La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2024 | FRANCE | N°21/04641

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 19 juin 2024, 21/04641


ARRÊT n°





























Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 19 JUIN 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04641 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PC2N



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 JUILLE

T 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 20/00749







APPELANT :



Monsieur [G] [B]

né le 07 Avril 1984 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représenté sur l'audience par Me Frédérique REA, avocat au barreau de MONTPELLIER









INTIMEE :


...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 19 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04641 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PC2N

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 JUILLET 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 20/00749

APPELANT :

Monsieur [G] [B]

né le 07 Avril 1984 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté sur l'audience par Me Frédérique REA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

EARL SAUVAGEOL

Prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité au dit siège social, sis

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Jacques Henri AUCHE, substitué sur l'audience par Me Christine AUCHE HEDOU, de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assistée sur l'audience par Me Guilhem NOGAREDE, avocat au barreau de NIMES, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 25 Mars 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 AVRIL 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

Madame Magali VENET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER, assistée de Madame Olivia COMARASSAMY, greffier stagiaire

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

Le 19 février 2018 Monsieur [G] [B] a donné à bail à ferme à l'EARL Sauvageol, exerçant une activité de production de fruits et légumes, différentes parcelles d'une superficie totale de 3 hectares, soixante-dix ares et soixante-deux centiares.

Précédemment employé par la société du Bas Rhône Languedoc, Monsieur [G] [B] démissionnait de son emploi avec effet au 20 octobre 2018 et il était engagé par l'EARL Sauvageol à compter du 1er novembre 2018 selon contrat de travail à durée déterminée saisonnier à temps complet pour une durée minimale de trois mois, en qualité d'ouvrier agricole hautement qualifié, niveau 4, échelon 1 selon la classification de la convention collective des exploitations agricoles de [Localité 3], afin d'effectuer les tâches suivantes : entretien et traitements phytosanitaires des vergers et cultures légumières, transport des récoltes et retour des contenus vides, ferti-irrigation.

À compter du 3 juin 2019 la relation de travail se poursuivait en vertu d'un contrat à durée indéterminée aux mêmes conditions moyennant un salaire mensuel brut de 2602,66 euros pour 151,67 heures de travail par mois.

Le 6 août 2019, le salarié était placé en arrêt de travail pour accident du travail.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 15 novembre 2019, le salarié était convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement prévu le 25 novembre 2019.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 28 novembre 2019 l'employeur notifiait au salarié son licenciement pour faute simple et la rupture du contrat de travail intervenait au terme du préavis d'un mois dont le salarié était dispensé d'exécution.

Par requête du 31 juillet 2020, le salarié, a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins de requalification du contrat à durée déterminée initial ainsi que de nullité du licenciement et de condamnation de l'employeur à lui payer avec exécution provisoire les sommes suivantes :

'2602,66 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de visite de prévention,

'2602,66 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de visite de reprise postérieurement au 25 octobre 2019,

'10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination en raison de l'état de santé,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions vexatoires,

'10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail,

'4473,53 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires, outre 447,35 euros au titre des congés payés afférents,

'15 615,96 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

'4000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 1er juillet 2021, le conseil de prud'hommes de Montpellier a condamné l'EARL Sauvageol à payer à Monsieur [G] [B] les sommes suivantes :

'2602,66 euros à titre d'indemnité de requalification,

'1000 euros à titre d'indemnité pour défaut de visite d'information et de prévention,

'2602,66 euros à titre d'indemnité pour défaut de visite de reprise,

'2408,99 euros à titre de rappel de salaire, outre 240,89 euros au titre des congés payés afférents,

'800 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [G] [B] a relevé appel de la décision du conseil de prud'hommes le 19 juillet 2021 et il a notifié ses premières conclusions d'appelant le 31 juillet 2021. Aux termes de celles-ci, il sollicitait la condamnation de l'EARL Sauvageol à lui payer les sommes suivantes :

'10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination en raison de l'état de santé,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions vexatoires,

'10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail,

'4473,53 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires, outre 447,35 euros au titre des congés payés afférents,

'15 615,96 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

'4000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures, notifiées par RPVA le 18 mars 2024, Monsieur [G] [B] conclut à la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes quant aux condamnations prononcées sauf en ce qu'il a limité le montant du rappel de salaire sur heures supplémentaires et de congés payés afférents aux somme respectives de 2408,99 euros et de 240,89 euros. Il sollicite en définitive la condamnation de l'EARL Sauvageol à lui payer les sommes suivantes :

'10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination en raison de l'état de santé,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

'15 615,96 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement intervenu dans des conditions vexatoires,

'10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail,

'4473,53 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires, outre 447,35 euros au titre des congés payés afférents,

'15 615,96 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

'4000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, notifiées par RPVA le 21 mars 2024, l'EARL Sauvageol conclut, au visa de l'article 910 du code de procédure civile, à l'irrecevabilité des conclusions en réponse de monsieur [B] en date du 19 mars 2024, à la réformation du jugement quant aux condamnations prononcées, à titre principal au débouté de monsieur [B] de l'ensemble de ses demandes ainsi qu'à sa condamnation à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages intérêts en raison du préjudice subi par la société au regard des agressions répétées de salariés et du gérant. À titre subsidiaire, l'EARL Sauvageol sollicite la réduction à de plus justes proportions du montant des condamnations prononcées et la condamnation de monsieur [B] à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages intérêts en raison du préjudice subi par la société au regard des agressions répétées de salariés et du gérant.

Pour l'exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 25 mars 2024.

SUR QUOI :

$gt; Sur l'irrecevabilité des dernières conclusions de l'appelant

Au soutien de sa prétention, l'EARL Sauvageol fait valoir que les conclusions de Monsieur [B] en réplique à l'appel incident qu'il a formé n'ont pas été signifiées dans le délai de l'article 910 du code de procédure civile.

En l'espèce, l'appelant notifiait ses premières conclusions le 31 juillet 2021. Le 22 octobre 2021 l'intimée notifiait ses conclusions en réponse portant appel incident.

C'est seulement le 18 mars 2024 que monsieur [B] a répliqué à ces écritures.

Pour autant, s'il n'est pas discuté que monsieur [B] ait répondu aux conclusions de l'intimé portant appel incident postérieurement au délai de trois mois à compter de la notification qui lui en avait été faite, il ressort des conclusions notifiées par Monsieur [B] le 18 mars 2024 que ces conclusions déposées par l'appelant principal avant la clôture mais après l'expiration du délai de trois mois suivant l'appel incident formé par l'intimé étaient exclusivement destinées à développer son appel principal.

Aussi convient-il de déclarer recevables les dernières écritures notifiées par l'appelant principal au moyen du RPVA le 18 mars 2024.

$gt;Sur la demande d'indemnité de requalification

Monsieur [G] [B] a été engagé par l'EARL Sauvageol à compter du 1er novembre 2018 selon contrat de travail à durée déterminée à temps complet pour une durée minimale de trois mois, en qualité d'ouvrier agricole hautement qualifié, niveau 4, échelon 1, coefficient 160 selon la classification de la convention collective des exploitations agricoles de [Localité 3], afin d'effectuer les tâches suivantes : « entretien et traitements phytosanitaires des vergers et cultures légumières, transport des récoltes et retour des contenus vides, ferti irrigation ».

Le motif énoncé au contrat est ainsi stipulé : « le présent contrat est conclu en raison de la saison : traitement, transport, irrigation et entretien des cultures ».

Le contrat était conclu pour une durée minimale de trois mois et il était également stipulé : « si la saison se prolongeait au-delà de cette date, votre engagement se poursuivrait jusqu'à l'achèvement de la saison pour se finir automatiquement avec elle. La date exacte de la fin de saison mettant un terme au présent contrat vous sera notifiée par tout moyen ».

Le contrat à durée indéterminée à effet du 3 juin 2019 stipule que « Monsieur [G] [B] devra accomplir toutes les missions inhérentes à sa qualification. Ses principales fonctions seront les suivantes :

' entretien et traitements phytosanitaires des vergers et cultures légumières,

' transport des récoltes et retour des contenants vides,

' Ferti irrigation,

' traitement, transport, irrigation et entretien des cultures pendant la saison ».

L'employeur qui conteste la requalification opérée par le premier juge fait valoir que si le libellé des missions de monsieur [B] avait pu être considéré comme identique dans le cadre du contrat à durée indéterminée, ce seul élément ne pouvait fonder la requalification dès lors que dans le cadre de la relation de travail à durée indéterminée les fonctions du salarié étaient plus polyvalentes et que le rapport Agrisynergie produit par Monsieur [B] relève que la production des terres mises à bail était croissante entre 2018 et 2019, ce qui traduisait un accroissement d'activité justifiant son embauche en contrat à durée indéterminée à compter du 3 juin 2019.

Or ce document, qui se limite à faire état de l'évolution de la production d'asperges entre 2018 et 2019 sur l'une des parcelles de l'exploitation ne suffit pas à établir le caractère saisonnier de l'emploi pour la période du 20 octobre 2018 au 3 juin 2019 dès lors qu'il ne permet d'apporter aucune précision sur la nature et les dates des différentes productions de fruits et légumes sur l'ensemble de l'exploitation et sur celles qui auraient plus spécialement nécessité l'accomplissement de tâches à caractère strictement saisonnier et non durables, appelées à se répéter chaque année à une époque voisine, en fonction du rythme des saisons.

L'employeur échoue par conséquent à rapporter la preuve du motif de recours au contrat à durée déterminée. Aussi convient-il de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande de requalification en contrat à durée indéterminée formée par le salarié et en ce qu'il a condamné l'EARL Sauvageol à payer à Monsieur [G] [B] une somme de 2602,66 euros à titre d'indemnité de requalification.

$gt; Sur la demande de rappel de salaire sur heures supplémentaires »

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Ensuite, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Monsieur [G] [B] prétend avoir accompli chaque mois de nombreuses heures supplémentaires et sollicite à cet égard un rappel de salaire de 4473,53 euros.

Au soutien de sa prétention Monsieur [B] produit, contrairement à ce que soutient l'employeur selon lequel le salarié ne produit pas d'élément sur les horaires de travail accomplis, un tableau mentionnant la réalisation de 31 heures supplémentaires en novembre 2018, de 18,75 heures supplémentaires en décembre 2018, de 25,33 heures supplémentaires en janvier 2019, de 30,5 heures supplémentaires en février 2019, de 25 heures supplémentaires en mars 2019, de 25,33 heures supplémentaires en avril 2019 et de 30,5 heures supplémentaires en mai 2019.

Il fait valoir par ailleurs que si les bulletins de paie mentionnent des heures supplémentaires, les bulletins sont retraités pour faire sciemment figurer des heures de travail inférieures à celles réellement effectuées.

Monsieur [G] [B] présente par conséquent des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Or l'employeur ne justifie d'aucun élément de contrôle de la durée du travail.

Il fait valoir toutefois que les heures supplémentaires effectuées ont été payées comme cela ressort des bulletins de paie et que sur la base des calculs opérés par le salarié le salaire brut du premier contrat ne pouvait être que de 2302 euros.

Toutefois, si les bulletins de paie mentionnent des heures supplémentaires pour une durée de travail parfois en-deçà de 151,67 heures, il ressort de ces mêmes bulletins un paiement d' heures de travail sans majoration au-delà d'une durée de travail de 151,67 heures, comme c'est notamment le cas en janvier 2019 et en avril 2019.

Ensuite, comme il a été relevé ci-avant, l'employeur ne produit pas d'élément de contrôle de la durée du travail si bien que les éléments qu'il verse aux débats sont insuffisamment probants pour rapporter la preuve que les heures supplémentaires accomplies ont été intégralement payées.

Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, la cour dispose par conséquent d'éléments suffisants pour fixer à la somme de 1986,75 euros le montant du rappel de salaire sur heures supplémentaires dû au salarié sur la période revendiquée, outre 198,67 euros au titre des congés payés afférents.

Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de rappel de salaire sur heures supplémentaires mais réformé quant au montant alloué.

$gt;Sur la demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

Ni les circonstances dans lesquelles les heures supplémentaires ont été accomplies, ni le défaut de paiement d'heures supplémentaires pour un montant de 1986,75 euros sur une durée de six mois, ne suffisent à caractériser l'intention frauduleuse de dissimuler l'activité du salarié.

D'où il suit qu'il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

$gt;Sur les demandes de dommages intérêts pour discrimination en raison de l'état de santé, manquements à l'obligation de sécurité, manquement à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail

En l'espèce, le salarié a été placé en arrêt de travail pour accident du travail en raison d'un traumatisme à l'épaule gauche du 6 août 2019 au 25 octobre 2019, date à laquelle le médecin traitant préconisait la poursuite de soins sans arrêt de travail.

Le salarié soutient qu'au terme de son arrêt de travail, l'employeur qui n'a pas cherché à organiser une visite de reprise l'a empêché de reprendre le travail puis licencié en raison de son état de santé.

Il produit à cet égard les certificats médicaux d'arrêt de travail décrivant sa pathologie invalidante ainsi que trois courriers des 4 novembre 2019, 11 novembre 2019, 25 novembre 2019 aux termes desquels l'employeur lui demande de rester chez lui « pour raisons personnelles » alors que parallèlement était engagée la procédure de licenciement le 15 novembre 2019.

Il est constant et non discuté qu'aucune visite médicale d'information et de prévention ou de reprise n'a été organisée. Si l'employeur se défend d'une abstention délibérée, il ne produit à cet égard qu'un courrier adressé à la MSA le 12 février 2021 pour demander des visites médicales à la médecine du travail concernant trois salariés autres que monsieur [B]. Il verse encore aux débats la réponse faite par ce service sur les difficultés à organiser toutes les visites en raison d'une pénurie de personnel médical à cette date, le document précisant toutefois que les visites de reprise restaient priorisées. La pénurie de personnel médical de la médecine du travail en 2021 est cependant sans lien avec l'absence d'initiative de l'employeur relativement à une visite médicale d'information et de prévention ou à une visite médicale de reprise en octobre 2019. Le grief tenant au choix de ne pas organiser une visite de reprise est par conséquent établi.

Monsieur [B] présente ainsi des éléments de fait laissant supposer que l'employeur qui n'organisait pas de visite de reprise tout en lui demandant de rester chez lui entendait en réalité ne pas employer un salarié susceptible de voir son poste de travail aménagé, si bien que ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une discrimination.

Pour autant, le salarié ne justifie d'aucun préjudice en raison d'un défaut d'organisation de visites médicales d'information et de prévention ou de reprise si bien qu'il ne peut qu'être débouté de ses demandes de dommages-intérêts en raison d'un manquement à l'obligation de sécurité ou de défaut d'organisation de visite médicale d'information et de prévention et de visite médicale de reprise. Le jugement sera par conséquent infirmé à cet égard, et, y ajoutant le salarié sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité dès lors que le salarié n'avait, de fait, pas repris le travail.

L'EARL Sauvageol fait valoir qu'en réalité il n'a pas laissé reprendre son travail au salarié le 25 octobre 2019 en raison des insultes proférées envers son épouse et des coups de pieds donnés dans le véhicule de la société, faits à l'origine du licenciement de Monsieur [B].

Il apparaît que, d'une part, le 25 octobre 2019 le gérant de l'EARL se présentait à la gendarmerie en fin de journée afin d'effectuer une déclaration de main courante aux termes de laquelle il reprochait à Monsieur [B] des propos inappropriés envers lui-même ainsi que des gestes déplacés et une virulence de ce dernier à son égard, que d'autre part, l'employeur verse aux débats deux attestations concordantes de salariés ou collaborateurs occasionnels de l'entreprise, dont celle de Monsieur [S], lequel indique très précisément que le 25 octobre 2019 il a pu voir et entendre Monsieur [B] lorsqu'il avait insulté le gérant, frappé dans sa voiture et traité son épouse de « grosse connasse », et celle de Madame [T] [J] laquelle indique à une période qu'elle situe avant le licenciement, avoir vu [G] frapper sur la voiture d'[E] [X] et l'avoir entendu traiter son épouse de « grosse connasse ».

Ces éléments constituent par conséquent un faisceau d'indices précis et concordants rapportant la preuve que la décision de l'employeur de ne pas laisser reprendre le travail au salarié le 25 octobre 2019 était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination.

En outre, ces éléments ne démontrent pas davantage une exécution déloyale du contrat de travail et le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande à ce titre.

$gt;Sur la demande aux fins de nullité du licenciement

Monsieur [G] [B] a été placé en arrêt de travail pour accident du travail le 6 août 2019.

Au 28 novembre 2019, date de la rupture du contrat de travail, le contrat de travail du salarié restait suspendu dès lors qu'aucune visite de reprise n'était intervenue.

Or, les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail devaient s'appliquer dès lors que l'employeur avait eu connaissance de l'origine professionnelle de l'accident.

Au cours de la période de suspension du contrat de travail pour accident du travail, Monsieur [B] a été licencié pour faute simple sans que l'employeur ne justifie par ailleurs de son impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à l'accident.

Alors qu'il n'appartient pas à la cour, sur la base de l'appréciation d'éléments de fait, de conférer à la rupture une qualification autre que celle que lui a donné l'employeur, le licenciement intervenu dans ces conditions doit être déclaré nul par application des articles L1226-9 et L1226-13 du code du travail.

Aussi, infirmant en cela le jugement entrepris, convient-il de faire droit à la demande de dommages-intérêts pour licenciement nul à concurrence du montant de 15 615,96 euros réclamé, correspondant à six mois de salaire brut.

Monsieur [G] [B] qui ne justifie toutefois d'aucun préjudice moral excédentaire ni d'aucune circonstance vexatoire entourant le licenciement, nonobstant les nombreux litiges opposant par ailleurs les parties, sera débouté de ses demandes de dommages intérêts pour préjudice moral et pour licenciement intervenu dans des conditions vexatoires.

$gt;Sur les demandes accessoires et reconventionnelles

L'EARL Sauvageol qui ne caractérise pas le préjudice subi au regard d'une situation que ses manquements fautifs ont contribué à créer avant la rupture du contrat de travail n'est pas davantage fondé en sa demande formée devant la juridiction prud'homale pour des faits postérieurs à la rupture du contrat de travail. Aussi y a-t-il lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté l'employeur de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts.

Compte tenu de la solution apportée au litige, l'EARL Sauvageol supportera la charge des dépens ainsi que celle de ses propres frais irrépétibles et sera également condamnée à payer au salarié qui a dû exposer des frais pour faire valoir ses droits une somme de 2500 euros au titre des dispositions l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Déclare recevables les dernières écritures notifiées par l'appelant principal le 18 mars 2024 ;

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montpellier le 1er juillet 2021 sauf en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande aux fins de nullité du licenciement, condamné l'employeur à payer au salarié des dommages intérêts pour défaut de visite d'information et de prévention et pour défaut de visite de reprise et quant au montant alloué à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires ;

Et statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,

Déboute Monsieur [G] [B] de ses demandes de dommages intérêts pour défaut de visite d'information et de prévention et pour défaut de visite de reprise ;

Déclare nul le licenciement de Monsieur [G] [B] par l'EARL Sauvageol le 28 novembre 2019 ;

Condamne l'EARL Sauvageol à payer à Monsieur [G] [B] les sommes suivantes :

'1986,75 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires, outre 198,67 euros au titre des congés payés afférents,

'15 615,96 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [G] [B] de sa demande de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ;

Déboute l'EARL Sauvageol de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts ;

Condamne l'EARL Sauvageol à payer à Monsieur [G] [B] une somme de 2500 euros au titre des dispositions l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'EARL Sauvageol aux dépens ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/04641
Date de la décision : 19/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-19;21.04641 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award