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20/06/2024 | FRANCE | N°20/00620

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 20 juin 2024, 20/00620


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 20 JUIN 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/00620 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OP62





Décision déférée à la Cour :

Jugeme

nt du 16 DECEMBRE 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 17/00643





APPELANTE :



S.A SMA, anciennement dénommée SAGENA représenté par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 14]

[Adresse 14]

[Localité 6]

Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOC...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 20 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/00620 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OP62

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 16 DECEMBRE 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 17/00643

APPELANTE :

S.A SMA, anciennement dénommée SAGENA représenté par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 14]

[Adresse 14]

[Localité 6]

Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Gilles BIVER, avocat au barreau de CARCASSONNE, avocat plaidant

INTIMES :

Madame [F] [B]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

et

Monsieur [V] [X]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentés par Me Estelle CONQUET de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE

Madame [P] [R]

née le 09 Juin 1956 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 1]

et

Monsieur [U] [Z]

né le 17 Novembre 1980 à [Localité 7] ([Localité 7])

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 1]

et

Monsieur [L] [Z]

né le 08 Novembre 1984 à [Localité 7] ([Localité 7])

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 1]

Représentés par Me Nicolas SAINTE CLUQUE de la SELARL SAINTE-CLUQUE - SARDA - LAURENS, avocat au barreau de NARBONNE

SA AXA FRANCE IARD ès qualités d'assureur de la SARL BOUTON

[Adresse 5]

[Localité 9]

et

SARL BOUTON

L'Estradelle

[Localité 2]

Représentées par Me DOMMEE, substituant Me Sophie ORTAL de la SCP CASCIO,ORTAL, DOMMEE, MARC, DANET, GILLOT, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 03 Avril 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 avril 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Hélène ALBESA

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Hélène ALBESA, greffier

* * * *

EXPOSE DU LITIGE :

Madame [B] et Monsieur [X] ont acquis le lot n° 19 [Adresse 12], sis [Adresse 3].

La commune de [Localité 2], propriétaire, a classé cette zone en constructible et l'a aménagée pour créer le lotissement la Bade.

Le propriétaire du lot n° 33, parcelle voisine du lot n° 19, avait déjà terrassé son terrain pour procéder à une construction selon permis de construire obtenu en 2009.

Les consorts [B]/[X] ont, après leur acquisition, fait terrasser leur terrain pour y faire construire leur maison d'habitation.

Courant 2012, les consorts [B]/[X] ont fait édifier leur maison d'habitation et aménagé les extérieurs par la création d'une terrasse et l'installation d'une piscine après avoir réalisé un mur de clôture en retrait de la limite de propriété du lot n° 33.

Le lot n° 33 du lotissement la Bade a été racheté par les consorts [Z]/[R].

Messieurs [Z], propriétaires en indivision de la parcelle de terrain à bâtir, cadastrée commune de [Localité 2] ([Localité 2]) section B n° [Cadastre 4], ont obtenu un permis de construire le 23 mai 2014.

Durant le mois de juillet 2014, les consorts [Z]/[R] ont entrepris des travaux sur leur parcelle. Ils ont mandaté à ce titre :

- la SARL Bouton, assurée par la SA AXA France IARD, pour les travaux de terrassement avec un complément de terrassement du terrain qui a été facturé à hauteur de 6 480 euros le 1er août 2014. Les travaux ont débuté le 28 juillet 2014 ;

- l'entreprise [A] pour les travaux de construction pour un montant total de 145 568,44 euros, l'assureur décennal de cet artisan étant la société SAGENA, devenue la SMA SA.

Dans la nuit du 28 au 29 juillet 2014, un morceau de roche du terrain des consorts [B]/[X] situé sous le mur de clôture est tombé sur la parcelle des consorts [Z]/[R].

Dans la nuit du 29 au 30 septembre 2014, lors de fortes pluies, le mur de soutènement appartenant aux consorts [B]/[X] s'est effondré sur la parcelle des consorts [Z]/[R].

Par ordonnance de référé du 21 avril 2015, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire et désigné Monsieur [D] pour y procéder. L'entreprise SM, diligentée par l'expert judiciaire sur proposition des parties, a estimé le coût des mesures conservatoires urgentes à réaliser à la somme de 15 280 euros.

Par ordonnance du 21 octobre 2015, le président du tribunal de grande instance de Narbonne, chargé du contrôle des expertises, autorisait l'exécution d'urgence des travaux préconisés par l'expert aux frais avancés de la SARL Bouton.

Monsieur [A], le maçon devant procéder à la construction de la maison, est en liquidation judiciaire depuis le 6 avril 2016.

Le rapport d'expertise de Monsieur [D] a été déposé le 6 décembre 2016.

Selon ce rapport d'expertise :

- l'effondrement du mur de soutènement est directement lié aux travaux réalisés sur la propriété des consorts [Z]/[R] (p. 32) ;

- l'entreprise [A] n'a pas pris les précautions d'usage dans le cadre de la réalisation des ouvrages de gros 'uvre qui ont débuté début août 2014 et aucune reprise en sous-'uvre n'a été réalisée par le maçon sous les fondations du mur de soutènement à la suite des terrassements (p. 32) ;

- tant la SARL Bouton que l'entreprise [A] auraient dû attirer l'attention des consorts [Z]/[R] sur la nécessité de mettre en 'uvre des travaux de confortement en urgence selon les prescriptions de bureaux d'étude structure et géotechnique pour éviter la ruine du mur (p. 32) ;

- l'imputabilité des causes de l'effondrement du mur envisagée est entre 60 et 70 % pour l'entreprise Bouton et de 30 à 40 % pour l'entreprise [A] (p. 34).

Par acte du 12 avril 2017, les consorts [B]/[X] ont assigné au fond devant le tribunal de grande instance de Narbonne les consorts [Z]/[R], la SARL Bouton terrassement et son assureur la compagnie AXA ainsi que la compagnie SMA SA, assureur de [A].

Par jugement du 16 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Narbonne :

- Dit que la SARL Bouton et l'entreprise [A] ont commis une faute de nature contractuelle qui engage leur responsabilité contractuelle ;

- Dit que la SARL Bouton est responsable à hauteur de 70 % des dégâts qui ont été causés ;

-Dit que Monsieur [A] est responsable à hauteur de 30 % des dégâts qui ont été causés ;

- Condamne in solidum les consorts [Z]/[R], la SARL Bouton terrassement, in solidum avec la SA AXA France IARD et la compagnie d'assurances SMA SA, à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 186 381,43 euros avec indexation sur l'indice BT01 du bâtiment ;

- Fait injonction aux consorts [Z]/[R] d'autoriser les entreprises mandatées par les consorts [B]/[X] à pénétrer sur leur terrain pour y réaliser les travaux nécessaires et constate que les consorts [Z]/[R] ne s'y opposent pas ;

- Rejette le surplus des demandes des consorts [B]/[X] ;

- Condamne in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 8 393,70 euros pour le remplacement du gazon synthétique et la replantation des haies ;

- Condamne in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 4659,60 euros pour les travaux relatifs aux plages de la piscine ;

- Condamne in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 1 560 euros pour les travaux de réfection de la clôture effondrée ;

- Condamne in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 40 000 euros au titre du préjudice de jouissance, tout préjudices confondus ;

- Rejette la demande au titre du préjudice moral ;

- Condamne in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 6 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne in solidum les codéfendeurs aux entiers dépens en ceux compris les frais d'expertise judiciaire et les dépens exposés par les requérants dans le cadre de la procédure de référé ;

- Prononce l'exécution provisoire du jugement à hauteur des deux tiers des condamnations prononcées ;

- Condamne la SARL Bouton terrassement in solidum avec la SA AXA France IARD et la compagnie d'assurances SMA SA à garantir les consorts [Z]/[R] de l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre des consorts [B]/[X] ;

- Constate que le mur d'une longueur de 8,20 mètres environ de la propriété des consorts [B]/[X] a chuté sur le chantier de construction de la maison d'habitation des consorts [Z]/[R], de sorte que le chantier est en suspens depuis le mois de septembre 2014, alors que la maison aurait dû être terminée au 1er janvier 2015 ;

- Condamne solidairement la SARL Bouton, SA AXA France et SA SMA à verser aux consorts [Z]/[R] les sommes de :

o 191 548,23 euros avec indexation sur l'indice BT01 ;

o 48 940 euros au titre de leur préjudice de jouissance tous préjudices confondus ;

- Rejette le surplus des demandes comme non fondées ;

- Condamne in solidum la SARL Bouton, SA AXA France et SA SMA au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile aux consorts [Z]/[R] ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise et de référé ;

- Rejette le surplus des demandes comme non fondées ;

- Prononce l'exécution provisoire du jugement à hauteur des deux tiers des condamnations prononcées.

Par déclaration d'appel, enregistrée au greffe le 3 février 2020, la SMA SA a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions enregistrées par le greffe le 1er septembre 2020, la SMA SA demande à la cour d'appel de :

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Narbonne en date du 16 décembre 2019, notamment en ce qu'il a déclaré M. [A] responsable à l'égard des consorts [X]/[B] d'une part et [Z]/[R] d'une autre part et prononcé condamnations à l'encontre de la société SMA SA ;

Et statuant à nouveau, au principal :

- Dire et juger que les travaux réalisés par l'entreprise [A] n'ont eu aucun rôle causal dans l'effondrement du mur de soutènement.

- Dire et juger que l'entreprise [A] n'est pas responsable de l'effondrement du mur.

- Dire et juger que seule la société Bouton peut être déclarée responsable du trouble anormal de voisinage subi par les consorts [X]/[B].

- Dire et juger que les consorts [X]/[B] ne sont pas fondés à invoquer un manquement de [K] [A] à son obligation de conseil à leur égard.

- Dire et juger que l'entreprise [A] n'a pas commis de faute contractuelle à l'égard des consorts [Z]/[R].

- Dire et juger que la garantie de la société SMA SA n'est pas due, d'une part en raison de l'absence de responsabilité de M. [K] [A], d'autre part car la garantie dommage à l'ouvrage en cours de travaux ne peut bénéficier qu'à l'assuré.

En conséquence :

- Débouter les consorts [X]/[B], les consorts [Z]/[R], la société Bouton et/ou la compagnie AXA de toutes leurs demandes dirigées contre la société SMA SA.

Subsidiairement, si par extraordinaire, la cour juge que l'entreprise [A] a une part de responsabilité et que la garantie de la SMA SA est due :

- Dire et juger que le préjudice des consorts [X]/[B] ne peut s'analyser qu'en une perte de chance.

- Fixer le montant du préjudice et de la perte de chance des consorts [X]/[B] à 5 % des sommes qui leur ont été allouées par le tribunal au titre de la réparation de leur préjudice.

- Dire et juger que la garantie dommage à l'ouvrage avant réception est limitée aux frais de déblaiement et au paiement des matériaux nécessaires pour remplacer ceux de l'ouvrage détruit.

- Dire et juger que le montant des frais de déblaiement s'élève à somme de 5 800 euros TTC.

- Dire et juger que les consorts [Z]/[R] ne justifient pas du montant du prix des matériaux à remplacer.

- Limiter le montant de la garantie du par SMA à la somme de 5 800 euros TTC.

- Débouter les consorts [Z] [R] de plus amples demandes.

- Condamner solidairement la société Bouton Terrassement et la compagnie AXA IARD à relever et garantir la SMA SA de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, en intérêts, principal, frais, article 700, accessoires et dépens, au profit des consorts [B]/[X], et/ou des consorts [Z]/[R].

- Débouter la Compagnie AXA, de son appel incident dirigé contre la société SMA SA.

- Débouter [F] [B], [V] [X], [U] [Z], [L] [Z] et [P] [R] de leur appel incident.

Dans tous les cas :

- Condamner la partie qui succombe à payer à la SMA SA la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner la partie qui succombe aux entiers dépens avec application des règles de l'article 699 du code de procédure civile dont distraction profit de la SCP Argellies Apollis.

Dans leurs dernières conclusions enregistrées par le greffe le 31 juillet 2020, la SARL Bouton et la SA AXA France IARD en sa qualité d'assureur, demandent à la cour d'appel de :

- Confirmer le jugement entreprit notamment en ce qu'il a :

- Jugé que les deux constructeurs, la SARL Bouton et Monsieur [K] [A], sont responsables des dommages causés.

- Jugé que le maçon, Monsieur [A] a commis une faute en ne procédant pas à une reprise en sous-'uvre des fondations du mur de soutènement à la suite des terrassements entrepris par la SARL Bouton, et une seconde faute en n'attirant pas l'attention des consorts [Z]-[R] sur la nécessité de mettre en 'uvre des travaux de confortement en urgence.

- Rejeté toute demande au titre du préjudice moral, ce dernier faisant double emploi avec le préjudice de jouissance et à défaut le rapporter à de plus justes proportions.

- Rejeté toute demande au titre des crédits car ces derniers font double emploi avec le montant des travaux réparatoires.

- Rejeté la demande des consorts [B]-[X] au titre de la reprise d'un mur de confortement de la piscine car faisant double emploi avec les travaux d'achèvement de l'ouvrage à intervenir.

- Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il n'a pas chiffré le montant des travaux de remise en état à la somme de 109 611,28 euros TTC

- Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il n'a pas condamné la SMA SA à relever et garantir les concluantes de 40 % des sommes mises à leur charge.

- Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il n'a pas rapporté à de plus juste proportion les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En conséquence :

-Fixer le montant des travaux à la somme de 109 611,28 euros TTC ;

- Condamner la SMA SA à relever et garantir les concluantes de 40 % des sommes mises à la charge de la SARL Bouton et son assureur AXA.

- Rapporter à de plus justes proportions les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Débouter les parties adverses de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires.

- Condamner in solidum les consorts [Z]-[R], les consorts [B]-[X] et la compagnie SMA SA à verser à la compagnie AXA, la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions enregistrées au greffe le 13 mars 2024, les consorts [Z]/[R] demandent à la cour d'appel de :

- Déclarer la constitution par-devant la cour d'appel de Montpellier des intimés recevable,

- Juger que la SARL Bouton est responsable en tout ou partie des dégâts qui ont été causés aux consorts [Z]-[R], soit sur le fondement de la responsabilité décennale, soit sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun,

- Juger que Monsieur [K] [A] est responsable en tout ou partie des dégâts qui ont été causés aux consorts [Z]-[R], soit sur le fondement de la responsabilité décennale, soit sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun,

En conséquence :

- Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a fait injonction aux consorts [Z]-[R] d'autoriser les entreprises mandatées par les demandeurs à pénétrer sur leur terrain pour y réaliser les travaux,

- Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a rejeté la demande de condamnation des consorts [R]-[Z] à rapporter sous astreinte de la terre sur leur parcelle et à réaliser un mur de soutènement sur la partie haute de leur parcelle,

- Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la SARL Bouton, in solidum avec la SA AXA France IARD et la compagnie d'assurances SMA SA, à garantir les consorts [Z]-[R] de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre,

- Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France et la compagnie d'assurance SA SMA à verser à Madame [R] [P], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z], héritiers de feu Monsieur [O] [Z], les sommes de :

o 191 548,23 euros T.T.C (166 565,23 + 19 987 + 4 996) avec indexation sur l'indice BT01,

o 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du C.P.C. et aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise et de référé,

- Infirmer le jugement dont appel sur le quantum de la somme qui a été accordée à Madame [R] [P], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z], héritiers de feu Monsieur [O] [Z] au titre de leur préjudice de jouissance,

- Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il n'a pas examiné les demandes indemnitaires des consorts [Z]-[R] concernant la somme de 6 800 euros qui leur est due au titre de l'acompte versé pour la piscine, ainsi que la somme de 10 000 euros qu'ils sollicitent chacun au titre de leur préjudice moral ;

- Condamner in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France et la compagnie d'assurance SA SMA, à verser à Madame [R] [P], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z], héritiers de Monsieur [O] [Z], la somme de 99 789 euros au titre de leur préjudice de jouissance arrêté au 30 avril 2024 (899 euros x 111 mois), cette somme restant à parfaire jusqu'à l'arrêt à intervenir,

- Condamner in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France et la compagnie d'assurance SA SMA à verser à Madame [R] [P], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z],

héritiers de feu Monsieur [O] [Z], une indemnité de 6 800 euros au titre de l'acompte versé au titre de la piscine (poste de préjudice sur lequel les premiers juges ont omis de statuer),

- Condamner in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France et la compagnie d'assurance SA SMA, à verser à chacun des héritiers de feu [O] [Z] et à Madame [R], une indemnité de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral,

- Condamner in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France et la compagnie d'assurance SA SMA IARD au paiement d'une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux dépens d'appel, en ce compris les frais d'exécution de l'arrêt à intervenir, conformément aux dispositions de l'article 696 et 699 du code de procédure civile , avec distraction au profit de la SELARL Sainte-Cluque Sarda Laurens.

Dans leurs dernières conclusions enregistrées par le greffe le 29 mars 2024, les consorts [B]/[X] demandent à la cour d'appel de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit que la SARL Bouton et l'entreprise [A] ont commis une faute de nature contractuelle qui engage leurs responsabilités contractuelles ;

- Dit que la SARL Bouton est responsable à hauteur de 70 % des dégâts qui ont été causés ;

- Dit que M. [A] est responsable à hauteur de 30 % des dégâts qui ont été causés ;

- Condamné solidairement les consorts [Z]/[R], la SARL Bouton terrassement in solidum avec la SA AXA France IARD et la compagnie d'assurance SMA SA, à indemniser les consorts [B]/[X].

- Infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Condamné in solidum les consorts [Z]/[R], la SARL Bouton terrassement, in solidum avec la SA AXA France IARD et la compagnie d'assurances SMA SA, à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 186 381,43 euros avec indexation sur l'indice BT01 du bâtiment ;

- Condamné in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 8 393,70 euros pour le remplacement du gazon synthétique et la replantation des haies ;

- Condamné in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 4659,60 euros pour les travaux relatifs aux plages de la piscine ;

- Condamné in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 1 560 euros pour les travaux de réfection de la clôture effondrée ;

Et statuant à nouveau de :

-Juger qu'il y a eu aggravation des dommages en cours de la procédure devant la cour d'appel ;

- Condamner solidairement les consorts [Z]/[R], la SARL Bouton terrassement in solidum avec la SA AXA France IARD et la compagnie d'assurance SMA SA, à indemniser les consorts [B]/[X] à la somme globale de 315 427,39 euros ;

- Débouter les codéfendeurs de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires ;

Sur les injonctions :

Confirmer le jugement en ce qu'il a :

- Fait injonction aux consorts [Z]/[R] d'autoriser les entreprises mandatées par les demandeurs de pénétrer sur leur terrain pour y réaliser les travaux et constate que les consorts [Z]/[R] ne s'y opposent pas ;

- Infirmer le jugement en qu'il a débouté de leur demande tendant à faire injonction aux consorts [Z]/[R] d'avoir à rapporter de la terre sur la parcelle des consorts [B]/[X] afin de la reconstituer dans ses limites séparatives et d'avoir à réaliser un mur de soutènement sur la partie haute de leur parcelle et ce sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification de la décision à venir ;

Et statuant à nouveau sur ce point :

- Faire injonction aux consorts [Z]/[R] d'avoir à rapporter de la terre sur la parcelle des requérants afin de la reconstituer dans ses limites séparatives ;

- Faire injonction aux consorts [Z]/[R] d'avoir à réaliser un mur de soutènement sur la partie haute de leur parcelle et ce sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification de la décision à venir ;

- Débouter les codéfendeurs de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires ;

Sur le préjudice de jouissance :

- Infirmer partiellement le jugement en ce qu'il a :

- Condamné in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 40 000 euros au titre du préjudice de jouissance, tout préjudices confondus ;

- Confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a retenu un préjudice de jouissance ;

- Infirmer le jugement entrepris concernant le montant du préjudice ;

Et statuant à nouveau sur ce point :

- Fixer le préjudice de jouissance subi entre le 1er août 2014 et le 16 mai 2018 à la somme de 600 euros par mois sur cinq mois (mai à septembre) et à la somme de 300 euros pour les mois restant ;

- Condamner solidairement l'ensemble des codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 18 900 euros au titre du préjudice de jouissance subi entre le 1er août 2014 et le 16 mai 2018 ;

- Condamner solidairement l'ensemble des codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 49 350 euros au titre du préjudice de jouissance subi depuis le 17 mai 2018 (somme arrêtée au 31 décembre 2013) ;

- Condamner solidairement l'ensemble des codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 900 euros sur cinq mois (mai à septembre) et à la somme de 600 euros pour les sept mois restants jusqu'à la réalisation des travaux ;

- Débouter les codéfendeurs de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires ;

Sur le préjudice moral :

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les consorts [B]/[X] de leur demande ;

Et statuant à nouveau sur ce point :

- Condamner in solidum l'ensemble des codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 35 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi ;

- Débouter les codéfendeurs de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires ;

Sur les dépens et frais irrépétibles :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Condamné in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 6 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné in solidum les codéfendeurs aux entiers dépens en ceux compris les frais d'expertise judiciaire et les dépens exposés par les requérants dans le cadre de la procédure de référé ;

Et statuant à nouveau sur ce point :

- Condamner in solidum les codéfendeurs à verser aux consorts [B]/[X] la somme de 6 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens relativement à la procédure d'appel.

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Sur les désordres et leur imputabilité :

Les désordres résultent de l'effondrement du mur bordant la limite Ouest de la parcelle [Adresse 13]/[Adresse 11] dans la nuit du 29 au 30 septembre 2014.

L'expert a en effet constaté que le mur d'une longueur d'environ 8,20 m a chuté sur le chantier des [Z]/[R] entraînant notamment des désordres au niveau des plages de la piscine et un désaffleurement significatif entre deux plaques de plage de piscine, les plages côté habitation étant en porte à faux sur 1,30 m.

L'expert a également constaté que la clôture en grillage fixée sur le dessus du mur avait été emportée et qu'elle avait occasionné des dégradations sur le reste de la clôture, les terrassements de la plateforme haute des [Z]/[R] ayant fragilisé la clôture en grillage des [B]/[X], deux des plots de fondations de la clôture ayant été déchaussés par les terrassements et étant dans le vide.

Selon l'expert, les désordres ont pour origine les travaux de terrassement réalisés par la société Bouton le 28 juillet 2014 sur la propriété [Z]/[R], à la verticale des fondations du mur de soutènement et sur une profondeur de 3 à 6 m, qui ont eu pour conséquence la décompression et la rupture progressive des sols sous la fondation du mur.

Le sol s'est dérobé sous le mur qui s'est alors effondré, entraînant avec lui une partie des remblais situés sous les plages de la piscine.

S'agissant de l'imputabilité des désordres, l'expert expose que l'effondrement du mur de soutènement est directement lié aux travaux réalisés sur la propriété [Z]/[R], les travaux de terrassement réalisés par la SARL Bouton Terrassement le 28 juillet 2014 n'ayant pas été réalisés conformément aux règles de l'art.

Monsieur [D] indique notamment que l'entreprise Bouton est venue terrasser entre 3 et 6 mètres de profondeur à la verticale du mur de soutènement sans précautions particulières, cette façon de procéder étant selon lui contraire aux règles de l'art et pouvant s'avérer dangereuse.

Force est de constater que la SARL Bouton ne conteste pas sa responsabilité, sollicitant uniquement que sa part de responsabilité dans les désordres soit ramenée à 60 % au lieu des 70 % retenue par le tribunal.

D'autre part, il n'est pas contestable, compte tenu des constatations de l'expert, que les désordres subis par la propriété [B]/[X] excèdent les inconvénients normaux du voisinage et que les consorts [Z]/[R], en leur qualité de maîtres de l'ouvrage et propriétaires de la parcelle, qui n'ont pas fait appel à un maître d'oeuvre et à un bureau d'études structure et géotechnique indispensables en l'espèce et qui ont piloté eux mêmes les travaux, sont responsables de plein droit des troubles excédant les inconvénient normaux du voisinage subis par leurs voisins, ce qu'ils ne contestent pas, sollicitant à ce titre la garantie de la SARL Bouton, de son assureur AXA et de la SMA SA.

Enfin, l'assureur de l'entreprise [A], la SMA SA, conteste toute responsabilité de son assurée dans la survenance des désordres, soutenant principalement :

- qu'il résulte de l'expertise que ce sont les travaux de terrassement et de fouille réalisés par l'entreprise Bouton qui sont à l'origine exclusive du désordre ;

- que s'agissant de la reprise en sous-oeuvre des fondations, l'entreprise [A] ne pouvait pas intervenir sur un ouvrage qui n'appartenait pas à ses clients, mais à leurs voisins ;

- que Monsieur [A] n'avait pas souscrit d'obligations contractuelles ayant pour objet la réalisation des reprises en sous-oeuvre sous le mur de soutènement du voisin de ses clients ;

- que la SARL Bouton n'a jamais informé l'entreprise [A] de la chute d'un morceau de roche dans la nuit du 28 au 29 juillet 2014.

En l'espèce, si l'expert expose que la cause des désordres est principalement imputable à l'entreprise de terrassement, il retient également la responsabilité de l'entreprise [A], titulaire du lot gros oeuvre, qui a accepté le support sans attirer l'attention des [Z]/[R] sur la nécessité de mettre en oeuvre des travaux de confortement en urgence pour éviter la ruine du mur.

Monsieur [D] relève en effet que l'entreprise [A] n'a pas pris les précautions d'usage dans le cadre de la réalisation des ouvrages de gros oeuvre qui ont débuté début août 2014, n'ayant réalisé aucune reprise en sous-oeuvre sous les fondations du mur de soutènement à la suite des terrassements alors même que contrairement à ce qu'elle soutient, elle ne pouvait ignorer la chute d'un morceau de roche du terrain des consorts [B]/[X] situé sous le mur dans la nuit du 28 au 29 juillet 2014 et qui était parfaitement visible, de nouveaux morceaux de roche étant en outre tombés au mois d'août 2014, étant enfin relevé que les consorts [B]/[X] affirment, sans être contredits sur ce point, avoir demandé, au début du mois de septembre 2014, à l'entreprise [A] de réaliser de toute urgence et en priorité le mur de soutènement du côté de leur terrain et de remblayer sur toute la largeur en limite séparative pour remplacer la roche tombée sous leur mur, afin qu'il soit de nouveau soutenu.

Or, l'entreprise [A] a refusé, préférant débuter les travaux de construction de la maison [Z]/[R], prenant ainsi le risque

de débuter le chantier en ne s'assurant pas de la sécurité de ce dernier.

Par conséquent, outre un manquement à son obligation de conseil, tant à l'égard des consorts [Z]/[R] que des consorts [B]/[X], l'entreprise [A], professionnelle du bâtiment, a également manqué à ses obligations dans le cadre de la réalisation des ouvrages de gros oeuvre en acceptant de débuter le chantier sans procéder à des travaux de sécurisation et de confortation du mur de soutènement qui n'avait déjà plus d'assise et qui risquait de s'effondrer à tout moment, le mur s'étant finalement effondré sur la parcelle des consorts [Z]/[R] dans la nuit du 29 au 30 septembre 2014, endommageant fortement les travaux déjà réalisés par l'entreprise [A].

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, et en l'absence de réception, la responsabilité contractuelle de la SARL Bouton et de l'entreprise [A] sera retenue, le jugement étant confirmé de ce chef ainsi que sur le partage de responsabilité entre les deux constructeurs à hauteur de 70 % pour la SARL Bouton, principalement responsable des désordres subis par les consorts [B]/[X] et [Z]/[R] et 30 % pour l'entreprise [A].

Sur la garantie de la SMA SA :

La SMA SA soutient que la responsabilité de Monsieur [A] ne peut être recherchée qu'au titre des dommages aux ouvrages en cours de travaux, avant réception et que la garantie prévue par les conditions générales de la police ne peut être mobilisée en l'espèce dans la mesure où elle ne peut bénéficier qu'à l'assuré et non au tiers.

Or, il résulte de l'article 8.1 du chapitre II des conditions générales que dans le cadre de la garantie responsabilité civile professionnelle en cas de dommages à des tiers, ce qui est le cas en l'espèce, l'assureur garantit, dans le cadre des activités déclarées et précisées aux conditions particulières, les conséquences pécuniaires de la responsabilité que son assuré peut encourir sous quelque fondement juridique que ce soit, en raison notamment des dommages matériels ou immatériels, la clause d'exclusion prévue à l'article 8.2 dont se prévaut la SMA SA ne concernant que les dommages causés aux ouvrages de l'assuré.

Par conséquent, la SMA SA sera condamnée à garantir son assurée, l'entreprise [A], sous réserve de l'application des franchises contractuelles, étant rappelé que la non-opposabilité de la franchise aux bénéficiaires des indemnités n'a vocation à s'appliquer que lorsque la responsabilité de l'assuré est engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Sur la réparation des préjudices des consorts [B]/[X] :

Sur les désordres matériels :

L'expert retient les travaux suivants :

- réfection du mur de soutènement ou dispositif équivalent

- réfection des plages de la piscine

- réfection de la clôture en grillage

Il précise qu'un bureau d'étude géotechnique et un bureau d'étude structure devront être missionnés pour dimensionner le projet, l'intervention d'un maître d'oeuvre ainsi que d'un coordonnateur SPS étant également nécessaire.

Si la SARL Bouton et AXA France IARD soutiennent que le devis à hauteur de 109 611,28 euros permettrait de replacer le chantier dans son état d'avancement au moment du désordre, le tribunal a justement relevé que ce devis ne concerne que la reconstruction du mur de soutènement et non la reprise des autres désordres constatés et retenus par l'expert judiciaire.

Par ailleurs, si le tribunal, sur la base du devis de la SARL CPL Terrassement, a retenu une somme de 186 381,43 euros comprenant, outre la réparation des désordres, les honoraires d'un architecte et d'un coordonnateur SPS, il résulte des factures versées aux débats qu'après la réalisation d'une partie des travaux, le coût réel des travaux effectués et payés s'élève à la somme de 211 173,44 euros, outre les travaux non encore réalisés d'un montant, selon les devis produits aux débats, de 88 595,32 euros, soit une somme totale de 299 768,76 euros, les désordres s'étant aggravés en cours de procédure, contraignant les consorts [B]/[X] à contracter en juin 2022 un emprunt de 90 000 euros pour financer une partie des travaux, le montant des intérêts s'élevant à 14 728,63 euros et les frais de dossier à 750 euros.

Enfin, si la SMA SA expose que la responsabilité de l'entreprise [A] ne pourrait être engagée qu'au titre d'une perte de chance pour manquement à son obligation de conseil, il convient de rappeler que le manquement à l'obligation de conseil n'est pas le seul manquement reproché à l'entreprise [A] qui a notamment omis de procéder à des travaux de sécurisation et de confortation du mur de soutènement avant de débuter son chantier, le préjudice des consorts [B]/[X] étant en conséquence un préjudice direct.

La réparation des désordres matériels s'élève donc à la somme totale de 315 247,39 euros à laquelle seront condamnées in solidum les consorts [Z]/[R], la SARL Bouton et son assureur AXA France IARD et la SMA SA, avec indexation sur l'indice BT01.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Le jugement sera en revanche confirmé en ce qu'il a fait injonction aux consorts [Z]/[R] d'autoriser les entreprises mandatées par les consorts [B]/[X] à pénétrer sur leur terrain pour y réaliser les travaux, les consorts [Z]/[R] ne s'y opposant pas.

Sur le soutènement des terres de la parcelle des consorts [B]/[X] :

L'expert a constaté qu'une plateforme avait été décaissée par l'entreprise Bouton à la verticale en limite de propriété sans qu'aucun dispositif de soutènement des terres des [B]/[X] ne soit réalisé, ajoutant qu'il appartenait aux [Z]/[R] de prévoir les travaux adaptés.

Si les consorts [Z]/[R] exposent que dès le mois d'août 2021, ils ont procédé au comblement et au terrassement de la partie haute de leur terrain, il résulte cependant des photographies versées aux débats datées du 24 août 2023 que la butte de la première plate-forme a été laissée sans remblai et sans mur de soutènement, avec une excavation d'environ 8 mètres de long, 2 mètres de large et 4 mètres de profondeur.

Il convient donc de condamner les consorts [Z]/[R] à rapporter de la terre sur la parcelle des consorts [B]/[X] afin de la reconstituer dans ses limites séparatives et de réaliser un mur de soutènement sur la partie haute de leur parcelle, et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le préjudice de jouissance :

En l'espèce, il est incontestable que depuis 2014, les consorts [B] [X] subissent un préjudice de jouissance considérable puisqu'ils sont privés, ainsi que leurs enfants, de la jouissance normale de leurs aménagements extérieurs, en particulier de leur terrasse et de leur piscine, cette situation s'étant en outre aggravée à compter de mai 2018 suite à de nouveaux effondrements, tel que cela ressort des photographies versées aux débats.

Force est de constater que l'évaluation de leur préjudice de jouissance n'est contestée ni par les consorts [Z]/[R], ni par la SARL Bouton et son assureur AXA France IARD, ni par la SMA SA.

Dans ces conditions, compte tenu de l'ancienneté du préjudice subi depuis dix ans et de la dangerosité des lieux empêchant leur utilisation, il sera fait droit aux demandes présentées par les consorts [B]/[X].

Les consorts [Z]/[R], la SARL Bouton et son assureur AXA France Iard et la SMA SA seront donc condamnés in solidum à payer aux consorts [B]/[X] les sommes suivantes au titre du préjudice de jouissance :

* entre le 1er août 2014 et le 16 mai 2018 :

- 600 euros par mois de mai à septembre et 300 euros par mois pour les sept mois restants, soit une somme de 18 900 euros.

* à compter du 16 mai 2018 :

- 900 euros par mois de mai à septembre et 600 euros par mois pour les sept autres mois, soit une somme de 49 350 euros.

* 900 euros par mois de mai à septembre et 600 euros par mois pour les sept autres mois jusqu'à la réalisation des travaux.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le préjudice moral :

En l'espèce, les effondrements répétés subis par leur terrain depuis dix ans sont incontestablement de nature à avoir généré chez Monsieur [X], Madame [B] et leur fils une situation de stress et une anxiété caractérisant un préjudice moral et justifiant la condamnation in solidum des consorts [Z]/[R], de la SARL Bouton et de son assureur AXA France Iard et de la SMA SA à leur payer à ce titre une somme de 12 000 euros.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l'appel en garantie des consorts [Z]/[R] :

Compte tenu des fautes de nature contractuelle commises par la SARL Bouton et par l'entreprise [A], la SARL Bouton et son assureur AXA France Iard et la SMA SA seront condamnés in solidum à relever et garantir les consorts [Z] [R] des condamnations prononcées à leur encontre au titre des désordres matériels, du préjudice de jouissance et du préjudice moral.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les préjudices des consorts [Z]/[R] :

Les consorts [Z]/[R] sollicitent d'une part la confirmation du jugement qui a condamné in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France Iard et la SMA SA à leur payer la somme de 191 548,23 euros TTC, avec indexation sur l'indice BT01 au titre de leur préjudice matériel résultant de la destruction des constructions existantes, de leur évacuation du terrain et de la réfection de la construction existante en maçonnerie.

La SMA SA oppose aux consorts [Z]/[R] les clauses de son contrat Protection Professionnelle des Artisans du Bâtiment, faisant valoir qu'au terme de son contrat d'assurance, elle n'est tenue de payer que les frais d'enlèvement des gravats et le coût de leur évacuation à hauteur de 5 800 euros TTC.

Or, il résulte du chapitre II des conditions générales que les dommages matériels ou les indemnités compensant les dommages subis par les travaux, les ouvrages ou parties d'ouvrage exécutés par l'assuré peuvent être couverts dans les conditions prévues au chapitre I lorsqu'ils surviennent avant réception.

L'article 5 du chapitre I stipule que les dommages atteignant l'ouvrage réalisé par l'assuré sont évalués sur la base des frais à engager, y compris les travaux de démolition, déblaiement, dépose et démontage éventuellement nécessaires pour remettre l'ouvrage ou la partie d'ouvrage endommagé dans l'état qui était le sien avant le sinistre.

En l'espèce, le devis de la SARL BTP Alliance évalue le montant des travaux de démolition et de reconstruction à la somme de 166 565,23 euros dont 23 289,09 euros au titre de la démolition, étant relevé que la somme de 5800 euros invoquée par la SMA SA ne correspond qu'à la démolition et l'évacuation du mur de soutènement, tel que cela ressort de l'offre de prix de l'entreprise SM versée aux débats par l'assureur.

Le montant total des travaux s'élève donc bien à la somme de 166 565,23 euros TTC, somme à laquelle il convient d'ajouter les honoraires d'un architecte à hauteur de 19 987 euros TTC et d'un coordonnateur SPS à hauteur de 4 996 euros TTC, soit une somme totale de 191 548,23 euros TTC à laquelle seront condamnées in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France IARD et la SMA SA, avec indexation sur l'indice BT01.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

S'agissant d'autre part du préjudice de jouissance, le tribunal a justement relevé que les consorts [Z]/[R] auraient dû emménager depuis le 1er janvier 2015 et qu'ils sont contraints depuis cette date de vivre dans une location pour laquelle ils règlent un loyer mensuel de 899 euros.

Sur la base de ce loyer et pour la période avril 2015-avril 2024, le préjudice de jouissance sera donc réactualisé et évalué à la somme

de 99 789 euros ( 899 x 111 mois), étant relevé que ce poste de préjudice n'est pas discuté par la SMA SA ou par AXA et la SARL Bouton.

Par conséquent, la SARL Bouton, la SA AXA France IARD et la SMA SA seront condamnées in solidum à payer à Madame [P] [R], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z] une somme de 99 789 euros au titre du préjudice de jouissance.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le remboursement de l'acompte de 6 800 euros réglé au pisciniste, il convient de relever que cet acompte a été réglé, non le 25 octobre 2014, soit plus d'un mois après l'effondrement du mur comme le soutient la SMA SA, mais le 6 août 2014, selon facture versée aux débats par les consorts [Z]/[R], soit avant l'effondrement du mur intervenu fin septembre 2014.

Par conséquent, la SARL Bouton, la SA AXA France IARD et la SMA SA seront condamnées in solidum à payer à Madame [P] [R], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z] une somme de 6 800 euros au titre du remboursement de l'acompte réglé au pisciniste.

Enfin, le préjudice moral des consorts [Z]/[R], qui n'ont pas pu emménager dans leur maison depuis 2015 et subissent depuis cette date de nombreuses procédures (référé, première instance, appel) est en l'espèce caractérisé et justifie la condamnation in solidum de la SARL Bouton, la SA AXA France IARD et la SMA SA à leur payer une somme globale de 10 000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme partiellement le jugement et statuant à nouveau sur le tout, pour une meilleure compréhension de la décision ;

Retient la responsabilité contractuelle de la SARL Bouton et de l'entreprise [A], le partage de responsabilité entre les deux constructeurs étant fixé à hauteur de 70 % pour la SARL Bouton, principalement responsable des désordres subis par les consorts [B]/[X] et [Z]/[R] et 30 % pour l'entreprise [A] ;

Condamne la SMA SA à garantir son assurée, l'entreprise [A], sous réserve de l'application des franchises contractuelles ;

Condamne in solidum Madame [P] [R], Messieurs [L] et [U] [Z], la SARL Bouton et son assureur AXA France IARD et la SMA SA à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [V] [X] la somme de 315 247,39 euros au titre des désordres matériels, avec indexation sur l'indice BT01 ;

Fait injonction aux consorts [Z]/[R] d'autoriser les entreprises mandatées par les consorts [B]/[X] à pénétrer sur leur terrain pour y réaliser les travaux ;

Condamne Madame [P] [R] et Messieurs [L] et [U] [Z] à rapporter de la terre sur la parcelle des consorts [B]/[X] afin de la reconstituer dans ses limites séparative et de réaliser un mur de soutènement sur la partie haute de leur parcelle, et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt ;

Condamne in solidum Madame [P] [R], Messieurs [L] et [U] [Z], la SARL Bouton et son assureur AXA France Iard et la SMA SA à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [V] [X] les sommes suivantes au titre du préjudice de jouissance :

* entre le 1er août 2014 et le 16 mai 2018 :

- 600 euros par mois de mai à septembre et 300 euros par mois pour les sept mois restants, soit une somme de 18 900 euros .

* à compter du 16 mai 2018 :

- 900 euros par mois de mai à septembre et 600 euros par mois pour les sept autres mois, soit une somme de 49 350 euros .

* 900 euros par mois de mai à septembre et 600 euros par mois pour les sept autres mois jusqu'à la réalisation des travaux.

Condamne in solidum Madame [P] [R], Messieurs [L] et [U] [Z], la SARL Bouton et son assureur AXA France Iard et la SMA SA à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [V] [X] la somme de 12 000 euros au titre du préjudice moral ;

Condamne in solidum la SARL Bouton et son assureur AXA France Iard et la SMA SA à relever et garantir Madame [P] [R] et Messieurs [L] et [U] [Z] des condamnations prononcées à leur encontre au titre des désordres matériels, du préjudice de jouissance et du préjudice moral ;

Condamne in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France Iard et la SMA SA à payer à Madame [P] [R] et Messieurs [L] et [U] [Z] la somme de 191 548,23 euros TTC au titre de leur préjudice matériel, avec indexation sur l'indice BT01 ;

Condamne in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France IARD et la SMA SA à payer à Madame [P] [R], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z] une somme de 99 789 euros au titre du préjudice de jouissance ;

Condamne in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France IARD et la SMA SA à payer à Madame [P] [R], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z] une somme de 6 800 euros au titre du remboursement de l'acompte réglé au pisciniste ;

Condamne in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France IARD et la SMA SA à payer à Madame [P] [R], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z] une somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral ;

Condamne in solidum Madame [P] [R], Messieurs [L] et [U] [Z], la SARL Bouton et son assureur AXA France Iard et la SMA SA à payer à Madame [F] [B] et Monsieur [V] [X] la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour leurs frais engagés en première instance et en appel ;

Condamne in solidum la SARL Bouton, la SA AXA France IARD et la SMA SA à payer à Madame [P] [R], Monsieur [U] [Z] et Monsieur [L] [Z] une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour leurs frais engagés en première instance et en appel ;

Condamne in solidum Madame [P] [R], Messieurs [L] et [U] [Z], la SARL Bouton et son assureur AXA France Iard et la SMA SA aux entiers dépens de première instance et d'appel, comprenant les frais engagés dans le cadre du référé et les frais d'expertise judiciaire.

le greffier le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00620
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;20.00620 ?
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