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26/06/2024 | FRANCE | N°21/01996

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 26 juin 2024, 21/01996


ARRÊT n°

































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 26 JUIN 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01996 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O5YN



Décision déférée à la Cour : Jugement du 1

5 MARS 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 19/00212











APPELANTE :



Madame [M] [F]

née le 24 Août 1988 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Romain GEOFFROY de la SELARL SELARL ORA, avocat au barreau de MONTPELLIER













INTIMEE :



S.A.S. ...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 26 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01996 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O5YN

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 MARS 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 19/00212

APPELANTE :

Madame [M] [F]

née le 24 Août 1988 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Romain GEOFFROY de la SELARL SELARL ORA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

S.A.S. [7]

Prise en la personne de son représentant légal, domicilié en

cette qualité audit siège, sis

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Fabrice BABOIN de la SELAS PVB AVOCATS, substitué sur l'audience par Me Déborah DEFRANCE, avocats au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 04 Mars 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 AVRIL 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Monsieur Jean-Jacques FRION, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

Assistée de Madame [R] [V], greffier stagiaire

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après prorogation de la date du délibéré initialement prévue le 05 juin 2024 à celle du 26 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mme [F] était engagée en qualité d'adjointe de direction à compter du 29 janvier 2018 par le biais de contrats de travail à durée déterminée successifs jusqu'au 29 avril 2018 par la société [7], gérant un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), employant habituellement plus de cinquante salariés, régie par la convention collective hospitalisation privée à but lucratif et faisant partie du groupe E4 en charge de la gestion de quatre EHPAD.

Elle était engagée par contrat à durée indéterminée le 30 avril 2018 en qualité de directrice de la résidence.

Le 29 octobre 2018 elle était convoquée à un entretien préalable à éventuel licenciement fixé au 12 novembre 2018 par lettre remise en main propre avec mise à pied conservatoire et elle était licenciée pour faute grave par une lettre du 21 novembre 2018 qu'elle réceptionnait le 24 novembre 2018.

Contestant cette décision, Mme [F] a saisi le 2 février 2019 le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins d'entendre juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, lequel par jugement du 15 mars 2021 a :

- dit que licenciement de Mme [F] pour cause réelle et sérieuse est justifié et fondé et que la faute grave est caractérisée,

- constaté que le caractère brutal et vexatoire n'est pas établi,

- constaté que la procédure relative à la portabilité a été respectée par l'employeur,

- débouté Mme [F] de l'ensemble de ses demandes,

- laissé les dépens à charge des parties.

Le 25 mars 2021 Mme [F] a relevé appel de ce jugement qui lui a été signifié le 18 mars 2021.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 15 juin 2021, Mme [F] demande à la cour d'infirmer, de réformer ou d'annuler le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau de :

- Fixer son salaire de base à la somme de 4.165 euros ;

- Requalifier le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Prendre acte du préjudice distinct de celui correspondant à la perte de son emploi qu'elle a subi constituant une brutalité dans la rupture ;

- Prendre acte du non-respect par l'employeur de ses obligations en matière de portabilité de la prévoyance ;

En conséquence,

- Condamner [7] à lui verser les sommes suivantes :

4.165 euros (barème MACRON, 1 mois) pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

24.990 euros soit 6 mois de salaire à titre d'indemnité compensatrice de

préavis et 2.499 euros de congés payés y afférents;

867,70 euros au titre de l'indemnité de licenciement et 86 euros de congés payés y afférents;

3.072,54 euros à titre de rappel de mise à pied conservatoire;

24.990 euros soit six mois de salaire de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire;

4.165 euros soit un mois de salaire à titre de préjudice pour non-respect de la

portabilité frais de santé.

- Ordonner la remise dans les 15 jours sous astreinte de 200 euros par jour de retard des documents de fin de contrat et bulletins de salaire rectifiés conformément au jugement ;

- Se réserver la possibilité de liquider l'astreinte ;

- Prononcer les intérêts au taux légal avec capitalisation ;

- Condamner la société [7] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

- La condamner aux entiers dépens.

Suivant ses dernières conclusions remises au greffe le 10 septembre 2021, la société [7] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Montpellier en date du 15 mars 2021 en ce qu'il a :

Dit que le licenciement de Mme [F] pour cause réelle et sérieuse est justifié et fondé et que la faute grave est caractérisée;

Constaté que le caractère brutal et vexatoire n'est pas établi;

Constaté que la procédure relative à la portabilité a été respectée par l'employeur;

Débouté Mme [F] de l'intégralité de ses demandes.

- Débouter Mme [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- La condamner à lui verser la somme de 3 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- La condamner aux entiers dépens.

Par décision en date du 04 mars 2024, le conseiller de la mise en état a clôturé l'instruction du dossier et fixé l'affaire à l'audience du 03 avril 2024.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures qu'elles ont déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le licenciement :

Convoquée le 29 octobre 2018, à un entretien préalable fixé au 12 novembre suivant, Mme [F] a été licenciée par lettre du 21 novembre 2018, énonçant les motifs suivants :

« Madame,

A la suite de l'entretien préalable que nous avons eu le Lundi 12 Novembre 2018, et lors duquel vous étiez assistée par Monsieur [B] [U], salarié de la société, nous sommes contraints de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour faute grave.

Les raisons qui motivent cette décision, et qui vous ont été exposées à cette occasion, sont les suivantes :

Vous avez été embauchée en contrat de travail à durée déterminée en qualité d'Adjointe de Direction en remplacement de Monsieur [Y] du 29 janvier 2018 au 29 avril 2018 puis en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 30 avril 2018 en qualité de Directrice de Résidence.

En votre qualité de Directrice, vous disposez d'un statut de «Cadre Dirigeant'' tel que prévu par l'article L3111-2 du Code du travail et par votre contrat de travail.

Ce statut impliquait une très large autonomie dans l'exercice de vos fonctions, la prise de décision sur l'organisation et l'administration de la résidence [7].

Dans ce cadre, nous vous accordions une confiance a priori concernant la gestion de l'établissement dans le respect, évidemment, des orientations données par la Direction Générale.

Au cours du mois d'octobre 2018, nous avons été successivement alertés par des salariés, des résidents et des familles de dysfonctionnements graves affectant la Résidence [7].

Nous avons alors procédé à des vérifications et des entretiens individuels, notamment avec des salariés de l'établissement.

A l'occasion de cette enquête, nous avons découvert un grand nombre de fautes commises par vos soins, dont certaines présentent un degré de gravité exceptionnel qui ne laisse aucune autre possibilité que de procéder à votre licenciement pour faute grave.

l/ Méthodes managériales instituant un climat tendu chez les salariés

De nombreux salariés nous ont rapporté leur mal-être au travail. Il en ressort un épuisement professionnel généralisé que certains salariés nous ont indiqué ressentir depuis le mois de mars 2018.

Les salariés ont fait état d'erreurs récurrentes dans leurs plannings ne leur permettant pas de s'organiser.

Pire encore, c'est votre management qui a été vivement critiqué par le personnel lequel a indiqué que vous ne seriez jamais disponible et à leur écoute, qui plus à raison de vos absences à répétition en cours de journée.

Certains salariés se sont sentis dévalorisés car vous vous permettiez de critiquer les uns et les autres sans vous en cacher voire de les dénigrer ou encore de les insulter.

Pour ne citer qu'un exemple, le 14 avril 2018, une salariée a appelé pour signifier qu'elle serait en arrêt de travail. Lorsque vous avez été prévenue, vous avez dit : «tant mieux, on la remplacera par du personnel compétent et qualifié. Ça suffit les incompétents. Ceux qui ne sont pas contents n'ont qu'à partir '' aux personnes présentes.

La détresse des salariés est telle que certains ont assimilé vos actes à du « harcèlement moral '' au cours de leurs témoignages.

Lors de l'entretien préalable, vous avez nié leur manquer de respect tout en indiquant de manière contradictoire qu'il était arrivé, parfois, que vous « pointiez le fait que certains étaient incompétents ''.

Vos méthodes managériales sont absolument incompatibles avec le bon fonctionnement de l'établissement et, plus encore, l'éthique sociale du Groupe E4.

Ce seul grief suffit, en soi, à justifier la rupture de votre contrat car nous ne pouvons

tolérer que les salariés de la Résidence soient placés dans une situation de souffrance psychologique.

Nous ne pouvons que vous rappeler l'importance de notre obligation de veiller à leur santé et leur sécurité.

2/ Non-respect de la politique instituée par la Direction Générale et rupture de confiance

a/ Vous avez délibérément pris des décisions de gestion contraires aux orientations données par la Direction Générale, tout en dissimulant vos actes.

En effet, vous avez procédé au remplacement de salariés par du personnel non qualifié (ASH pour remplacement d'AS) alors même que seules des personnes diplômées ou, à tout le moins, engagées dans une démarche de VAE « aide-soignante '', peuvent occuper de tels postes.

Le tout sans avoir sollicité l'ARS conformément aux consignes données par la Directrice Générale du Groupe.

Lors de l'entretien, vous avez reconnu ces faits comme celui de ne pas avoir tenu informée la Direction Générale. Vous avez toutefois minimisé leur impact en considérant que cela ne concernait que les CDD et non les CDI.

Cette explication n'est évidemment pas acceptable.

b/ Au cours de l'été 2018, vous avez pris l'initiative d'occuper un poste d'infirmière sans en informer la Direction Générale alors que cela ne relevait pas de vos fonctions de Directrice (même si vous êtes diplômée IDE).

c/ Nous avons également découvert que vous aviez facturé régulièrement la même chambre, sur la même période, à plusieurs personnes. Vous avez reconnu ces faits lors de l'entretien sachant que ce n'est ni éthique ni légalement autorisé.

Votre comportement, la dissimulation de vos agissements comme leur gravité, sont intolérables et ont rompu la confiance que nous placions en vous.

Nous ne pouvons laisser la gestion d'un établissement dans son ensemble à une personne qui agit à sa guise, sans considération des conséquences et en totale infraction avec la règlementation.

Pour cette autre raison prise isolément, votre maintien à votre poste de Directrice s'avère radicalement impossible.

3/ Non-respect de la règlementation applicable aux EPHAD

L'un des faits les plus graves que nous avons relevé à l'examen des comptes de la résidence au mois d'octobre, a été commis au mois de juin 2018.

En effet, durant plusieurs jours, l'EPAHD [7] a accueilli 61 résidents au lieu des 60 autorisés.

Une telle situation, fruit d'une décision de votre part, est totalement inacceptable.

En effet, cette décision de gestion peut avoir des conséquences gravissimes avec le retrait de notre autorisation d'ouverture de l'EPHAD.

Vous en étiez parfaitement consciente.

Vous avez reconnu ce fait, tout en indiquant que cela n'avait duré, selon vous, que 15 jours ( !) et que vous aviez manqué de discernement en ne nous en informant pas.

Nous ne pouvons tolérer un tel acte qui a mis en péril la pérennité de l'activité de la Résidence.

Pour ce fait pris isolément, la faute grave est indéniablement caractérisée.

4/ Non-respect de la législation en matière sociale

En votre qualité de Directrice, vous étiez censée être garante du respect de la législation sociale au sein de l'établissement. Là aussi, nous n'étions pas au bout de notre déconvenue.

Il est ressorti de notre enquête un changement récurrent des horaires de travail des salariés, sans respect du délai de prévenance, et incompatibles avec les besoins du service.

Un salarié nous a indiqué : « Depuis la prise de poste de Mme [F], nous avons changé 6 fois d'horaires et de roulements allant à l'encontre des résidents et de la qualité des soins.

A plusieurs reprises, ça lui a été signalé mais rien n'a changé ''.

En votre qualité de Directrice, il vous appartient de veiller à l'organisation des plannings dans le respect de la législation sociale, de cadrer cette organisation sur les besoins des résidents et de prendre en considération les remarques qui vous sont faites pour améliorer ce système.

Vous avez été, là encore, défaillante dans la réalisation de cette tâche. Nous avons également appris plusieurs faits faisant peser un risque de condamnations prud'homales voire d'infractions relevées par l'Inspection du Travail.

Il nous a été rapporté que les repos du personnel et la durée du travail n'étaient pas correctement suivis (exemples : membre du personnel en poste depuis le 29 septembre 2018 qui n'ont pas eu de repos jusqu'au 5 octobre 2018 inclus, semaine de travail à 50 heures).

Nous avons également été informés :

- que des CDD de remplacement sur des postes à temps plein avaient été conclus sur des postes à temps partiel,

- que des salariés à temps partiel avaient été amenés à effectuer plus de 35 heures par semaine,

- que les plannings n'étaient pas mis à jour des absences ou des heures supplémentaires,

- que des CDD ASH ont été conclus sur des remplacements d'AS,

- que des heures supplémentaires n'avaient pas été réglées ou avec des erreurs, que deux CDD à temps plein avaient été conclus pour le remplacement d'un seul poste.

Outre le fait que vous avez placé la Résidence en infraction avec des risques financiers prud'homaux voire même pénaux (travail dissimulé pour les heures supplémentaires) importants, ce non-respect à la réglementation explique indéniablement le ressenti des salariés en épuisement professionnel.

Ces griefs sont très graves et rendent impossible votre maintien dans la Résidence.

5/ Non-respect du bien être des résidents

Encore un grief non des moindres, nous avons dû essuyer les critiques et un mécontentement général des résidents et de leurs familles.

Cela portait sur les repas, les douches, votre indisponibilité, votre passivité à leur égard...

Des courriers ont été adressés à cet égard. Même le personnel s'en est ouvert.

Le bien-être de nos résidents est notre priorité. Toutes les critiques entachent notre image et doivent être immédiatement remontées à la Direction Générale pour que des mesures soient prises.

Vous ne pouviez laisser cette situation de mécontentement s'ancrer et se généraliser tenant les répercussions économiques et d'image qu'elle peut avoir.

6/ Laxisme général dans l'exercice des fonctions

En sus de ce tout ce qui précède, il nous a été rapporté que vous faisiez preuve d'un laxisme général et que vous ne preniez pas au sérieux l'exercice de vos fonctions.

Les salariés ont l'impression que vous prenez votre rôle de Directrice « avec légèreté '' et il est arrivé, à maintes reprises, que des personnes soient déconcentrées pendant leur service par votre attitude inappropriée, indiscrète ou extravagante.

Concernant votre attitude générale, il nous a été dit que vous faisiez des pauses « à rallonge '' et « riez aux éclats '' à l'accueil avec l'agent d'accueil et l'animatrice sans vous soucier des personnes qui vous entouraient ou encore, que vous ne « saviez pas vous tenir '' avec votre compagnon.

A de nombreuses reprises, vous avez ignoré l'attitude de réserve qui doit être celle d'un directeur d'EHPAD, vous comportant de manière parfaitement déplacée et inappropriée.

Concernant votre implication dans votre rôle de Directrice, il nous a été rapporté que vous quittiez souvent votre poste en pleine journée pour des raisons personnelles (faire des courses par exemple), et donniez pour consigne aux équipes de dire que vous étiez en rendez-vous extérieur si la Direction générale vous cherchait ou encore, que vous ne participiez pas aux réunions hebdomadaires ou y parliez peu.

Ce manque de sérieux affecte votre légitimité à manager le personnel et participe à vous décrédibiliser.

7/ Matériel de la Résidence

Enfin, s'ajoute à tous ces griefs, le fait que vous profitiez de votre poste pour utiliser ou commander du matériel de la Résidence pour votre compte personnel.

Nous avons notamment relevé des commandes de médicaments pour votre compte

personnel, réglées par la Résidence [7] (Factures du 22 octobre 2018 et du 24 mai 2018) et des suspicions de salariés s'agissant du vinaigre, de sacs poubelles etc.

Une salariée a expressément rapporté qu'elle avait dû commander des médicaments pour votre compte et les défalquer sur le compte de l'infirmerie.

Vous ne pouvez ignorer que ces actes correspondent à du vol et il est inadmissible d'abuser de votre position hiérarchique pour détourner du matériel qui ne vous appartient pas.

8/ Conclusion

Il ressort de ce qui précède que vous avez commis plusieurs fautes dans votre exercice professionnel dont certaines sont très graves.

Au terme de notre enquête, nous avons trouvé que le climat social au sein de la Résidence [7] était déplorable, le personnel à bout, les résidents et leurs familles souvent mécontents.

Cette situation dégradée de l'établissement résulte de votre management, de vos décisions et plus largement de votre attitude.

Par ailleurs, vous avez fait peser un risque incommensurable sur notre activité en acceptant plus de résidents que notre autorisation nous le permettait au risque d'entraîner une fermeture de l'établissement.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise s'avère d'évidence impossible.

Pour l'ensemble de ces motifs, nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour faute grave.

Votre licenciement prend effet à compter de la date d'envoi de la présente lettre, sans préavis ni indemnité de rupture.

Nous vous invitons à vous présenter au siège de la société pour récupérer vos documents de fin de contrat et les sommes vous restant éventuellement dues, ce qui sera également l'occasion pour vous de nous restituer le matériel de la société encore en votre possession.

Nous vous informons que vous êtes susceptible d'avoir acquis des heures de formation pouvant être créditées sur votre Compte Personnel de Formation.

Ce nombre d'heures sera actualisé à la date de sortie de l'entreprise, en fonction des informations reportées sur la DSN.

Vous pouvez demander pendant une période égale à celle du préavis qui aurait été applicable à utiliser ces heures pour bénéficier notamment d'une action de formation, de bilan de compétences ou de validation des acquis de l'expérience.

A défaut, vous pourrez bénéficier de la portabilité de ces droits à la formation.

Enfin. nous vous rappelons qu'à compter de la rupture de votre contrat de travail, vous avez la possibilité de conserver le bénéfice des régimes de santé et de prévoyance en vigueur au sein de notre entreprise et ce durant une partie de votre période d'indemnisation par l'assurance chômage dans la limite de l2 mois.

Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les quinze jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé.

Nous avons la faculté d'y donner suite dans un délai de quinze jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé.

Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l'initiative d'apporter des précisions à ces motifs dans un délai de quinze jours suivant la noti''cation du licenciement. »

La société [7] reproche donc à Mme [F] ses méthodes managériales dont les salariés de l'établissement ont souffert, le non-respect de la politique instituée par le groupe dans le respect de la législation sociale, le non-respect de la réglementation applicable aux EPHAD, ainsi que le non-respect de la législation en matière sociale et le non-respect du bien être des résidents, le laxisme général dans l'exercice des fonctions ainsi que le vol de matériel considérant qu'en l'espace de six mois elle a violé un grand nombre de règles légales, l'ensemble de ses obligations contractuelles mais encore mis à mal l'intégrité des personnels et parfois des résidents.

En vertu de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles, si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et la poursuite du contrat.

S'agissant des méthodes managériales, la société [7] rappelle que dans le cadre de ses fonctions Mme [F] a par ses méthodes managériales mis en danger la santé et la sécurité des salariés de la société par le biais de dévalorisations de ses subordonnés, des critiques ouvertes, une indisponibilité systématique, des erreurs récurrentes dans les plannings, un manque de savoir vivre.

Pour justifier des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, société [7] produit aux débats, un ensemble d'attestations établies par d'autres salariés de l'établissement.

L'attestation de Mme [W] (pièce 1), agent des services hospitaliers (ASH) relève que « (') Mme [F] ne motive absolument pas ses équipes en réunion, elle nous a dit à plusieurs reprises que si on était pas content, la porte était ouverte et qu'on pouvait partir, les remplacements se font de plus en plus rare, un poste AS a été supprimé, elle a dit aux AS pas de douche le WE, ce qui fait que le WE je me retrouve sans AS de 14 h à 14 h 30 (...) ».

Mme [J], infirmière (pièce 12) indique dans son attestation qu'elle a « (') constaté plusieurs dysfonctionnements à propos du management de l'équipe pluridisciplinaire de la part de Mme [F]. Je peux citer le recrutement d'une salariée en tant qu'aide soignante qui n'avait initialement aucune expérience dans le domaine du nursing ce qui remet en question la qualité des soins apportés aux résidences. Par ailleurs j'ai pu constater des erreurs récurrentes au niveau des plannings (personnel non remplacé) induisant un épuisement général de l'équipe soignante (') à plusieurs reprises Mme [F] s'est permise de dévaloriser des collègues de travail en leur absence induisant un clivage de l'équipe. La dynamique de l'équipe est perturbée et il devient difficile pour nous de travailler dans ces conditions ».

Mme [FX] aide soignante (AS) (pièce13) indique que « (') dès l'arrivée de Mme [F] , la nouvelle directrice, je m'attendais à ce qu'elle se présente, chose qu'elle n'a pas faite, un mois plus tard je suis donc allée me présenter. Elle a pris la décision de chambouler toute l'organisation, sans consulter son équipe, des horaires, les jours de repos ont été modifiés sans que nous ayons le temps de nous organiser au niveau de notre vie privée. Je suis allée consulter Mme [F] pour en discuter, pour comprendre sa subite décision et de trouver un arrangement. Elle ne voulait rien entendre (') je démissionne, à partir de ce moment-là j'ai subi du harcèlement moral (...) les 1 et 2 octobre une formation bientraitance a été dispensée de 09 h à 17 h à certains membres du personnel. Ils étaient en poste depuis le 29 septembre et n'ont pas eu de jours de repos jusqu'au 05/10 inclus. (...) Depuis les changements de planning au mois d'avril, il n'y avait plus de créneaux pour la réunion hebdomadaire au secteur protégé (') depuis l'arrêt de ces réunions (qui ont repris en septembre) on a vu une augmentation des troubles du comportement des résidents avec une dégradation de leur état ».

Mme [E] (pièce14) indique que « (...) les plannings sont établis de façon très pratique pour elle [Mme [F]], en déplaçant les uns et les autres sans respecter les amplitudes ni les qualifications de chacun (voir planning) (...) lors de la formation bientraitance / maltraitance des 1et 2 octobre 2018, elle a répondu à une salariée qui venait la chercher qu'elle n'y allait pas sous prétexte qu'elle avait mieux à faire (...) elle n'hésite pas à renvoyer une salariée, étudiante de 18 ans, sans qualification auprès des personnes âgées, laissée seule en secteur fermé auprès de 10 résidents désorientés, en la traitant de « petite merdeuse ».

Mme [F] relève que Mme [E] a établi deux attestations à son encontre, ce qui démontre son ressentiment à son égard et qu'elle fait état de propos diffamatoires à son encontre pour lesquels elle ne verse aucune preuve au débat.

Mme [I], infirmière référente, (15) indique que « (...) Mme [F] passe plusieurs heures par jour à boire le café avec [N] et parfois [Z] (l'animatrice) à l'accueil où elles y ont des conversations personnelles dont tout le monde peut profiter. A l'accueil et toujours devant tout le monde Mme [F] dit tout ce qu'elle pense des membres du personnel lorsqu'elle est énervée, souvent des insultes (...) Mme [F] commande des médicaments pour elle sur le compte de la société [7] (Lasilix) »

Mme [T] (pièce 16), AS de nuit indique qu'alors que Mme [F] était d'astreinte une nuit de la fin du mois de juin, l'établissement a subi une coupure électrique, qu'elle a tenté de joindre en vain Mme [F] et qu'elle a donc pris sur elle de faire intervenir d'urgence une entreprise.

Mme [K] (pièce 17), AS de nuit mentionne qu'ensuite d'une difficulté survenue entre une remplaçante et une famille d'une résidence « (...) le lendemain la directrice m'a appelé et m'a très mal parlé et m'a tenue responsable du problème alors que je n'ai même pas parlé à cette famille (...)  ».

Mme [S] (pièce18) infirmière témoigne que « (...) le 14 avril 2018 vers 13 h [L] ASH du secteur protégé appelle pour dire qu'elle sera en arrêt de travail (...) je vais prévenir la directrice (...) elle me dit : et bien tant mieux. On remplacera par du personnel compétent qualifié. Ça suffit les incompétents. Ceux qui ne sont pas contents n'ont qu'à partir ( ...) ».

Mme [F] relève que cette attestation porte sur des faits qui se seraient produits le 14 avril 2018 or cette date correspond à un samedi, date à laquelle la secrétaire d'accueil ne travaille pas tout comme elle-même alors qu'elle déménageait et considère donc que cette attestation est fausse.

Mme [A] (pièce 9) AS relate que Mme [F] passait la plupart des matinées à boire son café au bureau de l'agent d'accueil et à rire aux éclats, qu'elle partait régulièrement faire des courses personnelles et à répondre qu'elle était en rendez-vous personnel si on la cherchait, qu'elle prend son goûter « elle se sert » sur le chariot des résidents, qu'elle traite : « (...) le technicien Dalkia de « gougnafier».

Mme [D] (20) AS indique que « depuis la ' de poste de Mme [F] nous avons changé six fois d'horaire et de roulements allant à l'encontre des résidents et de la qualité des soins, à plusieurs reprises ça lui a été signalé. Mais rien n'a changé (...) Le week end nous sommes quatre AS pour 50 résidents du grand secteur et elle nous a dit de ne pas faire de douche (...) elle passe beaucoup de temps au bureau de l'agent d'accueil le matin à boire son café et rire aux éclats. l'après midi avec [Z] l'animatrice en salle à manger à papoter (...) ».

Mme [P] (21) infirmière, indique que Mme [F] « (...) reste à l'accueil, lorsque j'appelle [7] elle est à l'accueil et je l'entends rire (...) elle m'a demandé de lui commander ses médicaments et de les mettre sur le compte de l'infirmerie lorsqu'elle ne pouvait pas aller chez son médecin renouveler son ordonnance (...) elle parlait d'une ancienne collègue en l'appelant « miss bronzette ».

L'attestation de Mme [O] (pièce 22) établie de manière générale et non circonstanciée ne peut être retenue.

L'attestation au nom de Mme [X], médecin (pièce 23) ne peut être retenue alors qu'aucun justificatif portant sur l'identité de l'attestant n'est joint.

Me [F] considère que les faits relatés sont totalement imprécis, non justifiés, ni matériellement vérifiables.

Elle rappelle qu'au mois de mars 2018 elle occupait le poste de directrice adjointe, son contrat à durée indéterminée ayant été signé le 30 avril 2018, qu'elle n'a jamais été informée de ce que des salariés se plaindraient d'elle, l'employeur n'ayant pas provoqué un débat contradictoire pour rechercher les causes de la dégradation et y remédier.

Si Mme [F] relève à raison, qu'elle était directrice à partir du 30 avril 2018 et non en mars 2018, il apparaît toutefois qu'à la date du mois de mars 2018 elle était alors employée en qualité d'adjointe de direction depuis le 29 janvier 2018, en remplacement temporaire et partiel du directeur alors absent pour maladie de sorte que l'attestation faisant état d'une dégradation des conditions de travail à partir du mois de mars 2018 n'est pas incompatible avec les fonctions qu'elle occupait déjà au sein de l'établissement et en l'absence du directeur.

Par ailleurs, il ne ressort pas des obligations de l'employeur de provoquer un débat contradictoire comme soulevé par l'appelante alors que l'employeur estimait compte tenu de la gravité des faits dont il prenait connaissance en octobre 2018 que ceux-ci justifiaient l'engagement d'une procédure de licenciement, la salariée ayant eu en outre l'occasion de présenter ses observations sur les faits reprochés à l'occasion de l'entretien préalable.

Enfin, bien que Mme [F] reproche à l'employeur de ne pas lui avoir donné les moyens nécessaires d'exercer correctement sa mission car il n'a jamais mis en place les process et méthodes de travail à suivre alors qu'elle n'a eu aucun entretien, aucune formation, il n'apparaît pas qu'elle ait pour sa part sollicité son employeur en ce sens ni fait état d'une quelconque difficulté rencontrée à même de justifier un manquement ou une défaillance de son employeur alors qu'elle n'était pas sans connaître l'étendue de ses fonctions détaillées dans son contrat de travail et la délégation de pouvoir également signée.

La cour relève que les attestations énoncées supra sont concordantes, suffisamment précises, relatent des faits de même nature et portent sur des qualificatifs insultants ou dégradants de certains salariés, des changements intempestifs et récurrents des plannings et horaires sans respect du délai de prévenance, d'un comportement inapproprié de Mme [F] avec son statut de directrice de l'établissement de sorte que ces attestations doivent être retenues.

Enfin, l'appelante qui soutient que les nombreuses attestations versées font ressortir une sorte de jalousie et d'incompréhension sur ses méthodes managériales n'étayent aucunement ses allégations.

S'agissant de la facturation de la même chambre sur une même période à plusieurs personnes en infraction avec la législation, il ressort des pièces de la société intimée que Mme [F] a accueilli 61 résidents au sein de l'établissement avec deux résidents dans la même chambre, alors que l'établissement a une capacité maximum de 60 résidents.

Mme [F] soulève la prescription de ce grief, considérant qu'il était connu de l'employeur car contenu dans le compte rendu de la réunion du 26 juin 2018 avec les délégués du personnel et qu'il appartenait dès lors à la société [7] dans le cadre de son obligation de suivi de soit consulter les documents soit en vérifier la transmission pour consultation de sorte que ce grief est prescrit l'employeur ayant été en mesure d'avoir connaissance du fait reproché sans avoir pour autant réagi dans le délai de deux mois.

L'article L.1332-4 du code du travail prévoit qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

En l'espèce, il ressort des conclusions même de Mme [F] que le compte rendu de la réunion du 26 juin 2018 n'a pas été remonté à la direction générale du groupe E4 et que l'on ne peut faire grief à cette dernière d'avoir fait confiance à sa directrice qui disposait d'un large pouvoir d'autonomie et n'avait nullement informé la direction d'une éventuelle difficulté.

Mme [F] ajoute que la lettre de licenciement ne précise pas la période concernée ce dont il résulte une absence de précision ainsi que de datation de ce grief, que cette situation était connue du groupe qui reçoit un reporting mensuel comprenant le nombre de résidents et alors que chaque mois le cabinet comptable venait analyser les comptes.

Elle soutient également que la double facturation concerne une occupation du fait du décès d'un résident, sa chambre lui est facturée jusqu'à ce que sa famille rende les clés et le résident suivant paye une partie de la réservation en attendant de louer la chambre et enfin qu'aucun process en ce sens n'a été établi.

Il ressort de ces éléments que Mme [F] ne discute pas la matérialité des faits reprochés mais explique qu'il s'agissait d'une situation connue et d'un glissement contractuellement réalisable de deux personnes sur la même chambre, alors qu'aucun process n'a été établi.

La cour relève que Mme [F] tout en considérant que ce grief n'est pas suffisamment précis apporte tous les éléments permettant de relever qu'elle a parfaitement identifié le grief et la période.

Il ressort du justificatif de la facturation du mois de juin (pièce 34 du bordereau de l'intimée) que la chambre 2 a été facturée à deux résidents pour la même période, soit du 12 au 18 juin 2018 portant en conséquence l'occupation de l'EHPAD à 61 résidents sur cette période, or en sa qualité de directrice elle ne pouvait ignorer la contenance maximum de l'EHPAD soit 60 résidents, ni arguer d'un défaut de process pour justifier un dépassement de la capacité de l'établissement.

Elle ne peut pas davantage considérer que le groupe était informé dès lors qu'elle communique un reporting postérieur à la période concernée, qui ne permet pas d'avoir connaissance du nombre de résidents accueillis au mois de juin, et qu'elle ne peut arguer du contrôle opéré par le cabinet comptable qui, comme elle le souligne elle-même, venait analyser les comptes et non pas opérer un contrôle sur le taux d'occupation de l'établissement.

Si elle ajoute encore que cette pratique de double facturation était récurrente au sein du groupe, la société [7] communique six attestations de directeurs du groupe E4 qui indiquent le contraire (pièces 27 à 32) et notamment M. [C], (pièce 31) directeur de 2014 à 2019 et qui ne se trouve plus employé par le groupe à la date d'établissement de son attestation, soit le 10 février 2020.

S'agissant du vol de matériel, la société [7] reproche à Mme [F] de profiter de son poste pour utiliser ou commander du matériel de la Résidence pour son compte personnel.

Elle s'appuie sur les attestations de Mmes [I] et [P] qui attestent :

Mme [I] infirmière référente : « (...)Mme [F] commande des médicaments pour elle sur le compte de [7] ('). » (pièce 15).

Madame [P] infirmière indique : « (...) elle m'a demandé de commander ses médicaments et de les mettre sur le compte de l'infirmerie lorsqu'elle ne pouvait pas aller chez son médecin renouveller son ordonnance.» (pièce n°21).

Si Mme [F] réplique qu'en dehors des attestations des salariés qu'elle conteste et que rien ne corrobore, aucune pièce ne permet d'étayer ce grief, la cour relève que les attestations en question sont suffisamment précises et détaillées pour établir les faits reprochés.

Il ressort de ce qui précède que la faute grave de Mme [F] est établie et que ses demandes seront par conséquent rejetées.

Par suite, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement pour faute grave

La société [7] soutient que l'offre d'emploi parue le 16 octobre 2018, concernant le recrutement par le groupe d'un(e) directeur ou directrice ne concernait pas la résidence de [7] mais l'EHPAD [6] et produit à l'appui de sa défense un courrier de Mme [G], en date du 15 octobre 2018, adressé au groupe E4 et par lequel Mme [G] informe le groupe de son intention de prendre un congé parental d'éducation à temps plein à compter de la fin du congé maternité, soit le 17 décembre 2018 et jusqu'au 28 février 2019.

Pour autant et comme le souligne à juste titre Mme [F], l'offre d'emploi parue, concerne un recrutement en contrat à durée indéterminée et non un contrat de travail à durée déterminée en remplacement d'une salariée momentanément absente.

Il convient également de relever la concomitance de l'offre parue avec la procédure engagée à l'encontre de Mme [F] alors même que le courrier de Mme [G] laisse supposer qu'elle est en congé maternité et que le congé parental d'éducation débuterait le 17 décembre 2018 soit dans un délai de deux mois à la date de son courrier.

Mme [F] est dès lors fondée à considérer que le licenciement présente un caractère brutal en ce qu'il n'y a eu aucun avertissement antérieur de la part de son employeur portant sur ses fautes.

Elle justifie également d'un suivi médical avec mise en place d'un traitement en communiquant une prescription médicale établie par le docteur [H], psychiatre à [Localité 8], en date du 17 décembre 2018.

Il convient dès lors de faire droit à la demande présentée par Mme [F] et de lui allouer la somme de 3000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du caractère brutal du licenciement intervenu.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect de la portabilité de la mutuelle d'entreprise :

Mme [F] rappelle que l'employeur est débiteur d'une obligation d'information sur la portabilité des garanties de prévoyance et peut être condamné à des dommages et intérêts en cas de méconnaissance de cette obligation.

Si elle a été informée de ses droits, elle n'a pu bénéficier de la portabilité dès lors que le 29 janvier 2019 le service de prévoyance l'informait qu'elle ne bénéficiait plus du contrat collectif santé.

Elle a dû contracter une autre mutuelle et elle sollicite de percevoir 4165 euros, soit un mois de salaire pour le préjudice subi.

Conformément à l'article L.911-8 du code de la sécurité sociale, l'employeur doit informer le salarié licencié sur l'existence de la portabilité de la prévoyance avec la notification de la lettre de licenciement.

Force est de constater que tel est le cas en l'espèce de sorte que l'employeur a respecté son obligation d'information.

S'il ressort des termes du courriel que lui a adressé l'agence Axa qu'elle ne bénéficiait plus du contrat collectif santé depuis le 01 décembre 2018, il appartenait à Mme [F] de faire valoir ses droits à portabilité auprès de cet organisme au besoin en sollicitant de son ancien employeur une attestation de maintien de ses droits à garantie.

Bien qu'elle ajoute avoir dû souscrire un nouveau contrat de mutuelle elle ne produit pas le contrat qui aurait été conclu. En outre, la salariée ne justifie pas de sa prise en charge par Pôle emploi, condition requise pour bénéficier des dispositions de l'article L.911-8 du code de la sécurité sociale. Il s'ensuit que l'appelante ne justifie pas d'un préjudice.

Il convient en conséquence de confirmer la décision du conseil de prud'hommes de Montpellier qui l'a déboutée de ce chef de demande .

Sur les autres demandes :

Il est rappelé que la capitalisation des intérêts est de droit conformément à l'article 1343-2 nouveau du code civil (ancien 1154 du code civil), pourvu qu'il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière.

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, société [7] qui succombe partiellement sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à Mme [F] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais exposés en première instance et en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement en dernier ressort, par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a jugé que le caractère brutal et vexatoire du licenciement n'est pas établi ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Condamne la société [7] à payer à Mme [F] la somme de 3000 euros pour licenciement brutal  avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Condamne la société [7] aux entiers dépens de première instance et d'appel, et à payer Mme [F] la somme de 1000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et cause d'appel ;

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par Madame Marie-Lydia Viginier, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/01996
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;21.01996 ?
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