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07/12/2007 | FRANCE | N°05/01263

France | France, Cour d'appel de Nancy, Chambre sociale, 07 décembre 2007, 05/01263


ARRÊT No PH

DU 07 DÉCEMBRE 2007
R. G : 05 / 01263
Conseil de Prud'hommes d'EPINAL F03 / 784 29 mars 2005

COUR D'APPEL DE NANCY CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :
S. A. NESTLE WATERS FRANCE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social 20 rue Rouget de Lisle 92793 ISSY-LES-MOULINEAUX Représentée par Maître Denis REBOUL-SALZE (Avocat au Barreau de CLERMONT-FERRAND)

INTIMÉ :
Monsieur Eric X...... 84000 AVIGNON Représenté par Maître Farouz BENHARKAT substituant Maître Alexandre GASSE (Avocats au Barreau de NA

NCY)

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,
Président de Chambre : Madame ...

ARRÊT No PH

DU 07 DÉCEMBRE 2007
R. G : 05 / 01263
Conseil de Prud'hommes d'EPINAL F03 / 784 29 mars 2005

COUR D'APPEL DE NANCY CHAMBRE SOCIALE

APPELANTE :
S. A. NESTLE WATERS FRANCE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social 20 rue Rouget de Lisle 92793 ISSY-LES-MOULINEAUX Représentée par Maître Denis REBOUL-SALZE (Avocat au Barreau de CLERMONT-FERRAND)

INTIMÉ :
Monsieur Eric X...... 84000 AVIGNON Représenté par Maître Farouz BENHARKAT substituant Maître Alexandre GASSE (Avocats au Barreau de NANCY)

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré,
Président de Chambre : Madame SCHMEITZKY Conseillers : Madame MAILLARD Monsieur FERRON

Greffier présent aux débats : Mademoiselle FRESSE

DÉBATS :

En audience publique du 18 octobre 2007 ;
L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 07 décembre 2007 ;
A l'audience du 07 décembre 2007, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur Eric X..., né en 1958, a été embauché le 1er août 1999 en qualité de responsable des ressources humaines à la Verrerie du Languedoc (Gard), société faisant partie du groupe Perrier Vittel France.
Son contrat de travail comportait une clause de mobilité.
Le 1er septembre 2000, il a, à la demande de sa hiérarchie, été affecté à un poste analogue à l'usine d'embouteillage de Perrier à Vergèze puis, le 1er mai 2001, à l'usine d'embouteillage de Contrexéville dans les Vosges.
Le 19 juillet 2000, le groupe Perrier avait signé un accord sur les mesures d'accompagnement de la restructuration du site de Contrexéville visant à réduire l'effectif de l'établissement de 125 personnes. Cet accord prévoyait notamment la cessation anticipée d'activité pour les salariés nés en 1945 ou avant, une incitation au passage à mi-temps et une aide pour un projet professionnel.
Par courrier du 13 août 2001, Monsieur X... a décidé de quitter son poste à compter du 31 octobre 2001 en demandant à bénéficier pour lui-même du plan de restructuration mis en place dans l'établissement de Contrexéville par accord du 19 juillet 2000, antérieur à son arrivée.
Il a quitté l'établissement de Contrexéville sans obtenir paiement des indemnités prévues dans le cadre de l'accord en vigueur. Il a toutefois reçu paiement d'une indemnité de licenciement conventionnelle.
Par constat d'huissier en date du 14 mars 2002 dressé en application d'une ordonnance sur requête rendue par le Président du Tribunal de Grande Instance de Rouen, la société Perrier Vittel France a fait constater que Monsieur X... travaillait au service de la société Gaz de France à Rouen depuis le 5 novembre 2001.
Monsieur X... a, par acte du 29 septembre 2003, saisi le Conseil de Prud'hommes d'Epinal de demandes en paiement des aides et montants prévus par l'accord d'entreprise du 19 juillet 2000 à savoir une aide au porteur de projet professionnel, une indemnité spéciale de rupture, une indemnité de préavis et les congés payés sur préavis, des dommages et intérêts pour préjudice moral, des dommages et intérêts pour préjudice économique, à titre subsidiaire treize mois de salaire de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, trois mois de salaire au titre du préavis et les congés payés sur préavis, des dommages et intérêts pour préjudice moral et des dommages et intérêts pour préjudice économique.
Par jugement du 29 mars 2005, le Conseil de Prud'hommes a partiellement fait droit à ses demandes et a condamné l'employeur à payer à Monsieur Y... les sommes suivantes :
28 610,03 € à titre d'indemnité spéciale de rupture après déduction des indemnités de licenciement versées,38 112,25 € à titre d'aide au porteur de projet professionnel personnel,16 414,64 € à titre d'indemnité de préavis,1 641,46 € à titre des congés payés afférents au préavis,500 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

et a débouté Monsieur X... de ses plus amples demandes.
La société Nestlé Waters France a interjeté appel par lettre recommandée du 26 avril 2005. Elle demande à la Cour de débouter Monsieur X... de ses demandes et de le condamner au paiement d'une somme de 4 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Monsieur X... conclut à la confirmation du jugement en tant qu'il a fait droit à ses demandes et à son infirmation en tant qu'il l'a débouté de ses demandes en dommages et intérêts pour préjudice moral et pour préjudice économique. Il réclame à ce titre paiement pour chaque chef de préjudice d'un montant de 10 000 € ; subsidiairement, il reprend sa demande en paiement d'une somme de 71 130,12 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité de préavis de trois mois (16 414,64 €), des congés payés sur préavis (1 641,46 €) et de 10 000 € à titre de préjudice moral et 10 000 € pour préjudice économique et en tout état de cause il demande 3 000 € en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La Cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier le 18 octobre 2007, dont elles ont maintenu les termes lors de l'audience.

MOTIVATION

-Sur l'application de l'accord du 19 juillet 2000

L'accord sur les mesures d'accompagnement de la restructuration signé au sein de l'établissement de Contrexéville a, dans son chapitre III, prévu la mise en oeuvre de mesures spéciales d'accompagnement, et notamment des départs dans le cadre de projets professionnels personnels. Il posait comme principe que " tout salarié porteur d'un projet professionnel personnel et candidat au départ de l'entreprise percevra, lors de son départ, les indemnités suivantes :
-une indemnité de rupture,-une aide au porteur de projet professionnel personnel d'un montant de 250 000 Francs, versée au moment du départ, augmentée de 50 000 Francs par nouvel emploi à temps plein créé et justifié dans les deux ans suivant le départ. "

Il précisait que les départs des salariés pour réalisation de projets professionnels devront être effectifs avant le 31 décembre 2001 et mettait en place un dispositif d'aide à l'élaboration du projet et à la formation consistant à faire bénéficier le candidat qui le souhaitait de l'aide d'un cabinet choisi et rémunéré par l'entreprise et à participer à la formation correspondant au projet.
L'accord précise à cet égard que l'aide apportée par le cabinet pourra consister notamment en la mise en forme du projet personnel (formalisation de l'idée, étude des moyens à mettre en oeuvre, indemnités au titre des intérêts du prêt), l'étude de faisabilité en prenant en compte les aspects commerciaux, techniques et financiers, le montage des dossiers (business plan, demande de prêt, demandes d'aides), le montage juridique avec un partenaire (avocat, notaire).
Il n'est pas discuté que cet accord pouvait s'appliquer à tous les membres du personnel de l'usine sans condition d'ancienneté et que le terme de projet professionnel personnel n'a pas été clairement défini.
Les avantages prévus pour le cas de départs dans le cadre de projets professionnels personnels ne peuvent toutefois, au vu des dispositions du § 2 relatives à l'appui à l'élaboration du projet et à la formation, être assimilés à une simple prime de départ pouvant être versée à tout salarié quittant définitivement l'entreprise, notamment pour occuper un autre emploi.
Il résulte des pièces du dossier que Monsieur X..., qui occupait au sein de l'établissement de Contrexéville les fonctions de responsable des ressources humaines, était particulièrement bien informé des conditions d'application de l'accord du 19 juillet 2000 puisqu'il avait lui-même suivi l'élaboration de deux accords de résiliation conventionnelle et notamment celui concernant Monsieur A... B... qui envisageait une association dans une entreprise de commercialisation de matériaux de construction au Portugal dans le cadre duquel il avait notamment sollicité la transmission des pièces justificatives dont un contrat de prêt.
Monsieur X... a, par courrier du 13 août 2001, informé son employeur de son intention de quitter son emploi en indiquant que ce départ se situait dans le cadre des dispositions relatives aux salariés porteurs d'un projet professionnel tel que mentionné au chapitre III de l'accord du 19 juillet 2000 et interviendra au plus tard le 31 octobre 2001.
Ce courrier tenait à l'évidence compte d'un délai de prévenance de deux mois et demi.
Monsieur X... ne précisait nullement la nature de son projet professionnel et n'indique pas à quelle date ce dernier a été soumis à son employeur. Il admet toutefois qu'il devait présenter un tel projet puisqu'il a, en cours de procédure, produit un projet schématique ne portant ni date, ni nom, concernant la création d'une société de conseils en ressources humaines ayant pour objet de prodiguer des conseils en droit du travail aux entreprises et aux avocats ainsi que des conseils en recrutement avec début d'activité en janvier 2002 et semblant, bien qu'aucune précision ne soit donnée sur son implantation géographique, déployer son activité dans le département de l'Héraut. Ce projet comportait un compte d'exploitation prévisionnel très sommaire et prévoyait la création d'une société.
Monsieur Y... qui avait, au vu d'un courrier remis à l'huissier chargé de procéder au constat du 14 mars 2002 par la société Perrier Vittel France, depuis août 2001 une proposition d'emploi émanant de la société Gaz de France et devant prendre effet le 1er novembre 2001 admet dans son courrier adressé à l'employeur le 20 mars 2002 qu'il avait longuement hésité entre deux possibilités-création d'une activité de conseil juridique ou emploi salarié-et qu'il a in fine opté pour la deuxième solution.
En vertu des dispositions de l'article L 120-4 du Code du Travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
Monsieur Y... qui, en sa qualité de responsable des ressources humaines, connaissait particulièrement bien le mécanisme et les exigences de la mise en place d'un accord de résiliation conventionnelle ne peut se prévaloir de l'absence de réponse à sa lettre du 13 août 2001 et de l'établissement en date du 27 septembre 2001 d'une simulation des montants qu'il aurait pu percevoir en cas de départ pour projet personnel alors qu'il résulte de l'attestation de Monsieur C... D... Bernardo, responsable administratif de l'entreprise et subordonné de Monsieur X..., que c'est à la demande de Monsieur Y... qu'il a calculé les sommes pouvant éventuellement lui être dues en cas de départ dans le cadre de la réalisation d'un projet professionnel personnel.
Contrairement à ce qu'ont admis les premiers juges, le simple départ en vue d'occuper dans une autre société un emploi de même nature n'impliquant aucune nouvelle formation, aucune réorientation professionnelle, ni aucun investissement personnel ne constitue pas le projet professionnel personnel visé par le chapitre III de l'accord du 19 juillet 2000 qui suppose la création d'une activité nouvelle, une installation, des investissements financiers, l'établissement d'un plan de financement et d'un plan d'exploitation prévisionnelle voire la création d'emploi, justifiant seul l'allocation des aides prévues.
Il résulte du dossier qu'en quittant son emploi pour occuper un poste analogue dans une autre société Monsieur X... n'a pas rempli les conditions nécessaires et suffisantes pour bénéficier des dispositions du plan de restructuration et de l'accord du 19 juillet 2000 et de versement des indemnités destinées aux salariés porteurs d'un projet professionnel personnel et candidats au départ de l'entreprise et ce, quand bien même l'employeur lui a versé une indemnité conventionnelle de licenciement.
Monsieur X... doit être débouté de ses demandes en paiement de l'indemnité spéciale de rupture, de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents et de l'aide au porteur de projet professionnel personnel.
Le jugement déféré sera donc infirmé sur ces points.
Monsieur X... fait état d'un préjudice moral et d'un préjudice économique résultant du refus opposé par son employeur des avantages prévus par l'accord du 19 juillet 2000.
En l'absence de toute faute de l'employeur et de toute justification de ses préjudices, ses demandes doivent être rejetées.
Le jugement déféré sera donc confirmé sur ces points.
-Sur la rupture du contrat de travail
Monsieur X... réclame subsidiairement paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité de préavis et des congés payés afférents et de dommages et intérêts en raison de son préjudice moral et de son préjudice économique.
Par courrier du 13 août 2001, il a informé son employeur de sa décision de quitter prochainement le poste de responsable des ressources humaines qu'il occupait sur le poste de Contrexéville. Il précisait que ce départ se situait dans le cadre des dispositions relatives aux salariés porteurs d'un projet professionnel tel que mentionné au chapitre III de l'accord du 19 juillet 2000 et interviendra au plus tard le 31 octobre 2001.
Il résulte des pièces produites en annexe que lors du départ de Monsieur X... l'employeur a versé une indemnité de licenciement conventionnelle et qu'il a mentionné sur l'attestation ASSEDIC que la rupture du contrat de travail résultait d'un licenciement autre qu'économique.
Il résulte toutefois des éléments du dossier que la société Nestlé Waters France n'a jamais manifesté son intention de mettre un terme au contrat de travail.
Monsieur X... a lui-même pris l'initiative de son départ en l'inscrivant dans le cadre des dispositions de l'accord du 19 juillet 2000 sur les mesures d'accompagnement de la restructuration " projet professionnel ".
Il résulte toutefois des énonciations faites ci-dessus et des pièces produites en annexe que Monsieur X... n'a, lors de son départ, transmis à son employeur aucun projet professionnel au sens du chapitre III de l'accord du 19 juillet 2000 et qu'il ne remplissait pas les conditions lui permettant de bénéficier des avantages prévus par cet accord.
La rupture du contrat de travail ne peut donc être imputée à l'employeur et doit s'analyser comme une démission.
Monsieur X... n'est pas fondé à réclamer paiement d'une indemnité de préavis et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Ses demandes seront rejetées.
S'agissant d'un départ volontaire pour occuper un autre emploi, les demandes en dommages et intérêts pour préjudice moral et pour préjudice économique ne sont pas justifiées et doivent être rejetées.

-Sur les dépens et les demandes en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

Monsieur Y... qui succombe supportera les entiers dépens et ses frais irrépétibles.
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
La COUR,
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,
INFIRME partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau,
DÉBOUTE Monsieur Eric X... de ses demandes en paiement d'une indemnité spéciale de rupture, d'une aide au porteur d'un projet professionnel personnel, d'une indemnité de préavis et des congés payés afférents et d'une indemnité en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
CONFIRME le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,
DÉBOUTE Monsieur Eric X... de ses demandes en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité de préavis et des congés payés afférents, de dommages et intérêts pour préjudice moral et de dommages et intérêts pour préjudice économique ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
CONDAMNE Monsieur Eric X... aux entiers dépens.
Ainsi prononcé à l'audience publique ou par mise à disposition au greffe du sept décembre deux mil sept par Madame SCHMEITZKY, Président, assistée de Mademoiselle FRESSE, Greffier Placé présent lors du prononcé.
Et Madame le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Nancy
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 05/01263
Date de la décision : 07/12/2007
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Epinal, 29 mars 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.nancy;arret;2007-12-07;05.01263 ?
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