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04/09/2024 | FRANCE | N°21/02921

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 04 septembre 2024, 21/02921


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02921 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O7RD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 AVRIL 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PAR

ITAIRE DE CARCASSONNE - N° RG F 20/00040







APPELANTE :



S.A.S ATALIAN PROPRETE SUD OUEST (anciennement TFN PROPRETE SUD OUEST)

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social, sis

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée ...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 04 SEPTEMBRE 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02921 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O7RD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 AVRIL 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE CARCASSONNE - N° RG F 20/00040

APPELANTE :

S.A.S ATALIAN PROPRETE SUD OUEST (anciennement TFN PROPRETE SUD OUEST)

prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social, sis

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée sur l'audience par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

Madame [D] [O]

née le 05 Janvier 1981 à [Localité 5] (11)

de nationalité française

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Valérie RENEAUD, avocat au barreau de CARCASSONNE

avocat non plaidant et non substituée sur l'audience

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/008349 du 30/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 12 Février 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Juin 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence FERRANET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Florence FERRANET, Conseiller

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [O] a été embauchée par la société SIN & STES à compter du 1er novembre 2002 en qualité d'agent spécialisé de propreté à temps partiel à hauteur de 86,60 € par mois. Par avenant du 1er février 2012, sa durée de travail est passée à 107 heures 47 pour une rémunération mensuelle brute de 1 026,34 €.

La société TFN Propreté, devenue aujourd'hui la société Atalian Propreté Sud-Ouest, est venue aux droits de la société SIN & STES ce qui a donné lieu à un nouveau contrat à durée indéterminée a effet au 5 mai 2014, Mme [O] bénéficiant d'une reprise d'ancienneté au 1er novembre 2002. Dans le cadre de son contrat, Mme [O] exerçait ses fonctions au sein du centre hospitalier de [Localité 5].

Le 18 septembre 2019, alors qu'elles se trouvaient en pause, quatre salariées de l'entreprise dont Mme [O] ont utilisé le quad de la société dans les couloirs du rez-de-jardin de l'hôpital et le quad a percuté un mur intérieur, occasionnant des dégâts chiffrés à 282 €.

Par courrier du 3 octobre 2019, Mme [O] a été convoquée à un entretien préalable en vue de son licenciement, avec mise à pied conservatoire dans l'attente de la décision.

Par courrier du 18 octobre 2019, elle s'est vue notifier son licenciement pour faute grave.

Par requête enregistrée le 5 mai 2020, Mme [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Carcassonne des demandes suivantes :

Dire et juger que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ;

Condamner la société Atalian Propreté Sud-Ouest au paiement des sommes suivantes :

- 16 350,46 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 5 612,35 € au titre de l'indemnité de licenciement ;

- 2 335,78 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 233,57 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

- 568,98 € à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied ;

- 56,89 € à titre de congés payés sur le rappel de salaire ;

Ordonner la remise des documents de fin de contrat sous astreinte de 10 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;

Débouter la société Atalian Propreté Sud-Ouest de ses demandes ;

Condamner la société Atalian Propreté Sud-Ouest à verser à Mme [O] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par jugement rendu le 19 avril 2021, le conseil de prud'hommes a :

Dit que le licenciement de Mme [O] ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ;

Condamné la société Atalian Propreté à payer à Mme [O] :

- la somme de 16 350,46 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- la somme de 5 612,35 € brut au titre de l'indemnité de licenciement ;

- la somme de 2 335,78 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 233,57 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

- la somme de 568,98 € brut au titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied et 56,89 € brut à titre de congés payés sur le rappel de salaire ;

Ordonné la remise des documents de fin de contrat sous astreinte de 10 € par jour de retard à compter du 15ème jour après la notification de la décision à intervenir ;

Ordonné l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;

Débouté la société Atalian Propreté de l'ensemble de ses demandes ;

Condamné la société Atalian Propreté à verser à Mme [O] la somme de 1 250 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;

Dit que les sommes portées dans ce jugement porteront intérêts à taux légal à compter de la notification de ce jugement ;

Ordonné le remboursement par la société Atalian Propreté à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Mme [O], du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite d'un mois d'indemnités de chômage ;

Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Rappelé qu'en cas d'exécution forcée de la présente décision, le droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du créancier, prévu par l'article 10 du décret n°96-1080 du 12 décembre 1996, que l'huissier peut recouvrer, n'est pas dû pour les créances nées de l'exécution d'un contrat de travail, ni pour les créances alimentaires, en application de l'article 11 du même décret.

 

**

La société Atalian Propreté Sud-Ouest a interjeté appel de ce jugement le 5 mai 2021, intimant Mme [O]. Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 18 novembre 2021, elle demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, et de :

Juger que le licenciement de Mme [O] repose sur une faute grave ;

Débouter Mme [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Débouter Mme [O] de toute demande excédant la somme de 3 503,67 € (correspondant à trois mois de salaire) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamner Mme [O] à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

**

Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 20 janvier 2022, Mme [O] demande à la cour de confirmer le jugement , de débouter la société Atalian Propreté de ses demandes, et de la condamner à lui verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

**

Pour l'exposé des moyens il est renvoyé aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 12 février 2024 fixant la date d'audience au 10 juin 2024.

MOTIFS :

Sur le licenciement :

L'employeur qui prend l'initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige. Les motifs avancés doivent être précis et matériellement vérifiables, des motifs imprécis équivalant à une absence de motifs. La faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et situe nécessairement le débat sur le terrain disciplinaire. Alors que la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'incombe pas particulièrement à l'une ou l'autre des parties, il revient en revanche à l'employeur d'apporter la preuve de la faute grave qu'il reproche au salarié. S'il existe un doute concernant l'un des griefs invoqués par l'employeur ayant licencié le salarié pour faute grave, il profite au salarié. Lorsque les faits sont établis mais qu'aucune faute grave n'est caractérisée, le juge du fond doit vérifier si les faits initialement qualifiés de faute grave par l'employeur constituent ou non une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Il est reproché dans la lettre de licenciement notifiée à Mme [O] le 18 octobre 2019 d'avoir :

- conduit sans autorisation le quad de l'établissement qui a finalement percuté un mur à l'intérieur du site ce qui a causé d'importants dégâts ;

- De ne pas avoir prévenu ses supérieurs hiérarchiques de l'incident et de ses conséquences matérielles.

Sur l'utilisation du quad sans autorisation :

La société Atalian Propreté Sud Ouest fait valoir que Mme [O] en signant son contrat le 1er janvier 2018 a pris connaissance du règlement intérieur de la société qui mentionne qu'il est expressément interdit d'utiliser un véhicule hors service sans autorisation et qu'elle savait qu'il était formellement interdit d'utiliser le quad sur le site du centre hospitalier, cette utilisation étant strictement réservée aux agents chargés de la gestion des déchets.

Mme [O] répond que le quad était régulièrement utilisé par l'ensemble du personnel, y compris par la responsable Mme [E] et que ce n'est que postérieurement à l'incident qu'il a été demandé à chaque salarié de signer un document dans le quel il est expressément mentionné qu'il est interdit de conduire ce véhicule.

Est produite aux débats l'attestation de la chef de site, Mme [E] qui atteste que les « filles » savaient qu'elles n'avaient pas le droit de conduire le quad, seuls les agents « déchets »  ayant cette autorisation et il est exact que figure dans les consignes de sécurité annexées au contrat de travail une interdiction « d'utiliser un véhicule hors service sans autorisation ».

Toutefois la mention relative à l'interdiction d'utiliser un véhicule hors service sans autorisation ne correspond pas à une mention interdisant l'utilisation du quad de la société et Mme [Y] atteste que ce n'est que postérieurement à l'incident qu'il a été demandé aux salariés de signer un document mentionnant expressément l'interdiction de conduire le quad. Mme [M] et Mme [V] attestent avoir vu plusieurs personnes conduire ce quad, et Mme [M] déclare même que Mme [E] a reconnu qu'elle avait elle-même conduit le quad pour s'amuser.

Il ne peut être valablement soutenu comme le fait l'employeur qu'en faisant deux aller-retour avec sur le quad qui était conduit par Mme [P], Mme [O] a manqué à son obligation de prendre soin de sa santé et de sa sécurité.

Le seul grief qui peut être reprochée à Mme [O] est d'avoir pendant son temps de pause, pris place, sans avoir l'autorisation express, mais sans être informée de ce que cela lui était interdit, sur le quad conduit par Mme [P] afin de se divertir.

Sur le fait d'être monté sur le quad qui percuté un mur et d'avoir causé d'importants dégats :

Il ressort clairement des attestations de Mme [M] et de Mme [V] que si Mme [P] a conduit le quad et a fait deux aller-retour avec à l'arrière dans un premier temps Mme [O] puis ensuite Mme [V], c'est lorsque cette dernière a pris le volant que le véhicule a percuté le mur, il en résulte qu'il ne peut être reproché à Mme [O] de s'être trouvé sur le quad au moment ou celui-ci a percuté le mur et d'avoir causé des dégâts le 18 septembre 2019.

Sur le fait de ne pas avoir prévenu ses supérieurs hiérarchiques :

La société Atalian Propreté Sud Ouest soutient que Mme [O] a manifesté un comportement déloyal envers son employeur en ne l'informant pas de l'incident. Toutefois il ressort de l' attestation de Mme [V] que c'est Mme [P] qui a pris l'initiative d'aller parler à Mme [E] le 25 septembre 2019, alors que les deux personnes qui se trouvaient sur le quad au moment de l'accident (Mme [V] qui conduisait et Mme [M] qui se trouvait à l'arrière) étaient restées taisantes. Mme [O] n'a pas conduit le quad et n'est pas à l'origine de l'accident, il ne peut donc pas lui être reproché de na pas dénoncer les faits.

En l'état du seul grief établi à l'encontre de Mme [O], et en l'absence de tout antécédant disciplinaire, la mesure de licenciement paraît disproportionnée avec la faute commise, il en résulte que le licenciement prononcé n'a pas de cause réelle et sérieuse, le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les indemnisations sollicitées :

Sur le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

La société Atalian Propreté Sud Ouest demande à la cour de réduire à 3 503,67 € le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Mme [O] bénéficiait d'une ancienneté de dix-sept ans dans l'entreprise, en application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, elle est fondée à percevoir une indemnité variant de 3 mois à 14 mois de salaire. Son salaire de base s'élevait à 1 167,89 € mensuel.

La salariée justifie qu'elle a perçu l'allocation d'aide au retour à l'emploi à hauteur de 265,99 € en novembre 2019, puis qu'elle a trouvé un nouvel emploi à temps partiel au sein de la société Berge New Technologie lui procurant un revenu de 347,74 € jusqu'au 19 décembre 2020, et un autre emploi à temps partiel avec la société SKMC à compter du 3 décembre 2019, lui procurant un revenu variant de 800 à 900 € mensuels, il convient donc de lui allouer à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 8 000 € bruts. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les autres demandes :

La société Atalian Propreté Sud Ouest qui succombe en son appel sera tenue aux dépens et condamnée en équité en cause d'appel à verser à Mme [O] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

Statuant dans la limite des chefs du jugement contestés ;

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Carcassonne le 19 avril 2021 sauf sur le montant des dommages et intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau :

Condamne la société Atalian Propreté Sud Ouest à verser à Mme [O] la somme de 8 000 € bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant :

Condamne la société Atalian Propreté Sud Ouest à verser à Mme [O] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Atalian Propreté Sud Ouest aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/02921
Date de la décision : 04/09/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-09-04;21.02921 ?
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