La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/05/2022 | FRANCE | N°21/00495

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 19 mai 2022, 21/00495


ARRÊT N° /2022

PH



DU 19 MAI 2022



N° RG 21/00495 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXDB







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

19/00431

09 février 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANT :



Monsieur [T] [S]

[Adresse 1]
r>[Localité 2]

Représenté par Me Sophie CORNU de la SELARL GRAND EST AVOCATS, avocat au barreau de NANCY





INTIMÉE :



S.A.S. BUFFALO GRILL prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Patrice BUISSON de la SCP BUISSON BRODIEZ, avoca...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 19 MAI 2022

N° RG 21/00495 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXDB

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

19/00431

09 février 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANT :

Monsieur [T] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Sophie CORNU de la SELARL GRAND EST AVOCATS, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.S. BUFFALO GRILL prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Patrice BUISSON de la SCP BUISSON BRODIEZ, avocat au barreau de NANCY substitué par Me BOUCHEZ, avocate au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : STANEK Stéphane,

WILLM Anne-Sophie,

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 03 Mars 2022 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 05 Mai 2022 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 12Mai 2022 puis au 19 mai 2022;

Le 19 Mai 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

M. [T] [S] a été engagé par la société BUFFALO GRILL suivant contrat à durée déterminée, à compter du 27 décembre 2020, en qualité de serveur.

Les relations contractuelles se sont poursuivies suivant contrat à durée indéterminée à compter du 13 janvier 2001.

M. [T] [S] occupait, en dernier lieu, le poste de directeur d'exploitation France et international, statut cadre dirigeant.

Il a été placé en dispense d'activité rémunérée à compter du 14 mai 2019.

Par courrier du 29 mai 2019, il a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 11 juin 2019.

Par courrier du 22 juin 2019, il a été licencié pour faute grave, son employeur lui reprochant une opposition à mettre en 'uvre la stratégie de l'entreprise et une sous-performance économique de la société liée à ses mauvais résultats.

Par requête du 9 octobre 2019, M. [T] [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy aux fins de voir dire son licenciement nul motif pris du harcèlement moral subi, ou, à titre subsidiaire, sans cause réelle et sérieuse et obtenir, en conséquence, diverses indemnités.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 9 février 2021, lequel a :

- dit que les faits allégués par M. [T] [S] à l'appui de sa demande en nullité de son licenciement ne permettent pas pris ensemble de présumer de l'existence du harcèlement moral qu'il invoque,

- débouté en conséquence M. [T] [S] de sa demande en nullité de son licenciement et de ses demandes indemnitaires subséquentes,

- débouté se faisant M. [T] [S] de sa demande en dommages et intérêts pour préjudice distinct,

- dit que le licenciement de M. [T] [S] ne repose pas sur faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et en conséquence,

- condamné la société BUFFALO GRILL à payer à M. [T] [S] les sommes suivantes :

- 50 808 euros bruts à titre d'indemnité de préavis,

- 5 080 euros brut à titre de congés payés afférents,

- 90 310 euros net d'indemnité de licenciement,

- dit que ces condamnations portent intérêts au taux légal à compter du jour de la demande,

- débouté M. [T] [S] de sa demande en préjudice distinct,

- ordonné à la société BUFFALO RILL de remettre à M. [T] [S] un bulletin de salaire, un certificat de travail et une attestation pôle emploi rectifiée, et ce sous astreinte de 50 euros par document et par jour de retard, passé le délai de 15 jours de la notification de la présente décision,

- rappelé que le présent jugement est exécutoire de droit comme dit à l'article R. 1454-28 du code du travail dans la limite de neuf mois de salaires étant précisé que la moyenne des salaries calculée sur les trois derniers mois est de 14 882 euros,

- condamné la société BUFFALO GRILL à payer à M. [T] [S] une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société BUFFLAO GRILL qui succombe, en sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BUFFALO GRILL aux entiers dépens,

Vu l'appel formé par M. [T] [S] le 24 février 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de M. [T] [S] déposées sur le RPVA le 21 avril 2021 et celles de la société BUFFALO GRILL déposées sur le RPVA le 20 juillet 2021,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 12 janvier 2022,

M. [T] [S] demande :

- d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy du 9 février 2021, en ce qu'il a :

- dit que les faits allégués à l'appui de sa demande en nullité de son licenciement ne permettent pas pris ensemble de présumer de l'existence du harcèlement moral qu'il invoque,

- l'a débouté en conséquence de sa demande en nullité de son licenciement et de ses demandes indemnitaires subséquentes,

- l'a débouté ce faisant de sa demande en dommages et intérêts pour préjudice distinct,

- dit que son licenciement ne repose pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et en conséquence,

- condamné la société BUFFALO GRILL à lui payer les sommes suivantes :

- 50 808 euros brut à titre d'indemnité de préavis,

- 5 080 euros brut à titre de congés payés y afférents,

- 90 310 euros net d'indemnité de licenciement,

- l'a débouté de sa demande en préjudice distinct,

Statuant à nouveau :

A titre principal :

- de dire son licenciement nul car consécutif à des agissements de harcèlement moral,

En conséquence,

- de condamner la société BUFFALO GRILL à lui verser les sommes suivantes :

- 610 000 euros net à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

- 50 000 euros net de dommages et intérêts pour préjudice distinct,

A titre subsidiaire et infiniment subsidiaire :

- de dire son licenciement abusif car non fondé sur une cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- de condamner la société BUFFALO GRILL à lui verser les sommes suivantes :

- 245 500 euros nets a titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 50 000 euros nets de dommages et intérêts pour préjudice distinct,

En toutes hypothèses :

- de condamner la société SAS BUFFALO GRILL à lui verser les sommes suivantes :

- 50 808 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 5 080 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

- 90 310 euros net à titre d'indemnité de licenciement,

- d'ordonner à la société BUFFALO GRILL de lui remettre une attestation pôle emploi rectifiée et un bulletin de salaire récapitulatif conforme, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la signification de l'arrêt à intervenir.

- de se réserver le droit de liquider l'astreinte,

- d'ordonner le remboursement par la société BUFFALO GRILL des allocations chômages perçues par lui dans la limite de 6 mois,

- de condamner la société BUFFALO GRILL à lui verser la somme de 3 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

- de condamner la société BUFFALO GRILL aux entiers dépens.

*

La société BUFFALO GRILL demande :

A titre principal,

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 9 février 2021 en ce qu'il a jugé que le licenciement de M. [T] [S] ne reposait pas sur une faute grave,

- de juge que le licenciement de M. [T] [S] repose sur une faute grave,

- de débouter M. [T] [S] de l'ensemble de ses demandes,

- d'ordonner le remboursement par M. [T] [S] des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire du jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Nancy du 9 février 2021,

A titre subsidiaire,

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes du 9 février 2021 en ce qu'il a jugé que le licenciement de M. [T] [S] reposait sur une cause réelle et sérieuse,

A titre infiniment subsidiaire,

- de juger que M. [T] [S] ne justifie pas de son préjudice et du quantum de sa demande indemnitaire,

- de ramener à de plus justes proportions sa demande indemnitaire,

En tout état de cause,

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a jugé que M. [T] [S] n'avait pas été victime de harcèlement moral,

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a débouté M. [T] [S] de ses demandes au titre d'un prétendu licenciement nul,

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a débouté M.[T] [S] de ses demandes au titre d'un prétendu préjudice distinct,

- de condamner M. [T] [S] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures de M. [T] [S] déposées sur le RPVA le 21 avril 2021, et aux dernières écritures de la société BUFFALO GRILL déposées sur le RPVA le 20 juillet 2021.

Sur le harcèlement moral :

Monsieur [T] [S] fait valoir qu'il a été victime de harcèlement moral de la part de son employeur, ce que ce dernier conteste.

Monsieur [T] [S] indique qu'avec le changement de direction intervenu en avril 2018 et la prise de la présidence du directoire par Monsieur [L], sa situation, auparavant très favorable, a changé.

Il fait ainsi valoir que fin 2018, il a été écarté du « board » par Monsieur [L], instance où se prennent les décisions stratégiques.

Il fait également valoir que Monsieur [L] lui a annoncé par une note de service, à sa complète surprise, le 14 mai 2019, son départ prochain de l'entreprise et dans la foulée, l'a dispensé d'activité, sans motif, sans durée indiquée et sans qu'il puisse se défendre.

Monsieur [T] [S] fait valoir que la brutalité de ces décisions, alors qu'il s'est totalement investi dans l'entreprise depuis vingt ans, a provoqué une dépression durable et que des anxiolitiques et des somnifères ont dû lui être prescrits.

Sa santé mentale s'est encore dégradée lorsqu'il a appris « par une note interne » datée du 21 juin 2019 son licenciement, avant même que celui-ci lui fût notifié.

Il produit une note datée du 21 juin 2019 par laquelle Monsieur [T] [S] annonce que Monsieur [L] a quitté ses fonctions au sein de l'entreprise (pièce n° 17) et la lettre de notification de son licenciement datée du 22 juin 2019 (pièce n°20).

Il produit une ordonnance de son médecin traitant du 24 mai 2019 lui prescrivant un anxiolitique et un somnifère (pièce n° 23). Il produit également les attestations de proches et de membres de sa famille faisant état de sa détresse morale à la suite de sa mise à l'écart (pièces n° 24 à 31 et pièces n°61 et 62).

Il fait également valoir qu'entre la date de sa dispense d'activité et le 21 juin, son employeur a tenté de profiter de son affaiblissement psychologique en cherchant à lui faire accepter des conditions de sortie très défavorables, à savoir la proposition de reprise d'un restaurant en franchise nécessitant un investissement financier très important, puis les sommes de 100 000 euros, 200 000 euros et 250 000 euros.

Monsieur [T] [S] indique que c'est en raison de son absence de réponse positive que Monsieur [L] a décidé de le licencier pour faute grave.

Il produit le compte-rendu de l'entretien préalable au licenciement rédigé par le délégué syndical l'y ayant assisté. Il en ressort que Monsieur [L] indique « qu'il aurait aimé trouver un autre terrain d'entente qu'un entretien préalable au licenciement ».

Il produit également l'attestation de son épouse indiquant qu'il lui a fait part des propositions de transaction de la part de la société (pièce n° 61).

Il fait valoir qu'en raison du harcèlement moral ainsi subi, son licenciement est nul.

L'employeur nie tout fait de harcèlement, indique que Monsieur [T] [S] n'a jamais été exclu du « board » avant son licenciement, qu'il ne lui a jamais fait de propositions de reprise d'un restaurant franchisé ou de sommes d'argent ; il confirme en revanche qu'à partir du 14 mai 2019, il l'a dispensé d'activité tout en le rémunérant.

Motivation :

L'article L1152-1 du code du travail dispose :

« Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

L'article L1154-1 du code du travail dispose quant à lui :

« Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

- sur l'exclusion du « board » :

Le salarié ne produisant aucune pièce confirmant son exclusion du « board » fin 2018, la cour constate que ce fait n'est pas matériellement établi.

- Sur les propositions de transaction :

S'agissant des propositions de transaction qui auraient été faites à Monsieur [T] [S] pour qu'il quitte l'entreprise, l'employeur indique qu'elles n'ont pas existé.

Monsieur [T] [S] ne produit aucun document écrit, provenant notamment de l'employeur, faisant état des propositions de reprise d'un restaurant en franchise ou de sommes d'argent qui lui auraient été faites. Le seul témoignage de son épouse, qui ne fait que retranscrire ce que son époux lui a dit à ce propos, est insuffisant pour démontrer la réalité de ces offres. La cour constate donc que ce fait n'est pas matériellement établi.

- Sur la dispense d'activité, sans perte de rémunération, à partir du 14 mai 2019 :

L'employeur ne conteste pas avoir pris cette décision.

- Sur la note de service du 21 juin 2019 :

L'employeur fait valoir que la date du 21 juin a été indiquée par erreur et que le mail auquel était attaché la note a en fait été envoyé à ses destinataires le 24 juin, postérieurement au licenciement.

L'employeur produit le courrier auquel est attachée la note, dont il ressort que ce courriel a été effectivement adressé au personnel postérieurement au licenciement, ce que ne dément pas Monsieur [T] [S].

Au vue de ces éléments, la cour constate qu'un seul des faits présentés par le salarié est matériellement établi. Dès lors que le harcèlement moral consiste en des faits répétés, la cour constate que le harcèlement moral ne peut être même présumé.

Le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé sur ce point.

Sur la nullité du licenciement :

Le salarié fait valoir qu'en raison du harcèlement moral qu'il dit avoir subi, son licenciement doit être frappé de nullité.

Motivation :

Le salarié n'ayant pas subi de harcèlement, il ne peut prétendre voir son licenciement déclaré nul sur cette base.

Le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé sur ce point.

A titre subsidiaire, sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse :

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :

« Nous faisons suite à l'entretien préalable que nous avons eu le 11 juin 2019 auquel vous vous êtes rendu assisté de Monsieur [D].

A cette occasion nous vous avons fait part des faits relevés à votre encontre et avons recueilli vos explications.

Malheureusement, celles-ci ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation de la situation et nous nous voyons contraints de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour faute grave, pour les motifs évoqués lors de cet entretien et ci-après exposés.

En votre qualité de Directeur Exploitation France et International au sein de BUFFALO GRILL, statut cadre dirigeant, il vous appartient d'accompagner chaque Direction d'Exploitation Régionale sur la montée en performance des régions et de faire vivre les valeurs de BUFFALO GRILL sur le réseau, conformément aux directives reçues du Directeur Général.

Or, vous avez adopté une attitude d'opposition à la mise en oeuvre de la stratégie de l'entreprise conduisant à un impact négatif sur les résultats.

I.Une opposition à mettre en oeuvre de la stratégie de l'entreprise

Compte tenu de vos fonctions et de votre niveau hiérarchique, il vous appartient en effet d'assurer l'application et le respect des orientations stratégiques mises en place au sein de la Société, et ainsi de permettre le développement de l'activité de la Société conformément aux directives du Directeur Général.

Nous vous rappelons que vos fonctions impliquent ainsi, outre des capacités d'organisation, un vrai sens des responsabilités et de la communication afin de porter un discours en cohérence avec la ligne arrêtée et présentée par la Direction.

Or, nous avons constaté depuis plusieurs mois, que vous adoptez une attitude d'opposition à la direction peu compatible avec les besoins et les exigences de votre poste et de votre niveau de responsabilités, notamment à l'égard de vos équipes.

Ainsi, le 27 mars dernier, vous avez adressé un mail à l'ensemble de vos équipes, sans même en référer à votre Directeur Général, les invitant à réaliser des économies drastiques sur les frais de fonctionnement de chaque plateforme, créant ainsi un climat délétère au sein de vos équipes et une incompréhension totale de ces dernières.

Pourtant, lors d'une réunion organisée par Monsieur [W] [L] qui a pris la parole devant vos équipes, accompagnée du Directeur financier et de vous-même, il a clairement insisté sur la nécessité d'utiliser l'intégralité des outils de transformation de l'entreprise en vue d'améliorer ses performances économiques, à savoir : le management (les Hommes), les ventes (les clients), les standard (la marque) et la gestion.

Le message clair à véhiculer auprès de vos équipes était celui de l'équilibre de ces 4 leviers et non celui d'un plan d'économie drastique qui devenait incompréhensible pour les managers du fait de son désalignement par rapport à la stratégie de la Direction générale.

Vous avez donc fait le choix délibéré de porter un message en contradiction avec les directives données, ce qui a un impact direct sur les équipes opérationnelles en générant de l'incompréhension et un manque d'adhésion de vos équipes à vos consignes.

Votre refus de suivre la nouvelle stratégie se traduit également dans le management de vos équipes puisque nous constatons que les routines mises en place dans le cadre de la nouvelle organisation ne sont pas respectées et qu'aucun sens n'est donné à vos équipes sur le projet. Malgré tous les moyens alloués à la Direction des Operations, sur lesquels vous avez été au demeurant consulté et que vous avez validé, et les process mis en place, nous constatons que vos équipes continuent à fonctionner en mode « pompier » et ne sont pas présents en tant qu'encadrant auprès des équipes.

La conséquence directe en est que les méthodes ne sont pas respectées, les outils sont mal exploités, ce qui s'est traduit par un impact direct sur les résultats.

Enfin, malgré cela, et dans le contexte financier critique dont vous aviez connaissance, à titre d'exemple significatif, vous avez pris la liberté d'allouer de manière discrétionnaire la somme de 200.000 euros de bonus ' non budgétée ' à vos équipes.

Vous avez d'ailleurs reconnu dans un mail en date du 11 mars dernier avoir commis une erreur sur ce point.

En définitive et au regard de la situation décrite préalablement, nous considérons que votre attitude générale traduisant clairement une opposition à mettre en oeuvre la stratégie portée par le Directeur Général est constitutive d'une faute grave.

II.Une sous-performance économique

Dans le cadre de vos missions, vous avez notamment la charge de développer l'activité des restaurants en succursale dont vous avez l'entière responsabilité.

Or, force est de constater que les résultats sont constamment à la baisse depuis deux ans.

Ainsi, sur l'exercice 2018, le bénéfice avant Intérêts, impôts, dépréciation et amortissement (EBITDA) a été clôturé à hauteur de 33,5 millions d'euros, soit 4,1 millions d'euros de moins que l'année précédente à périmètre constant (soit une baisse de 8%).

En outre, l'EBITDA est inférieur de 12 millions d'euros au budget prévisionnel, soit une baisse de 26%.

Pire, en 2019, sur les quatre mois glissants entre janvier et avril 2019, l'EBITDA a été évalué à 10,7 millions d'euros, soit 3,9 millions d'euros de moins que l'année précédente à périmètre constant (soit une baisse significative de 25%).

L'EBITDA est ainsi inférieur de 5 millions d'euros au budget prévisionnel, soit une baisse de 32%.

Ces mauvais résultats sont d'autant plus inquiétants, compte tenu des moyens investis et mis en oeuvre par la Société pour son développement.

En effet, près de 1.500.000 euros ont été investis dans la structure, les Operations ont été stratégiquement repositionnées au centre de l'activité de la société et les effectifs des structures de management intermédiaire au sein des plateformes régionales ont été quasiment multipliés par deux.

Vous avez d'ailleurs eu la possibilité de procéder au choix des chacun de DER sur lesquels vous deviez vous appuyer pour développer la stratégie de l'entreprise et vous avez validé les nominations de tous les Districts Managers.

Malgré les moyens exceptionnels qui vous ont été donnés, force est de constater la dégradation continue des résultats depuis maintenant 18 mois, sans aucune perspective d'amélioration à court terme.

Vous avez d'ailleurs reconnu à plusieurs reprises cet échec en matière de résultat, lequel est la conséquence de votre incapacité à tenir ce poste et à mettre en oeuvre la stratégie de l'entreprise.

Compte tenu de ces éléments, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave ».

L'employeur fait ainsi valoir deux griefs :

1) Sur le grief de l'opposition de Monsieur [T] [S] à mettre en oeuvre de la stratégie de l'entreprise :

- La société indique qu'en tant que Directeur Exploitation France et International, il devait assurer l'application et le respect des orientations stratégiques mises en place au sein de la société.

Elle fait valoir que pourtant Monsieur [T] [S] s'est opposé à la stratégie de la société en vue d'améliorer sa performance basée sur l'équilibre entre quatre piliers : « Le management (les hommes) ; les ventes (les clients) ; les standard (la marque) ; la gestion ».

Cette stratégie implique que « ces 4 axes ne devaient pas être déséquilibrés dans la mise en 'uvre de la politique de l'entreprise » ; la société indique que Monsieur [L] a ainsi posé comme principe que « Le message de l'entreprise n'est en aucun cas de mettre tout le poids du corps sur le P&L. Le message est de trouver le meilleur équilibre du carré et de concilier les exigences des 4 faces » (pièce n° 5 de l'intimée).

La société fait également valoir que « Les orientations stratégiques définies pour l'année 2018 ont d'ailleurs déjà mis l'accent sur la nécessité de « mettre les hommes au centre » : « une culture valorisant ses hommes, centrée sur la responsabilisation, la performance et le développement » (pièce n° 18 de l'intimée).

Il est reproché à Monsieur [T] [S] d'avoir négligé le pilier « management » en exigeant par un courriel du 27 mars 2019 que ses équipes réalisent « des économies drastiques sur les frais de fonctionnement de chaque plateforme, sans même en référer à son Directeur Général et en totale opposition avec ses orientations » (pièce n° 7 de l'intimée).

Ainsi, en ordonnant à ses équipes des coupes claires dans leurs budgets de fonctionnement, il a laissé s'installer un « climat délétère » en leur sein.

L'employeur nie avoir demandé à Monsieur [T] [S] de procéder à des réductions de dépenses drastiques, mais lui avoir demandé d'assurer une meilleure orientation des dépenses dans le cadre d'une « politique d'identification de zones de réduction budgétaire ».

- L'employeur reproche également à Monsieur [T] [S] de ne pas avoir pas respecter la mise en 'uvre des « routines » au sein de ses équipes. Celles-ci consistent « à définir les journées types du District Manager pour leur permettre d'accorder du temps au management de leurs équipes » ; « La création des District Manager allait de pair avec la mise en place des routines de travail dont l'objectif était de consacrer du temps aux établissements de son périmètre de stabiliser les équipes et de limiter le turn over » (pièces n° 5 et 18 de l'intimée).

Il fait valoir que Monsieur [T] [S] a refusé de suivre la nouvelle stratégie et de « donner du sens à ses équipes sur le projet de routines » ce qui a eu pour conséquence que ses District Managers ont continué à travailler dans l'urgence, délaissant leurs propres collaborateurs.

- L'employeur reproche aussi à Monsieur [T] [S] de ne pas avoir respecté les orientations stratégiques de la société en allouant des bonus « dans des proportions démesurées ». Ainsi, « malgré le contexte financier critique » il a alloué 200 000 euros en bonus à ses équipes, alors que seulement 120 000 euros avaient été budgétés (pièce n° 6 de l'intimée).

L'employeur indique que Monsieur [T] [S] a reconnu ce fait dans ces termes : « Pas d'excuses, je n'ai pas fait attention à ce que nous avions provisionné » (pièce n° 6 de l'intimée). Il fait valoir que ce fait est d'autant plus grave que Monsieur [T] [S] a été membre du « board » et a donc participé à la détermination du budget (pièces n° 14 à 17 de l'intimée).

Enfin, la société soutient l'absence de prescription du grief d'opposition à mettre en oeuvre de la stratégie de l'entreprise, faisant valoir la continuité dans le temps de ce refus, ce, jusqu'au licenciement.

Monsieur [T] [S] indique que la note du 21 juin 2019 transmise à l'ensemble des services annonçant son départ constitue un licenciement sans motif et donc sans cause réelle et sérieuse.

S'agissant des griefs énoncés dans la lettre de notification du licenciement du 22 juin 2019, il fait valoir qu'ils sont couverts par la prescription. Il fait également valoir que l'absence de mise à pied conservatoire ôte aux faits reprochés leur caractère de gravité et que le délai de quinze jours entre sa dispense d'activité et le déclenchement de la procédure de licenciement, ôte également aux faits leur caractère de gravité.

Il fait valoir le caractère imprécis des griefs exposés. Il fait également valoir que depuis l'accession de Monsieur [L] à la direction générale, son propre poste a été vidé de sa substance dans les derniers mois de leur collaboration, le nouveau modèle économique étant de de s'appuyer sur des franchises, plutôt que sur des succursales ; dès lors, les responsabilités du poste de directeur d'exploitation ne pouvaient qu'être réduites.

Sur le grief tiré de l'opposition à mettre en oeuvre la stratégie de l'entreprise, il le conteste.

Il produit l'attestation de Messieurs [O] et [K], directeurs de restaurants de l'enseigne (pièces n ° 32 et 41), de Monsieur [H], responsable des ressources humaines de la région Ouest de l'enseigne (pièce n° 43), de Madame [X], salariée au service exploitation (pièce n° 44), indiquant que Monsieur [T] [S] était loyal à la stratégie de la société et s'en faisait le porte-parole sans aucune restriction.

Le salarié produit également l'attestation de Monsieur [G], directeur d'exploitation régional dans la société, qui indique que Monsieur [T] [S] a toujours été loyal, « en phase avec la politique de l'entreprise », qu'il a toujours relayée auprès de ses équipes et qu'il n'a jamais exprimé la moindre opposition (pièce n° 54 de l'appelant).

Monsieur [T] [S] indique que Monsieur [G] a été amené à se rétracter sous la pression de la société, celle-ci conditionnant le rachat des actions de celui-là à cette rétractation (pièces n° 51 à 53). Cette promesse n'ayant pas été tenue, le témoin a accepté de lui laisser produire son attestation.

Monsieur [T] [S] fait également valoir ses diverses productions écrites internes dont il ressort qu'il était parfaitement en ligne avec la stratégie de l'entreprise (pièces n° 60 et 39).

S'agissant du grief relatif à son courriel du 19 mars 2019 appelant à des économies budgétaires adressé à ses quatre directeurs d'exploitation régionaux leur demandant des économies, il fait valoir qu'il est prescrit, les poursuites disciplinaires ayant été engagées à son encontre plus de deux mois après.

Sur le fond, il indique qu'il n'a fait que mettre en oeuvre les directives de sa direction lui demandant de réaliser des économies sur son périmètre (pièces n° 14 et 15).

S'agissant des « routines », il indique qu'il est lui-même à l'origine de leur élaboration (pièces n° 36 à 38) et qu'il a présenté le résultat de ces travaux à une réunion à laquelle a assisté Monsieur [L].

En outre, il fait valoir que ce dispositif n'a été mis en 'uvre qu'à partir de décembre 2018 et qu'il faut plusieurs mois pour qu'il porte pleinement ses fruits.

S'agissant des bonus d'un montant total de 200 000 euros, il soutient que ce fait est prescrit, en ce que si l'employeur avait estimé le 11 mars ou dans les jours qui ont suivi qu'il s'agissait d'une faute, il n'aurait pas manqué de le sanctionner.

Sur le fond, il reconnaît avoir commis une erreur mais fait valoir que « le budget qui lui est alloué est une enveloppe annuelle, et que tout dépassement doit s'apprécier annuellement sur le budget global », et qu'il ainsi l'intention de compenser cette erreur en se rattrapant sur d'autres dépenses, ce dont il a informé son employeur qui en a pris acte (pièce n° 13).

Il produit également plusieurs attestations de salariés de l'entreprise indiquant que le 26 juin 2019, lors de la grande convention réunissant le personnel et les franchisés, son employeur lui a décerné, en hommage pour services rendus, le prix de l'enseigne de l'année (pièces n° 31, 41, 43).

Sur ce :

Si l'employeur produit un document interne à l'entreprise mettant en avant la nécessité pour l'entreprise de s'appuyer sur « quatre piliers », dont celui des ressources humaines, ce document définit ce pilier comme étant « notre engagement de nous occuper des hommes et des femmes de Bufalo ». L'employeur, au-delà de cet énoncé général, ne fait pas valoir la mise en place de politiques précises vis-à-vis de salariés visant à atteindre l'objectif énoncé, « People first », et auxquelles le salarié se serait opposé.

L'employeur ne produit aucun élément démontrant que les économies de fonctionnement énoncées par Monsieur [T] [S] dans son courriel du 27 mars 2019 l'ont été en contradiction avec la volonté de l'entreprise et ait provoqué quelque réaction que ce soit de sa part avant le mois de mai suivant. Il ne produit non plus aucun élément quant aux réactions supposées négatives des salariés et au « climat délétère » qui se serait installé suivant l'annonce de ces coupes dans le budget de fonctionnement.

S'agissant de la mise en place des « Routines », dont l'employeur ne précise pas l'échéance, il ne produit aucune pièce démontrant que Monsieur [T] [S] s'y soit opposé et n'ait pas préparé la mise en 'uvre de cette nouvelle politique, et notamment pas de messages d'alerte ou de demandes d'explications qui lui auraient été adressés sur ce point. En revanche ce dernier produit plusieurs documents à l'intention de ses équipes montrant qu'il a préparé effectivement cette nouvelle politique (pièces n° 36 à 38) Monsieur [L] étant informé de l'avancement de cette préparation (pièce n° 42). Il ressort en outre des attestations produites par Monsieur [T] [S] que ce dernier a toujours fait preuve de loyauté dans l'exécution de la politique décidée par la direction générale.

S'agissant de la distribution d'un bonus de 200 000 euros et non de 120 000 euros, la cour constate que l'employeur a été informé de cette erreur par le salarié le 11 mars 2019.

Ce grief particulier apparaît distinct du grief général de refus d'exécuter la politique de l'entreprise. Dès lors, compte-tenu de ce que les poursuites disciplinaires ont été engagées plus de deux mois après que l'employeur ait été informé de ce fait, il ne peut être retenu contre le salarié.

En tout état de cause, compte-tenu de ce que l'employeur n'invoque aucun préjudice, cette seule erreur ne permet pas d'établir le grief général d'opposition à la mise en en oeuvre de la stratégie de l'entreprise.

2) Sur le grief de sous-performance économique des résultats de Monsieur [T] [S] :

L'employeur indique que Monsieur [T] [S] avait la charge de développer l'activité des restaurants en succursale, donc gérés directement par la société. Il précise que, contrairement aux assertions du salarié, les succursales étaient majoritaires dans le groupe par rapport aux franchises, soit 255 contre 96.

Il fait valoir que les résultats sont en baisse depuis deux ans. Ainsi, sur les quatre mois glissants entre janvier et avril 2019, l'EBITDA a été évalué à 10,7 millions d'euros, soit 3,9 millions d'euros de moins que l'année précédente à périmètre constant, ce qui correspond à une baisse de 25% pièce n° 19). Sur l'exercice 2018, le bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement (EBITDA) était clôturé à hauteur de 33,5 millions d'euros, soit 4,1 millions d'euros de moins que l'année précédente, à périmètre constant (pièce n° 19).

Monsieur [T] [S] fait valoir que la pièce n° 19 présentée par l'employeur n'a aucun caractère officiel et a été créée pour les seuls besoins de la cause.

Il ajoute que pour les années 2018 et 2019, aucun objectif ne lui a été fixé et qu'en tout état de cause il a été privé de tout réel pouvoir décisionnel avec l'arrivée de Monsieur [L].

Sur ce :

Le grief de sous-performance reproché à Monsieur [T] [S] ressort essentiellement du document intitulé « Evolution Performance 2016-2019 » produit en pièce n°19 par l'employeur.

La cour constate que ce document n'est pas un document comptable de l'entreprise, mais un ensemble de tableaux  portant la mention « confidentiel », dont il n'est pas possible de savoir sur quelles bases comptables il a été réalisé, par quel service il a été réalisé à quelle date il a été réalisé, antérieurement ou postérieurement au licenciement, et si Monsieur [T] [S] en a eu connaissance alors qu'il était encore en service.

L'employeur ne démontre ainsi pas que le salarié est responsable d'une dégradation des comptes de la société qui l'emploie.

Le grief de sous-performance ne peut être retenu.

Enfin la cour relève que malgré les graves griefs relevés contre Monsieur [T] [S], l'employeur lui a adressé publiquement le 26 juin 2019, postérieurement à la notification de son licenciement le 24 juin 2019, un prix en reconnaissance de son travail, ce qui n'est pas contesté,

Au vu de l'ensemble de ces éléments, les deux griefs articulés contre Monsieur [T] [S] n'étant pas démontrés par l'employeur, le licenciement sera dit sans cause réelle et sérieuse. Le jugement du conseil de prud'hommes sera infirmé sur ce point.

Sur la demande d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Monsieur [T] [S] réclame la somme de 245 500 euros, correspondant à 14,5 mois de salaires.

Il fait valoir être toujours demandeur d'emploi (pièces n° 56 et 57), avoir une famille à charge et un crédit immobilier à payer.

L'employeur fait valoir que Monsieur [T] [S] ne justifie pas un préjudice à hauteur des dommages et intérêts qu'il réclame.

Motivation :

Il résulte de l'article L. 1235-3 du code du travail que la perte injustifiée de son emploi par le salarié lui cause un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue, le montant des dommages et intérêts qu'il peut décider étant compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par l'article visé ci-dessus.

Compte-tenu de l'ancienneté de 18 ans et 5 mois de Monsieur [T] [S], de ce qu'il n'a pas retrouvé d'emploi et de ses charges familiales, il lui sera accordée la somme de 200 000 euros.

Sur le préjudice distinct :

Monsieur [T] [S] fait valoir les conditions brutales et vexatoires de son licenciement.

Il indique qu'après son licenciement, son employeur lui a décerné le prix de l'enseigne de l'année, en hommage à ses services rendus, lors de la grande convention réunissant le personnel et les franchisés.

Il indique également que dans sa note du 21 juin 2019, l'employeur a salué « son engagement sans faille au service de notre marque et son parcours exemplaire ».

Il fait valoir que la divergence entre ces louanges publiques et le contenu de la lettre de licenciement caractérise son caractère vexatoire.

L'employeur fait valoir que Monsieur [T] [S] n'apporte aucune preuve d'un comportement brutal ou vexatoire de sa part.

Motivation :

La circonstance que l'employeur ait adressé des louanges publiques au salarié dans une note de service peu de temps avant son licenciement et au cours d'une réunion des salariées postérieurement au dit licenciement ne confère pas à ce dernier un caractère brutal ou vexatoire.

Le salarié sera donc débouté de sa demande, le jugement du conseil de prud'hommes étant confirmé sur ce point.

Sur l'indemnité légale de licenciement :

L'employeur fait valoir que le salarié ayant commis une faute grave, il ne peut prétendre à l'indemnité légale de licenciement.

Motivation :

Le licenciement de Monsieur [T] [S] étant sans cause réelle et sérieuse, le jugement du conseil de prud'hommes condamnant l'employeur à lui verser la somme de 90 310 euros sera confirmé.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

L'employeur fait valoir que le salarié ayant commis une faute grave, il ne peut prétendre à l'indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés y afférant.

Motivation :

Le licenciement de Monsieur [T] [S] étant sans cause réelle et sérieuse, le jugement du conseil de prud'hommes condamnant l'employeur à lui verser les sommes de 50 808 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 5080 euros à titre de congés payés y afférents sera confirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens :

La société SA BUFFALO GRILL devra verser à Monsieur [T] [S] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles et sera déboutée de sa propre demande.

La société SA BUFFALO GRILL sera condamnée aux dépens d'appel.

En outre, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail il y lieu d'ordonner le remboursement par la société BUFFALO GRILL des indemnités chômage éventuellement versées par Pôle Emploi à Monsieur [T] [S] postérieurement à son licenciement, dans la limite de six mois.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 9 février 2021 en ce qu'il a :

- condamné la société SA BUFFALO GRILL à payer à Monsieur [T] [S] la somme de 90 310 euros (quatre vingt dix mille trois cent dix euros),

- condamné la société SA BUFFALO GRILL à payer à Monsieur [T] [S] les sommes de 50 808 euros (cinquante mille huit cent huit euros) à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 5080 euros (cinq mille quatre vingt euros) à titre de congés payés y afférents,

- condamné la société SA BUFFALO GRILL à payer à Monsieur [T] [S] la somme de 1500 euros (mille cinq cents euros) au titre des frais irrépétibles,

- condamné la société SA BUFFALO GRILL aux dépens de l'instance

- débouté Monsieur [T] [S] de sa demande au titre du préjudice distinct,

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 9 février 2021 pour le surplus ;

STATUANT A NOUVEAU

Dit que le licenciement de Monsieur [T] [S] est sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société SA BUFFALO GRILL à verser à Monsieur [T] [S] la somme de 200 000 euros (deux cent mille euros) à titre d'indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y AJOUTANT

Condamne la société SA BUFFALO GRILL à verser à Monsieur [T] [S] la somme 2000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société SA BUFFALO GRILL aux entiers dépens de l'instance,

Ordonne le remboursement par la société SA BUFFALO GRILL des indemnités chômage versées par Pôle Emploi à Monsieur [T] [S] postérieurement à son licenciement, dans la limite de six mois.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en dix sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/00495
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.00495 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award