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05/05/2022 | FRANCE | N°21/00946

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 05 mai 2022, 21/00946


ARRÊT N° /2022

PH



DU 05 Mai 2022



N° RG 21/00946 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EYBS







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

19/00268

19 mars 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2









APPELANTE :



S.A. BANQUE CIC EST prise en la personne de son représentan

t légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY substituée par Me GROSSELIN Anne-Cécile, avocate au barreau de CHALON SUR SAONE





INTIMÉ :



Monsieur [K] [B]...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 05 Mai 2022

N° RG 21/00946 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EYBS

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

19/00268

19 mars 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

S.A. BANQUE CIC EST prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Clarisse MOUTON de la SELARL LEINSTER WISNIEWSKI MOUTON LAGARRIGUE, avocat au barreau de NANCY substituée par Me GROSSELIN Anne-Cécile, avocate au barreau de CHALON SUR SAONE

INTIMÉ :

Monsieur [K] [B]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Frédérique MOREL substituée par Me LASSERONT, avocates au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,

Président :WEISSMANN Raphaël,

Conseiller : STANEK Stéphane,

Greffier lors des débats :RIVORY Laurène

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 24 Février 2022 tenue par Raphaël WEISSMANN, Président, et Stéphane STANEK , conseiller, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en ont rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN, président, Dominique BRUNEAU, et Stéphane STANEK, conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 28 avril 2022; puis à cette date le délibéré a été prorogé au 05 mai 2022 ;

Le 05 Mai 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES

Monsieur [K] [B] a été engagé par la société CIC EST sous contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 01 avril 1982, en qualité de guichetier.

Le contrat de travail de Monsieur [K] [B] est régi par la convention collective de la banque.

A compter du 17 janvier 1995, Monsieur [K] [B] a occupé un poste de responsable de bureau, puis à compter du 10 février 2006 un poste de conseiller clientèle particulier, et enfin à compter du 15 juin 2009 un poste de conseiller en ligne.

Monsieur [K] [B] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 01 aout 2016.

A compter du 09 août 2016, Monsieur [K] [B] a été licencié pour faute grave.

Par requête du 31 mai 2019, Monsieur [K] [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy aux fins de contestation de son licenciement pour faute grave.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 19 mars 2021, lequel a :

- dit que la demande de Monsieur [K] [B] est recevable ;

- dit que le licenciement de Monsieur [K] [B] est nul et en conséquence a condamné la société CIC EST au paiement des sommes suivantes :

- 100 000,00 euros (CENT MILLE EUROS) à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- 59 796,41 euros (CINQUANTE-NEUF MILLE SEPT CENT QUATRE-VINGT SEIZE EUROS ET QUARANTE-UN CENTIMES) à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 8 337,00 euros (HUIT MILLE TROIS CENT TRENTE-SEPT EUROS) brut à titre d'indemnité de préavis ;

- 833,70 euros (HUIT CENT TRENTE-TROIS EUROS ET SOIXANTE-DIX CENTIMES) brut au titre des congés payés afférents ;

- 1 500,00 euros (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- a débouté Monsieur [K] [B] du surcroit de ses demandes ;

- a débouté la société CIC EST de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- a ordonné à la société CICI EST de rembourser aux organismes intéressés de tout ou parties des indemnités de chômage versées éventuellement à Monsieur [K] [B] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de 6 (SIX) mois d'indemnités de chômage ;

- a condamné la société CIC EST aux entiers frais et dépens.

Vu l'appel formé par la société CIC EST le 12 avril 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la société CIC EST déposées sur le RPVA le 29 novembre 2021, et celles de Monsieur [K] [B] déposées sur le RPVA le 15 septembre 2021,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 09 février 2022,

La société CIC EST demande :

- de déclarer l'appel recevable et bien-fondé ;

- d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy du 19 mars 2021 en ce qu'il a :

- dit que la demande de Monsieur [K] [B] est recevable ;

- dit que le licenciement de Monsieur [K] [B] est nul ;

- condamné la SA CIC EST au paiement des sommes de :

- 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- 59.796,41 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 8.337 euros brut à titre d'indemnité de préavis ;

- 833,70 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- a débouté la société CIC EST de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné à la SA CIC EST de rembourser aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées éventuellement à Monsieur [K] [B] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;

- condamné la SA CIC EST aux entiers frais et dépens ;

- et statuant à nouveau

- à titre principal, in limine litis, de juger les demandes de Monsieur [K] [B] prescrites, et en conséquence de déclarer irrecevables ses demandes ' à titre subsidiaire :

- sur le licenciement :

- à titre principal, de débouter Monsieur [K] [B] de l'ensemble de ses demandes ;

- à titre subsidiaire, si la Cour considérait que le licenciement est nul, de juger que Monsieur [K] [B] dans cette hypothèse ne pourrait prétendre qu'au paiement des indemnités de licenciement plafonnées à la somme de 44 848,23 euros, et compensatrice de préavis à hauteur de 5 570,68 euros, outre 557,07 euros au titre des congés afférents ;

- de juger que l'indemnisation de Monsieur [K] [B] en ce qui concerne tous les préjudices se rapportant au licenciement, doit avoir lieu conformément au barème de l'article L. 1235-3 du Code du travail ;

- de ramener en outre et en tout état de cause cette indemnisation à de plus justes proportions ;

- sur les autres demandes :

- de condamner Monsieur [K] [B] à verser au CIC EST la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

- de débouter Monsieur [K] [B] de sa demande au titre de l'article 700 ;

- de le condamner également aux entiers dépens et frais des première et seconde instances.

Monsieur [K] [B] demande :

- de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy le 19 mars 2021 en toutes ses dispositions ;

- y ajoutant, de condamner la société CIC EST à payer à Monsieur [K] [B] la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

- de condamner la société CIC EST aux entiers dépens de l'instance.

SUR CE, LA COUR

Pour plus ample exposé sur les moyens et prétentions des parties, il sera expressément renvoyé aux dernières écritures de la société CIC EST, déposées sur le RPVA le 29 novembre 2021, et aux dernières écritures de Monsieur [K] [B], déposées sur le RPVA le 15 septembre 2021.

Sur la prescription de l'action de Monsieur [K] [B] :

L'employeur fait valoir qu'en application de l'article 1471-1 du code du travail, applicable en l'espèce, l'action devant le juge des prud'hommes de Monsieur [K] [B] était prescrite, un délai de plus de deux ans s'étant écoulé entre la notification qui lui a été faite de son licenciement et la saisine du conseil de prud'hommes.

Il fait valoir que la date à partir de laquelle court le délai de prescription est celle de la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé réception notifiant au salarié son licenciement et non celle à laquelle il a effectivement reçu la lettre ; que l'obligation de prouver la réception par le salarié de la lettre recommandée avec accusé de réception n'incombe pas à l'employeur.

En outre, il fait valoir que l'accusé de réception de la lettre de notification a été effectivement signé, peu important que le salarié affirme qu'il n'en est pas le véritable signataire, puisque La Poste ne délivre des courriers recommandés qu'aux seuls mandataires désignés par le destinataire.

L'employeur fait valoir que le salarié ayant saisi le conseil de prud'hommes le 5 juin 2019 en contestation du bienfondé de la rupture alors que son licenciement a été notifié le 9 août 2016, son action est donc prescrite.

S'agissant de la mise sous curatelle du salarié qui l'aurait empêché d'agir, l'employeur fait valoir qu'il bénéficiait nécessairement d'une assistance et d'une protection lui permettant de défendre ses intérêts.

Enfin, l'employeur fait valoir que le 18 juin 2018, avant l'expiration du délai de prescription, le Docteur [S], psychiatre, écrivait que Monsieur [K] [B] ne présentait plus de troubles de l'humeur et ne nécessitait plus de traitement antidépresseur ni de suivi spécialisé et qu'il était donc en tout état de cause en capacité d'agir à cette date.

Monsieur [K] [B] fait valoir qu'il n'a jamais reçu la lettre de licenciement ; que la signature figurant sur l'accusé de réception n'est pas la sienne ; qu'en conséquence le licenciement ne lui ayant pas été signifié, le délai de prescription n'a pas commencé à courir.

Il fait en tout état de cause valoir qu'en raison de son état de santé physique et mental il était dans l'incapacité d'agir dans les délais légaux même si la lettre de licenciement lui avait été correctement notifiée ; qu'il avait souffert d'une dépression sévère et durable qui avait totalement aboli son discernement ; qu'il a été placé sous sauvegarde de justice le 19 décembre 2017 puis, sous curatelle renforcée à compter du 15 mars 2018, jusqu'au 22 octobre 2018.

Motivation :

L'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa version en vigueur du 17 juin 2013 au 24 septembre 2017, dispose que « Toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit. »

L'article L. 1232-6 prévoit que « Lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. »

En l'espèce, il n'est pas contesté que l'employeur a adressé à Monsieur [K] [B] le 9 août 2016 une lettre recommandée avec accusé de réception, à l'adresse de sa résidence (pièce n° 16 de l'appelante).

Il n'est pas non plus contesté que ce courrier a été reçu avec accusé de réception le 11 août 2016, la signature portée sur l'avis de réception en faisant foi.

La circonstance que Monsieur [K] [B] affirme que la signature n'est pas la sienne est sans emport, le règlement de La Poste prévoyant qu'une LRAR ne peut être remise qu'à son destinataire ou à son mandataire (pièce n° 21 de l'appelante). Il en résulte que l'accusé de réception a été signé, soit par Monsieur [K] [B], soit par la personne qu'il a mandatée à cet effet. A cet égard, il apparaît à la lecture du document que la signature y figurant apparaît sous la mention « ou du mandataire » (pièce n° 16 de l'appelante).

Il n'appartient pas à l'employeur de prouver que l'agent de La Poste qui a distribué ce courrier a respecté les prescriptions de son entreprise pour la délivrance des LRAR.

Dès lors, le délai de prescription de deux ans prévu par l'article L 1471-1 du code du travail courant à partir de la notification au salarié de la lettre de licenciement, l'action en justice de Monsieur [K] [B] introduite le 5 juin 2019 était prescrite depuis le 11 août 2018.

Les pièces médicales produites par Monsieur [K] [B] (pièces n° 10 à 16, 38 de l'intimé) ne démontrent pas qu'il a été dans l'impossibilité absolue d'agir en justice entre la date de notification de la lettre de licenciement et la fin du délai de prescription, étant relevé qu'il n'a fait l'objet d'une hospitalisation que du 19 juillet 2017 au 4 août 2017.

En outre, sa mise sous curatelle renforcée le 15 mars 2018 (pièce n° 29 de l'intimé) n'emporte pas la preuve qu'il était dans l'incapacité d'ester en justice mais permettait au contraire de s'assurer qu'il disposait de l'assistance nécessaire pour faire valoir ses droits.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la cour constate que l'action introduite par Monsieur [K] [B] devant la juridiction prud'homale pour voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse est prescrite, en conséquence de quoi il sera débouté de l'ensemble de ses demandes, le jugement du conseil de prud'hommes étant infirmé.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens :

La société BANQUE CIC EST et Monsieur [K] [B] seront déboutés de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles.

Monsieur [K] [B] sera condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement du 19 mars 2021 du conseil de prud'hommes de Nancy en sa totalité ;

STATUANT A NOUVEAU

Constate que l'action de Monsieur [K] [B] visant à faire juger son licenciement sans cause réelle est sérieuse est prescrite,

Déboute Monsieur [K] [B] de l'ensemble de ses demandes ;

Y AJOUTANT

Déboute la société BANQUE CIC EST et Monsieur [K] [B] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [K] [B] aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/00946
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;21.00946 ?
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