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10/07/2024 | FRANCE | N°21/04559

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 10 juillet 2024, 21/04559


ARRÊT n°





























Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 10 JUILLET 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04559 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PCVP



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 JUIN 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS -

N° RG F 19/00145







APPELANT :



Monsieur [D] [F]

né le 29 Mai 1974 à [Localité 5] (50)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Yannick CAMBON de la SELARL ELEOM BEZIERS-SETE, avocat au barreau de BEZIERS, ...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 10 JUILLET 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04559 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PCVP

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 JUIN 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS - N° RG F 19/00145

APPELANT :

Monsieur [D] [F]

né le 29 Mai 1974 à [Localité 5] (50)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Yannick CAMBON de la SELARL ELEOM BEZIERS-SETE, avocat au barreau de BEZIERS, substitué sur l'audience par Me Pauline AQUILA, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMEES :

S.E.L.A.R.L. [V] [E]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Dorothée SALVAYRE, avocat au barreau de BEZIERS, substituée sur l'audience par Me Lisa CAMPANELLA, avocat au barreau de BEZIERS

UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA de [Localité 6]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Delphine CLAMENS-BIANCO de la SELARL CHATEL BRUN MIRALVES CLAMENS, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 29 Avril 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Mai 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thomas LE MONNYER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Magali VENET, Conseiller

Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

M. [D] [F] a été engagé en qualité de chauffeur livreur, coefficient 118 M, suivant contrat à durée indéterminée à temps complet, à compter du 26 décembre 2006, par la société Tel Express, spécialisée dans l'activité de transport routier de messagerie relevant de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires.

Le 22 novembre 2018, le salarié a été élu en qualité de membre du CSE.

Par courrier du 14 janvier 2019, l'employeur lui a notifié un changement d'horaires de travail à effet au 22 janvier suivant.

Par courrier du 26 janvier 2019, le salarié a contesté ce changement d'horaires et a réclamé le paiement d'heures supplémentaires et congés payés afférents pour la période d'avril 2017 à décembre 2018, ainsi qu'un rappel d'ancienneté au titre de l'année 2018.

Le 3 avril 2019, il a saisi le conseil de prud'hommes de Béziers en sa formation de référé aux fins de voir constater un trouble manifestement illicite résultant de la modification de ses conditions de travail.

Par ordonnance du 14 juin 2019, le conseil de prud'hommes, constatant une contestation sérieuse, a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Le 11 avril 2019, le salarié a saisi conseil de prud'hommes de Béziers au fond de diverses demandes salariales et indemnitaires.

Le 4 septembre 2019, la société a été placée en redressement judiciaire, puis par jugement du 6 novembre 2019, elle a été placée en liquidation judiciaire et Me [V] [E] a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire de la société.

Par jugement du 17 juin 2021, le conseil de prud'hommes a statué comme suit :

Fixe la créance de M. [F] au passif de la liquidation judiciaire de l'Eurl Tel Express aux sommes de :

- 367,85 euros au titre du paiement des heures de formation syndicale,

- 345, 76 euros au titre du rappel d'ancienneté au regard de la convention collective des transports,

Déboute M. [F] du surplus de ses demandes,

Laisse les dépens aux frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

Le 15 juillet 2021, M. [F] a relevé appel de cette décision par voie électronique.

Par ordonnance rendue le 29 avril 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 29 mai 2024.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 8 octobre 2021, M. [F] demande à la cour de réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes relatives aux heures supplémentaires, aux heures de délégation, au travail dissimulé et à l'exécution déloyale du contrat de travail, et statuant à nouveau, fixer sa créance à la liquidation judiciaire de la Société Tel Express aux sommes suivantes

- 9 869,67 euros au titre des heures supplémentaires non rémunérées, outre 2 364,54 euros au titre des congés payés afférents,

- 2 051,86 euros au titre des heures de délégation non rémunérées,

- 9 564 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- 2 000 euros au titre de l'exécution déloyale de son contrat de travail,

- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 7 janvier 2022, la Selarl [V] [E], es qualité de mandataire liquidateur de la Société Tel Express, demande à la cour d'infirmer le jugement uniquement en ce qu'il a fixé la créance de M. [F] au passif de la liquidation judiciaire de la société à la somme de 345,76 euros à titre de rappel d'ancienneté, et statuant à nouveau :

Débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes,

Lui donner acte de ce qu'elle revendique le bénéfice des principes et textes applicables aux conditions et à l'étendue de l'opposabilité, de l'inscription et du paiement des créances dans le cadre de la liquidation judiciaire.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 30 novembre 2021, l'AGS CGEA de [Localité 6] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, débouter M. [F] de ses demandes et donner acte au CGEA de ce qu'il revendique le bénéfice exprès et d'ordre public des textes légaux et réglementaires applicables tant au plan des conditions de la mise en 'uvre du régime d'assurance de créances des salariés que de l'étendue de ladite garantie.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS

Sur les heures supplémentaires :

M. [F] conclut à la réformation du jugement qui l'a débouté de sa demande à titre de rappel d'heures supplémentaires et sollicite à ce titre la somme de 9 869,67 euros outre 2 364,54 euros au titre des congés payés afférents.

Il résulte des dispositions des articles L.3171-2 et L.3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le salarié verse aux débats les éléments suivants :

- son contrat de travail qui prévoit une durée de travail de 35 heures par semaine et précise que 'selon l'accord ARTT signé le 31 juillet 2000 (accord de modulation +/- 4 heures par semaine), le salarié observera les horaires de travail qui lui seront fixés par la Société Tel Express',

- un courrier du 14 janvier 2019, lui notifiant un changement d'horaires à effet au 22 janvier suivant, comme suit :

- du lundi au vendredi de 7h30 à 13h00 et de 14h00 à 15h00

- un samedi sur deux de 7h00 à 12h00.

- sa réclamation du 26 janvier 2019 aux termes de laquelle il sollicite la somme de 9 924,65 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires outre 2 735,71 euros au titre des congés payés afférents, ainsi détaillée : '04/2017 au 12/2018 : HS 125% 329h53 et HS 150% : 361h01".

- ses bulletins de salaire pour la période d'avril 2017 à janvier 2019 qui font mention du paiement, chaque mois, d'heures supplémentaires rémunérées au taux majoré à 25% entre 5 et 25 heures, pour un total de 323,94 heures.

- ses feuilles de route mensuelles détaillant ses heures de prise et de fin de poste et le nombre d'heures supplémentaires accomplies quotidiennement,

- un tableau récapitulatif des heures accomplies, semaine par semaine, de mars 2017 à janvier 2019, pour un total de 1 077,66 heures sur 88 semaines travaillées, soit une moyenne de 12 heures supplémentaires par semaine.

Les relevés d'heures produits par le salarié sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre.

Le mandataire liquidateur objecte que les éléments produits par le salarié ne sont pas suffisamment précis et soulève un différentiel entre le nombre d'heures figurant sur les feuilles de route et celui figurant sur le tableau récapitulatif.

L'AGS s'en rapporte à l'argumentation soutenue par le mandataire liquidateur.

S'il existe un léger différentiel entre le nombre d'heures mensuelles indiquées sur les feuilles de route et les tableaux récapitulatifs, celui-ci n'est pas de nature à remettre en cause, dans son principe, le bien fondé de la réclamation du salarié qui repose sur des éléments suffisamment précis, lesquels ne sont pas utilement contredits par l'employeur qui ne produit aucun élément.

Après analyse des éléments produits par l'une et l'autre des parties, il apparaît que le salarié a effectivement réalisé des heures supplémentaires, dans une proportion moindre à celle sollicitée. La cour évalue sa créance à la somme de 4 300 euros de ce chef, outre 430 euros au titre des congés payés afférents.

Sur les heures de délégation :

Au soutien de sa demande l'appelant fait valoir qu'il a accompli 160 heures de délégation, à majorer, pour une créance totale de 2 051,86 euros.

Au soutien de sa demande, il produit des tableaux récapitulatifs des heures de délégation réalisées sur la période de décembre 2018 à août 2019 précisant le nombre d'heures réalisées (20 heures par mois) et dont il ressort qu'elles auraient été réalisées en début et en fin de journée, en dehors de ses horaires habituels de travail.

Le mandataire liquidateur réplique que le salarié, qui ne produit pas d'éléments relatifs à l'utilisation des ces heures, ne démontre pas qu'elles ont été effectuées en raison des nécessités de son mandat. Il relève en outre des incohérences sur son décompte du mois de janvier 2019 (l'absence de mention des heures réalisées les 14, 16 et 18 janvier et le fait que les 5 et 19 janvier étaient des samedis).

L'AGS s'en rapporte à l'argumentation soutenue par le mandataire liquidateur.

Il est de droit que les heures de délégation, qui sont payées comme temps de travail, doivent, lorsqu'elles sont prises en dehors de l'horaire de travail et qu'elles sont justifiées par les nécessités du mandat, être payées comme des heures supplémentaires mais aussi que l'utilisation du crédit d'heures est présumée conforme à son objet, y compris pour les heures de délégation prises en dehors du temps de travail.

L'employeur ne peut contester l'usage fait du temps alloué aux représentants du personnel pour l'exercice de leur mandat qu'après l'avoir payé, le cas échéant en heures supplémentaires.

En l'espèce, alors que le décompte des heures de délégation communiqué par le salarié est suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, le mandataire liquidateur se borne à contester leur usage, sans fournir d'éléments permettant de renverser la présomption d'utilisation conforme.

Néanmoins, il y a lieu de relever que dans sa réclamation détaillée du 26 janvier 2019, le salarié ne faisait état d'aucune réclamation de ce chef.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société la somme de 500 euros à titre de rappel de salaire, par réformation du jugement entrepris.

Sur le travail dissimulé :

Selon l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, le fait, notamment pour tout employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie.

Le salarié soutient que l'employeur a intentionnellement omis de mentionner sur ses bulletins de paie une partie des heures supplémentaires réalisées en les dissimulant par le versement régulier d'indemnités de repas et de casse croûte, évitant ainsi leur paiement majoré.

Il expose que la société a fait l'objet d'une condamnation par l'Ursaff pour dissimulation d'heures supplémentaires par le biais d'indemnités de repas et que l'intention de travail dissimulé résulte de la correspondance entre le nombre d'heures supplémentaires non rémunérées et le nombre d'indemnité de casse-croûte ou de panier repas versées. Par exemple, pour le mois de mai 2017, il a perçu 410,80 euros à titre d'indemnité 'repas midi et casse croûte', ce qui correspond, selon lui aux 41,79 heures supplémentaires effectuées et non rémunérées.

Il ajoute qu'il n'aurait pas du être bénéficiaire d'indemnités de repas ou de casse croûte dès lors qu'il était domicilié à [Localité 2], à proximité du lieu de sa tournée.

Il verse aux débats ses bulletins de paie qui font état du paiement chaque mois d'une vingtaine d'indemnités repas, pour un montant total de 7139,04 euros sur la période d'avril 2017 à janvier 2019.

Le mandataire liquidateur objecte qu'une telle fraude n'est pas démontrée et que si un tel système avait été mis en place, le salarié en était bénéficiaire puisqu'il n'a pas été imposé au titre de l'impôt sur le revenu sur ces indemnités.

S'il résulte des termes du jugement du tribunal de commerce de Béziers du 18 septembre 2019 que la société a fait l'objet d'un redressement par l'Ursaff du Var au cours de l'année 2017, l'objet de la fraude constatée et la période concernée ne sont pas précisés et seul le site de Toulon était concerné.

En outre, les bulletins de salaire font état du paiement de nombreuses heures supplémentaires pour un nombre variable. Le seul versement par l'employeur d'indemnités de repas et casse croûte, que le salarié estime non justifiée, ne suffit pas à établir l'intention de dissimulation d'activité.

Il y a donc lieu de débouter le salarié de sa demande à ce titre.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :

M. [F] sollicite le versement de la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail.

Au soutien de sa demande, il invoque :

- le non-paiement d'une partie des heures supplémentaires réalisées et de ses heures de délégation,

- le travail dissimulé,

- la modification de ses horaires de travail le 14 janvier 2019 à titre de sanction et de mesure de rétorsion, pour avoir participé à une formation CSE d'une semaine du 14 janvier au 18 janvier 2019.

Le mandataire liquidateur objecte que les manquements visés ne sont pas caractérisés, et qu'en tout état de cause, le salarié ne justifie pas du préjudice subi.

L'AGS soutient qu'aucune volonté de nuire n'est établie et qu'elle ne peut venir garantir les dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Sur le non paiement des heures supplémentaires et des heures de délégation, la preuve d'un préjudice distinct de celui réparé par le jeu des intérêts moratoires n'est pas rapportée, non plus que l'intention de dissimulation d'activité. Ces griefs seront écartés.

S'agissant du changement d'horaires, le salarié produit un courrier adressé à son employeur le 26 janvier 2019 au sein duquel il conteste son changement d'horaire et indique que, le 14 janvier 2019, premier jour de sa formation syndicale, il a été contacté par téléphone par M. [R] qui s'est plaint de son absence.

La concomitance de dates entre la notification de son changement d'horaires et le début de la formation CSE à laquelle il a participé ne suffit pas à démontrer qu'une telle modification de conditions de travail, relevant du pouvoir de direction de l'employeur, constituait une mesure de rétorsion. Ce grief n'est pas établi.

Par conséquent, il convient de confirmer le jugement qui a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Sur le rappel d'ancienneté :

Le mandataire liquidateur sollicite la réformation du jugement qui a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Société Tel Express la somme de 345, 76 euros à titre de rappel de salaire en considérant que le salarié fonde son action sur un calcul erroné et qu'il ne rapporte pas la preuve de l'obligation dont il se prévaut. L'intimé soutient que le salarié a bénéficié d'un taux horaire supérieur au salaire minimum conventionnel augmenté selon l'ancienneté acquise et ne peut donc bénéficier d'une rémunération supplémentaire.

Le salarié soutient qu'il n'a pas perçu la rémunération minimale garantie prévue par la convention collective des transports routiers, correspondant à son ancienneté.

Il produit un courrier du 26 janvier 2019 par lequel il a réclamé le paiement de la somme de 200,16 euros à titre de 'prime d'ancienneté' pour l'année 2018. Il conteste le taux horaire qui lui était appliqué de 10,36 euros, et sollicite un rappel de salaire, par application d'un taux de10,47 euros selon le calcul suivant (9,88 euros + 6%).

L'article 12 de l'annexe I de la convention collective applicable prévoit que :

' Aucun ouvrier des transports ayant une aptitude et une activité normales, âgé de plus de 18 ans, ne peut percevoir, quel que soit le mode de rémunération en vigueur dans l'entreprise, une rémunération effective inférieure à la rémunération globale garantie correspondant à son emploi, à son ancienneté dans l'entreprise et à la durée du travail effectif pendant la période considérée.

La rémunération effective du personnel roulant "marchandises" et "déménagements" ne peut être inférieure à la rémunération de l'intégralité des temps pris en compte pour la détermination des temps de travail effectifs, le cas échéant, enregistrés par les appareils de contrôle.

Pour l'application des dispositions des paragraphes ci-dessus, la rémunération à prendre en considération comprend l'ensemble des éléments de rémunération assujettis aux cotisations sociales et auxquels le salarié a droit du fait de son activité professionnelle pendant le mois considéré, quelles que soient la date et les modalités de leur paiement.

Ne sont pas comprises dans la rémunération effective au sens du présent article :

- les sommes versées en application de l'article 6 (§ 4) du décret du 26 janvier 1983 relatives aux dépassements d'amplitude et de l'article 17 de la présente convention relatif à l'indemnisation de l'amplitude,

- les gratifications ayant un caractère bénévole et exceptionnel,

- les indemnités ayant le caractère d'un remboursement de frais,

L'article 13 de la même annexe dispose également que :

'La rémunération globale garantie visée au premier paragraphe de l'article 12 ci-dessus est égale aux sommes fixées en francs par les tableaux joints à la présente convention collective nationale annexe et augmentée, le cas échéant, notamment des majorations conventionnelles fixées en application du présent article (§ 2, Ancienneté).

L'ancienneté est comptée à partir de la date de formation du contrat de travail. Elle donne lieu aux majorations suivantes :

- 2 % après 2 années de présence dans l'entreprise ;

- 4 % après 5 années de présence dans l'entreprise ;

- 6 % après 10 années de présence dans l'entreprise ;

- 8 % après 15 années de présence dans l'entreprise.

La rémunération globale garantie est calculée mensuellement'

Aux termes de ces articles, il apparaît que le salarié doit percevoir une rémunération globale, abstraction faites des sommes ci-dessus identifiées, conforme à la rémunération minimale garantie qui comprend, le cas échéant, une majoration due au titre de l'ancienneté calculée selon la durée de présence du salarié dans l'entreprise.

Par ailleurs, en application des dispositions de l'article 1315 du code civil, devenu 1353, s'il appartient à celui qui se prévaut d'une obligation d'en justifier, il revient à celui qui prétend s'en être libéré de justifier du paiement ou du fait extinctif. Par l'effet de ce texte, sous réserve pour le salarié de justifier du principe de l'obligation contractuelle ou conventionnelle dont il se prévaut, il appartient à l'employeur de justifier du paiement ou du fait extinctif de son obligation.

Pour vérifier si le salarié a bien été rempli de ses droits, il convient de comparer, non pas le taux horaire, mais la rémunération globale perçue qui en dépend néanmoins.

Alors, d'une part, que le salarié justifie du principe de l'obligation conventionnelle dont il se prévaut, d'autre part, que l'employeur n'a revalorisé le taux horaire consécutivement à l'entrée en vigueur de l'accord du 6/03/2018, étendu par arrêté ministériel d'avril 2019, qu'au mois de décembre 2018 et que d'avril à décembre 2018, il n'est relevé par la cour à l'examen des bulletins de salaire aucun élément complémentaire de rémunération assujettis aux cotisations sociales, abstraction faite des sommes et gratifications exclues, susceptible de compenser ce déficit de taux, l'employeur ne rapporte pas la preuve de s'être libéré de son obligation au titre de l'ancienneté.

Par suite, le jugement sera confirmé en ce qu'il a accueilli la demande formée par le salarié de ce chef à hauteur de 345, 76 euros bruts.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en ce qu'il a, d'une part, fait droit aux demandes salariales de M. [F] au titre de heures de formation syndicale et du rappel d'ancienneté et, d'autre part, débouté le requérant de ses demandes en paiement d'indemnité pour travail dissimulé et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

L'infirme pour le surplus relativement aux heures supplémentaires et aux heures de délégation,

Statuant de nouveau des seuls chefs infirmés,

Fixe la créance de M. [D] [F] au passif de la liquidation judiciaire de la Société Tel Express aux sommes suivantes :

- 4 300 euros bruts au titre des heures supplémentaires non rémunérées, outre 430 euros au titre des congés payés afférents,

- 500 euros bruts au titre des heures de délégation non rémunérées.

Déboute M. [D] [F] du surplus de ses demandes,

Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront considérés comme frais privilégiés dans le cadre de la procédure collective.

Prononce publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Thomas Le Monnyer, Président, et par Madame Marie-Lydia Viginier, greffier auquel la minute la décision à été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/04559
Date de la décision : 10/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-10;21.04559 ?
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