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12/05/2022 | FRANCE | N°21/01371

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 12 mai 2022, 21/01371


ARRÊT N° /2022

PH



DU 12 MAI 2022



N° RG 21/01371 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EY7P







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ST DIE DES VOSGES

18/00107

10 mai 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2





APPELANT :



Monsieur [Z] [O]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Re

présenté par Me Olivier GIRARDOT de la SELARL SENTINELLE AVOCATS, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉES :



S.E.L.A.R.L. VOINOT & ASSOCIESMandataires Judiciaires, es-qualités de Liquidateur Judiciaire de la SARL P.I.D.C. ([Adresse 3], [Localité 5])

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me ...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 12 MAI 2022

N° RG 21/01371 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EY7P

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ST DIE DES VOSGES

18/00107

10 mai 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANT :

Monsieur [Z] [O]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Olivier GIRARDOT de la SELARL SENTINELLE AVOCATS, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉES :

S.E.L.A.R.L. VOINOT & ASSOCIESMandataires Judiciaires, es-qualités de Liquidateur Judiciaire de la SARL P.I.D.C. ([Adresse 3], [Localité 5])

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN, avocat au barreau de NANCY

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS (CGEA DE NANCY) Représentée par sa Directrice nationale Madame [L] [J]

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Eric SEGAUD de la SELARL FILOR AVOCATS substitué par Me NAUDIN, avocats au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : STANEK Stéphane,

WILLM Anne-Sophie,

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 10 Mars 2022 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 12 Mai 2022 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 12 Mai 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Monsieur [Z] [O] a été engagé sous contrat de travail à durée indéterminée, par la société P.I.D.C, à compter du 04 février 2013, en qualité de peintre chef d'équipe.

A compter du 18 avril 2017, Monsieur [Z] [O] a été en arrêt maladie.

Par décision du Médecin du Travail du 02 octobre 2017, Monsieur [Z] [O] a été déclaré inapte à son poste de travail et à tous postes dans l'entreprise.

Par courrier du 20 octobre 2017, Monsieur [Z] [O] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 30 octobre 2017.

Par courrier du 03 novembre 2017, Monsieur [Z] [O] a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par requête du 02 novembre 2018, Monsieur [Z] [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges, aux fins de contestation de son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges rendu le 10 mai 2021, lequel a :

- pris acte de ce que la défenderesse reconnaît devoir à Monsieur [Z] [O] la somme de 92,88 euros à titre de rappel de salaire ;

- fixé la créance salariale de Monsieur [Z] [O] à la somme de 92,88 euros à titre de congés payés sur rappel de salaire du 2 novembre 2015 au 3 novembre 2017 ;

- condamné la société VOINOT & ASSOCIES, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société P.I.D.C, à verser à Monsieur [Z] [O] la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté Monsieur [O] de l'ensemble de ses autres demandes ;

- donné acte au CGEA-AGS de NANCY des limites légales et jurisprudentielles de sa garantie ;

- dit que les entiers dépens d'instance et d'exécution éventuels seront prélevés sur l'actif de la société P.I.D.C en liquidation judiciaire.

Vu l'appel formé par Monsieur [Z] [O] le 02 juin 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Monsieur [Z] [O] déposées sur le RPVA le 21 janvier 2022, celles de la société VOINOT ET ASSOCIES déposées sur le RPVA le 15 octobre 2021 et celles de l'UNEDIC AGS CGEA NANCY déposées sur le RPVA le 11 octobre 2021,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 23 février 2022,

Monsieur [Z] [O] demande :

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges rendu le 10 mai 2021 en toutes ses dispositions ;

- statuant à nouveau,

- à titre principal, de dire et juger le licenciement nul ;

- en conséquence, de fixer sa créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société P.I.D.C. aux sommes suivantes :

- 3 860,30 euros (brut) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 386,03 euros (brut) à titre de congés payés y afférents ;

- avec intérêt de droit du jour de la demande et exécution provisoire par application des dispositions de l'article R 1454-28 du code du travail ;

- 36 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- avec intérêt de droit du jour du jugement à intervenir et exécution provisoire par application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile ;

- à titre subsidiaire, de dire et juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

- en conséquence, de fixer sa créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société P.I.D.C. aux sommes suivantes :

- 3 860,30 euros (brut) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 386,03 euros (brut) au titre des congés payés y afférents ;

- avec intérêt de droit du jour de la demande et exécution provisoire par application des dispositions de l'article R 1454-28 du code du travail ;

- 18 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- avec intérêt de droit du jour du jugement à intervenir et exécution provisoire par application des dispositions de l'article 515 du code de procédure civile 

- enfin, de voir fixer sa créance au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société P.I.D.C. aux sommes suivantes :

- 10 143,66 euros (brut) à titre de rappel de salaire ;

- 1 014,36 euros (brut) à titre de congés payés y afférents ;

- 6 670,52 euros à titre de compléments de salaires non perçus pour les périodes suivantes, à savoir du 5 août 2015 au 6 septembre 2015, du 12 novembre 2016 au 9 février 2017, du 18 avril 2017 au 19 juillet 2017 ;

- 10 000euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'entretiens professionnels ;

- 1 287,79 euros (brut) à titre de rappel d'heures supplémentaires ;

- 128,77 euros à titre de congés payés y afférents.

- de condamner la société VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité de liquidateur, à lui communiquer, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de la décision à intervenir, les documents suivants :

- les relevés de géolocalisation dont était doté son véhicule ;

- le certificat pour la caisse de congés payés ;

- de fixer au passif de la société de la procédure de liquidation judiciaire de la société P.I.D.C, les sommes suivantes :

- 31 581,00 euros à titre d'indemnité de travail dissimulé ;

- 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les entiers dépens de première instance et d'appel ;

- de dire que la décision sera applicable au CGEA qui devra procéder à l'avance des créances conformément aux dispositions des articles L 3253-8 et suivants du code du travail.

La société VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société PIDC demande :

- de donner acte à la société P.I.D.C de ce qu'elle reconnaît devoir à Monsieur [Z] [O] la sommes de 928,88 euros à titre de rappel de salaire ;

- de débouter Monsieur [Z] [O] de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

- de le condamner en tous frais et dépens.

L'association UNEDIC AGS CGEA NANCY demande :

- à titre principal,

- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges ;

- de débouter Monsieur [Z] [O] de l'intégralité de ses demandes ;

- à titre subsidiaire, de donner acte au CGEA des limites légales et jurisprudentielles de sa garantie ;

- en tout état de cause, de mettre à la charge de tout autre que le CGEA les dépens.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant du liquidateur judiciaire le 15 octobre 2021, en ce qui concerne le salarié le 21 janvier 2022, et en ce qui concerne l'AGS le 11 octobre 2021.

Sur le licenciement

M. [Z] [O] affirme avoir été victime de harcèlement moral.

Aux termes des dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3, le salarié présente des faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

M. [Z] [O] fait valoir avoir fait l'objet d'un blâme le 05 décembre 2016, dont les termes sont inappropriés, et lui notifiant une rétrogradation sans respect d'aucune procédure.

Il ajoute avoir fait l'objet d'une mise à pied le 27 mars 2017, sans que la procédure ne soit respectée.

Il souligne les termes d'un courrier reçu de l'employeur le 16 mai 2017.

M. [Z] [O] dénonce également un traitement discriminatoire en matière de rémunération, indiquant qu'en arrêt maladie il n'a pas pu bénéficier du maintien de son salaire.

Il précise également que ce harcèlement a déclenché chez lui une pathologie l'ayant conduit à un arrêt maladie le 18 avril 2017.

Il affirme que ce harcèlement a conduit à son inaptitude.

M. [Z] [O] produit les éléments suivants :

- en pièce 10, un courrier reçu de son employeur, daté du 05 décembre 2016 : « (') le jeudi 10 novembre 2016, j'ai constaté avec notre client « De [Localité 8] », le très mauvais suivi de votre chantier.(') Suite à un pointage précis de notre client,il s'avère et rassure mes soupçons sur vos absences sur ce chantier. Depuis le mois de septembre 2016, nos situations sont bloquées sur ce chantier et sur votre autre chantier [Localité 8] Motel de juillet 2016. (') ces faits constituent une effraction aux dispositions de votre contrat de travail et à l'article 13 alinéa 1. Nous amène donc à vous notifier ici un blâme avec mise à pied de 5 jours. Celui-ci sera versé à votre dossier Personnel. Par la suite : vous n'aurez plus personne sous vos ordre et vous vous tiendrez éloigné de nos clients. Vous serez amené à gérer votre chantier sur ordre de votre conducteur de trvx ou moi-même. (...) »

- en pièce 11, un courrier daté du 16 mai 2017, reçu de son employeur : « (') ce jour, mardi 16 mai 2017 à 10h00, avec le N°0782289255 vous faisant passer pour le chef d'équipe, grade que vous n'avez plus. Vous avez essayé de soustraire avec votre langage toujours aussi virulent ; les codes de notre plateforme de géolocalisation de nos véhicules.En disant que j'étais en vacances. Vous n'est pas sans savoir que ce fait constitué une faute lourde. Dès réception de l'attestation sur l'honneur de ce Monsieur, nous déposerons une plainte pour usurpation. Sachant que vous êtes en arrêt maladie, et même sans l'être, vous n'avez plus aucune procuration depuis le 05 décembre 2016 (...) »

- en pièce 16 un décompte de ce qu'il estime dû pour la période du 05 août 2015 au 06 septembre 2015, et une attestation de paiement des indemnités journalières de la CPAM pour cette période

- en pièce 17, un décompte de ce qu'il estime dû pour la période du 12 novembre 2016 au 12 mars 2017, et une attestation de paiement des indemnités journalières de la CPAM pour cette période

- en pièce 18, un décompte de ce qu'il estime dû pour la période du 18 avril 2017 au 1er octobre 2017, et une attestation de paiement des indemnités journalières de la CPAM pour cette période

- en pièce 13 un document de la SARL PIDC concernant un autre salarié, portant mention de sommes payées en complément d'indemnités journalières

- en pièce 4, son arrêt de travail du 18 avril 2017, mentionnant un « état dépressif réactionnel »

- en pièce 5 un certificat médical du Docteur [U] en date du 12 octobre 2017, indiquant : « l'arrêt de travail de Mr [O] [Z] en date du 18 avril est en rapport avec une pathologie professionnelle (état dépressif réactionnel) ».

Ces éléments laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral.

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, fait valoir que le titre de chef d'équipe a toujours figuré sur les bulletins de paie du salarié ; que sa rémunération n'a jamais été modifiée ; que M. [Z] [O] n'a donc jamais fait l'objet d'une rétrogradation.

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité affirme que l'appelant s'est montré incapable de diriger le chantier qui lui a été confié, et qu'il le laissait à l'abandon en prétendant mensongèrement qu'il s'y trouvait ; elle indique que le chantier VOGESLIS à [Localité 8] s'est terminé avec trois mois de retard, la contraignant à payer des pénalités de retard. La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité affirme que M. [Z] [O] effectuait beaucoup moins d'heures de travail qu'il n'en déclarait à son employeur, et qu'il quittait le chantier ou ne s'y présentait pas.

L'AGS estime que M. [Z] [O] ne justifie pas d'éléments matériels laissant supposer l'existence d'un licenciement, ni d'agissements répétés.

Bien que ne visant pas de pièce à l'appui de ses explications, aucune des pièces produites par la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, ne démontre la réalité des explications avancées :

- les compte-rendus de réunion de chantier en pièces 10 ne comprennent aucun élément en rapport avec les arguments de l'employeur

- les relevés d'horaires de M. [Z] [O] en pièces 11 de l'employeur n'établissent pas le déficit d'heures travaillées dénoncé

- les plannings d'exécution des travaux « plannings Vosgeslis » en pièces 12, transmis par M. [Z] [O] à son employeur, ne démontrent pas sa carence

- la lettre de Vosgelis à la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, en date du 30 novembre 2016, fait état d'un retard de chantier sans l'attribuer spécialement au salarié,

- en pièce 14 est produite une lettre d'avertissement à M. [Z] [O], du 24 octobre 2016, lui reprochant sur les semaines 36 à 42, 32h50 et 8h75 d'absence « après contrôle approfondi, sur vos états de présence » ; aucune pièce complémentaire ne vient objectiver cette lettre qui demeure donc une preuve à soi-même,

- en pièce 15, est produite une lettre de la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité à M. [Z] [O], datée du 27 mars 2017, indiquant : « (') le lundi 27 mars 2017, j'ai constaté avec notre client « De STDDV » votre absence le lundi 27 mars 2017 à 9h08, ainsi, aussi j'ai pu constater que samedi 25 mars 2017 à 9h40 de votre chantier suite à votre mail du 24 me confirmant votre travail pour terminer votre chantier avant vos congés ou je m'étais déplacé spécialement, suite à votre mail. (') Une nouvelle fois vous nous mettez en porta faux avec notre client, le même que notre précédent courrier. (') Nous amène donc à vous notifier ici un nouveau blâme avec mise à pied de 3 jours.(...) »

Cette pièce confirme le reproche adressé par M. [Z] [O] d'absence de respect de la procédure disciplinaire prévue par les dispositions de l'article L1332-2 du code du travail, ce courrier ne faisant pas état d'un entretien préalable, non justifié par d'autres pièces de l'employeur

- en pièce 16, un mail de l'employeur envoyé à M. [Z] [O], le 08 novembre 2016 : « Bonsoir, 15h30 je passe sur le chantier et à première vue il n'y avait plus personne. Je pense que vous m'avez pris pour un pigeon. Ça fait de nombreuses semaines que je vous alerte sur vos horaires et que vous n' avez pas bougé le moindre orteil. Vous vous laisser vivre depuis plus de deux mois, après avoir eu ce que vous vouliez ' Encore bonne poire, je ne vous ai pas retiré vos échéances et autres heures en moins et non réalisées sur le mois d'octobre. De bien parler et d'endormir les gens et votre seul atout. Mais au niveau de l'action réaction c'est loin d'être les bons termes à employer. (') Nous sommes le 8 novembre la veille de la date où vous étiez engagé à finir votre chantier. (') Ne vous cachez surtout pas derrière votre collègue, vous êtes une équipe. (') Encore ce jour vous avez réalisé 6h18 moins et trois quarts d'heure de repas fait [Adresse 9]. Hier vous avez réalisé 5h41 moins les trois quarts d'heure de repas réalisé. Vous avez réalisé une moyenne de cinq heures par jour et là ne me dites pas que vous apprenez pas pour un imbécile. (') Voulez-vous payer complètement votre maison si je vous donne mon préavis à partir du 1er janvier 2017. (...) »

Outre que cette pièce, preuve de l'employeur à lui-même, ne démontre pas, à défaut d'éléments objectifs complémentaires, les arguments de la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, elle confirme les propos « inappropriés », pour reprendre le qualificatif utilisé par M. [Z] [O] dans ses conclusions, à l'égard de son salarié.

L'employeur n'ayant pas réussi à combattre la présomption de harcèlement, celui-ci est établi, sans qu'il soit besoin d'examiner par ailleurs les éléments mis en avant par le salarié relativement aux indemnités journalières.

En conséquence, le licenciement sera déclaré nul.

Sur les demandes indemnitaires au titre du licenciement

Ni la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité ni l'AGS ne contestent les demandes formulées par M. [Z] [O] en conséquence du licenciement.

Dans ces conditions il sera fait droit à ses demandes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et des dommages et intérêts pour licenciement nul.

Les intérêts courront à compter du présent arrêt, en application des dispositions de l'article 1231-7 du code civil.

La demande d'exécution provisoire est sans objet, le présent arrêt étant susceptible d'un recours non suspensif d'exécution.

Sur la demande de rappel de salaire

M. [Z] [O] fait valoir qu'il aurait dû être classé au niveau IV coefficient 250, en application de la convention collective applicable.

Il demande en conséquence un rappel de salaire de 10 143,66 euros outre 1 014,36 euros à titre de congés payés y afférents ;.

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité confirme que l'appelant aurait dû être rémunéré à l'indice 250 ; elle indique reconnaître lui devoir 928,88 euros à titre de rappel, tenant compte de la prescription de l'action en paiement, outre 92,88 euros au titre des congés payés afférents.

L'AGS conclut au débouté de la demande, estimant que le salarié ne démontre pas qu'il devait être rémunéré au coefficient qu'il revendique.

Aux termes des dispositions de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, agissant en qualité de représentant de l'employeur, confirme le bien fondé de la réclamation ; le paiement de l'intégralité du salaire dû lui incombant, c'est à l'employeur de démontrer que la somme qu'il propose est de nature à désintéresser son salarié ; aucune des parties n'explicite la somme qu'il soutient.

Il n'appartient pas à la cour de se substituer aux parties dans leurs démonstrations quant aux montants allégués.

Dans ces conditions, à défaut pour la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, de justifier que la somme minorée qu'elle avance éteindrait l'obligation de paiement du salaire dû, il sera fait droit à la demande de M. [Z] [O] à hauteur de ce qu'il réclame.

Sur la demande au titre d'heures supplémentaires

M. [Z] [O] précise que sa durée de travail était de 35 heures, et qu'il produit aux débats un tableau récapitulatif des heures supplémentaires effectuées.

Il demande en outre que la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, soit enjointe de produire les relevés de géolocalisation dont était équipé son véhicule, pour y ajouter les heures supplémentaires que le système révèlera.

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, fait valoir qu'à la lecture du tableau produit par le salarié, ce que ce dernier réclame correspond à 12h08 par semaine de trajets qu'il aurait effectué pendant 13 semaines, et que ces heures ne constituent pas des heures de travail mais des heures de trajet, qui lui ont été réglées.

L'AGS considère que le tableau produit par le salarié n'est pas suffisant pour étayer sa demande.

Le tableau en pièce 8 de M. [Z] [O] fait un décompte des heures réclamées au titre d'heures supplémentaires, par addition d'heures de trajets.

Aux termes des dispositions de l'article L3121-4 du code du travail, le temps de trajet entre le domicile et le lieu d'exécution du travail n'est pas du temps de travail effectif.

Les heures de trajets présentées par M. [Z] [O] ne peuvent donc fonder une demande au titre des heures supplémentaires, dont il sera débouté.

Il sera pareillement débouté de sa demande de production des relevés de géolocalisation pour justifier des temps de trajets, en ce que cette demande est fondée sur une réclamation au titre d'heures supplémentaires, que ces temps de trajet ne peuvent justifier.

Sur la demande au titre du travail dissimulé

La demande de M. [Z] [O] à ce titre est fondée sur les heures supplémentaires qu'il réclame.

Étant débouté de sa demande au titre des heures supplémentaires, M. [Z] [O] sera dès lors pareillement débouté de sa demande au titre du travail dissimulé.

Sur la demande de rappel au titre de complément de salaires

M. [Z] [O] sollicite des rappels, expliquant ne pas avoir bénéficié du maintien de son salaire lors de ses arrêts maladie; il renvoie à des tableaux de décompte en pièces 16, 17 et 18.

Ses demandes concernent les périodes suivantes : 05/08/2015- 06/09/2015 ; 12/11/2016-09/02/2017 ; 18/04/2017-19/07/2017.

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, affirme que M. [Z] [O] a toujours bénéficié du maintien de salaire, et renvoie à ses pièces 17 à 20.

L'AGS ne conclut pas sur cette demande.

La pièce 20 de la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, est un bulletin de paie de régularisation, de novembre 2017, portant notamment indemnisation pour les périodes de maladie suivantes :

- 2 et 3 novembre 2017

- du 12 novembre 2016 au 11 février 2017

- du 21 avril 2017 au 07 juin 2017

- du 08 juin 2017 au 19 juillet 2017

- du 20 juillet 2017 au 1er octobre 2017

- du 12 février 2017 au 12 mars 2017.

M. [Z] [O] ne conclut pas sur cette pièce.

Dans ces conditions, M. [Z] [O] sera débouté de ses demandes au titre des années 2016 et 2017, la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, justifiant par sa pièce 20 du paiement du complément aux indemnités journalières.

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, ne produisant aucune pièce justifiant de la prise en charge pour 2015, il sera fait droit à la demande de M. [Z] [O] pour 2015, soit 1420,90 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts pour défaut d'entretiens professionnels

M. [Z] [O] réclame à ce titre des dommages et intérêts à hauteur de 10 000 euros.

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, confirme l'absence d'entretiens professionnels, mais fait valoir que l'appelant ne démontre l'existence d'aucun préjudice.

M. [Z] [O] n'explicite aucun préjudice, se contentant d'indiquer que « ce défaut d'entretien obligatoire [lui] a incontestablement porté préjudice (') puisque ce dernier est précisément consacré aux perspectives d'évolution professionnelle ».

A défaut de démonstration d'un préjudice, M. [Z] [O] sera débouté de sa demande.

Sur la demande de communication du « certificat pour la caisse de congés payés »

Cette demande n'est ni explicitée ni motivée ; M. [Z] [O] en sera donc débouté.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité, sera condamnée à payer 1000 euros à M. [Z] [O] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Dié-des-Vosges rendu le 10 mai 2021 en ce qu'il a :

- condamné la société VOINOT & ASSOCIES, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société P.I.D.C, à verser à Monsieur [Z] [O] la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté Monsieur [O] de l'ensemble de ses autres demandes ;

- donné acte au CGEA-AGS de NANCY des limites légales et jurisprudentielles de sa garantie ;

- dit que les entiers dépens d'instance et d'exécution éventuels seront prélevés sur l'actif de la société P.I.D.C en liquidation judiciaire ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. [Z] [O] en date du 03 novembre 2017 est nul ;

Fixe les créances de M. [Z] [O] au passif de la société PIDC aux sommes de :

- 3 860,30 euros (trois mille huit cent soixante euros et trente centimes) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 386,03 euros (trois cent quatre vingt six euros et trois centimes) à titre de congés payés y afférents,

- 36 000,00 euros (trente six mille euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 10 143,66 euros (dix mille cent quarante trois euros et soixante six centimes) à titre de rappel de salaire ;

- 1 014,36 euros (mille quatorze euros et trente six centimes) à titre de congés payés y afférents,

- 1420,90 euros (mille quatre cent vingt euros et quatre vingt dix centimes) au titre de complément aux indemnités journalières ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Y ajoutant,

Déclare le présent arrêt opposable à la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualités de mandataire liquidateur de la société PIDC et à l'Unedic, délégation Ags;

Dit que l'Unedic, délégation Ags est tenu à garantie des créances fixées au passif de la société PIDC au profit de M. [Z] [O], à l'exclusion des frais irrépétibles, et dans la limite de limites légales de sa garantie;

Condamne la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité à payer à M. [Z] [O] 1000 euros (mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SELARL VOINOT ET ASSOCIES, ès qualité aux dépens d'appel.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en onze pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/01371
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.01371 ?
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