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11/01/2008 | FRANCE | N°05/03319

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale, 11 janvier 2008, 05/03319


ARRÊT No PH

DU 11 JANVIER 2008
R. G : 05 / 03319
Conseil de Prud'hommes de LONGWY F04 / 88 18 novembre 2005

COUR D'APPEL DE NANCY CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :
Mademoiselle Nabia X... ... 54400 LONGWY HAUT Représentée par Monsieur Robert GIOVANARDI (Délégué Syndical Ouvrier), régulièrement muni d'un pouvoir

INTIMÉE :
S. A. S. METZELER APS prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social ZI Villers la Montagne 54920 VILLERS LA MONTAGNE Représentée par Maître Michel GAMELON (Avocat au Barreau de BRIEY)



COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,
Président de Chambre : Madame SCHMEIT...

ARRÊT No PH

DU 11 JANVIER 2008
R. G : 05 / 03319
Conseil de Prud'hommes de LONGWY F04 / 88 18 novembre 2005

COUR D'APPEL DE NANCY CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :
Mademoiselle Nabia X... ... 54400 LONGWY HAUT Représentée par Monsieur Robert GIOVANARDI (Délégué Syndical Ouvrier), régulièrement muni d'un pouvoir

INTIMÉE :
S. A. S. METZELER APS prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social ZI Villers la Montagne 54920 VILLERS LA MONTAGNE Représentée par Maître Michel GAMELON (Avocat au Barreau de BRIEY)

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,
Président de Chambre : Madame SCHMEITZKY Conseillers : Madame MAILLARD et Monsieur FERRON

Greffier présent aux débats : Mademoiselle FRESSE

DÉBATS :

En audience publique du 15 novembre 2007 ;
L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 11 janvier 2008 ;
A l'audience du 11 janvier 2008, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Le 8 juin 1994, Mademoiselle Nabia X... a été embauchée en qualité d'opératrice de finition caoutchouc par la société SAIAG TOKAI France aux droits de laquelle a succédé la société Metzeler.
Son salaire mensuel brut s'élevait en dernier lieu à 1 230 €.
L'entreprise employait plus de onze salariés.
La relation de travail était régie par la convention collective du caoutchouc.
Le 17 juillet 2003, l'employeur a adressé à Mademoiselle X... une proposition de modification de son contrat de travail consistant en un changement de ses horaires (passage d'un horaire 2x8 à un horaire 3x8) justifié par la situation de sureffectif résultant de l'arrêt de certains produits et la nécessité de maintenir la compétitivité de l'entreprise tout en maintenant l'emploi.
Mademoiselle X... a refusé cette proposition le 14 août 2003.
Le 5 décembre 2003, Mademoiselle X... a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement économique et il lui a été remis à cette occasion un document faisant état des motifs de la mesure envisagée, des critères retenus pour déterminer l'ordre des licenciements, des postes disponibles dans l'entreprise qui pouvaient lui être proposés.
Par courrier du 19 décembre 2003, Mademoiselle X... a répondu qu'elle refusait les propositions de reclassement qui lui avaient été faites.
Le 23 décembre 2003, l'employeur lui a notifié son licenciement pour motif économique et l'a dispensée d'effectuer son préavis.
Le 7 mai 2004, Mademoiselle X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Longwy pour voir reconnaître son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et obtenir à titre de dommages et intérêts une somme de 30 204 €. Subsidiairement, elle a réclamé la même somme à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements.
Par jugement du 18 novembre 2005, le Conseil de Prud'hommes l'a déboutée de toutes ses demandes.
Mademoiselle X... a régulièrement interjeté appel ; elle conclut à l'infirmation du jugement et maintient ses réclamations initiales.
La société Metzeler conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de Mademoiselle X... au paiement d'une somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La Cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier le 15 novembre 2007, dont elles ont maintenu les termes lors de l'audience.
MOTIVATION
Sur le licenciement
Il résulte de la combinaison des articles L. 122-14-2 et L. 321-1 du Code du Travail que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit énoncer, lorsqu'un motif économique est invoqué, à la fois la cause économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi et le contrat de travail du salarié ; il appartient de plus au juge d'apprécier le caractère sérieux du motif économique invoqué par l'employeur et l'effectivité de la mise en oeuvre de l'obligation de reclassement mise à la charge de l'employeur.
En l'espèce, la lettre de licenciement est ainsi libellée :
" Suite à l'entretien préalable que nous avons eu le vendredi 12 décembre 2003, nous avons le regret de vous notifier votre licenciement à compter du 29 février 2004 pour les motifs économiques suivants :
1o) Arrêt de la production du produit SAAB : Suite à une modification technique imposée par le client à laquelle nous ne pouvions pas répondre, d'où un sureffectif de deux personnes et demi.
2o) Arrêt de la production du produit cover Bumper : Plus de demande du client suite à la fin de série du véhicule correspondant, d'où un sureffectif d'une demi personne.
3o) Ajustement de la production du produit T16 : Aujourd'hui, compte tenu de la demande client en baisse et des cadences actuelles (150 pièces par poste et par opérateur), 3 personnes sont nécessaires pour satisfaire la demande actuelle contre 5 précédemment.
4o) Diminution des rebuts sur les productions Land Rover / Hot melt : Le taux de rebut sur ces postes de travail est passé de 60 à 45 % en moyenne, ce qui se traduit par un sureffectif d'une personne.
Lors de l'entretien préalable, nous vous avons rappelé les motifs exposés ci-dessus, remis une note explicative concernant le projet de licenciement économique et proposé des postes disponibles aux conditions suivantes :
postes de même nature que ceux que vous occupez actuellement, à savoir principalement : guide vitre, découpe CRV, finition ROOF, emballage sur différentes lignes ; passage en 3 postes ; aucune baisse de salaire ni de coefficient ; une formation qui pourrait, le cas échéant, vous être dispensée afin d'assurer l'adaptation à votre nouveau poste de travail dans les meilleurs conditions, y compris principalement une formation d'opérateur sur presse qui aurait pu, si elle avait abouti, déboucher sur un statut plus élevé (salaire et coefficient).

Nous vous avons également accordé un délai de réflexion de dix jours pour réfléchir et nous donner votre réponse. Par votre courrier du 19 décembre 2003, vous nous avez informé de votre refus de passer d'un horaire 2 postes à un horaire 3 postes. Nous sommes donc dans l'obligation de procéder à votre licenciement pour motif économique.

Nous vous rappelons que vous disposez d'un délai de 8 jours à compter de la réception de cette lettre pour remettre le dossier « PARE anticipé » dûment rempli à l'ASSEDIC de votre domicile, dossier qui vous a été remis lors de l'entretien préalable du 12 décembre 2003.
Vous aurez la possibilité de bénéficier d'une priorité de réembauchage pendant un an à compter du 29 février 2004 concernant tout emploi devenu disponible et compatible avec la qualification que vous possédiez au moment de votre licenciement et, le cas échéant, avec la nouvelle qualification que vous aurez pu acquérir postérieurement à condition que vous nous en informiez.
Si vous souhaitez utiliser cette possibilité, vous devrez nous le faire savoir dans un délai de douze mois à compter du 29 février 2004.
Votre préavis, que nous vous dispensons d'effectuer, débutera dès réception de la présente pour se terminer le 29 février 2004. Vous cesserez donc définitivement de faire partie du personnel de notre entreprise à compter du 1er mars 2004.
Votre certificat de travail et votre attestation ASSEDIC seront tenus à votre disposition à compter du 1er mars 2004, ainsi que les salaires vous restant dus et l'indemnité compensatrice de congés payés acquise au 29 février 2004. " (Sic)
Mademoiselle X... fait valoir :
- que cette lettre se borne à invoquer le nombre de suppressions d'emplois envisagées sans préciser l'incidence des prétendues difficultés économiques sur l'exécution du contrat de travail (transformation ou suppression de poste),- que l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement au regard des exigences de la convention collective,- que les représentants du personnel n'ont pas été consultés au sujet de l'ordre des licenciements.

Cependant, la lettre de licenciement fait état d'un arrêt ou d'une baisse de production de certains produits de nature à remettre en question la rentabilité de certaines chaînes, l'arrêt de celles-ci ayant pour conséquence le regroupement de leurs opérateurs sur d'autres chaînes fonctionnant sur un rythme plus intensif et la modification des horaires de travail de ces opérateurs appelés à travailler la nuit selon le système 3x8.
Cette réorganisation de l'outil de travail n'est pas tant justifiée par un souci de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise que par celui de faire face à de réelles difficultés économiques auxquelles elle était confrontée depuis plusieurs années.
Ces difficultés avaient été exposées dans une note jointe à l'ordre du jour de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise prévue le 29 octobre 2003, note dans laquelle étaient rappelés les résultats comptables des trois dernières années qui, déposés régulièrement auprès du Tribunal de Commerce, faisaient apparaître :- une perte de 2 899 000 € en 2000,- une perte de 4 682 000 € en 2001,- une perte de 3 864 000 € en 2002.

Il était envisagé dans cette note, grâce à une réorganisation des modes de production, un résultat prévisionnel comptable en nette amélioration avec une perte financière ramenée à 1 053 000 €.
Les difficultés économiques ainsi évoquées devant le comité d'entreprise sont confirmées par les documents comptables versés aux débats, plus précisément ceux des exercices clos au 31 décembre des années 2002 et 2003.
Il résulte de ces éléments que la réorganisation de l'outil de travail au sein de l'entreprise et la modification du contrat de travail de Mademoiselle X..., appelée à travailler de nuit selon le système 3x8, qui en était la conséquence, étaient justifiées par de réelles et sérieuses difficultés économiques.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a considéré le licenciement comme reposant sur une cause réelle et sérieuse.
S'agissant de l'obligation de reclassement, la convention collective du caoutchouc prévoit que l'employeur doit s'efforcer, avant tout congédiement pour cause de suppression d'emploi, de modification de structure ou de réorganisation de ce secteur, de proposer à l'intéressé dans l'entreprise un poste équivalent et, dans le cas où l'entreprise ne peut fournir un tel poste à l'intéressé, qu'elle doit s'adresser à son organisation professionnelle qui s'efforce à son tour de reclasser le salarié congédié.
Il en résulte que l'employeur est débiteur d'obligations alternatives et non cumulatives, la première étant principale, l'autre subsidiaire.
Il ressort de la lettre de licenciement et du document remis à Mademoiselle X... à l'issue de l'entretien préalable qu'il lui était proposé, au sein de l'entreprise, plusieurs postes de même nature que celui qu'elle occupait jusque-là, sans aucune baisse de salaire ou de coefficient.
Le reproche fait à l'employeur de ne pas s'être adressé à son organisation professionnelle en vue du reclassement de la salariée, alors qu'il avait satisfait à son obligation principale, n'est donc pas fondé.
En outre, sollicité par courrier du 3 novembre 2003 sur le point de savoir s'il était en mesure d'offrir un poste correspondant à l'expérience et à la formation professionnelle des personnes dont le licenciement était envisagé, l'établissement situé à Transières (27380 Charleval) a répondu par la négative.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a considéré qu'il avait été satisfait par l'employeur à son obligation de reclassement.

S'agissant de l'ordre des licenciements, l'article L. 321-1-1 du Code du Travail prévoit qu'en cas de licenciement collectif pour motif économique, à défaut de convention ou accord collectif applicable, l'employeur définit, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements.

En l'espèce, si la convention collective du caoutchouc prévoit que l'ordre des licenciements est celui prévu dans le règlement intérieur non versé aux débats, il résulte de la note d'information remise aux représentants du personnel dans le cadre du projet de licenciement pour motif économique de six personnes et en vue de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise prévue le 29 octobre 2003, que les critères de pondération retenus pour déterminer l'ordre des licenciements ont été exposés ; ces critères étaient les suivants :
Un point sera attribué au salarié ayant un ou plusieurs enfants à charge, et un point supplémentaire sera attribué dans le cas de parent isolé. Deux points seront attribués au salarié dont l'ancienneté au sein de l'entreprise sera supérieure à dix ans, un point entre cinq et dix ans. Les salariés dont la réinsertion professionnelle risque d'être particulièrement difficile se verront attribuer les points suivants : quatre points pour la personne âgée de cinquante ans ou plus, un point pour la personne reconnue handicapée au sens de la COTOREP dont la société aura eu connaissance. Les qualités professionnelles seront également appréciées en prenant pour support la grille de polyvalence officielle affichée dans l'usine. La personne dont le pourcentage de polyvalence sera supérieur à cinq se verra attribuer deux points.

Le procès-verbal de cette réunion extraordinaire fait état de la note d'information remise aux représentants du personnel qui ont ainsi été mis en mesure de donner un avis sur les critères de licenciement établis par l'employeur.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mademoiselle X... de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements.
Sur les frais non répétibles et les dépens
Mademoiselle X... qui succombe sera condamnée aux dépens.
Enfin, il n'y a pas lieu en l'espèce de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
La COUR,
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement déféré et y ajoutant, DÉBOUTE la société Metzeler de sa demande fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Mademoiselle Nabia X... aux entiers dépens.
Ainsi prononcé à l'audience publique ou par mise à disposition au greffe du onze janvier deux mil huit par Madame SCHMEITZKY, Président, assistée de Mademoiselle FRESSE, Greffier Placé présent lors du prononcé.
Et Madame le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.
Minute en sept pages


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 05/03319
Date de la décision : 11/01/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Longwy, 18 novembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nancy;arret;2008-01-11;05.03319 ?
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