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06/05/2022 | FRANCE | N°21/00653

France | France, Cour d'appel de Nancy, Première présidence, 06 mai 2022, 21/00653


COUR D'APPEL DE NANCY

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Requête en indemnisation à raison

d'une détention provisoire

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N° RG 21/00653 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXNU



Minute : 2/2022



du 06 Mai 2022





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





A l'audience du 01 Avril 2022, présidée par Monsieur Marc JEAN-TALON, Premier Président de la Cour d'Appel de NANCY, assisté de Madame Céline PAPEGAY, greffier et statuant sur la requête

enregistrée au secrétariat de la Première Présidence le 15 Mars 2021 sous le numéro RG 21/00653 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXNU, conformément aux dispositio...

COUR D'APPEL DE NANCY

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Requête en indemnisation à raison

d'une détention provisoire

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N° RG 21/00653 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXNU

Minute : 2/2022

du 06 Mai 2022

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

A l'audience du 01 Avril 2022, présidée par Monsieur Marc JEAN-TALON, Premier Président de la Cour d'Appel de NANCY, assisté de Madame Céline PAPEGAY, greffier et statuant sur la requête enregistrée au secrétariat de la Première Présidence le 15 Mars 2021 sous le numéro RG 21/00653 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EXNU, conformément aux dispositions de l'article 149-2 du Code de Procédure Pénale et formée par :

Monsieur [I] [W]

né le [Date naissance 2] 1983 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Maître Samira BOUDIBA, membre de la SCP NOIRJEAN GIRARD BOUDIBA GRAILLOT, avocat au barreau de NANCY,

L'agent judiciaire de l'État étant représenté par Maître François JAQUET, membre de la SCP TERTIO AVOCATS, avocat au barreau de NANCY,

Le ministère public étant représenté aux débats par Monsieur Philippe RENZI, avocat général près la cour d'appel de Nancy.

Vu le dossier de la procédure duquel il résulte que Monsieur [I] [W] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour des faits de divulgation de fausse information dans le but de faire croire à la commission d'une destruction, dégradation ou détérioration dangereuse pour les personnes ;

Vu la requête déposée le 15 mars 2021 par Maître Samira BOUDIBA, au nom de Monsieur [I] [W] ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire de l'État notifiées par lettre recommandée avec avis de réception le 12 mai 2021 ;

Vu les conclusions du procureur général près la cour d'appel de Nancy, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception le 12 juillet 2021 ;

Vu la lettre recommandée avec avis de réception en date du 23 février 2022 par laquelle a été notifiée la date de l'audience fixée au 01 Avril 2022 ;

Vu les articles 149 à 150 du code de procédure pénale ;

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [I] [W] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Nancy pour avoir, à [Localité 4] le 5 mars 2020, communiqué ou divulgué une fausse information dans le but de faire croire à la commission d'une destruction, dégradation ou détérioration dangereuse pour les personnes, en l'espèce en disant notamment « attentat possible, soyez vigilant et prudent ».

Par jugement contradictoire à signifier en date du 24 juillet 2020, le tribunal correctionnel de Nancy a déclaré Monsieur [I] [W] coupable des faits reprochés, l'a condamné à la peine de douze mois d'emprisonnement et a décerné mandat d'arrêt à son encontre.

Le mandat d'arrêt a été ramené à exécution le 27 juillet 2020.

Par arrêt rendu le 4 novembre 2020, devenu définitif, la cour d'appel de Nancy, statuant sur l'appel de Monsieur [I] [W] et du ministère public, a relaxé Monsieur [W] des fins de la poursuite.

Suivant requête parvenue au secrétariat de la première présidence le 15 mars 2021, Monsieur [I] [W] a sollicité l'indemnisation de sa détention provisoire à hauteur des sommes de :

- 18.000 euros au titre de son préjudice matériel,

- 23.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- 3.500 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

À l'appui de sa demande, il a fait valoir d'une part qu'il a souffert de l'image véhiculée devant ses voisins lors de son interpellation, qu'il avait précédemment réussi à stabiliser une instabilité psychologique, que son incarcération a généré une souffrance pour ses proches et qu'il convient de tenir compte de l'existence ou non d'un passé carcéral, et d'autre part qu'il n'a pu percevoir le RSA dont il était bénéficiaire et qu'il a perdu des revenus après sa libération pendant la période nécessaire à la recherche d'un emploi.

L'agent judiciaire de l'État n'a pas contesté la recevabilité de la requête de Monsieur [I] [W] mais a conclu à la réduction à 5.000 euros de la demande au titre du préjudice moral, au rejet de celle présentée au titre du préjudice matériel, faute de justification, et à la réduction à de plus justes proportions de la demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le procureur général près cette cour a également conclu à la réduction à 5.000 euros de la demande au titre du préjudice moral, au rejet de celle présentée au titre du préjudice matériel, faute de justification, et à la réduction à de plus justes proportions de la demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Lors des débats, tenus à l'audience du 1er avril 2022, les parties ont comparu et maintenu, chacune, la position développée dans leurs écritures.

SUR CE :

Sur la recevabilité de la requête

En application de l'article 149 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.

En l'espèce, Monsieur [I] [W] a bénéficié le 4 novembre 2020 d'une décision de relaxe rendue par la cour d'appel de céans, devenue définitive, a présenté sa requête dans le délai de six mois fixé par l'article 149-2 du code de procédure pénale et n'apparaît pas se trouver dans l'un des cas d'exclusion prévus par l'article 149 précité.

Sa requête est donc recevable.

Sur le bien-fondé de la requête

S'agissant du préjudice moral

Monsieur [I] [W], alors âgé de 37 ans, a été placé en détention provisoire du 27 juillet 2020 au 4 novembre 2020, soit durant 101 jours, avant d'être définitivement innocenté.

Il a ainsi nécessairement subi un préjudice moral résultant du choc carcéral ressenti par toute personne brutalement et injustement privée de liberté, et prolongé durant plus de trois mois.

Monsieur [I] [W] ne communique toutefois aucun élément susceptible de justifier les causes d'aggravation de ce préjudice qu'il invoque, en particulier quant à son état de santé ou sa situation familiale. Les conditions de son interpellation pour placement en garde à vue sont par ailleurs étrangères à l'indemnisation de la privation de liberté dans le cadre de la présente procédure.

En revanche il résulte du bulletin n° 1 du casier judiciaire de Monsieur [W] que celui-ci avait déjà connu huit périodes d'incarcération entre 2003 et 2019. Cette circonstance est de nature à réduire la souffrance psychologique subie lors de l'entrée en détention puis durant cette dernière.

Au regard de ces éléments, l'allocation de la somme de 8.000 euros réparera intégralement le préjudice moral subi par Monsieur [I] [W] du fait de la détention provisoire injustifiée dont il a fait l'objet.

S'agissant du préjudice matériel

M. [W], qui ne communique aucune pièce à ce titre, ne justifie pas avoir perçu le RSA avant son entrée en détention, ni la perte de ce RSA, ni même la recherche d'un emploi après sa sortie de détention.

Il n'apporte ainsi pas la preuve du préjudice qu'il invoque, de sorte que sa demande doit être rejetée.

S'agissant des frais non compris dans les dépens

Il serait inéquitable que M. [I] [W] conserve la charge intégrale des frais non compris dans les dépens qu'il a déboursés du fait de la présente instance. La somme de 1.500 euros lui sera en conséquence accordée en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,

Déclarons recevable en la forme la requête de M. [I] [W] ;

Lui allouons, en indemnisation de la détention provisoire injustifiée dont il a fait l'objet, les sommes de :

- 8.000 euros en réparation de son préjudice moral,

- 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejetons le surplus de la demande ;

Rappelons qu'en application de l'article R. 40 du code de procédure pénale, la présente décision est assortie de plein droit de l'exécution provisoire.

Laissons les frais à la charge de l'État.

Ainsi fait, jugé et prononcé par Monsieur Marc JEAN-TALON, premier président de la cour d'appel de NANCY, assisté de Madame Laurène RIVORY, greffier, conformément aux dispositions de l'article 149-1 du code de procédure pénale.

Le greffierLe premier président

Laurène RIVORY Marc JEAN-TALON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 21/00653
Date de la décision : 06/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-06;21.00653 ?
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