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26/06/2024 | FRANCE | N°21/00551

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 26 juin 2024, 21/00551


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1re chambre sociale



ARRET DU 26 JUIN 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00551 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O3DT





Décision déférée à la Cour :

Juge

ment du 18 JANVIER 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE PERPIGNAN - N° RG F 18/00194





APPELANTE :



Madame [G] [W]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Bruno LEYGUE de la SCP CAUVIN, LEYGUE, avocat au barreau de MONTPELLIER



INTIMEE :



S.C.P. RIBOT ESTEVE JEANJEAN-MARTY ARNAUDIES prise en la ...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 26 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00551 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O3DT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 JANVIER 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE PERPIGNAN - N° RG F 18/00194

APPELANTE :

Madame [G] [W]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Bruno LEYGUE de la SCP CAUVIN, LEYGUE, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

S.C.P. RIBOT ESTEVE JEANJEAN-MARTY ARNAUDIES prise en la personne de son représentant légal en exercice sis audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Fernand MOLINA de la SCP DE TORRES - PY - MOLINA - BOSC BERTOU, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

Ordonnance de clôture du 05 Mars 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 MARS 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

M. Jean-Jacques FRION, Conseiller

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Véronique ATTA-BIANCHIN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, apres prorogation de la date du délibéré prévue le 22 mai 2024 au 26 juin 2024 les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Véronique ATTA-BIANCHIN, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

La SCP REMIGNARD RIBOT ESTEVE a recruté [G] [W] en qualité de comptable taxatrice à temps plein avec effet au 18 avril 2006. En décembre 2014, le contrat de travail est transformé en contrat à temps partiel de 29 heures par semaine afin de permettre à la salariée de s'occuper de son fils.

Une restructuration de l'étude notariale a eu lieu en février 2016 à l'occasion de départs à la retraite, de cessions de parts entre notaires avec en outre l'arrivée d'un quatrième notaire associé ce qui a nécessité des bilans de clôture effectués par la salariée, critiqués par l'employeur.

L'employeur et la salariée se sont rencontrés le 2 mars 2017 au cours d'un entretien aux termes duquel l'employeur a formulé des reproches professionnels à la salariée.

[G] [W] était en arrêt de travail à compter du 3 mars 2017 jusqu'au 2 mai 2017.

À l'occasion d'une rencontre le jour de la reprise le 2 mai 2017, l'employeur a formulé des reproches professionnels à la salariée.

Au cours de la visite de reprise effectuée le 3 mai 2017, le médecin du travail déclarait la salariée inapte temporairement au poste de travail. [G] [W] était en arrêt de travail à compter du 3 mai 2017.

[G] [W] contestait par courrier du 10 mai 2017 les reproches qui lui avaient été effectués au cours de l'entretien du 2 mai 2017.

Par acte du 11 mai 2017, l'employeur adressait à la salariée un avertissement qui a été contesté par courrier du 20 mai 2017, réitéré le 11 janvier 2018.

Fin 2017, une nouvelle cession de parts sociales est intervenue au sein de l'étude engendrant la nécessité d'un nouveau bilan et des contrôles.

Par acte du 22 mai 2018, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Perpignan pour demander l'annulation de l'avertissement et la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur.

[G] [W] était déclarée inapte le 29 mai 2018.

Par acte du 4 juin 2018, l'employeur convoquait la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 14 juin 2018.

Par acte du 28 juin 2018, l'employeur adressait à l'inspection du travail une demande d'autorisation de procéder au licenciement pour inaptitude de la salariée du fait de son statut de membre du comité mixte départemental de la chambre des notaires de [Localité 3] jusqu'au 1er juin 2018. Par décision du 24 juillet 2018, l'inspection du travail considérait que le mandat d'ancien membre du comité mixte départemental de la chambre des notaires ne figurait pas parmi ceux conférant le bénéfice de la protection, que son avis ne saurait se substituer aux formalités prévues par la convention collective du notariat en cas de licenciement d'un membre du comité mixte et a considéré qu'elle n'était pas compétente pour statuer sur le licenciement de la salariée, la demande qui lui était soumise étant rejetée.

Par décision du 30 juillet 2018, l'employeur licenciait la salariée pour inaptitude.

Par acte du 21 novembre 2018, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en contestation du licenciement pour inaptitude.

Par jugement de départage du 18 janvier 2021, le conseil de prud'hommes a annulé l'avertissement prononcé le 11 mai 2017 et a débouté la salariée de ses demandes.

Par acte du 28 janvier 2021, [G] [W] interjetait appel des chefs du jugement.

Par conclusions du 26 septembre 2023, [G] [W] demande à la cour d'infirmer le jugement, d'annuler l'avertissement, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement nul à tout le moins sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :

14 580 euros au titre des indemnités conventionnelles de licenciement,

12 757,50 euros au titre de l'indemnité de préavis,

7445,23 euros au titre de l'indemnité des congés payés,

21 424,32 euros au titre de l'indemnité de requalification du poste réellement exercé de C1 à C2 outre la somme de 2142,43 euros au titre de l'indemnité de congés payés,

sous astreinte de 100 euros par jour de retard pour remise des bulletins de paie régularisés,

d'ores et déjà, ordonner la liquidation au 15 mai 2018 de la somme de 21 424,32 euros outre celle de 2142,43 euros au titre de l'indemnité de congés payés,

131 220 euros au titre de l'indemnisation du statut de salariée protégée,

50 000 euros à titre de préjudice moral,

sur le licenciement :

50 000 euros à titre d'indemnisation du préjudice moral pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

21 870 euros pour violation du statut protégé,

21 870 euros pour la période de protection restant de la salariée de la date de son licenciement à la date de la fin de la période de protection, équivalent à six mois de salaire,

5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens, les intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance et l'exécution provisoire.

Par conclusions du 25 septembre 2023, la SCP RIBOT ESTEVE JEANJEAN-MARTY ARNAUDIES demande à la cour de confirmer le jugement, débouter l'appelante de ses demandes et la condamner au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Il sera fait référence aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits et des moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 mars 2024.

LES MOTIFS DE LA DECISION :

Sur le rappel de salaire au titre de la requalification en statut cadre C2 :

Il est admis que la qualification d'un salarié s'apprécie au regard des fonctions réellement exercées par lui et non en considération des seules mentions figurant sur le contrat de travail.

En l'espèce, [G] [W] a exercé son activité de comptable en qualité de cadre C1 et revendique le statut de cadre C2 au motif de l'importance de son travail accompli, de la responsabilité et de l'autonomie, sans autre précision.

La SCP RIBOT ESTEVE JEANJEAN-MARTY ARNAUDIES justifie que la catégorie professionnelle revendiquée par [G] [W] suppose « une mise au point de dossiers complexes ou de conception difficile, une conduite d'un secteur dont le salarié assure le développement selon la délégation reçue (') une autorité sur le personnel de son secteur (') un diplôme de notaire ou diplôme équivalent ».

Au vu des éléments produits, la catégorie revendiquée par la salariée n'est pas établie et sa demande sera par conséquent rejetée étant précisé qu'elle bénéficie d'un coefficient contractuel de 283 alors que la classification C2 est de 270 points.

Sur l'annulation de l'avertissement :

L'article L.1333-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil des prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. L'article 1333-2 dispose que le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

En l'espèce, l'avertissement contesté énonce qu'à la suite de l'absence de la salariée pendant deux mois entre mars et mai 2017, il est apparu un certain nombre d'erreurs précédemment commises par la salariée lors d'un arrêté de caisse du 3 février 2007, lors du traitement des prélèvements au cours des exercices, du fait d'un accroissement trop important de comptes clients créditeurs en raison d'une insuffisance du suivi de ces comptes et des opérations de solde, de l'embauche de Madame [I] qui n'a pas été affiliée à la mutuelle des clercs et des employés de notaires, l'absence de déclaration à la suite de divers arrêts maladie, l'absence de mise à disposition des codes de déclarations sociales ou fiscales, l'absence d'adaptation des modèles de taxes pour les adapter aux nouveaux tarifs des notaires et lors d'un virement effectué de son propre chef d'une somme de 40 000 euros sur un compte non rémunéré.

L'employeur justifie dans ses pièces 17 à 21 de créances en compte débiteurs, de la régularisation de comptes clients débiteurs, produit un état de compte entre le 6 janvier 2015 et le 29 décembre 2020 faisant état de virement au débit du compte courant de l'étude. Les inspections notariales externes entre 2016 et 2018 font état d'une bonne tenue des dossiers, d'une bonne analyse juridique et de formalités accomplies rapidement. Elles font état des recommandations suivantes le 8 septembre 2016 :  « passer les chèques périmés en consignation libératoire et non en DO, faire approuver les honoraires libres, comptes C/111 « prix euros symbolique » et C/36885 « clients divers chèques périmés à consigner en libératoire », travail important et nécessaire à effectuer sur la balance des comptes consignés, procéder à la restitution du solde de compte du client par virement dès l'information de la réalisation de la formalité hypothécaire (pas de refus) afin d'éviter le passage en DO ». L'inspection du 22 juin 2017 fait état du non suivi d'effet concernant les chèques périmés, la régularisation des comptes 111 et 36 885 et la continuation du travail entrepris sur la balance des comptes clients consignés et suggère des recommandations. La conclusion de l'inspection du 14 juin 2018 fait état du non suivi d'effets de certaines recommandations et opère d'autres recommandations à faire à l'office.

L'employeur fait valoir que la salariée ne justifie pas de son refus de la voir assistée d'un représentant du personnel le jour de l'entretien du 3 mai 2017. De surcroît, il explique qu'il ne s'agissait que d'un entretien informel destiné à faire le point sur une situation sans conséquences sur une éventuelle sanction de la salariée.

La salariée conteste l'avertissement qu'elle considère infondé et conteste les reproches sans autre précision écrite que l'absence de toute sanction antérieurement à la restructuration de l'office notarial en 2016.

Au vu des éléments produits, l'avertissement apparaît régulier en la forme, justifié et proportionné à la faute commise.

Le jugement qui avait annulé l'avertissement du fait de l'absence de pièces produites par l'employeur en première instance, sera infirmé.

Sur l'annulation de l'avertissement en raison de la discrimination en raison de l'état de santé et de l'activité syndicale de la salariée :

En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire en raison notamment de ses activités syndicales. Les articles L. 1132-4 et L. 1134-1 prévoient respectivement que toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance de ces dispositions est nul. Lorsque survient un litige, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination et qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l'espèce, la salariée considère que cette situation caractérise un fait constitutif du harcèlement et de discrimination syndicale et médicale à son encontre.

La salariée évoque des heures supplémentaires et produit en pièce 18 des notes manuscrites incompréhensibles, de surcroît sans former de demande à ce titre, sans les chiffrer ni les expliquer. Cette charge de travail excessive telle invoquée liée aux heures supplémentaires n'est pas établie.

La salariée fait état de l'ambiance délétère au sein de l'étude, révélatrice de nombreuses difficultés avec d'autres salariés ayant subi aussi une dépression. Aucun élément n'est produit à ce titre par la salariée. Ce fait n'est pas établi.

Cependant, [G] [W] bénéficie d'un mandat représentatif puisqu'elle fait partie du comité mixte paritaire au sein de la chambre des notaires. Ce fait est établi.

Elle indique avoir vainement écrit à son employeur à plusieurs reprises entre mai 2017 et janvier 2018 pour provoquer une médiation sur l'avertissement qui lui a été délivré. Ces courriers sont établis.

La salariée considère que l'employeur a douté de la réalité de l'arrêt de travail et de l'atteinte à sa santé lorsqu'il énonce dans sa lettre du 16 janvier 2018 que la salariée, après l'entretien du 2 mai 2017, « s'est de nouveau mise en arrêt maladie ». Ce fait est établi.

[G] [W] critique le refus de l'employeur d'établir tout dialogue social. Elle produit un courrier de l'employeur 2 janvier 2018 faisant valoir impossibilité de toute médiation. Ce fait est établi.

La salariée conteste le refus émis par l'employeur d'avoir pu être assistée par un représentant du personnel lors de la rencontre du 2 mai 2017 qu'elle considère être un « procès inquisitorial ». Ce fait de l'absence d'un délégué du personnel le 2 mai 2017 est établi.

La salariée fait valoir un choc émotionnel à la suite de l'entretien du 2 mai 2017, un état dépressif de burnout et produit l'attestation d'un psychothérapeute (pièce 15) évoquant des symptômes dépressifs réactionnels et un syndrome de burnout. Ce fait est établi.

La salariée indique que le régime juridique de maladie a démarré le 4 septembre 2017, qu'elle n'a reçu les premières indemnités journalières de la CRPCEN que le 23 octobre 2017 au titre des mois de septembre et d'octobre 2017 et le paiement de la garantie complémentaire AXA que le 9 novembre 2017 pour la période de septembre 2017, ralentissement dû au défaut de diligence de l'employeur dans la déclaration auprès des organismes concernés révélant la volonté de la laisser dans une situation délicate. Elle produit son courrier du 6 octobre 2017 faisant état du non paiement intégral de son salaire en septembre 2017. Ce fait est établi.

Les éléments de fait présentés par le salarié, pris dans leur ensemble, laissent présumer une situation de discrimination.

L'employeur conteste toute discrimination.

L'expression énonçant dans sa lettre du 16 janvier 2018 que la salariée « s'est mise en arrêt maladie » ne révèle pas une contestation de l'état de santé de la salariée ni une remise en cause de ses arrêts de travail.

La SCP RIBOT ESTEVE JEANJEAN-MARTY ARNAUDIES considère qu'en raison de l'arrêt de travail de la salariée sur cette période, aucune médiation ne pouvait intervenir pendant cette période, de surcroît pour permettre à la salariée de ne pas être dérangée pendant son arrêt de travail étant précisé que la salariée n'est pas revenue dans l'entreprise avant son licenciement pour inaptitude.

L'employeur reproche à la salariée d'avoir entravé le travail d'autres comptables, de ne pas avoir donné l'ensemble des codes d'accès ce qui lui a rendu difficile l'exercice de consultation, d'avoir pris du retard dans le traitement de la demande de remboursement des indemnités journalières de trois salariés, de ne pas avoir déclaré un salarié à la mutuelle santé, de ne pas avoir remis les comptes clients créditeurs-débiteurs depuis 120 mois, de ne pas être diligente dans son travail, d'avoir commis des erreurs de comptabilité et de ne pas maîtriser les nouvelles règles de comptabilité notariale et d'avoir refusé de se former. L'employeur justifie dans ses pièces 17 à 21 de créances en compte débiteurs, de la régularisation de comptes clients débiteurs, produit un état de compte entre le 6 janvier 2015 et le 29 décembre 2020 faisant état de virements au débit du compte courant de l'étude. Les inspections notariales externes entre 2016 et 2018 font état d'une bonne tenue des dossiers, d'une bonne analyse juridique et de formalités accomplies rapidement. Elles font état des recommandations suivantes le 8 septembre 2016 :  « passer les chèques périmés en consignation libératoire et non en DO, faire approuver les honoraires libres, comptes C/111 « prix euros symbolique » et C/36885 « clients divers chèques périmés à consigner en libératoire », travail important et nécessaire à effectuer sur la balance des comptes consignés, procéder à la restitution du solde de compte du client par virement dès l'information de la réalisation de la formalité hypothécaire (pas de refus) afin d'éviter le passage en DO ». L'inspection du 22 juin 2017 fait état du non suivi d'effet concernant les chèques périmés, la régularisation des comptes 111 et 36 885 et la continuation du travail entrepris sur la balance des comptes clients consignés et suggère des recommandations. La conclusion de l'inspection du 14 juin 2018 fait état du non suivi d'effets de certaines recommandations et opère d'autres recommandations à faire à l'office.

L'employeur fait valoir que la salariée ne justifie pas de son refus de la voir assistée d'un représentant du personnel le jour de l'entretien du 3 mai 2017. De surcroît, il explique qu'il ne s'agissait que d'un entretien informel destiné à faire le point sur une situation sans conséquences sur une éventuelle sanction de la salariée.

Au vu des éléments produits par les parties, l'expression maladroite de l'employeur dans son courrier du 16 janvier 2018 ne constitue pas une critique de la décision médicale mais davantage un sentiment dans le cadre du conflit qui l'oppose à cette époque à la salariée.

S'agissant de la rencontre du 2 mai 2017, il convient de relever que la lettre d'avertissement est datée du 11 mai 2017. En application de l'article L. 1332-2, lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié. En l'espèce, il n'est pas établi par la salariée le refus par l'employeur de l'assistance par un délégué du personnel ni la nécessité d'un entretien préalable pour cet avertissement.

S'agissant du retard dans le paiement des indemnités journalières au bout de six mois arrêts maladie, la salarié produit le courrier en réponse de l'employeur du 11 octobre 2017 lui indiquant que son salaire était garanti à 100 % pendant six mois ce qui a été appliqué sur le bulletin jusqu'au 3 septembre 2017 et que, postérieurement à ce délai, le régime de prévoyance a pris le relais, le dossier lui a été adressé le 3 octobre 2017 réceptionné par elle le 5 octobre 2017 avec un paiement direct à la salariée sans passer par la comptabilité de l'étude.

Il apparaît que l'avertissement a été délivré à la salariée pour un manque de diligences et des erreurs d'appréciation de sa part dans le cadre de sa fonction. Aucun élément ne permet de considérer que l'avertissement est dû à l'état de santé de la salariée ou au mandat représentatif au sein du comité mixte paritaire. La lettre d'avertissement repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Dès lors, aucun élément ne permet d'établir une discrimination à l'encontre de [G] [W].

Ce chef de jugement sera confirmé.

Sur l'annulation de l'avertissement en raison du harcèlement moral :

L'article L.1152-1 du code du travail prévoit qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Selon l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. Enfin, l'article L.1154-1 du même code prévoit que lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4, le candidat à un emploi, un stage ou à une période de formation en entreprise, ou le salarié, présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

1- En premier lieu, le salarié doit présenter des éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Pour cela, le salarié doit établir la matérialité de chacun des faits invoqués pour permettre de déterminer s'ils sont ou non établis.

En l'espèce, la salariée fait état des mêmes éléments qu'au titre de la discrimination qui sont établis pareillement.

Ces faits, pris dans leur ensemble, sont de nature à faire présumer un harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 précité.

2 - Dès lors, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que ces faits sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

L'employeur fait état des mêmes objections qu'au titre de la discrimination et réfute tout harcèlement moral de sa part.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, aucun fait de harcèlement moral n'est établi et l'annulation de l'avertissement sera par conséquent rejetée.

Ce chef de jugement sera confirmé.

Sur la résiliation du contrat aux torts de l'employeur :

L'article 1224 du Code civil dispose que la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier du débiteur ou d'une décision de justice.

En pareille situation, il est admis que si les manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, le juge prononce la rupture de celui-ci au jour de la décision sauf si le contrat a déjà été rompu et que le salarié n'est plus au service de son employeur.

En l'espèce, le salarié a saisi le conseil des prud'hommes en demandant la résiliation judiciaire du contrat avant d'être licencié.

Les mêmes faits que ceux au soutien de la demande d'annulation de l'avertissement sont invoqués par la salariée au soutien de sa demande de résiliation.

Au vu des éléments produits par les parties, il n'apparaît établi aucun manquement de l'employeur suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifiant la résiliation judiciaire du contrat. La demande de la salariée sera par conséquent rejetée.

Ce chef de jugement sera confirmé.

Sur le licenciement pour inaptitude :

L'article 1226-2-1 du code du travail prévoit qu'en cas d'inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnel, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie, soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que le maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Aucun élément ne permet d'établir que l'inaptitude provient d'un manquement de l'employeur à ses obligations.

La demande de la salariée de voir juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse sera rejetée.

Ce chef de jugement sera confirmé.

Sur la nullité du licenciement pour défaut d'autorisation de l'inspecteur du travail :

Par acte du 28 juin 2018, l'employeur adressait à l'inspection du travail une demande d'autorisation de procéder au licenciement pour inaptitude de la salariée du fait de son statut de membre du comité mixte départemental de la chambre des notaires de [Localité 3] jusqu'au 1er juin 2018. Par décision du 24 juillet 2018, l'inspection du travail considérait que le mandat d'ancien membre du comité mixte départemental de la chambre des notaires ne figurait pas parmi ceux conférant le bénéfice de la protection, que son avis ne saurait se substituer aux formalités prévues par la convention collective du notariat en cas de licenciement d'un membre du comité mixte et a considéré qu'elle n'était pas compétente pour statuer sur le licenciement de la salariée, la demande qui lui était soumise étant rejetée.

Ainsi, en l'état d'une décision d'incompétence et de rejet de l'inspecteur du travail, intervenant après la demande faite par l'employeur d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, au motif que celui-ci n'était pas protégé au jour où il statue, décision à l'encontre de laquelle aucun recours n'a exercé, le juge judiciaire ne peut analyser le licenciement prononcé par l'employeur en un licenciement nul intervenu en violation du statut protecteur.

Dès lors, la demande de [G] [W] sera rejetée.

Ce chef de jugement sera confirmé.

Sur les indemnités de licenciement pour inaptitude :

L'article L.1226-4 du code du travail prévoit qu'en cas de licenciement pour inaptitude consécutive à une maladie un accident non professionnel, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L.1234-9. Par dérogation à l'article L.1234-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice.

Ainsi, en cas de rupture non imputable à l'employeur, seule l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement est due par l'employeur, sans préavis ni indemnité compensatrice de préavis.

L'article 12-4 de la convention collective du notariat prévoit que l'indemnité conventionnelle de licenciement est due pour les salariés ayant au moins un an de présence ininterrompue dans l'office à l'expiration du préavis, sauf en cas de faute grave ou lourde, selon les dispositions suivantes : moins de 10 ans d'ancienneté dans l'office, un cinquième de mois par année d'ancienneté ; à partir de 10 ans d'ancienneté dans l'office, plus 2/15e deux mois par année d'ancienneté au-delà de 10 ans.

Le salaire à prendre en considération est le 12e de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement, selon la formule la plus avantageuse pour l'intéressé, le tiers des trois derniers mois, étant entendu que, dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère exceptionnel qui aurait été versée au salarié pendant cette période, ne serait prise en compte qu'au prorata du temps.

En l'espèce, la salariée demande la condamnation de l'employeur au paiement de la somme de 14 580 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement. Le solde de tout compte que la salarié produit mentionne une indemnité de rupture conventionnelle payée d'un montant de 1004,20 euros. L'employeur fait état du paiement de la somme de 10 567,15 euros correspondant à ses droits au jour du licenciement sans en justifier.

Le salaire de référence est fixé à la somme brute de 3645 euros.

L'indemnité conventionnelle de licenciement sera fixée à la somme brute de 9234 - 1004,20 = 8229,80 euros.

Ce chef de jugement qui avait rejeté la demande sera infirmé.

Sur l'indemnité de congés payés :

L'article 1353 du Code civil prévoit que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui prétend être libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, s'agissant de l'indemnité au titre des congés payés, sans justification, la salariée demande la somme brute de 7445,23 euros au titre d'un solde non pris de 43 jours ouvrés de congés payés au titre des années 2016 et 2017. L'employeur fait valoir, sans le justifier, que cette demande est devenue sans objet compte tenu du licenciement postérieur à la requête faisant état du paiement de 41 jours de congés payés, soit la somme brute de 6207,47 euros.

Le solde de tout compte produit par la salariée mentionne une indemnité à titre de congés payés d'un montant de 1885,09 euros.

Ainsi, faute pour l'employeur de justifier du paiement et du décompte de l'indemnité au titre des congés payés, une indemnité de congés payés est due pour un montant brut de

7445,23 ' 1885,09 = 5560,14 euros.

Ce chef de jugement qui avait rejeté la demande sera infirmé.

Sur les autres demandes :

Aucune faute dommageable ayant créé un préjudice moral pour la salariée n'est établi. Cette demande sera rejetée.

La SCP RIBOT ESTEVE JEANJEAN-MARTY ARNAUDIES succombe à la procédure, elle sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

Il paraît inéquitable de laisser à la charge de [G] [W], l'intégralité des sommes avancées par elle et non comprises dans les dépens. Il lui sera alloué la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort ;

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a annulé l'avertissement, en ce qu'il a rejeté les demandes au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et au titre de l'indemnité de congés payés.

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Déboute [G] [W] de sa demande d'annulation de l'avertissement du 11 mai 2017.

Condamne la SCP RIBOT ESTEVE JEANJEAN-MARTY ARNAUDIES à payer à [G] [W] les sommes suivantes :

8229,80 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

5560,14 euros au titre de l'indemnité de congés payés.

Déboute [G] [W] de ses autres demandes.

Y ajoutant,

Condamne [G] [W] à payer à la SCP RIBOT ESTEVE JEANJEAN-MARTY ARNAUDIES la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne [G] [W] aux dépens de la procédure d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00551
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;21.00551 ?
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