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28/04/2022 | FRANCE | N°21/01041

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale-2ème sect, 28 avril 2022, 21/01041


ARRÊT N° /2022

PH



DU 28 AVRIL 2022



N° RG 21/01041 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EYIK







Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

19/00202

30 mars 2021











































COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2













APPELANTE :



Madame [S] [W]

[Adresse 1]

[

Localité 2]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER, avocat au barreau de NANCY









INTIMÉE :



S.A.R.L. INTER ENTREPRISES SERVICES prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Bertrand F...

ARRÊT N° /2022

PH

DU 28 AVRIL 2022

N° RG 21/01041 - N° Portalis DBVR-V-B7F-EYIK

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANCY

19/00202

30 mars 2021

COUR D'APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE - SECTION 2

APPELANTE :

Madame [S] [W]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Fabrice GOSSIN de la SCP FABRICE GOSSIN ET ERIC HORBER, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.R.L. INTER ENTREPRISES SERVICES prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Bertrand FOLTZ de la SELARL FILOR AVOCATS, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président :BRUNEAU Dominique

Siégeant comme magistrat chargé d'instruire l'affaire

Greffier :RIVORY Laurène (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue en audience publique du 25 Février 2022 tenue par BRUNEAU Dominique, magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Raphaël WEISSMANN, président, Dominique BRUNEAU et Stéphane STANEK , conseillers, dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 28 Avril 2022 ;

Le 28 Avril 2022, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES.

Mme [S] [W] a été engagée par la société UPIMM sous contrat à durée indéterminée, à compter du 03 février 1992, en qualité d'assistante sociale.

A compter du 01 janvier 1993, son contrat de travail a fait l'objet d'un transfert auprès de la société Inter Entreprises Services (IES).

Puis, par avenant en date du 28 février 2015, Madame [S] [W] a été promue en qualité de directrice du département social de la société Inter Entreprises Services.

Par courrier en date du 10 décembre 2018, Madame [S] [W] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement, avec notification d'une mise à pied à titre conservatoire ;

Par courrier en date du 27 décembre 2018, elle a été licenciée pour faute grave, son employeur lui reprochant des faits de harcèlement moral à l'égard de ses subordonnés.

Par requête en date du 24 avril 2019, Madame [W] a saisi le Conseil de prud'hommes de NANCY aux fins de contestation de son licenciement

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Nancy rendu le 30 mars 2021, lequel a :

- dit que le licenciement pour faute grave de Madame [S] [W] est justifié ;

- dit qu'elle n'a pas réalisé d'heures supplémentaires au-delà de celles rémunérées mensuellement et forfaitairement par la société Inter Entreprises Services ;

- débouté Madame [S] [W] de l'ensemble de ses demandes ;

- l'a condamné au versement de la somme de 100 euros à la société Inter Entreprises Services au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Madame [S] [W] aux entiers dépens de l'instance.

Vu l'appel formé par Madame [S] [W] le 22 avril 2021,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les conclusions de Madame [S] [W] déposées sur le RPVA le 14 février 2022, et celles de la société Inter Entreprises Services déposées sur le RPVA le 07 février 2022,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 09 février 2022,

Madame [S] [W] demande à la cour:

- d'infirmer le jugement entrepris ;

- de dire qu'elle a fait l'objet d'un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

-de condamner la société Inter Entreprises Services à lui payer les sommes de:

- 28 935,42 euros (6 x 4 822,57 euros) à titre d'indemnité de préavis ;

- 2 893,54 euros au titre des congés payés sur préavis ;

- 37 858,00 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 89 217,54 euros (18,5 x 4 822,57 euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

- 20 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct ;

- 22 680,15 euros au titre des heures supplémentaires ;

- 2 268,00 euros à titre des congés payés y afférents ;

- 16 922,40 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos ;

- 28 389,66 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

- 3 274,56 euros au titre de rappel de salaire ;

- 2 858,13 euros à titre de salaire mis à pied ;

- de condamner la société Inter Entreprises Services à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers frais et dépens.

La société Inter Entreprises Services demande à la cour:

- de déclarer l'appel recevable mais mal fondé et en conséquence ;

- de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Nancy le 30 mars 2021 entre les parties, en ce qu'il a :

- dit que le licenciement pour faute grave de Madame [S] [W] était justifié ;

- dit que Madame [S] [W] n'avait pas réalisé d'heures supplémentaires au-delà de celles rémunérées mensuellement et forfaitairement par la société Inter Entreprises Services ;

- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné Madame [S] [W] au versement de la somme de 100 euros à la SARL Inter Entreprises Services au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- l'a condamnée aux entiers dépens de l'instance ;

- et statuant à nouveau :

- de la condamner à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à hauteur de Cour ;

- de laisser les entiers frais et dépens à la charge de Madame [S] [W].

La cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions déposées et soutenues à l'audience du 25 février 2022.

SUR CE, LA COUR ;

- Sur le licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. C'est à l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier d'en rapporter la preuve.

Par lettre du du 27 décembre 2018, Mme [S] [W] a été licenciée pour faute grave, son employeur lui reprochant des faits de harcèlement moral à l'égard de ses subordonnés.

- Sur la prescription.

L'article L 1333-4 du code du travail qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

Mme [S] [W] expose que les faits qui lui sont reprochés sont prescrits en ce que l'employeur avait connaissance de ceux-ci tel qu'il résulte de la lecture des termes mêmes de la lettre de licenciement.

La lettre de licenciement est, sur ce point, ainsi rédigée:

Le médecin du travail, par courrier du 9 août 2017 et l'inspecteur du travail, par courrier du 8 septembre 2017, faisant suite à un contrôle au sein de l'établissement du 28 août 2017, ont alerté sur des situations de souffrance au travail.

Le 18 juin dernier, la Direction a été interpellée par des salariés, faisant état d'une situation tendue avec vous.

C'est dans ces conditions que nous avons saisi, d'un commun accord, un cabinet indépendant, à savoir le cabinet BETTER HUMAN Cie pour réaliser un audit concernant la souffrance au travail, sur nos trois sites.

Le cabinet d'audit a entendu 20 personnes uniquement sur le site de [Localité 4] entre le 12 et le 20 novembre 2018.

Il résulte de la synthèse présentée le 10 décembre dernier suite à l'audit de notre site de [Localité 4] que tous les critères caractérisant le harcèlement moral sont présents...'.

Il ressort donc de ces éléments que la société IES, après avoir reçu des informations sur des faits relatifs à des comportements de harcèlement moral mettant en cause Mme [S] [W],a, avec l'accord de celle-ci, fait diligenter une expertise afin d'établir ces faits et de les qualifier.

Ce n'est donc que lors du dépôt du rapport établi par le cabinet extérieur désigné pour effectuer cette expertise, soit le 10 décembre 2018, que la société IES a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés ;

La procédure disciplinaire a été engagée le même jour.

Dès lors, il convient de constater que cette procédure a été engagée dans le délai rappelé plus haut, et que la prescription invoquée n'est pas encourue.

La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

- Sur le motif du licenciement.

La société IES reproche à Mme [S] [W] d'avoir adopté à l'égard des salariés placés sous sa responsabilité un comportement de harcèlement moral.

Mme [S] [W] conteste le grief, exposant que le rapport d'audit ne fait état d'aucun fait précis, ne cite aucun nom de salarié, comprend des erreurs et appoximations, et que pour sa part elle produit des attestations aux termes desquelles il apparaît qu'elle était appréciée par les salariés de l'entreprise.

Toutefois, c'est par une exacte analyse de la teneur et du contenu des neuf attestations établies par des salariés et apportées au dossier par la société IES, documents qui font état de faits précis, et par une motivation que la cour adopte, que les premiers juges ont estimé que le comportement de Mme [W] avait eu pour objet ou pour effet de dégrader la santé psychique et physique de ces salariés, et qu'il importait de mettre fin à cette situation dans les meilleurs délais.

Dès lors, il convient de constater que le comportement fautif de Mme [S] [W] rendait impossible son maintien dans l'entreprise.

En conséquence, il y a lieu de dire le licenciement pour faute grave de Mme [S] [W] par la société IES valide, et de confirmer la décision entreprise sur ce point, ainsi qu'en ce qu'elle a débouté Mme [W] de sa demande de paiement des rémunérations de la période de mise à pied.

- Sur la demande au titre des heures supplémentaires et du travail dissimulé.

Il ressort des dispositions de l'article L 3171-4 en sa rédaction applicable au litige qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le contrat de travail de Mme [S] [W] prévoyait le paiement de 15,16 heures supplémentaires mensuelles.

C'est par une exacte appréciation des pièces du dossier que les premiers juges ont constaté que:

- Mme [S] [W] apportait des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétendait avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ;

- la société IES apportait au dossier des éléments relatifs au contrôle des heures de travail mis en place dans l'entreprise, dont en particulier l'agenda Google de Mme [W] et les relevés du système de badgeage.

C'est par une analyse précise et détaillée de la comparaison des éléments fournis respectivement par la salariée et l'employeur et par une motivation que la cour adopte, que les premiers juges, qui ont constaté que de nombreuses heures supplémentaires revendiquées par la salariée correspondaient notamment à des réunions non tenues ou annulées ainsi qu'à la participation à titre personnel de la salariée à des réunions d'associations professionnelles, ont estimé que les éléments qui leurs étaient fournis n'établissaient pas que Mme [S] [W] avait effectué un nombre d'heures supplémentaires supérieur à celui qui lui était contractuellement rémunéré.

C'est également par une exacte appréciation du contenu des bulletins de paie et de l'agenda Google de la salariée que les premiers juges ont constaté que les repos compensateurs générés par les heures supplémentaires contractuellement prévues avaient été régulièrement attribués à la salariée.

En conséquence, les demandes relatives tant au paiement d'heures supplémentaires qu'au paiement d'une indemnité pour travail dissimulé seront rejetées, et la décision entreprise sera confirmée sur ces points.

- Sur la demande au titre de la prime d'objectif pour l'année 2018.

Mme [S] [W] expose qu'elle n'a pas été réglée de la prime d'objectif pour l'année 2018, pour un montant de 3274,56 euros ;

Toutefois, il ressort du bulletin de paie du mois d'avril 2019 qu'elle a été réglée au titre de la prime d'objectif pour l'année 2018 d'une somme de 3653 euros.

Dès lors, il convient de débouter Mme [S] [W] de sa demande, et de confirmer la décision entreprise sur ce point.

- Sur la demande en dommages et intérêt pour préjudice distinct.

Aucun manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles n'étant établi, cette demande sera rejetée, et la décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Mme [S] [W], qui succombe, supportera les dépens d'appel.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la société IES l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a supportés ; la demande sur ce point sera rejetée.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

CONFIRME le jugement rendu le 30 mars 2021 par le conseil de prud'hommes de Nancy ;

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

DIT que Mme [S] [W] supportera les dépens d'appel ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Et signé par Monsieur Raphaël WEISSMANN, Président de Chambre, et par Madame Laurène RIVORY, Greffier.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Minute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale-2ème sect
Numéro d'arrêt : 21/01041
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;21.01041 ?
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