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10/07/2024 | FRANCE | N°24/03352

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre civile, 10 juillet 2024, 24/03352


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



(Loi n°2011-803 du 05 Juillet 2011)

(Décrets n° 2011-846 et 847 du 18 juillet 2011)



ORDONNANCE

DU 10 JUILLET 2024



N° 2024 - 145







N° RG 24/03352 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QJJC







[N] [Z]





C/



MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER REGIONAL



MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL



MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT


















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Décision déférée au premier président :



Ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Montpellier en date du 24 juin 2024 enregistrée au répertoire général sous le n° 24/01189.



ENTRE :



Monsieur [N] [Z]

né le 14 Juillet 2003 à [Loca...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

(Loi n°2011-803 du 05 Juillet 2011)

(Décrets n° 2011-846 et 847 du 18 juillet 2011)

ORDONNANCE

DU 10 JUILLET 2024

N° 2024 - 145

N° RG 24/03352 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QJJC

[N] [Z]

C/

MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER REGIONAL

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL

MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT

Décision déférée au premier président :

Ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Montpellier en date du 24 juin 2024 enregistrée au répertoire général sous le n° 24/01189.

ENTRE :

Monsieur [N] [Z]

né le 14 Juillet 2003 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Appelant

Comparant, assisté de Me Cloé PERROT, avocat commis d'office

ET :

MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER REGIONAL

Hôpital de la [5]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Non représenté

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL

Cour d'appel

[Adresse 1]

[Localité 6]

Non représenté

MONSIEUR LE PREFET DE L'HERAULT

[Adresse 7]

[Localité 6]

Non représenté

DEBATS

L'affaire a été débattue le 09 Juillet 2024, en audience publique, devant Fanny COTTE, vice-présidente placée près Monsieur le premier président de la cour d'appel de Montpellier déléguée aux fonctions de conseiller à la cour d'appel de Montpellier par ordonnance n°2024-66 du 19 février 2024 et en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique, assisté de Alexandra LLINARES greffière et mise en délibéré au 10 juillet 2024.

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Signée par Fanny COTTE, vice-présidente placée près Monsieur le premier président de la cour d'appel de Montpellier déléguée aux fonctions de conseiller à la cour d'appel de Montpellier par ordonnance n°2024-66 du 19 février 2024, et Alexandra LLINARES, greffière et rendue par mise à disposition au greffe par application de l'article 450 du code de procédure civile.

***

Vu la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge,

Vu la loi n° 2013-803 du 27 septembre 2013 modifiant certaines dispositions issues de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge,

Vu le décret n° 2011- 846 du 18 juillet 2011 relatif à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures de soins psychiatriques,

Vu le décret n°2014-897 du 15 août 2014 modifiant la procédure judiciaire de mainlevée et de contrôle des mesures de soins psychiatriques sans consentement,

Vu l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Montpellier en date du 24 Juin 2024,

Vu l'appel formé le 28 Juin 2024 par Monsieur [N] [Z] reçu au greffe de la cour le 28 Juin 2024,

Vu les convocations adressées par le greffe de la cour d'appel de Montpellier le 01 Juillet 2024 à l'établissement de soins, à l'intéressé, à son conseil, à Monsieur le Procureur général, à Monsieur le préfêt de l'Hérault et à l'ARS Occitanie les informant que l'audience sera tenue le 09 Juillet 2024 à 14 H 30,

Vu l'avis du ministère public en date du 8 juillet 2024,

Vu le procès verbal d'audience du 09 Juillet 2024,

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur [N] [Z] a déclaré à l'audience : 'je me sens totalement soigné, je suis bien dans ma peau, mes nuits se passent bien, mon traitement est adapté. Même quand j'ai des coups de colère, j'arrive à me gérer. Je n'ai plus besoin d'être hospitalisé, mon moral baisse parce que je suis tombé sur d'autres prisonniers. Ça se passe très bien, je suis respectueux, j'essaie d'être positif, j'aide quand je peux.

J'ai été hospitalisé parce que j'ai arrêté mon traitement et en une semaine, tout m'est tombé dessus : ma copine m'a quitté, j'ai appris la mort de mon cousin, je me suis embrouillé pour mon appart. Je me suis mis à fumer du hash.

Quand j'étais jeune, j'avais un traitement mais j'ai arrêté quand j'avais 14 ans. Ensuite, je me suis mis à fumer des joins, je pouvais fumer jusqu'à 10 grammes (= 10 joints) par jour. J'ai totalement arrêté de fumer, même la clope, je suis motivé. Pour l'instant, ça peut aller mais il faudrait que je sois dans un autre milieu pour avancer. Je sais que si je sors de l'hôpital, avec le traitement que j'ai, je pourrai me gérer. Je me suis même mis à lire. On ne m'a pas parlé de sortie mais seulement d'un changement d'unité, c'est pour ça que j'ai demandé moi-même à sortir pour me soigner tout seul. D'être enfermé, je me sens oppressé et ça m'angoisse.'

L'avocat de Monsieur [N] [Z] fait valoir au soutien de la demande de mainlevée que les droits du patient ne lui ont pas été notifiés après la décision de maintien du 17 juin 2024 ; que la préfecture ne démontre pas que les signataires des arrêtés de placement en hospitalisation complète et de maintien bénéficiaient d'une délégation de signature ; qu'une erreur matérielle est présente dans la requête préfectorale.

Le représentant du ministère public conclut à la confirmation de l'ordonnance.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel motivé, formé le 28 Juin 2024 à l'encontre d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention de Montpellier notifiée le 24 Juin 2024, est recevable pour avoir été formé dans les 10 jours de la notification en application de l'article R 3211-18 et R 3211-19 du code de la santé publique.

Sur l'appel

Sur l'absence de notification de la décision de maintien en hospitalisation complète

Aux termes de l'article L3211-3 du code de la santé publique, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en hospitalisation complète sous forme contrainte doit être informée le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état de la décision d'admission et de chacune des décisions prononçant le maintien des soins et définissant la forme de sa prise en charge, ainsi que des raisons qui les motivent ; elle doit également être informée, dès l'admission et aussitôt que son état le permet, de ses droits et des voies de recours et garanties qui lui sont offertes.

Il est constant que l'information doit être dispensée à un moment où le patient est en mesure d'en comprendre l'objet et d'exercer effectivement les droits qui lui sont garantis.

En l'espèce, Monsieur [Z] fait valoir qu'il n'a pas reçu notification de ses droits et voies de recours après la décision de maintien en hospitalisation complète.

Il résulte pourtant de l'examen du dossier que deux formulaires de notification des droits et voies de recours figurent au dossier.

Le premier formulaire, daté du 14 juin 2024, soit le jour de l'admission du patient, porte mention de la remise de la brochure d'information et du refus de celui-ci de la signer.

Le deuxième formulaire est signé de la main du patient le 16 juin 2024. Il semble cependant, au vu de la mention griffonée sur la brochure, qu'il s'agisse d'une erreur de plume en ce que deux brochures (au demeurant identiques s'agissant des droits qu'elles mentionnent) sont remises durant l'hospitalisation en soins complets d'un patient, l'une après la décision d'admission (soit le 14 juin 2024 en l'espèce), l'autre après la décision de maintien.

En tout état de cause, les deux décisions d'admission et de maintien ont bien été notifiées à Monsieur [Z], qui ne démontre aucun grief tiré de l'absence de notification de ses droits en ce qu'il n'a pas cherché à exercer lesdits droits prévus dans le formulaire avant et après la décision de maintien en hospitalisation complète.

Le moyen sera rejeté en conséquence.

Sur la compétence des signataires des décisions d'admission et de maintien

Le conseil de Monsieur [Z] soulève l'irrégularité des arrêtés d'admission du 14 juin 2024 et de maintien en hospitalisation du 17 juin 2024 dans l'hypothèse où la préfecture de l'Hérault ne justifierait pas des délégations de signature de leurs signataires, Monsieur [B] [J] et Monsieur [C] [G].

Il est constant que les décisions d'admission et de maintien en soins psychiatriques sans consentement doivent émaner d'une personne compétente juridiquement, identifiable par sa signature, ses nom, prénom et qualité en caractères lisibles, disposant d'une délégation de signature si elle n'est pas le maire, le directeur d'établissement ou le représentant de l'Etat.

En l'espèce, l'arrêté portant admission en soins sans consentement a été pris par Monsieur [B] [J] 'pour le préfet et par délégation, le secrétaire général' le 14 juin 2024. L'arrêté préfectoral portant délégation de signature à son bénéfice ne figure pas au dossier cependant.

L'article L. 3216-1, alinéa 2 du code de la santé publique dispose que l'irrégularité affectant la décision administrative n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet. Pour obtenir la mainlevée d'une mesure, le patient doit donc prouver à la fois une irrégularité et le grief qui en est résulté pour lui. Autrement dit, l'irrégularité ne fait pas nécessairement grief et la Cour de cassation prononce des cassations pour manque de base légale toutes les fois où les décisions se bornent à retenir l'existence d'une irrégularité et à lever la mesure pour ce seul motif, ainsi que pour une irrégularité liée à l'absence de la mention des nom, prénom, qualité du signataire de la décision d'admission et de maintien en hospitalisation à la demande d'un tiers (1re Civ., 18 juin 2014, pourvoi n° 13-16.363).

En la cause, la cour constate que par décret du Président de la République du 2 septembre 2022, Monsieur [B] [J], sous-préfet, a été nommé secrétaire général de la préfecture de [Localité 6], sous-préfet de [Localité 6]. La consultation du recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Hérault, à la disposition du public, permet de constater qu'il dispose d'une délégation générale de signature de Monsieur le Préfet de l'Hérault par arrêté préfectoral du 14 septembre 2022 n° 2022.09.DRCL.0357, publié le même jour, pour tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Hérault.

Il en résulte qu'il avait donc qualité pour signer l'arrêté du 14 juin 2024.

S'agissant de l'arrêté de maintien en soins sans consentement du 17 juin 2024, il est signé par Monsieur [C] [G], 'pour le préfet et par délégation, le directeur de cabinet'.

Par décret du Président de la République du 29 mai 2024, Monsieur [C] [G] a été nommé sous-préfet, directeur de cabinet du préfet de l'Hérault pour une durée de trois ans. La consultation du recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Hérault permet de constater qu'il bénéficie d'une délégation de signature, par arrêté n° 2024-06-DRCL-229 du 7 juin 2024 pris par Monsieur le Préfet de l'Hérault, 'en matière d'admission en soins psychiatriques'.

Il avait donc qualité pour signer l'arrêté du 17 juin 2024.

Il convient donc de rejeter ce moyen.

Sur l'erreur relative à la date de naissance

L'erreur portant sur la date de naissance du patient dans la requête valant saisine du juge des libertés et de la détention comme l'absence du lieu de naissance ne portent pas atteinte aux intérêts du patient qui est bien concerné par la procédure transmise par l'autorité préfectorale.

Au demeurant, le patient ne tire aucune conclusion de cette erreur.

Le moyen sera rejeté.

Sur le fond

Le certificat médical établi par le Docteur [R] [D] le 5 juillet 2024 fait état des éléments suivants :

'patient admis dans un contexte de crise suicidaire réactionnelle à des idées de persécution. Il présente une probable entrée dans un processus psychotique chronique, précipitée par une consommation importante de cannabis et caractérisée par une désorganisation cognitivo-comportementale, des idées délirantes et un trouble des interactions sociales. Sur le plan clinique, le traitement a pu réduire l'intensité des symptômes mais le patient est totalement anosognosique et rationnalise ses troubles. Il est ambivalent à l'égard des soins. Un relai vers son secteur de rattachement est en cours d'organisation afin de mettre en oeuvre la prise en charge globale psycho-sociale dont il relève'.

Il résulte des pièces du dossier que l'intéressé présente des troubles mentaux qui rendent impossible son consentement et son état mental impose dans l'immédiat des soins assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète.

En conséquence, l'ordonnance déférée sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement,

Déclarons recevable l'appel formé par Monsieur [N] [Z],

Confirmons la décision déférée,

Disons que la présente décision est portée à la connaissance de la personne qui fait l'objet de soins par le greffe de la cour d'appel.

Rappelons que la présente décision est communiquée au ministère public, au directeur d'établissement, à Monsieur le préfêt de l'Hérault et à l'ARS Occitanie.

La greffière Le magistrat délégué


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre civile
Numéro d'arrêt : 24/03352
Date de la décision : 10/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-10;24.03352 ?
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