ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 29 AOUT 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 23/04365 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P6BV
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 26 JUILLET 2023
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE PERPIGNAN
N° RG 23/00308
APPELANTS :
Monsieur [P] [Y]
né le 09 Juin 1986 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représenté par Me Morgane BOUCHAN, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-009442 du 17/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)
Madame [X] [W] épouse [Y]
née le 03 Décembre 1988 à [Localité 6] (MAROC)
de nationalité Marocaine
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Morgane BOUCHAN, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-009440 du 17/11/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)
INTIMEE :
Madame [O] [D]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 3]
assigné à personne le 15 septembre 2023
Ordonnance de clôture du 06 Juin 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Juin 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Fanny COTTE, Vice-Président placé, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre
Madame Nelly CARLIER, Conseiller
Madame Fanny COTTE, Vice-Président placé
Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO
ARRET :
- réputé contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
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* *
FAITS ET PROCEDURE
Par acte du 28 avril 2021 Madame [O] [B] épouse [D] a donné à bail à Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]un local à usage d'habitation situé [Adresse 1] moyennant un loyer mensuel de 580 euros outre 70 euros de provision sur charges
Constatant des impayés de loyers, le bailleur a fait délivrer aux locataires, par acte d'huissier du 14 septembre 2022, un commandement de payer les loyers tout en visant expressément la clause résolutoire.
Par acte d'huissier délivré le 13 janvier 2023, Madame [B] a fait assigner en référé les locataires devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Perpignan pour obtenir la résiliation du contrat, l'expulsion et la condamnation au paiement.
Par ordonnance du 26 juillet 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Perpignan a :
Ecarté des débats les pièces produites par Monsieur [P] [Y]
Constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 28 avril 2021 entre Madame [O] [B] et Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]concernant le local à usage d'habitation situé [Adresse 1] étaient réunies le 14 novembre 2022
Condamné solidairement Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]à verser à Madame [O] [B] la somme provisionnelle de 2.945 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation impayés selon décompte arrêté à la date du 1er juin 2023
Débouté Monsieur [P] [Y] de sa demande de délais de paiement
Condamné à titre provisionnel solidairement Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]à verser à Madame [O] [B] la somme de 705,15 euros par mois à titre d'indemnité d'occupation de la date de résiliation du bail et jusqu'à ce qu'ils aient libéré les lieux, libération qui ne sera effective qu'à la remise des clés au bailleur ou à la personne qu'il aura mandaté à cet effet
Dit que Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]devront quitter les lieux loués dans le délai de deux mois prévu à l'article L412-1 du code des procédures civiles d'exécution courant à compter de la signification d'un commandement d'avoir à libérer et qu'à défaut de départ volontaire, il pourra être procédé à leur expulsion et à celle de tous occupants de leur chef, avec l'appui de la force publique en cas de besoin
Dit n'y avoir lieu d'ordonner la séquestration des meubles et objets mobiliers
Condamné solidairement Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer
Condamné solidairement Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]à verser à Madame [O] [B] la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Rappelé que l'ordonnance était exécutoire de plein droit par provision en application de l'article 489 du code de procédure civile
Ordonné que la décision soit notifiée aux services de la préfecture en vue de la prise en compte de la demande de relogement dans le cadre du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées.
Le 25 août 2023, Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]ont formé appel contre cette décision.
Par ordonnance du 8 septembre 2023, Madame la présidente de la 2e chambre civile a fixé l'affaire à l'audience du 5 mars 2024, selon les dispositions des articles 905, 905-1 et 905-2 du code de procédure civile. La date d'audience a finalement été modifiée pour être fixée au 13 juin 2024.
Vu les conclusions de la partie appelante signifiées le 9 octobre 2023 à l'intimée,
Vu l'ordonnance de clôture en date du 6 juin 2024,
Madame [O] [B] épouse [D] a été régulièrement avisée de la déclaration d'appel par signification à personne mais n'a pas constitué avocat, ni a fortiori fait valoir d'observations.
PRETENTIONS DES PARTIES
Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]sollicitent l'infirmation de l'ordonnance déférée dans toutes ses dispositions et demande à la Cour, statuant à nouveau de :
Leur accorder des délais de paiement d'une durée de trois ans, au visa de l'article 27 de la loi ALUR du 24 mars 2014,
Suspendre les effets de la clause résolutoire du bail d'habitation en date du 28 avril 2021
En tout état de cause de :
Condamner l'intimée à leur payer la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l'instance
Au soutien de leurs prétentions, ils exposent qu'ignorant la procédure, ils n'étaient pas représentés à l'audience et n'ont pu faire produire leurs pièces conformément aux règles de procédure civile, le premier juge ayant écarté les pièces communiquées par Monsieur [P] [Y]. Ils font état de leur situation économique respective marquée par la perception du RSA et indiquent qu'ils ont trois enfants en bas âge.
Ils expliquent que la dette locative a diminué contrairement à ce qui est indiqué dans l'ordonnance déférée, qu'ils sont de bonne foi et en capacité d'apurer leur dette locative tout en réglant les loyers courants et sollicitent à ce titre des délais de paiement durant trois ans.
MOTIFS
Aux termes de l'article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, le locataire est obligé :
- de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus ; le paiement mensuel est de droit lorsque le locataire en fait la demande. Le paiement partiel du loyer par le locataire réalisé en application des articles L. 542-2 et L. 831-3 du code de la sécurité sociale ne peut être considéré comme un défaut de paiement du locataire ; (')
L'article 24 de la même loi dispose que « Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux. »
Selon le V de l'article 24 précité, « Le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d'office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu'il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l'audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l'article 1343-5 s'applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 6 de la présente loi. Il invite les parties à lui produire tous éléments relatifs à l'existence d'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation ».
A titre liminaire, il convient de relever que Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]ne remettent pas en cause le bienfondé du commandement de payer visant la clause résolutoire qui leur a été signifié le 14 septembre 2022. Ils ne contestent pas avoir connu plusieurs incidents de loyer ayant entraîné une dette locative significative.
Ils sollicitent de la cour qu'elle leur octroie des délais de paiement indiquant à ce titre que cette dette locative avait diminué au jour de l'audience de première instance et qu'ils avaient, en août 2022, versé le loyer courant ainsi qu'une somme de 100 euros au titre de l'arriéré.
Leur situation économique doit être appréciée au jour où la Cour statue.
Les appelants produisent des avis d'échéance établis le 27 mars 2023, le 28 avril 2023, le 29 juin 2023, le 27 juillet 2023 et le 29 septembre 2023 attestant que le solde débiteur initial de 2.570,63 euros a diminué en six mois pour atteindre la somme de 1.570,11 euros.
Ils démontrent ainsi qu'ils ont fait des efforts importants durant cette période en reprenant le paiement des loyers courants tout en versant une somme supplémentaire variable pour commencer à apurer leur dette.
Toutefois, le dernier décompte date du 29 septembre 2023 et il est regrettable que les appelants n'aient pas produit de document plus récent permettant à la Cour de vérifier la poursuite de leurs efforts et le règlement régulier des loyers courants comme l'exige l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989.
Ils font en outre état de difficultés économiques importantes puisqu'ils sont tous deux allocataires du RSA et ne bénéficient pas de situations professionnelles stables permettant de garantir le règlement régulier des loyers. Monsieur [P] [Y] évoque des missions d'intérim ponctuelles sans toutefois faire état de revenus récents à ce titre.
Dans ces conditions, l'octroi de délais de paiement est manifestement irréaliste de sorte qu'il convient de confirmer l'ordonnance déférée dans toutes ses dispositions et notamment en ce qu'elle a refusé d'accorder aux appelants des délais de paiement.
L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il y a lieu en revanche de condamner les appelants aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme l'ordonnance déférée dans toutes ses dispositions
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne Monsieur [P] [Y] et Madame [X] [W]aux dépens
Le greffier La présidente