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10/10/2008 | FRANCE | N°07/02537

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale, 10 octobre 2008, 07/02537


RG : 07 / 02537
Conseil de Prud'hommes de NANCY 07 / 00151 24 octobre 2007

COUR D'APPEL DE NANCY CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :
SARL INLUCE, venant aux droits de la société FABRIK, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social 21 rue Nabécor 54000 NANCY Comparante en la personne de Monsieur Sébastien X..., gérant Assisté de Maître Etienne GUIDON (Avocat au Barreau de NANCY)

INTIMÉ :
Monsieur Renaud Z... ... Comparant en personne Assisté de Maître Frédéric BARBAUT (Avocat au Barreau de NANCY)

COMPOSITION

DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré,
Président de Chambre : Madame SCHMEITZKY Conseil...

RG : 07 / 02537
Conseil de Prud'hommes de NANCY 07 / 00151 24 octobre 2007

COUR D'APPEL DE NANCY CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :
SARL INLUCE, venant aux droits de la société FABRIK, prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social 21 rue Nabécor 54000 NANCY Comparante en la personne de Monsieur Sébastien X..., gérant Assisté de Maître Etienne GUIDON (Avocat au Barreau de NANCY)

INTIMÉ :
Monsieur Renaud Z... ... Comparant en personne Assisté de Maître Frédéric BARBAUT (Avocat au Barreau de NANCY)

COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré,
Président de Chambre : Madame SCHMEITZKY Conseillers : Madame MLYNARCZYK, Madame ZECCA-BISCHOFF

Greffier présent aux débats : Madame FRESSE
DÉBATS :
En audience publique du 05 septembre 2008 ;
L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 10 octobre 2008 ;
A l'audience du 10 octobre 2008, la Cour, après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :
FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur Renaud Z..., né le 26 octobre 1973, a été engagé à compter du 18 avril 2006 par la société Fabrik, aux droits de laquelle succède la société Inluce, en qualité de technicien poseur / étalagiste moyennant une rémunération mensuelle brute de 1 910,82 € pour un horaire de travail hebdomadaire de 35 heures.
La société employait moins de onze salariés.
Il n'est pas contesté que Monsieur Z... s'est vu confier à compter de juillet 2006 des fonctions renforcées de responsable de production, le salarié soutenant avoir fait l'objet d'un licenciement verbal le 21 novembre 2006 lors d'un entretien avec Monsieur X..., gérant de la société, ce que ce dernier a toujours contesté.
Monsieur Z... a été licencié pour motif économique par lettre du 18 janvier 2007 pour suppression de son poste lié à des difficultés économiques.
Contestant la légitimité de son licenciement et soutenant avoir effectué des heures supplémentaires, Monsieur Z... a saisi le 13 février 2007 le Conseil de Prud'hommes de Nancy aux fins de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et d'une double demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif et pour préjudice moral.
Par jugement du 24 octobre 2007, le Conseil de Prud'hommes a dit que le licenciement de Monsieur Z... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et condamné la société Fabrik à lui payer :
- 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,- 2 500 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,- 800 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le Conseil de Prud'hommes a débouté le salarié de sa demande de rappel d'heures supplémentaires.
La société Fabrik, aux droits de laquelle succède la société Inluce, a régulièrement interjeté appel ; elle conclut à l'infirmation partielle du jugement et au rejet de l'intégralité des demandes de Monsieur Z... à l'encontre duquel elle sollicite 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Monsieur Z... conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse et forme appel incident pour réclamer la somme de 9 686,25 € au titre des heures supplémentaires, 15 000 € pour licenciement abusif et 5 000 € pour préjudice moral du fait de l'annonce brutale de son licenciement, outre 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
La Cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier, du 5 septembre 2008, dont elles ont maintenu les termes lors de l'audience.
MOTIVATION
- Sur les heures supplémentaires
S'il résulte de l'article L. 3171-4 du Code du Travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires.
Monsieur Z... réclame la somme globale de 9 686,25 € correspondant d'une part aux cinq heures supplémentaires de travail par semaine et d'autre part aux nombreuses heures supplémentaires accomplies à compter du 17 juillet 2006 lors de la période où il a exercé les fonctions de responsable de production.
La société Inluce conteste ces demandes aux motifs que l'intéressé a bénéficié de jours de récupération et qu'il consultait de nombreux sites de jeux lors de ses heures de travail.
Au soutien de sa réclamation, Monsieur Z... produit l'attestation de Madame D..., ancienne collègue, affirmant qu'il était présent quotidiennement à l'entreprise lors de ses heures d'ouverture de 9h à 12h et de 14h à 19h, horaires non contestés en soi par la société Inluce.
Sont également communiquées les copies de courriers électroniques émis par Monsieur Z... sur la période correspondant à sa prise de responsabilité et faisant mention d'horaires effectués au-delà de 19h ainsi que de courriers professionnels émis un samedi et un dimanche.
Pour autant, l'examen attentif des bulletins de paie de l'intéressé font état de la prise effective de cinq jours de récupération à défalquer des heures supplémentaires accomplies, le listing de fichiers informatiques temporaires joint au dossier ne suffisant pas à en imputer la consultation à Monsieur Z... durant ses heures de travail.
Il apparaît en conséquence que les éléments fournis par le salarié sont de nature à étayer, en son principe, sa demande de rappel d'heures supplémentaires que la Cour est en mesure de fixer ; à l'examen des différentes pièces transmises au dossier, à la somme de 3 000 €, outre 300 € à titre de congés payés afférents.
Le jugement sera infirmé en ce sens.
- Sur le licenciement
Il résulte de la combinaison des articles L. 1233-16 et L. 1233-1 du Code du Travail que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit énoncer, lorsqu'un motif économique est invoqué, à la fois la cause économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi et le contrat de travail du salarié ; il appartient de plus au juge d'apprécier le caractère sérieux du motif économique invoqué par l'employeur ainsi que l'effectivité de l'obligation de reclassement mise à la charge de l'employeur.
La lettre de licenciement est ainsi libellée :
" Pour faire suite à l'entretien préalable qui a eu lieu le Lundi 8 janvier 2007 au siège de la société et pour lequel vous vous êtes fait assister par un conseiller extérieur, nous sommes au regret de vous notifier votre licenciement pour motif économique motivé par la suppression de votre poste de travail lié par nos soudaines difficultés économiques liées à la perte de marchés d'importance, ce qui nous occasionne une perte de chiffre d'affaires tout à fait significative depuis le dernier trimestre 2006.
En effet, ainsi que nous avons pu vous en informer lors de l'entretien, notre expert-comptable nous a alerté en urgence sur la nécessité qu'il y avait de réduire notre masse salariale compte tenu d'un niveau de charges fixes trop élevé par rapport à nos rentrées.
Notre chiffre d'affaires est insuffisant pour couvrir nos charges et la situation va sensiblement s'aggraver du fait de la perte récente de l'un de nos 2 clients principaux (Kenzo).
En conséquence, ne pouvant sur le plan économique et financier nous permettre de maintenir un effectif constant sauf à mettre en péril l'économie et la rentabilité de notre société, la suppression de votre poste de travail est donc devenue inévitable compte tenu du fait que vous êtes le dernier arrivé dans la société. Le choix s'est donc porté sur votre poste.
Nous vous avons en outre expliqué que nous envisagions d'autres suppressions de postes si notre activité ne s'améliorait pas très rapidement et qu'eu égard à la très faible taille de l'entreprise et à la structure très restreinte de notre effectif qui se doit d'être polyvalent, il nous était totalement impossible de vous proposer une solution de reclassement, qui n'existe pas en l'état.
Compte tenu de ces éléments, votre licenciement pour motif économique est donc devenu inévitable. " (Sic)
Monsieur Z..., qui affirme avoir été licencié verbalement le 21 novembre 2006 sans cependant en apporter la preuve formelle compte tenu de la teneur contradictoire des courriers échangés entre lui et Monsieur X... et à défaut de témoignages autres que celui de Madame D..., elle-même licenciée, conteste la réalité des difficultés économiques invoquées par la société Inluce qui en outre n'a pas satisfait à son obligation de reclassement en recrutant, dès le 5 mars 2007, une autre responsable d'agence.
La société Inluce affirme que le licenciement de Monsieur Z... est fondé sur un motif économique, eu égard à la perte de son chiffre d'affaires résultant notamment de l'abandon de son client principal Kenzo et à la nécessité de réduire les effectifs de la société.
S'agissant des difficultés financières de la société Inluce, il ressort effectivement des pièces comptables versées aux débats qu'entre le 31 juillet 2006 et le 31 juillet 2007 l'entreprise a enregistré une perte de son chiffre d'affaires passant de 1 542 670 € à 840 357 € ; est produit le courrier du cabinet d'expertise comptable de la société lui indiquant qu'au regard de l'ampleur de ses charges financières fixes, elle devait envisager la réduction de ses effectifs.
Le motif économique du licenciement est ainsi suffisamment caractérisé.
S'agissant de l'obligation de reclassement mise à la charge de l'employeur, non seulement la société Inluce ne justifie par aucune pièce avoir concrètement cherché à reclasser Monsieur Z... au sein de l'entreprise, mais il apparaît de plus qu'elle a procédé dès le 5 mars 2007, soit moins de deux mois après le licenciement, à l'embauche définitive de Madame E... en qualité de responsable d'agence et chargée de clientèle, sans avoir proposé au préalable ce type de poste à l'intéressé.
Le licenciement de Monsieur Z... doit donc être considéré comme dénué de cause réelle et sérieuse, faute pour l'employeur d'avoir respecté son obligation de reclassement.
Le préjudice subi de ce fait par l'intéressé ayant été exactement apprécié en première instance, compte tenu de son âge et de son ancienneté limitée, le jugement sera confirmé.
- Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral
C'est à juste titre que les premiers juges ont fait droit à la demande de dommages et intérêts de Monsieur Z... en réparation de son préjudice moral, compte tenu des circonstances particulières ayant entouré son licenciement, ainsi que cela ressort des affirmations sans cesse contradictoires énoncées dans les courriers de l'employeur adressés à Monsieur Z... l'assurant de son intention de le garder tout en initiant dans la même période une procédure de licenciement.
Le préjudice moral, nécessairement subi par Monsieur Z... du fait des tergiversations incessantes de la société Inluce à son égard, ayant été de même justement évalué par les premiers juges, le jugement sera confirmé de ce chef.
- Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile
Il sera alloué une somme complémentaire de 1 200 € à Monsieur Z... au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
La COUR,
Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,
INFIRME partiellement le jugement et statuant à nouveau,
CONDAMNE la société Inluce à payer à Monsieur Renaud Z... :
- 3 000 € (TROIS MILLE EUROS) à titre de rappel d'heures supplémentaires ;
- 300 € (TROIS CENTS EUROS) à titre de congés payés afférents ;
CONFIRME pour le surplus le jugement déféré ;
Ajoutant,
CONDAMNE la société Inluce à payer à Monsieur Z... la somme de 1 200 € (MILLE DEUX CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
CONDAMNE la société Inluce aux entiers dépens.
Ainsi prononcé publiquement par Madame SCHMEITZKY, Président, et signé par Madame SCHMEITZKY, Président, et par Madame FRESSE, Greffier Placé présent lors du prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/02537
Date de la décision : 10/10/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 02 juin 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 2 juin 2010, 08-45.316, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Nancy, 24 octobre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nancy;arret;2008-10-10;07.02537 ?
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