responsable d'établissement.

L'appelant précise qu'il avait bien été décidé entre la société LA MACHINE A VAPEUR et lui-même d'adapter dès que possible sa classification et sa rémunération à l'emploi qui était réellement le sien.

La société LA MACHINE A VAPEUR conteste qu'elle aurait fait des promesses à M.[Z] [R] quant à sa classification et à sa rémunération.

Elle affirme qu'il ne travaillait pas aux mois d'octobre et novembre 2015, ni au mois de février 2016 ; que le fait qu'il se trouvait sur la péniche LA MACHINE A VAPEUR, aux moments concernés par les pièces 25 à 35 de l'appelant, ne démontre aucunement qu'il y travaillait; que le fait qu'il passait des commandes ne démontre pas qu'il se serait tenu à disposition de l'employeur.

L'intimée souligne que M. [Z] [R] réclame le paiement du mois de février 2016 alors qu'il n'a pas travaillé pendant ce mois.

Elle souligne également que réclamant le paiement de salaires du mois d'octobre 2015 au mois de février 2016, M. [Z] [R] a néanmoins approuvé les comptes en qualité d'associé le 31 décembre 2015.

En ce qui concerne la demande de reclassification, la société LA MACHINE A VAPEUR estime que M. [Z] [R] échoue à démontrer un lien de subordination concernant les prétendues fonctions de management et organisation du bon fonctionnement de la Péniche.

L'intimée affirme que M. [Z] [R] était rémunéré pour un poste qu'il n'assumait pas ; qu'il était souvent absent, et percevait néanmoins un salaire.

La société LA MACHINE A VAPEUR soutient que les missions de M. [Z] [R] de management et de gestion ont été assumées par lui à compter de mai 2016, en qualité de directeur général, de manière bénévole.

Elle indique que si M. [Z] [R] avait certaines relations avec le cabinet comptable, le président de la société en assumait également une partie.

La société LA MACHINE A VAPEUR affirme qu'il assumait ses tâches d'organisation en qualité de directeur général, et non dans un lien de subordination à l'égard de la société .

Il ressort des pièce 81 de M. [Z] [R] qu'entre novembre 2015 et mars 2016, soit avant qu'il ne soit investi d'un mandat social, ce dernier organisait des concerts dans l'établissement La Péniche, appartenant à l'intimée, se rend à un rendez-vous à la SACEM avec le Président de la société, dispose et détient le chéquier de l'établissement ; il ressort des pièces 82 de M. [Z] [R] que de janvier 2016 à mars 2016 il effectuait des commandes pour l'établissement ; qu'il ressort de sa pièce 83, qu'il a reçu un sms de mars 2016 signé [O] : « Nous avons RV à 16h30 à la [Adresse 3] ... » (mars 2016) ; ses pièces 86 et 87 sont des sms août 2015 relatifs à l'organisation de concerts pour La Péniche ; ses pièces 88 à 92 sont des sms pour la mise en commande d'affiches pour des manifestations à La Péniche entre novembre 2015 et février 2016.

Ces éléments ne justifient pas d'un emploi de simple serveur, mais d'un emploi de management de l'établissement La Péniche.

Il convient dès lors d'opérer la requalification de l'emploi.

La société LA MACHINE A VAPEUR reproduit dans ses conclusions les descriptifs, non contestés, du niveau V échelons 3 et 2, de la convention collective applicable.

Il résulte de leur lecture que les fonctions remplies par M. [Z] [R], telles que justifiées par les pièces précitées et exercées dès avant sa nomination aux fonctions de directeur général, correspondent à un niveau V échelon 2.

Les montants réclamés sur la requalification ne sont pas contestés à titre subsidiaire ; il sera donc fait droit à la demande de M. [Z] [R] à ce titre pour une classification au niveau 2, soit 32 548,70 euros, outre 3254,87 euros à titre d'indemnité de congés payés afférents.

Sur la demande au titre d'heures supplémentaires

M. [Z] [R] indique produire en pièces 11 et 13 la copie de ses agendas électroniques, et en pièces 10 et 12, des tableaux reprenant jour après jour ses heures d'arrivée et de départ sur son lieu de travail.

Il indique produire des attestations de salariés qui confirment que c'est lui qui procédait à la désactivation et à l'activation de l'alarme de l'établissement. Il précise également avoir corrigé ses calculs d'heures supplémentaires en prenant en compte les relevés d'activation et désactivation de l'alarme produit par l'employeur, ce qui a abouti à un différentiel de 13 heures selon ses écritures.

La société LA MACHINE A VAPEUR fait valoir que le propre agenda électronique que M. [Z] [R] fait apparaître une absence d'activité ou des activités dont on ignore le lien avec l'entreprise; elle ajoute que les heures d'activation et de désactivation de l'alarme ne sauraient permettre de démontrer qu'il effectuait des heures supplémentaires; que bien que chargé de transmettre les heures effectuées par les salariés de l'établissement et lui-même, il n'a jamais fait état d'heures supplémentaires; elle souligne qu'il ne produit aucun élément pour 2015, alors qu'il réclame le paiement d'heures supplémentaires pour cette année; elle met en avant les heures d'activation et de désactivation de l'alarme de la Péniche sur certains jours pour contester les heures de travail alléguées; elle note que plusieurs personnes pouvaient procéder à l'activation et la désactivation de l'alarme; elle fait état d'attestations pour indiquer que M. [Z] [R] n'était que peu présent sur la Péniche; elle liste également une série de dates d'absence de M. [Z] [R] pour jouer avec son groupe de musique; elle souligne des contradictions entre les écritures de M. [Z] [R] et les tableaux de ce dernier en pièce 63.

L'article L. 3171-4 du code du travail dispose qu' 'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction '.

Il ressort de cette règle que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties mais que le salarié doit appuyer sa demande en paiement d'heures supplémentaires par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

M. [Z] [R] produit en pièces 10 et 12 ses «feuilles de présence » pour 2016 et 2017 ; ces tableaux indiquent ses horaires de prise de poste et de fin de travail. Il ne produit pas de tel tableau pour 2015.

Le seul tableau produit pour 2015 se trouve en pièce 66 ; il s'agit de tableaux intitulés « horaires badgés ' alarme VERISURE (d'après pièce adverse n°12) ». Ils n'indiquent donc que les heures de désactivation et d'activation de l'alarme, et non les horaires effectués par M.[Z] [R].

Au vu de ces éléments, M. [Z] [R] verse aux débats des éléments suffisamment précis pour 2016 et 2017 permettant à l'employeur de répondre.

Il ne produit pas d'éléments suffisamment précis pour 2015 ; il sera donc débouté de ses demandes pour cette année.

S'agissant de la liste des journées pendant lesquelles le salarié ne travaillait pas selon la société LA MACHINE A VAPEUR, il convient de constater que les dates ne sont pas travaillées dans les pièces 10 et 12 du salarié; pour la journée du mardi 09 mai 2017, le sms en pièce 56 par lequel M. [Z] [R] annonce à 10 h36 qu'il part pour [Localité 4] ne démontre pas qu'il n'aurait pu être présent sur la Péniche à partir de 16h00 comme l'indique son tableau en pièce 12.

Les contestations de la société LA MACHINE A VAPEUR qu'elle appuie par ses relevés d'activation et désactivation de l'alarme soit ne correspondent pas à ce que soutient M. [Z] [R] au travers de ses tableaux horaires (par exemple, pour le 1er août 2016, la société LA MACHINE A VAPEUR explique que M. [Z] [R] indique avoir travaillé de 5h58 à 22h00, alors que le tableau du salarié en pièce 10 il indique avoir travaillé de 08h00 à 16h00 ; pour le 12 octobre 2016, la société LA MACHINE A VAPEUR indique que le salarié soutient avoir travaillé de 09h19 à 21h01, alors que selon la pièce 10 de M. [Z] [R], ce dernier a travaillé de 17h00 à 03h00), soit repose sur l'existence de plusieurs « utilisateurs » de l'alarme (utilisateur 0, utilisateur 3, utilisateur 5 ') en soulignant que sur une même journée il peut y avoir plusieurs ouvertures et fermetures par différents utilisateurs, mais sans identifier ces derniers.

La société LA MACHINE A VAPEUR conteste également les indications de tableaux en pièce 63 du salarié, alors que celui-ci renvoie dans ses écritures à ses tableaux en pièces 10 et 12.

L'employeur ne produit donc aucun élément permettant de contester les horaires présentés par le salarié.

La société LA MACHINE A VAPEUR ne discute pas du montant des sommes réclamées par M. [Z] [R], calculées sur la base du niveau V échelon 2, avec un taux horaire variant selon la période, les éléments de calculs étant précisés en page 53 de ses conclusions.

Dans ces conditions, il sera fait droit à la demande au titre des heures supplémentaires pour 2016 et 2017 à hauteur de ce qui est réclamé selon les pièces 10 et 12 précitées, soit 24 481,45 euros, outre l'indemnité de congés payés afférents.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non-paiement des salaires dus

M. [Z] [R] explique ne pas avoir été payé de ses salaires, même sur la classification niveau I échelon 1, d'octobre 2015 à février 2016, hormis 1000 euros le 03 février 2016 ; qu'il a été contraint de souscrire un prêt de 5000 euros le 15 décembre 2015. Il ajoute que le salaire de niveau I échelon 1 l'a privé pendant deux ans de vivre selon le niveau de vie auquel il aurait pu prétendre.

M. [Z] [R] précise que le prêt souscrit lui coûtera 5192,16 euros.

M. [Z] [R] souligne que ce ne sont que quelques journées de concert qui ont eu lieu entre novembre 2015 et février 2016 ; il renvoie à ses pièces 81 et 82 pour démontrer qu'il travaillait à la Péniche.

La société LA MACHINE A VAPEUR renvoie à ses explications quant aux salaires d'octobre 2015 à février 2016.

Elle soutient qu'il était absent en octobre et novembre 2015 ; qu'en décembre 2015 aucun versement n'a été effectué car il avait déjà perçu un acompte de 1200 euros ; que le salaire de janvier 2016 lui a été réglé par chèque débité le 03 février 2016.

Elle indique qu'il a approuvé les comptes de la société le 18 mai 2016, et fait valoir qu'il était en vacances à l'étranger le 18 avril 2016 et en novembre 2016.

Elle fait valoir des dates de concert entre le 18 novembre 2015 et le 11 mars 2016, dates auxquelles M. [Z] [R] était absent.

Il résulte des éléments du dossier mis en avant par les parties que :

- la société LA MACHINE A VAPEUR ne justifie pas par un document de contrôle de présence ou de tout autre document, d'autorisation d'absence ou de congés, que M. [Z] [R] n'aurait pas travaillé d'octobre 2015 à février 2016

- que la société LA MACHINE A VAPEUR fait valoir dix dates de concert du groupe de musique de M. [Z] [R], du 18 novembre 2015 au 11 mars 2016

- par ses pièces 81 et 82 (sms échangés avec M. [W] [H], ancien président de la société, et la société REGA) M. [Z] [R] avait un rendez-vous à la SACEM le 26 novembre 2015 avec M. [H], et qu'il avait des rendez-vous professionnels à La Machine, et qu'entre janvier et février 2016 il a passé des commandes de boissons auprès de la société REGA.

Il convient dès lors d'en conclure que, hormis sur certaines dates de concert, M. [Z] [R] était en situation de travail auprès de la société LA MACHINE A VAPEUR.

Le non-paiement de salaire sur cette période n'est pas contesté.

Il n'y pas de demande de paiement de salaire pour cette période.

M. [Z] [R] renvoie à sa pièce 14 pour justifier des intérêts de son prêt de 5000 euros ; sa pièce 14 regroupe ses bulletins de paie. Son bordereau de pièces ne mentionne pas de prêt. Il ne justifie donc pas de cet emprunt et de ses intérêts.

Compte tenu de ces éléments, le préjudice sera estimé à 500 euros, pour privation de salaire pendant 5 mois. La société LA MACHINE A VAPEUR sera condamnée à lui payer ce montant.

Sur la demande de rectification de l'attestation Pôle Emploi et des bulletins de salaire

Il sera fait droit à la demande de documents rectifiés en fonction du présent arrêt.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société LA MACHINE A VAPEUR sera condamnée aux dépens, ainsi qu'à payer à M. [Z] [R] 1500 euros sur le fondement de l'article 700.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Ecarte des débats la pièce 67 de M. [Z] [R] ;

Dit que les demandes de M. [Z] [R] sont recevables ;

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy le 12 mars 2021 ;

Statuant à nouveau,

Dit que les fonctions exercées par Monsieur [R] au sein de la société LA MACHINE A VAPEUR sont classifiées au niveau V échelon 2 de la convention collective des Hôtels, Cafés, Restaurants ;

Condamne la société LA MACHINE A VAPEUR à payer à M. [Z] [R] :

- 32 548,70 euros (trente deux mille cinq cent quarante huit euros et soixante dix centimes) au titre de la requalification du poste ;

- 3254,87 euros (trois mille deux cent cinquante quatre euros et quatre vingt sept centimes) à titre d'indemnité de congés payés afférents ;

- 24 481,45 euros (vingt quatre mille quatre cent quatre vingt un euros et quarante cinq centimes) au titre des heures supplémentaires ;

- 2 448,14 euros (deux mille quatre cent quarante huit euros et quatorze centimes) au titre de l'indemnité de congés payés afférents ;

- 500 euros (cinq cents euros) à titre de dommages et intérêts ;

Condamne la société LA MACHINE A VAPEUR à remettre à M. [Z] [R] les bulletins de salaire, le certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi rectifiés, conformément au présent arrêt ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Y ajoutant,

Condamne la société LA MACHINE A VAPEUR à payer à M. [Z] [R] 2000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société LA MACHINE A VAPEUR aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en treize pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/00859
Date de la décision : 25/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-25;21.00859 ?
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