La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/04/2022 | FRANCE | N°21/01521

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 28 avril 2022, 21/01521


ARRÊT N° /2022

PH



DU 28 AVRIL 2022



N° RG 21/01521 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EZJS







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

18/00555

04 juin 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



S.A.S. TMF OPERATING prise en la personne

de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Hélène STROHMANN, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉE :



Madame [U] [O] épouse [Y]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER substitué ...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 28 AVRIL 2022

N° RG 21/01521 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EZJS

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

18/00555

04 juin 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

S.A.S. TMF OPERATING prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Hélène STROHMANN, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

Madame [U] [O] épouse [Y]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER substitué par Me FORT, avocats au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président :BRUNEAU Dominique

Siégeant comme magistrat chargé d'instruire l'affaire

Greffier :RIVORY Laurène (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 04 Février 2022 tenue par BRUNEAU Dominique, magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN, président, Dominique BRUNEAU et Stéphane STANEK , conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 31 Mars 2022 ; date à laquelle le délibéré a été prorogé au 28 Avril 2022 ;

Le 28 Avril 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

Mme [U] [Y] a été engagé par la société COSITRAF, devenue la société TMF OPERATING, suivant contrat à durée déterminée du 1er novembre 1983 au 31 janvier 1984 en qualité d'employée service route débutante.

Les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée le 30 avril 1984.

Elle a occupé, à compter du 1er novembre 1994, le poste de responsable d'exploitation de l'affrètement.

Par courrier du 22 mars 2018, elle a été convoquée à un entretien préalable au licenciement pour motif économique fixé au 6 avril 2018.

Le 7 avril 2018, Mme [U] [Y] a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle.

Par courrier du 17 avril 2018, le motif économique du licenciement a été notifié à Mme [U] [Y].

Par requête du 26 novembre 2018, Mme [U] [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Nancy aux fins de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir, en conséquence, des dommages et intérêts ou, à titre subsidiaire, des dommages et intérêts pour non-respect des critères d'ordre de licenciement.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 4 juin 2021 qui a:

- dit que le licenciement de Mme [U] [Y] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société à verser à Mme [U] [Y] les sommes suivantes :

- 50 235,80 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 45 212,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudices liés à l'absence d'adaptation au poste et de formation, ainsi que pour préjudice moral,

- constaté que Mme [U] [Y] a perçu une somme de 26 097 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- condamné la société à lui verser à Mme [U] [Y] la somme de 694,96 euros nets à titre de complément d'indemnité de licenciement,

- condamné la société à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la société de délivrer à Mme [U] [Y] les documents de fin de contrat rectifiés conformément au jugement sans astreinte,

- débouté Mme [U] [Y] du surplus de ses demandes,

- débouté la société de ses demandes, fins et prétentions,

- condamné la société aux entiers dépens,

Vu l'appel formé par la société TMF OPERATING le 17 juin 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de la société TMF OPERATING déposées sur le RPVA le 14 janvier 2022 et celles de Mme [U] [Y] déposées sur le RPVA le 26 novembre 2021,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 26 janvier 2022,

La société TMF OPERATING demande à la cour:

- d'infirmer la décision en ce qu'elle a :

- dit que le licenciement de Mme [U] [Y] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- l'a condamnée au paiement des sommes suivantes :

- 50 235,80 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 45 212,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudices liés à l'absence d'adaptation au poste et de formation, ainsi que pour préjudice moral,

- 694,96 euros nets à titre de complément d'indemnité de licenciement,

- 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- lui a ordonné de délivrer à Mme [U] [Y] les documents de fin de contrat rectifiés conformément au jugement,

- l'a déboutée de ses demandes, fins et prétentions,

- l'a condamnée aux entiers dépens,

- de confirmer la décision en ce qu'elle a :

- constaté que Mme [U] [Y] a perçu une somme de 26 907 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- débouté Mme [U] [Y] du surplus de ses demandes.

Statuant à nouveau,

- de débouter Mme [U] [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires et de tout appel incident,

- de condamner Mme [U] [Y] à lui payer la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner Mme [U] [Y] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

A titre subsidiaire et si par extraordinaire la cour considérait le licenciement pour motif économique sans cause réelle ni sérieuse,

- de constater l'absence de préjudice,

- de limiter l'indemnisation de Mme [U] [Y] à la somme de 7 535,37 euros toute cause de préjudice confondue.

*

Mme [U] [Y] demande à la cour:

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris en date du 4 juin 2021 en ce qu'il a :

- dit que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société à lui verser les sommes suivantes :

- 50 235,80 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 45 212,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudices liés à l'absence d'adaptation au poste et de formation, ainsi que pour préjudice moral,

- constaté qu'elle a perçu une somme de 26 097 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

- condamné la société à lui verser la somme de 694,96 euros nets à titre de complément d'indemnité de licenciement,

- condamné la société à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la société de lui délivrer les documents de fin de contrat rectifiés conformément au jugement sans astreinte,

- débouté Mme [U] [Y] du surplus de ses demandes,

- débouté la société de ses demandes, fins et prétentions,

- condamné la société aux entiers dépens,

- de condamner la société TMF OPERATING au paiement d'une indemnité d'un montant de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles à hauteur de cour, ainsi qu'aucun frais et dépens de l'instance d'appel.

La cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées et soutenues à l'audience du 4 février 2022.

SUR CE, LA COUR ;

Sur le licenciement.

- Sur le motif du licenciement.

L'article L 1233-3 du code du travail dispose que : 

« Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

'

3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ».

Le juge prud'homal est tenu de contrôler le caractère réel et sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur.

La société TMF OPERATING expose que suite notamment au départ de plusieurs de ses dirigeants, elle s'est trouvée en difficulté économique et a dû réduire son personnel ; elle apporte au dossier :

Les lettres de démission de ses anciens dirigeants ;

Le compte-rendu de la réunion du comité d'entreprise du 28 février 2018 ;

Des courriels émanant de l'entreprise et adressés à des prospects.

Toutefois, la société n'apporte aucun document, notamment comptable, justifiant les difficultés économiques qu'elle allègue ; qu'en particulier, le tableau intitulé « Difficultés économiques : agence [Localité 5] », annexé au compte-rendu de la réunion du comité d'entreprise extraordinaire du 28 février 2018, est présenté sans une clé de lecture des termes utilisés et des chiffres y figurant, et ne permet pas à la cour d'apprécier la réalité des difficultés évoquées par la société TMF OPERATING, l'exposé lors de cette réunion des difficultés alléguées ne permettant pas de pallier l'insuffisance de la démonstration objectivement chiffrée de ces difficultés.

Dès lors, la société TMF OPERATING ne justifie pas de la réalité des difficultés économiques sur fondement desquelles elle a prononcé le licenciement de Mme [U] [O] [Y] ;

En conséquence, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner la demande au titre du respect de l'ordre des licenciements, il convient de dire le licenciement de Mme [U] [O] [Y] sans cause réelle et sérieuse, et la décision entreprise sera confirmée.

- Sur les conséquences indemnitaires du licenciement abusif.

C'est par une exacte appréciation du montant de la rémunération mensuelle moyenne brut de Mme [U] [O] [Y], soit la somme de 2511,79 euros, de son ancienneté dans l'entreprise, de son âge lors de son départ de celle-ci et de sa situation personnelle postérieure que les premiers juges ont fixé le montant des dommages et intérêts pour licenciement abusif dus à la salariée à l'équivalent de 20 mois de salaire, soit la somme de 50 235,80 euros.

La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Par ailleurs, Mme [U] [O] [Y] expose qu'elle a perçu au titre de l'indemnité de licenciement la somme de 26 097,47 euros alors qu'en application des dispositions légales et réglementaires sur ce point, il lui était dû la somme de 26 792, 43 euros.

La société TMF OPERATING soutient pour sa part que le montant de l'indemnité de licenciement a été calculé au regard de périodes de congé maladies qui ne sont pas prises en compte pour le calcul de cette indemnité.

Toutefois, la société n'apporte pas d'élément justifiant de ces périodes.

Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont condamné la société à verser à Mme [U] [O] [Y] la somme de 694,96 euros à titre de complément de l'indemnité de licenciement.

La décision entreprise sera donc confirmée sur ce point.

Sur la demande au titre du manquement de l'employeur à son obligation d'adaptation du salarié.

L'article L 6321-1 du code du travail dispose que :

« L'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations ».

Il ressort de ce texte que cette obligation pèse sur l'employeur en dehors de toute demande de la part des salariés.

Mme [U] [O] [Y] expose qu'elle n'a pas bénéficié de formation lui permettant de préserver son employabilité.

La société TMF OPERATING soutient pour sa part que Mme [U] [O] [Y] n'a jamais émis de souhait de formation, et qu'elle a pu dans le cadre de l'exercice de ses fonctions disposer de l'expérience lui permettant de s'adapter à l'évolution de celle-ci.

Toutefois, il convient de constater que Mme [U] [O] [Y] a exercé les fonctions de responsable d'exploitation de l'affrètement routier durant plus de 23 ans ;

La société TMF OPERATING ne démontre pas que la salariée a bénéficié de formations durant cette période.

Dès lors, il y a lieu de constater que l'employeur a manqué à son obligation de veiller au maintien de la capacité de sa salariée à occuper un emploi ; que ce manquement a causé à Mme [U] [O] [Y] un préjudice qu'il convient de fixer, au regard de l'ancienneté de celle-ci dans son poste, à la somme de 20 000 euros.

En revanche, Mme [U] [O] [Y] ne démontre pas l'existence d'un préjudice moral distinct de celui subi au titre du manquement de l'employeur à son obligation de veiller au maintien de la capacité de sa salariée à occuper un emploi ; elle sera donc déboutée de cette demande.

La décision entreprise sera donc réformée sur ce point.

La société TMF OPERATING, qui succombe, supportera les dépens d'appel.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [U] [O] [Y] l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés ; il sera fait droit à cette demande à hauteur de 2500 euros.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement rendu le 4 juin 2021 par le conseil de prud'hommes de Nancy en ce qu'il a condamné la société TMF OPERATING à payer à Mme [U] [O] [Y] la somme de 45 212,22 euros nets à titre de dommages et intérêts pour préjudices liés à l'absence d'adaptation au poste et de formation, ainsi que pour préjudice moral ;

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

STATUANT A NOUVEAU;

CONDAMNE la société TMF OPERATING à payer à Mme [U] [O] [Y] la somme de 20 000 euros (vingt mille euros) à titre de dommages et intérêts pour préjudices liés à l'absence d'adaptation au poste et de formation ;

DEBOUTE Mme [U] [O] [Y] de sa demande au titre du préjudice moral ;

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

DIT que la société TMF OPERATING supportera les dépens d'appel ;

CONDAMNE la société TMF OPERATING à payer à Mme [U] [O] [Y] la somme de 2500 euros (deux mille cinq cents euros) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/01521
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;21.01521 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award