Minute n°
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
ORDONNANCE DE REFERE
du 03 SEPTEMBRE 2024
REFERE RG n° N° RG 24/00127 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QJ4N
Enrôlement du 10 Juillet 2024
assignation du 09 Juillet 2024
Recours sur décision du
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER
du 29 Avril 2024
DEMANDERESSE AU REFERE
S.A.S. N.C.E.C. (CAMPING ET BAR HORIZON)
société immatriculée au RCS de Montpellier sous le numéro 824 170 229 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Thibault GANDILLON de la SCP LES AVOCATS DU THELEME, avocat au barreau de MONTPELLIER
DEFENDEUR AU REFERE
Monsieur [J] [B]
né le 28 Décembre 1964 à [Localité 4] (EGYPTE)
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représenté par Me Erik ROUXEL, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTERVENANTE
S.A.S.U. NCEC
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Erik ROUXEL, avocat au barreau de MONTPELLIER
L'affaire a été débattue à l'audience publique des référés, tenue le 07 AOUT 2024 devant Madame Fanny COTTE, Vice-Président placé conseiller, désignée par ordonnance de Monsieur le premier président L'affaire a été mise en délibéré au 03 Septembre 2024.
Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO.
ORDONNANCE :
- contradictoire .
- prononcée publiquement par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signée par Madame Fanny COTTE, Vice-Président placé conseiller, désignée par ordonnance de Monsieur le premier président et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par jugement du 29 juillet 2024, le conseil des Prud'hommes de Sète a :
- condamné la SASU NCEC à payer à Monsieur [J] [B] les sommes suivantes:
* 4.945,25 € bruts au titre du solde de salaire contractuel sur la période d'activité du 1er novembre 2021 au 15 août 2022,
* 494,52 € bruts -à titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
* 1.992,43 bruts au titre des quatre premières heures supplémentaires hebdomadaires à 15%,
* 199,24 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
* 2.03 8,30 € bruts au titre des quatre premières heures supplémentaires hebdomadaires à 25%,
* 203,83 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
* 15.682,92 € bruts au titre des heures supplémentaires à 50%,
*1.568,29 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
* 5.827,14 € bruts à titre de repos compensateurs pour dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires,
* 21.515,27 € à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
* 1.000 € nets de CSG-CRDS au titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,
*1.819,66 € au titre d'indemnité compensatrice de préavis,
* 181,96 € au titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
* 322,23 € au titre d'indemnité de licenciement,
* 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- rappelé que pour les sommes prévues au 2° de l'article R1424-28 l'exécution provisoire est de droit dans la limite des 9 mois.
- dit que la moyenne des trois derniers mois est de 181 9,66 €.
- ordonné l'exécution provisoire des autres décisions du jugement.
La SASU NCEC formait appel de ce jugement par déclaration au greffe de la cour d'appel de Montpellier le
Par exploit de commissaire de justice du 9 juillet 2024 , elle faisait assigner Monsieur [J] [B] devant le premier président de la cour d'appel de Montpellier aux fins, à titre liminaire, de se livrer à une interprétation du dispositif afin de définir les obligations soumises à l'exécution provisoire, à titre principal d'arrêter l'exécution provisoire et à titre subsidiaire de pouvoir mettre sous séquestre les sommes dues au titre de l'exécution provisoire outre des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.
Elle expose que l'exécution provisoire est susceptible d'entraîner des conséquences excessives pour elle et qu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation du jugement entrepris. A cet égard, elle fait valoir que la juridiction de première instance a privé sa décision de base légale en considérant que le décompte des heures qu'elle avait produit devait être signé des deux parties alors que ni la loi ni la jurisprudence ne l'imposent. Elle a ainsi retenu des sommes dont le calcul et la justification ne sont pas motivés.
Par ailleurs, l'exécution provisoire entraînerait des conséquences excessives pour elle dans la mesure où le dernier bilan comptable de 2023 fait état d'une perte d'exploitation et d'un résultat en déclin. En outre, le défendeur ne justifie pas de garantie de solvabilité permettant une restitution des fonds en cas d'infirmation du jugement querellé.
Monsieur [J] [B] s'oppose à la demande et indique qu'il n'existe pas de contradiction entre les termes du jugement. S'agissant des risques d'annulation ou de réformation du jugement critiqué, il soutient que la requérante ne démontre pas qu'elle l'aurait fait travailler sans le déclarer à sa propre demande.
Par ailleurs, le décompte horaire qu'il produit est selon lui particulièrement précis et étayé par des attestations que la société requérante échoue à contester .
Il considère d'ailleurs que le conseil des prud'hommes a retenu un volume d'heures de travail inférieur aux heures réellement réalisées et à un taux horaire là aussi inférieur à celui retenu initialement et contractuellement.
Il ajoute que l'exécution provisoire n'est pas susceptible de mettre en péril l'activité de la société requérante qui réalise un chiffre d'affaires annuel important et qui est en capacité de souscrire un prêt pour exécuter ses obligations le cas échéant.
MOTIFS
Sur la demande d'interprétation
La société NCEC soutient qu'il existe une difficulté d'interprétation concernant le dispositif de la décision déférée et sur la portée de l'exécution provisoire. Il n'appartient cependant pas au premier président d'interpréter une décision de première instance, cette question relevant de l'appréciation de la cour d'appel.
Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire
Selon l'article 514-3 du code de procédure civile, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de droit de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
Il résulte de l'examen des écritures et pièces des deux parties qu'il n'est pas contesté que Monsieur [B] a travaillé au sein de la société NGEC de novembre 2021 à août 2022 sans contrat de travail.
La société requérante fonde le risque d'infirmation de la décision déférée sur le calcul des heures travaillées et des sommes dues en considérant que le conseil des prud'hommes avait posé une condition au décompte horaire qu'elle avait produit, non prévue par la loi et avait donc rendu une décision sans base légale.
Les deux parties opposent à ce titre des décomptes horaires différents ainsi que des captures d'écran relatives aux horaires d'ouverture de la pizzéria et attestations différentes à l'appui de leurs prétentions s'agissant du nombre d'heures travaillées de Monsieur [J] [B]. Dès lors, l'appréciation du décompte d'heures travaillées par ce dernier ne revêt pas le caractère d'évidence permettant au juge des référés en l'espèce d'affirmer qu'il existe un moyen sérieux de réformation de la décision et relève de l'appréciation des juges du fond
Ainsi, en l'absence de démonstration d'un moyen d'annulation ou de réformation de la décision déférée et sans qu'il soit nécessaire d'examiner le risque de conséquence manifestement excessive, le texte susvisé instaurant deux conditions cumulatives à son application, il convient de rejeter la demande d'arrêt de l'exécution provisoire.
Sur la demande de mise sous séquestre ou de consignation des condamnations
Aux termes de l'article 521 du code de procédure civile, la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires des provisions peut éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie en consignant sur autorisation du juge les espèces où les valeurs suffisantes pour garantir en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.
L'application de ce texte n'exige pas que soit démontrée l'existence de conséquences manifestement excessives à l'exécution de la décision. Elle relève du pouvoir discrétionnaire du premier président.
Dans la mesure où la requérante ne démontre pas qu'il existe un risque sérieux d'annulation ou d'infirmation de la décision dont appel et qu'elle ne prouve pas davantage que Monsieur [J] [B] sera incapable de la rembourser en cas d'infirmation, il y a lieu de rejeter la demande d'application de l'article 521 du code de procédure civile.
Sur les frais irrépétibles
L'équité commande de condamner la société NCEC requérante qui succombe à payer la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l'instance.
PAR CES MOTIFS
Statuant en référé, après débats en audience publique, par décision contradictoire,
Rejetons les demandes de la société NCEC aux fins d'interprétation du jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Sète le 29 avril 2024, d'arrêt de l'exécution provisoire et de consignation ou de mise sous séquestre des sommes auxquelles elle a été condamnée
Condamnons la société NCEC à verser à Monsieur [J] [B] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
Condamnons la société NCEC aux dépens de la présence instance
Le greffier La conseillère
Il est vrai que le conseil des prud'hommes a commis une erreur matérielle en visant, dans son dispositif l'article R1424-28 du code du travail alors qu'il s'agit de l'article R1454-28 du même code qui prévoit qu'est de droit, exécutoire à titre provisoire le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R. 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement. La juridiction prud'hommale précise ensuite la moyenne des trois derniers mois soit 1.819,66 euros.
En l'espèce, la société NCEC soutient qu'il existe un moyen sérieux de réformation de la décision en ce que le conseil des Prud'hommes a retenu des sommes dont le calcul n'est pas motivé considérant qu'il a privé de base légale son jugement en ne retenant pas les éléments chiffrés qu'elle avait apportées au motif que le planning horaire n'était pas signé contradictoirement par les parties.