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12/05/2022 | FRANCE | N°21/00624

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 12 mai 2022, 21/00624


ARRÊT N° /2022

PH



DU 12 MAI 2022



N° RG 21/00624 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXL4







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERDUN

F 19/00018

18 janvier 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2









APPELANTE :



Madame [V] [Z]

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par Me Adrien PERROT de la SCP PERROT AVOCAT, avocat au barreau de NANCY



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000097 du 28/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NANCY)





INTIMÉE :



S.A.S. PYR immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 12 MAI 2022

N° RG 21/00624 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXL4

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VERDUN

F 19/00018

18 janvier 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Madame [V] [Z]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Adrien PERROT de la SCP PERROT AVOCAT, avocat au barreau de NANCY

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/000097 du 28/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de NANCY)

INTIMÉE :

S.A.S. PYR immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de BAR LE DUC sous le numéro 494 151 574, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Frédéric VERRA de la SCP ANNIE SCHAF-CODOGNET ET FRÉDÉRIC VERRA substitué par Me Marine CHOLLET, avocats au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseillers : STANEK Stéphane,

WILLM Anne-Sophie,

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

DÉBATS :

En audience publique du 17 Mars 2022 ;

L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 12 Mai 2022 ; par mise à disposition au greffe conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ;

Le 12 Mai 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Mme [V] [Z] a été engagée sous contrat de travail à durée déterminée par la société PYR, à compter du 17 octobre 2016, pour une période 36 mois, en qualité de caissière de niveau 1 selon la convention collective des commerces de détail non alimentaire IDCC 1970.

Par courrier du 27 octobre 2018, Mme [V] [Z] s'est vue notifier une mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre du 21 novembre 2018, elle a été convoquée à un entretien préalable à une rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée fixé au 11 décembre 2018.

Par courrier du 27 décembre 2018, le contrat de travail de Mme [V] [Z] a été rompu pour faute lourde.

Par requête réceptionnée le 5 juillet 2019, Mme [V] [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Verdun, aux fins de nullité de la mise à pied et de rupture illégale de son contrat de travail.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Verdun rendu le 18 janvier 2021, lequel a :

- dit que la mise à pied à titre conservatoire est régulière,

- dit que le licenciement pour faute grave est régulier,

- débouté Mme [V] [Z] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la SAS PYR de sa demande au titre de l'article 700,

- dit que les dépens seront laissés à la charge de chacune des parties,

- dit que Mme [V] [Z] devra rembourser les sommes exposées par l'Etat pour la part lui incombant ;

Vu l'appel formé par Mme [V] [Z] le 11 mars 2021 ;

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de Mme [V] [Z] déposées sur le RPVA le 30 novembre 2021, et celles de la société PYR déposées sur le RPVA le 9 septembre 2021 ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 9 mars 2022 ;

Mme [V] [Z] demande :

- de prononcer la recevabilité de l'appel et son bien fondé,

- de recevoir ses moyens de fait et de droit,

En conséquence,

- d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Verdun en date du 18 janvier 2021 en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes,

Statuant à nouveau,

- de condamner la société PYR à lui payer :

. 2 944 euros au titre des salaires qu'elle aurait dû percevoir pendant la période de la mise à pied,

. 294,40 euros au titre des congés payés afférents,

. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de l'annulation de la mise à pied,

. 14 720 euros au titre des salaires qui auraient dû être perçus jusqu'à la rupture du contrat de travail,

- de condamner la société PYR à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société PYR aux entiers frais et dépens.

La société PYR demande :

- de confirmer le jugement en ce qu'il rejette l'ensemble des demandes de Mme [V] [Z] relatives à requalification de la mise à pied disciplinaire et à la régularité de la rupture du contrat de travail,

En conséquence :

- confirmer la régularité de la mise à pied disciplinaire et débouter Mme [V] [Z] des demandes d'indemnisation à ce titre,

- confirmer la régularité de la rupture du contrat de travail et débouter Mme [V] [Z] des demandes d'indemnisation à ce titre,

- de condamner Mme [V] [Z] à lui payer la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Mme [V] [Z] aux entiers frais et dépens.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures qu'elles ont déposées sur le RPVA, s'agissant de Mme [V] [Z] le 30 novembre 2021, et de la société PYR le 9 septembre 2021.

I. Sur la mise à pied du 27 octobre 2018

Sur la requalification de la mise à pied

Mme [V] [Z] sollicite la requalification de la mise à pied conservatoire qui lui a été notifiée par courrier du 27 octobre 2018 en mise à pied disciplinaire. Elle fait ainsi valoir que le délai qui s'est écoulé entre la mise à pied et la convocation à l'entretien préalable au licenciement est excessif, et que l'employeur ne rapporte pas la preuve de la réalité de l'enquête disciplinaire qu'il mentionne avoir réalisée pour justifier ce délai. Elle ajoute que la mise à pied prononcée repose sur les mêmes griefs que ceux qui sont invoqués au soutien de la rupture de son contrat de travail.

La société PYR fait valoir que dans mesure où la procédure disciplinaire a été déclenchée le 27 octobre 2018, soit le jour de la mise à pied, la salariée ne pouvait en conséquence avoir aucun doute sur le caractère conservatoire de celle-ci. Elle explique que l'enquête qu'elle a diligentée pour vérifier la gravité des faits commis par la salariée a pris du temps en raison des témoignages à recueillir.

Motivation :

Aux termes de l'article L.1332-3 du code du travail, lorsque les faits reprochés au salarié ont rendu indispensable une mesure conservatoire de mise à pied à effet immédiat, aucune sanction définitive relative à ces faits ne peut être prise sans que la procédure prévue à l'article L.1332-2 ait été respectée.

La mise à pied, qui pour être conservatoire doit être prononcée en raison de faits considérés comme gravement fautifs, doit être concomitante au déclenchement de la procédure disciplinaire ou intervenir à bref délai. La mise à pied prononcée par l'employeur dans l'attente de sa décision dans la procédure de licenciement engagée dans le même temps a un caractère conservatoire.

Mais si un délai s'est écoulé entre le prononcé de la mise à pied et la convocation à l'entretien préalable, la mise à pied présente alors un caractère disciplinaire sauf si ce délai est justifié par l'employeur.

En l'espèce, Mme [V] [Z] a été mise à pied à titre conservatoire par la société PYR le jour des faits qui lui sont reprochés, soit le 27 octobre 2018.

Le courrier du 27 octobre 2018 est ainsi rédigé (pièce salariée N°3) :

« En date du 27 octobre 2018, nous avons eu à déplorer de votre part, les comportements fautifs suivants ;

. Etat d'ébriété sur votre lieu de travail

. Propos diffamatoires et menaces envers votre supérieur hiérarchique

. Comportements inappropriés pour l'image du magasin : cris et fracas, état d'ébriété.

Nous vous informons que ces faits constituent une violation de notre règlement intérieur ainsi qu'à la discipline et au bon fonctionnement de notre entreprise.

Nous sommes donc dans l'obligation d'engager une procédure disciplinaire à votre égard et nous vous informons que vous faites dès à présent l'objet d'une mise à pied conservatoire pendant le déroulement de cette procédure.

Cette mise à pied à caractère conservatoire prendra fin au jour du prononcé de la sanction disciplinaire ».

Par une correspondance du 21 novembre 2018, l'employeur a convoqué Mme [V] [Z] à un entretien préalable pour le 11 décembre 2018 ainsi rédigée (pièce salariée N°4) :

« En date du 27 octobre 2018, nous avons eu à déplorer de votre part, les comportements fautifs suivants :

. Etat d'ébriété sur votre lieu de travail

. Propos diffamatoires et menaces envers votre supérieur hiérarchique

. Comportements inappropriés pour l'image du magasin : cris et fracas, état d'ébriété.

Nous vous informons que ces faits constituent une violation de notre règlement intérieur ainsi qu'à la discipline et au bon fonctionnement de notre entreprise.

Votre comportement fautif est constaté très régulièrement malgré nos avertissements. Nous sommes donc dans l'obligation d'engager une procédure disciplinaire à votre égard et nous vous informons que vous faites dès à présent l'objet d'une mise à pied conservatoire pendant le déroulement de cette procédure.

Vous voudrez bien vous présenter, le 11 Décembre 2018 à 10 heures à Cash Express Verdun dans nos locaux situé [Adresse 5] pour un entretien avec monsieur [R] [G] gérant de magasin, au cours duquel vous serez invité à fournir toute explication sur les fautes qui vous sont reprochées.

Nous vous précisons que vous avez la possibilité de vous faire assister lors de cet entretien par une personne de votre choix appartenant obligatoirement au personnel de l'entreprise.

Cette mise à pied à caractère conservatoire prendra fin au jour du prononcé de la sanction ».

Le 27 décembre 2018, Mme [V] [Z] s'est vue notifier la rupture de son contrat de travail (pièce employeur N°7).

Il ressort de ces éléments que Mme [V] [Z] a donc été mise à pied à titre conservatoire jusqu'au « jour du prononcé de la sanction disciplinaire » par lettre du 27 octobre 2018, et elle a été convoquée le 21 novembre 2018 à un entretien préalable lui précisant faire l'objet « dès à présent'd'une mise à pied conservatoire pendant le déroulement de cette procédure ».

Par ailleurs, il est constaté que les témoignages des clients du magasin (MM. [M] et [H]) et des collègues de Mme [V] [T] (MM. [E] et [R]), que la société PYR produit en indiquant qu'ils lui étaient nécessaires pour apprécier la nécessité de mettre un terme immédiat au contrat de travail, sont datés de janvier 2020.

Si la société PYR fait valoir que cette date se justifie par le fait qu'elle a été contrainte de renouveler les témoignages parce qu'elle ignorait qu'il était nécessaire de les recueillir sur un formulaire CERFA et parce qu'il lui a fallu du temps pour retrouver les clients plus d'un an après les faits, elle ne produit pas les premières déclarations à l'origine de ces attestations, et elle n'explique pas pourquoi il lui a fallu ce temps pour obtenir le témoignage des deux salariés qu'elle verse aux débats.

La société PYR ne justifiant pas du délai de 25 jours séparant la notification de la mise à pied de l'engagement de la procédure disciplinaire, la mise à pied prononcée le 27 octobre 2018 présente dès lors un caractère disciplinaire.

Elle sera requalifiée en mise à pied disciplinaire.

Sur la nullité de la mise à pied

Mme [V] [Z] fait valoir que la mise à pied est injustifiée et en sollicite l'annulation.

La société PYR conclut au débouté de la demande.

Motivation :

Aux termes de l'article L.1333-2 du code du travail, le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

En l'espèce, la mise à pied du 27 octobre 2018 fait état des comportements fautifs suivants :

- état d'ébriété sur le lieu de travail,

- propos diffamatoires et menaces envers le supérieur hiérarchique,

- comportements inappropriés pour l'image du magasin : cris et fracas, état d'ébriété.

Les pièces produites par l'employeur pour justifier des griefs reprochés à Mme [V] [Z] sont les témoignages de deux clients et de deux salariés de la société (pièces N°8, 9, 10, 11).

Il est constaté que ces attestations ne décrivent aucun comportement ou propos diffamatoires et menaçants qui auraient été tenus par la salariée et qui soient en rapport avec les faits énoncés dans la lettre du 27 octobre 2018, et si elles font état que Mme [V] [Z] sentait l'alcool ou se trouvait « manifestement sous l'empire de l'alcool ou autres produits » (pièceN°11), ils ne font référence à aucun fait daté et circonstancié.

Les faits reprochés à la salariée ne sont donc pas établis.

La mise à pied disciplinaire est en conséquence nulle.

Sur le rappel de salaire pendant la mise à pied, les congés payés afférents et les dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de l'annulation de la mise à pied

Mme [V] [Z] sollicite un rappel de salaire suite à l'annulation de la mise à pied pour la période du 27 octobre 2018 au 27 décembre 2018, soit une somme de 2 944 euros correspondant à deux mois de salaire outre les congés payés afférents, ainsi que des dommages et intérêts à hauteur de 1 000 euros pour le préjudice subi du fait de l'absence de fondement de la sanction.

La société PYR soutient Mme [V] [Z] ne saurait se prévaloir d'aucun préjudice dès lors qu'elle a été en arrêt de travail durant toute cette période et qu'elle a perçu des indemnités.

Motivation :

L'annulation de la mise à pied confère au salarié le droit à sa rémunération pour l'ensemble de la période visée, peu important qu'elle coïncide avec un arrêt de travail pour maladie.

L'employeur est en conséquence tenu de verser au salarié les salaires durant cette période.

En l'espèce, il ressort de ce qui précède que Mme [V] [Z] a été mise à pied disciplinairement le 27 octobre 2018 et il est observé qu'elle a été placée en arrêt de travail du 28 octobre 2018 au 7 janvier 2019 (pièce salariée N°5).

La société PYR ne contestant pas subsidiairement le montant réclamé par la salariée dans son quantum, il sera fait droit à la demande de rappel de salaire formée par Mme [V] [Z] au cours de la période de mise à pied, outre les congés payés afférents.

Par ailleurs, la sanction disciplinaire prononcée à l'encontre Mme [V] [Z] n'étant pas justifiée, la société PYR, qui ne conteste pas subsidiairement le montant dans son quantum des dommages et intérêts réclamés à titre de préjudice, sera condamnée à lui payer la somme de 1 000 euros.

Le jugement du conseil de prud'hommes sera en conséquence infirmé en ce qu'il a dit que la mise à pied à titre conservatoire est régulière et débouté Mme [V] [Z] de ses demandes.

II. Sur la demande au titre des salaires qui auraient dû être perçus jusqu'à la rupture du contrat de travail

Le 27 décembre 2018, Mme [V] [Z] s'est vue notifier la rupture de son contrat de travail en ces termes (pièce employeur N°7) :

« Nous vous avons reçu le 21 décembre 2018 pour l'entretien préalable à la mesure de rupture anticipée de votre contrat cdd de travail que nous envisageons de prendre à votre encontre.

Rappel des faits qui vous sont reprochés :

En date du 27 Octobre 2018, vous vous êtes présenté à votre poste dans un état d'ébriété visible. En effet, votre haleine sentait fortement l'alcool et votre comportement était anormal. Je vous ai donc demandé de me suivre dans mon bureau en présence de M. [L], votre collègue pour clarifier la situation et prendre la mesure adéquate sur le moment.

Il était sûr que vous ne pouviez pas assurer à bien votre mission sur votre poste de caissière dans votre état.

Visiblement vous n'avez pas apprécié et vous vous êtes mise à crier, à gesticuler dans tous les sens en proférant insultes et menaces envers moi. Je vous ai donc dit que j'allais appeler la police pour vous soumettre à un test d'alcoolémie uniquement pour votre sécurité car vous étiez incontrôlable.

C'est à ce moment que vous vous êtes calmée et vous êtes sortie de mon bureau pour partir. C'est au même moment que la police est arrivée sur les lieux et vous avez croisé les agents. Ils nous ont questionnées mais malheureusement vous aviez déjà pris la fuite, ils ont ensuite tenté de vous rattraper sans succès et n'ont pas pu vous faire passer le test.

Nous disposons de témoignages écrits des clients présents en magasin à ce moment-là, ainsi que vos collègues qui attestent de votre état ce jour-là.

Nous considérons que ces faits constituent une faute lourde et une violation du règlement intérieur de l'entreprise, rendant impossible votre maintien, même temporaire, dans l'entreprise.

Nous vous avons donc reçu dans nos locaux le 21 décembre 2018. Vous étiez accompagnée de M. [O]. Vous ne vous êtes pas exprimée, aucun mot n'est sorti de votre bouche, et aucune explication n'a été donnée. Seul votre comportement inadapté a été mis en lumière avec vos gestes provocateurs que nous qualifierons d'enfantins. Du fait vous n'avez pas profité de l'occasion pour vous expliquer et seul M. [O] s'est exprimé.

Malgré cet entretien et les explications que vous ne nous avez pas fournies, nous avons décidé de mettre fin à votre contrat de travail pour les raisons suivantes : Faute lourde pour votre état alcoolisé du 27 octobre 2018.

Vous cesserez de faire partie de l'entreprise à la date du 21 décembre 2018' »

Mme [V] [Z] fait valoir que les faits énoncés dans le courrier de mise à pied du 27 octobre 2018 sont identiques à ceux qui lui sont reprochés dans la lettre de rupture. Elle indique qu'elle ne pouvait pas être sanctionnée disciplinairement deux fois pour les mêmes faits, et sollicite en conséquence une somme de 14 720 euros correspondant aux salaires qu'elle aurait dû percevoir du 27 décembre 2018 jusqu'au terme du contrat, soit le 16 octobre 2019.

La société PYR s'oppose à la demande en rappelant que ses courriers des 27 octobre et 21 novembre 2018 n'avaient que pour objet d'avertir la salariée de l'ouverture d'une procédure disciplinaire à son encontre, de l'informer de sa mise à pied à titre conservatoire et de la convoquer à un entretien préalable à la rupture anticipée du contrat de travail.

Motivation :

Selon l'article L.1243-4 du code du travail, la rupture anticipée du contrat par l'employeur en dehors des cas autorisés ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat

En l'espèce, il est constaté que les motifs qui ont été retenus par l'employeur pour rompre le contrat de travail de la salariée sont identiques à ceux qui ont été invoqués à l'appui de la mise à pied du 27 octobre 2018.

Or, il résulte de ce qui précède que la mise à pied a été jugée nulle parce les faits à l'appui desquels elle a été prononcée ne sont pas établis.

Il n'était en conséquence pas possible pour la société PYR de s'en prévaloir pour sanctionner la salariée le 27 décembre 2018.

La rupture par l'employeur du contrat de travail à durée déterminée de Mme [V] [Z] étant de la sorte abusive, il sera dès lors fait droit à la demande au titre des salaires qui auraient dû être perçus jusqu'à la rupture du contrat de travail, le jugement du conseil de prud'hommes étant infirmé en ce qu'il a dit que le licenciement pour faute grave est régulier et débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes.

III. Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société PYR sera condamnée à payer à Mme [V] [Z] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et elle sera déboutée de sa demande formée à ce titre.

La société PYR sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Verdun en ce qu'il a :

- dit que la mise à pied à titre conservatoire est régulière,

- dit que le licenciement pour faute grave est régulier,

- débouté Mme [V] [Z] de l'ensemble de ses demandes ;

STATUANT A NOUVEAU

Requalifie la mise à pied conservatoire prononcée le 27 octobre 2018 en mise à pied disciplinaire ;

Annule la mise à pied disciplinaire du 27 octobre 2018 ;

Condamne la société PYR à payer à Mme [V] [Z] la somme de 2 944 euros (deux mille neuf cent quarante quatre euros) au titre des salaires pendant la période de la mise à pied ;

Condamne la société PYR à payer à Mme [V] [Z] la somme de 294,40 euros (deux cent quatre vingt quatorze euros et quarante centimes) au titre des congés payés afférents ;

Condamne la société PYR à payer à Mme [V] [Z] la somme de 1 000 euros (mille euros) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'annulation de la mise à pied ;

Dit que la rupture par la société PYR du contrat de travail à durée déterminée de Mme [V] [Z] est abusive ;

Condamne la société PYR à payer à Mme [V] [Z] la somme de 14 720 euros (quatorze mille sept cent vingt euros) au titre des salaires qui auraient dû être perçus jusqu'à la rupture du contrat de travail ;

Y AJOUTANT

Condamne la société PYR à payer à Mme [V] [Z] la somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société PYR aux dépens d'appel ;

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en dix pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/00624
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.00624 ?
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