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30/07/2024 | FRANCE | N°22/01681

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 30 juillet 2024, 22/01681


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1re chambre sociale



ARRET DU 30 JUILLET 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/01681 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PLSO





Décision déférée à la Cour :

J

ugement du 16 MARS 2022

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER -N° RG F 20/00743





APPELANTE :



SASU JULIA PASCAL VIANDES



[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Célia VINANOVA, avocat au barreau de MONTPELL...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 30 JUILLET 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/01681 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PLSO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 16 MARS 2022

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER -N° RG F 20/00743

APPELANTE :

SASU JULIA PASCAL VIANDES

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Célia VINANOVA, avocat au barreau de MONTPELLIER ( postulant)

Représentée par Me Christophe BRINGER,avocat au barreau d'AVEYRON (plaidant)

INTIME :

Monsieur [U] [K]

[Adresse 1]

Résidence [7]

[Localité 3]

Représenté par Me Marie odile LAMOUREUX DE BELLY de la SELARL LEXIATEAM SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Gladys GOUTORBE, avocat au barreau de MONTPELLIER,

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/005635 du 08/06/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 02 Avril 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 AVRIL 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

M. Jean-Jacques FRION, Conseiller

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Véronique ATTA-BIANCHIN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après prorogation de la date du délibéré initialement prévue le19 juin 2024 à celle du 30 juillet 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Véronique ATTA-BIANCHIN, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

Par contrat à durée déterminée du 15 novembre 2019, la SASU JULIA PASCAL VIANDES a recruté [U] [K] en qualité de chauffeur livreur en raison d'un accroissement temporaire d'activité. Par avenant du 12 avril 2019, le contrat de travail a été prolongé jusqu'au 13 juillet 2019 pour le même motif d'accroissement temporaire d'activité.

Par avenant du 1er juillet 2019, le contrat de travail a été modifié en contrat à durée indéterminée.

La SASU JULIA PASCAL VIANDES est spécialisée dans le secteur d'activité du commerce de gros de viandes de boucherie.

Par acte du 13 janvier 2020, l'employeur a notifié au salarié un avertissement au motif que les véhicules qui lui sont confiés n'avaient pas été lavés après la dernière livraison, étaient restés sales pendant les deux semaines de fermeture en violation des règles sanitaires et d'une bonne exécution du contrat de travail.

Par courrier du 16 avril 2020, l'employeur a notifié au salarié un avertissement au motif que le salarié n'avait pas fait la livraison postérieurement à celles réalisées dans l'Intermarché [Localité 4] et au Carrefour de [Localité 11] sans l'avertir ce qui l'a contraint à faire appel en urgence à un autre chauffeur pour effectuer ce travail, caractérisant un acte d'insubordination.

Par courrier du 14 mai 2020, l'employeur a notifié au salarié un avertissement au motif qu'il avait effectué des livraisons sans faire correctement signer les bons de livraison au client. L'employeur fait valoir que le salarié a indiqué sur un bon de livraison de la boucherie [9] que trois des animaux qui leur étaient destinés avaient été livrés à la boucherie Royale Paillarde sans que celle-ci n'ait accusé réception de ces trois agneaux provoquant une perte de facturation qui représente pour l'entreprise une perte non négligeable, l'employeur ajoutant qu'il ignore toujours à ce jour où ont été livré ces agneaux.

Par actes du 22 mai 2020, l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement prévu le 5 juin 2020 et a ordonné une mise à pied conservatoire. Un licenciement pour faute grave a été notifié au salarié le 10 juin 2020.

Par acte du 15 juillet 2020, le salarié a vainement contesté le licenciement.

Par acte du 30 juillet 2020, [U] [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins de voir requalifier les contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de voir juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 16 mars 2022, le conseil de prud'hommes a requalifié les contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, a jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et a condamné l'employeur au paiement des sommes suivantes :

2068,61 euros à titre d'indemnité de requalification de contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée,

2100 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

2068,61 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 206,86 euros à titre de congés payés sur préavis,

689,54 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

1241,16 euros à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire et celle de 124,11 euros à titre de congés payés y afférents,

a débouté les parties de leurs autres demandes,

et a condamné l'employeur aux dépens.

Par acte du 28 mars 2022, la SASU JULIA PASCAL VIANDES a interjeté appel des chefs de jugement la condamnant au paiement de diverses sommes.

Par conclusions du 8 décembre 2022, la SASU JULIA PASCAL VIANDES demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement de diverses indemnités, débouter le salarié de ses demandes et le condamner au paiement de la somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 16 septembre 2022, [U] [K] demande à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement de l'indemnité de requalification, de l'indemnité légale de licenciement et à titre de rappel de salaire sur la mise à pied conservatoire assorti des congés payés,

d'infirmer le jugement pour le surplus et de condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :

4137,22 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

12 411,66 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure brutale vexatoire,

2068,61 euros à titre de dommages et intérêts pour sanctions disciplinaires injustifiées,

5000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité,

3000 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 outre les dépens,

se réserver la faculté de liquider les intérêts,

prononcer la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil.

Il sera fait référence aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits et des moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 avril 2024.

LES MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée :

Aux termes de l'article L.1221-2 du code du travail, toute embauche réalisée pour faire face à l'activité normale et permanente de l'entreprise doit s'effectuer, sauf exception, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée. L'article L.1242-1 précise que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir, ni pour objet ni pour effet, de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, quelque soit son motif. En outre, le contrat à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire.

L'article L.1242-2 du code du travail limite les cas de recours au contrat à durée déterminée aux cas notamment d'accroissement temporaire d'activité de l'entreprise.

Il est admis qu'en cas de litige sur le motif du recours à un contrat à durée déterminée, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat. La notion d'accroissement temporaire de l'activité recouvre une augmentation temporaire de l'activité habituelle de l'entreprise qui ne permet pas de faire face à ce surcroît d'activité temporaire avec son effectif permanent. Pour apprécier le fait que le contrat à durée déterminée n'a pas pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, il convient de procéder à une comparaison avec l'activité courante de l'entreprise.

En l'espèce, l'employeur fait état que son activité connaît un accroissement d'activités pendant la période des contrats de travail et produit à cette fin le chiffre d'affaires mentionné dans le compte de résultat entre le 1er janvier 2019 et le 30 juin 2019. En outre, il produit des articles de presse faisant état de la mise sur le marché d'un grand nombre d'agneaux [Localité 6] en début de chaque année et des fêtes de Pâques et du ramadan dans le premier semestre de chaque année sans aucune autre précision.

Toutefois, puisque la notion d'accroissement temporaire d'activité nécessite la comparaison avec l'activité courante de l'entreprise, les périodes visées sont insuffisantes pour une telle appréciation qui aurait nécessité une comparaison sur une plus large période. De plus, l'employeur ne justifie d'aucun contrat conclu au titre de ces périodes. Enfin, la conclusion d'un contrat à durée indéterminée le 1er juillet 2019 contredit l'accroissement temporaire d'activité.

Le motif du recours aux contrats à durée déterminée n'étant pas valable, ceux-ci sont irréguliers. Les contrats seront requalifiés en contrat à durée indéterminée à compter du premier contrat irrégulier, le 15 novembre 2019.

En application de l'article L.1245-2 du code du travail, lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande du salarié de requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.

La requalification donne lieu au versement d'une seule indemnité même en cas de succession de contrats. Elle est au moins égale à la dernière moyenne du salaire mensuel.

En l'espèce, l'indemnité sera évaluée à la somme de 2068,61 euros.

Ce chef de jugement sera confirmé.

Sur la sanction de l'avertissement du 16 avril 2020 :

L'article L.1333-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil des prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. L'article 1333-2 dispose que le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ses prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. Il en résulte que la cour n'est saisie que des demandes figurant dans le dispositif des conclusions et pas de celles qui n'auraient pas été reprises dans ce dispositif.

En l'espèce, la SASU JULIA PASCAL VIANDES ne formule pas dans le dispositif de ses conclusions la demande de nullité de l'avertissement du 16 avril 2020 contrairement aux motifs de ses conclusions. Dès lors, la cour n'est pas saisie de cette demande. Seule la demande en dommages et intérêts a valablement saisi la cour.

En l'espèce, par courrier du 16 avril 2020, l'employeur a notifié au salarié un avertissement au motif que le salarié n'avait pas fait la livraison postérieurement à celles réalisées dans l'Intermarché [Localité 4] et au Carrefour de [Localité 11] sans l'avertir ce qui l'a contraint à faire appel en urgence à un autre chauffeur pour effectuer ce travail, caractérisant un acte d'insubordination.

L'employeur produit un échange de SMS aux termes duquel il indique au salarié un chargement le lendemain le 18 mars 2020 à « l'abattoir de [Localité 10] avec une livraison  « ameziane » centre commercial [12] ». Il n'est pas contesté par le salarié que cette dernière livraison n'a pas été faite par lui. Le salarié s'était plaint dans un courrier du 18 mai 2020 que ce client n'était pas dans son secteur puisqu'il devait effectuer le chargement à 140 km de son lieu de travail pour ensuite se rendre dans la Drôme.

En l'absence de demande de nullité de l'avertissement, et en tout état de cause, dès lors que le salarié n'a pas réalisé ce déplacement, il n'a subi aucun préjudice. Sa demande en dommages et intérêt sera par conséquent rejetée.

Sur le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité :

En application des articles L. 4121-1 et L.4121-2 du code du travail, l'employeur est tenu vis-à-vis des salariés d'une obligation de sécurité et de protection de la santé dont il doit assurer l'effectivité et prendre toutes les mesures visant à assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale des travailleurs.

Dès lors que le salarié invoque précisément un manquement professionnel en lien avec le préjudice qu'il invoque, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve du respect de son obligation de sécurité à l'égard du salarié.

Ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

En l'espèce, le salarié indique souffrir de douleurs à son épaule gauche préalablement à son embauche, aggravées par l'employeur dans son activité professionnelle puisqu'il devait porter d'importants kilos de viande tous les jours, les charger et les décharger sans aucune mesure de prévention malgré la connaissance de ses antécédents médicaux par l'employeur.

L'employeur fait valoir ne pas avoir connu les antécédents médicaux du salarié, avoir élaboré le document unique de l'entreprise dans le cadre de la prévention des risques professionnels en janvier 2018, avoir installé un rail qui se lie au camion pour permettre l'acheminement de la viande ainsi qu'un bras articulé pour apporter une aide à la manutention des pièces lors des chargement et déchargement du camion, le suivi d'une formation par le salarié le 19 mars 2019 intitulée vade-mecum du transport comprenant le rappel des locaux et des équipements en bon état sanitaire et les éventuelles sanctions s'agissant du transport de denrées animales ou d'origine animale dans un véhicule mal aménagé ou mal entretenu pouvant constituer un risque de contamination, d'altération ou de souillure.

Au vu des éléments produits, la réalité de l'aggravation des douleurs du salarié n'est pas établie. De plus, il n'est pas établi que l'employeur avait connaissance des douleurs à l'épaule du salarié, qu'il avait mis en place une série de dispositifs faisant supporter à un rail et à un bras articulé la charge des kilos de viande transportée et une formation en la matière. Dès lors, l'employeur justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail à ce titre.

La demande du salarié sera rejetée.

Ce chef de jugement sera confirmé.

Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse :

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il appartient à l'employeur de prouver la réalité de la faute grave qu'il reproche au salarié. La mise en 'uvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits fautifs dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire. Le maintien du salarié dans l'entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises.

L'article 1235-1 du code du travail prévoit que le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Si le principe est le non-cumul des sanctions, de nouveaux griefs autorisent l'employeur à retenir des fautes antérieures même déjà sanctionnées, pour apprécier la gravité des faits reprochés au salarié.

La lettre de licenciement fait mention des reproches suivants : « non seulement vous faites preuve d'insubordination en ne faisant pas le travail qui vous est donné sans aucune raison valable ni nous en avoir averti mais vous n'effectuez pas non plus correctement les tâches qui vous sont confiées en ne faisant pas remplir correctement les documents de livraison ce qui entraîne pour l'entreprise des pertes financières non négligeables. De plus, vous n'entretenez pas correctement le véhicule de livraison qui vous était confié, les prélèvements de surface effectués à l'intérieur de celui-ci montent des résultats très mauvais. Vous aviez pourtant été formé aux bonnes pratiques d'hygiène et informé des règles d'hygiène à respecter. Le fait de ne pas respecter ces règles fait courir un risque sanitaire grave à nos clients. Ces faits cumulés constituent une faute grave et sont de nature à affecter la poursuite de votre contrat de travail ».

En l'espèce, l'employeur indique avoir pris connaissance des faits contenus dans la lettre de licenciement le 18 mai 2020 lorsqu'il s'est déplacé sur place pour organiser la reprise de l'activité après le premier confinement sanitaire pour cause de Covid.

S'agissant du premier grief, l'insubordination évoquée renvoie au fait pour le salarié de ne pas avoir exécuté une activité demandée par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction sans aucune autre précision. Ainsi, aucun fait n'est établi par l'employeur depuis l'avertissement sanctionnant ces faits, ce grief n'est pas caractérisé.

S'agissant du deuxième grief relatif au manquement du salarié dans la rédaction des documents de livraison, aucun élément n'est produit par l'employeur à ce titre distinct des avertissements. Ce grief n'est pas caractérisé.

S'agissant du troisième grief, l'employeur expose que le premier confinement lié à la crise du Covid a eu lieu du 17 mars 2020 au 11 mai 2020, que l'établissement de [Localité 8] dans lequel était affecté le salarié avait temporairement fermé pendant cette période et que c'est à l'occasion de la préparation de la réouverture qu'il s'est déplacé le 18 mai 2020 dans les locaux et qu'il a pris connaissance du constat effectué le 6 mars 2020 par le conseiller qualité hygiène alimentaire interne à l'entreprise, dans le cadre du plan de maîtrise sanitaire, révélant un camion immatriculé EW 646 YV en mauvais état compte tenu de la présence de 45 colonies de germes ou contaminants qui se développent. Ce conseiller sanitaire indiquait que ce camion présentait déjà visuellement une hygiène défectueuse de plusieurs jours, très certainement en raison d'une absence du simple nettoyage journalier et systématique de fin de journée a minima.

Le salarié a contesté ce constat et sa responsabilité dans l'état de ce camion de surcroît non identifiable.

Force est de constater que l'employeur produit seulement une photographie du côté d'un camion présentant une porte ouverte sans aucun élément d'immatriculation ou d'identification. Ainsi, en l'absence de tout élément permettant d'identifier ce camion et par conséquent son conducteur le jour des faits, ce grief sera rejeté.

Ainsi, aucun fait fautif n'est établi pouvant donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites dans un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance. Par conséquent, les faits plus anciens, même déjà précédemment sanctionnés dans le cadre des avertissements, ne peuvent être invoqués et sont sans incidence sur la solution du litige en raison de la règle du non-cumul des sanctions pour un même fait.

Le licenciement est donc considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les indemnités de rupture :

L'article L.1234-1 du code du travail prévoit que lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à une indemnité de préavis et de licenciement.

Compte tenu de son entrée dans l'entreprise le 15 janvier 2019 et son licenciement le 10 juin 2020, le salarié dispose d'une ancienneté d'un an et de quatre mois. Le salaire de référence est d'un montant de 2068,61 euros.

S'agissant de l'indemnité au titre du préavis de départ, l'article L.1234-1 du code du travail prévoit que lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à une indemnité de préavis 2° s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d'un mois. L'indemnité compensatrice de préavis sera fixée à la somme de 2068,61 euros brute outre celle de 206,86 euros brute à titre de congés payés y afférents. Ce chef de jugement sera confirmé.

S'agissant de l'indemnité de licenciement de l'article L.1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte huit mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement. Tel est le cas en l'espèce. L'indemnité de licenciement sera évaluée à la somme de 689,54 euros. Ce chef de jugement sera confirmé.

S'agissant de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail, il apparaît qu'en considération de la situation particulière du salarié, son âge pour être né le 9 août 1995, les circonstances de la rupture, sa capacité à retrouver un emploi compte tenu de sa formation, sa prise en charge au titre des allocations chômage jusqu'en janvier 2021, il convient de condamner l'employeur au paiement de la somme de 2100 euros brute. Ce chef de jugement sera confirmé.

S'agissant de l'indemnité au titre d'un licenciement vexatoire, l'article L.1222-1 du code du travail prévoit que le contrat de travail est exécuté de bonne foi. Le caractère vexatoire de la rupture du contrat de travail peut résulter des conditions dans lesquelles le licenciement est intervenu et des circonstances qui l'ont entouré. En l'espèce, aucun élément n'est produit par le salarié permettant de caractériser des circonstances dans lesquelles la faute de l'employeur lui aurait causé un préjudice distinct de ceux déjà réparés. Sa demande sur ce point sera rejetée. Ce chef de jugement sera confirmé.

La période correspondant à la mise à pied doit être payée par l'employeur, soit la somme de 1241,16 euros outre la somme de 124,11 euros au titre à titre de congés payés. Ce chef de jugement sera confirmé.

L'employeur sera condamné à délivrer au salarié les bulletins de salaire et les documents de fin de contrat conformes à la décision sans astreinte.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les limites de l'article 1343-2 du code civil.

Sur les autres demandes :

La partie appelante succombe à la procédure, elle sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de l'intimé, l'intégralité des sommes avancées par lui et non comprises dans les dépens. Il lui sera alloué la somme de 1500 euros en application de l'article 700 alinéa 2 du Code de procédure civile. L'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 prévoit que les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif, peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. Tel est le cas en l'espèce, il en sera donné acte.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les limites de l'article 1343-2 du code civil.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les limites de l'article 1343-2 du code civil.

Condamne la SASU JULIA PASCAL VIANDES à payer à [U] [K] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SASU JULIA PASCAL VIANDES aux dépens de la procédure d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/01681
Date de la décision : 30/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-30;22.01681 ?
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