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18/06/2024 | FRANCE | N°22/03981

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 18 juin 2024, 22/03981


ARRÊT n°2024-



































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 18 JUIN 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/03981 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PQBI





Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 JUIN 2022

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE M

ONTPELLIER

N° RG 20/05320





APPELANTE :



Syndic. de copropriété résidence LES [12] représentée par son syndic : SARL CITYA COGESIM RCS MONTPELLIER B 469 800 312 [Adresse 4]

dont le siège social est sis

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Laurence -Marie FOURRIER, avocat au b...

ARRÊT n°2024-

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 18 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/03981 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PQBI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 JUIN 2022

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MONTPELLIER

N° RG 20/05320

APPELANTE :

Syndic. de copropriété résidence LES [12] représentée par son syndic : SARL CITYA COGESIM RCS MONTPELLIER B 469 800 312 [Adresse 4]

dont le siège social est sis

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Laurence -Marie FOURRIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMES :

Madame [W] [K] épouse [X]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Monsieur [R] [V]

né le 29 Juin 1965 à [Localité 14]

[Adresse 9]

[Localité 6]

Représenté par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Monsieur [Y] [L]

né le 05 Décembre 1962 à [Localité 13](09)

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représenté par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Madame [P] [U]

née le 26 Mars 1962 à [Localité 11] (Corse)

[Adresse 8]

[Localité 6]

Représentée par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Monsieur [O] [T]

né le 09 Août 1948 à [Localité 16](34)

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Monsieur [Y] [T]

né le 24 Mai 1944 à [Localité 6] (34)

[Adresse 10]

[Localité 6]

Représenté par Me Emily APOLLIS de la SELARL SAFRAN AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Ordonnance de clôture du 22 Avril 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Mai 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Corinne STRUNK, Conseillère, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON

Greffier lors du prononcé : Madame Estelle Doubey

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre, et par Mme Estelle DOUBEY, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Mme [W] [K] épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] sont propriétaires de divers emplacements de stationnement situés au premier sous-sol de l'un des deux bâtiments (« E » [Adresse 15]) composant la résidence Les [12].

Aucun d'eux n'est copropriétaire ou occupant d'un appartement situé dans cette résidence.

Le 23 septembre 2020, le syndicat des copropriétaires a voté une résolution selon laquelle le coût total des travaux afférents au remplacement de l'ascenseur desservant le bâtiment « E », soit la somme de 89.715,10 euros, sera réparti « selon les millièmes attachés aux lots concernés par la dépense, soit la clé de répartition des charges ascenseurs ».

Exposant que l'accès au garage s'effectue par une télécommande ouvrant la porte principale donnant sur la rue et que la sortie peut s'effectuer à pied, sans avoir à pénétrer dans l'immeuble, par un escalier longeant la rampe d'accès au parking et séparé par un garde-fou sans qu'il ne soit nécessaire d'utiliser l'ascenseur concerné par l'opération de réfection, Mme [W] [K], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] ont fait assigner, par exploit d'huissier du 3 décembre 2020, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les [12] afin notamment de voir prononcer la nullité de la résolution n°16 de l'assemblée générale du 23 septembre 2020.

Par jugement rendu le 16 juin 2022, le tribunal judiciaire de Montpellier :

Déboute Mme [W] [K] épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] de leur demande de rejet de pièces ;

Annule la résolution n°16 de l'assemblée générale du 23 septembre 2020 ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Les [12] à payer à Mme [W] [K] épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande ;

Rappelle que l'exécution provisoire est de droit ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Les [12] aux dépens, distraits au profit de la SCP Moulin et Associés, avocat soussigné, dans les conditions prévues aux articles 699 et suivants du code de procédure civile.

Le premier juge relève qu'il n'y avait pas lieu à rejeter les documents produits par le syndicat dès lors que le principe du contradictoire est respecté.

Le premier juge annule la résolution n°16 de l'assemblée générale du 23 septembre 2020 dès lors que les demandeurs n'ont pas d'utilité objective à prendre l'ascenseur pour accéder à leur lot et ne l'empruntent jamais faute d'en détenir la clé et d'habiter dans l'immeuble.

Le syndicat des copropriétaires de la résidence Les [12], pris en la personne de son syndic en exercice, a relevé appel de la décision par déclaration au greffe du 20 juillet 2022.

Dans ses dernières conclusions du 9 avril 2024, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :

Réformer le jugement contradictoire en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a écarté la demande des intimés tendant au rejet des débats de lettres confidentielles entre avocats;

Statuant à nouveau,

Dire et juger que Mme [W] [K], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] ont accès à l'ascenseur de la résidence [12] auquel ils doivent se rendre pour entrer et sortir de la résidence ;

Débouter Mme [W] [K], épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

Condamner Mme [W] [K], épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence [12] la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis par l'action abusive en nullité de la 16ème résolution de l'assemblée générale du 23 septembre 2020 ;

Condamner Mme [W] [K], épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence [12] les préjudices particuliers de chacun des copropriétaires et en particulier l'ensemble des facturations des réparations de l'ascenseur du Bâtiment E, générées depuis la procédure (7.344,93 euros) ;

Condamner Mme [W] [K], épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence [12] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Mme [W] [K], épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais d'huissier de justice relatifs au procès-verbal de constat avec droit pour l'avocat soussigné, conformément à l'article 699 du code de procédure civile, de recouvrer directement ceux dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu de provision.

Le syndicat des copropriétaires soutient que les intimés sont redevables des charges concernant l'ascenseur dès lors qu'ils ont la possibilité de l'emprunter et même s'ils n'en font pas usage. Il affirme que les consorts font un mauvais usage des voies d'accès au parking et que ces derniers possèdent nécessairement la clé d'accès aux ascenseurs, ce dont atteste un mail du syndic en date du 30 octobre 2018 qui propose à M. [Y] [L] de tenir la clé à sa disposition en agence. Selon lui, l'utilité objective des charges d'ascenseur doit donc être retenue. Le syndicat ajoute que l'escalier permettant la sortie directe du parking dans la rue n'a pas vocation à être utilisé de manière quotidienne, les piétons n'étant pas autorisés, selon lui, à passer par le portail pour des raisons de sécurité et ce dernier ayant été installé pour éviter les ouvertures intempestives du portail suite à la mauvaise utilisation des copropriétaires.

L'appelant sollicite le rejet de la demande d'annulation de la 16ème résolution. Il affirme que l'article 17 du règlement est conforme aux dispositions de la loi de 1965 et que le remplacement de l'ascenseur relève bien des charges spéciales à chaque bâtiment qui doivent être supportées par chacun des copropriétaires. Le quantum des charges appelées pour l'ascenseur correspondrait, selon lui, aux tantièmes prévus dans le règlement de copropriété.

Le syndicat soutient que les intimés ont gravement abusé de leur droit d'ester en justice. Il affirme qu'ils avaient connaissance de la possibilité de récupérer la clé mais ne l'ont pas fait et n'ont ni voté contre la résolution 16 ni effectué de demande préalable auprès du syndic. L'appelant précise qu'il a subi un préjudice dans la paralysie des travaux engendrée par l'action des consorts et qui a obligé à des interventions supplémentaires, contraignant certains copropriétaires âgés à ne plus pouvoir se déplacer, faute de pouvoir utiliser l'ascenseur en panne. Le syndicat évoque également un préjudice financier du fait de la perte d'une chance de pouvoir maintenir un taux d'emprunt avantageux.

Dans leurs dernières conclusions du 2 janvier 2023, Mme [W] [K], épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] demandent à la cour de :

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Montpellier, le 16 juin 2022, sauf en ce qu'il a écarté la demande des intimés tendant au rejet des débats de lettre confidentielles entre avocats et, par conséquent, l'infirmer en ce chef de jugement ;

Prononcer la nullité pure et simple de la seizième résolution de l'assemblée générale de la résidence « Les [12] », tenue le 23 septembre 2020, en ce que cette résolution impute à des copropriétaires de places de stationnement des charges inhérentes à des ascenseurs auxquels ils n'ont pas accès ;

Ordonner le rejet des débats de toute lettre produite par le syndicat des copropriétaires émanant soit de son conseil, soit de celui des demandeurs, non revêtue de la mention « officielle » ;

Débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence « Les [12] » de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence « Les [12] », pris en la personne de son syndic, la société Citya Immobilier, à payer à chacun des requérants la somme de 900 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner le même en tous les dépens distraits au profit de la SCP Argellies Apollis, Avocat soussigné, dans les conditions prévues aux articles 699 et suivants du code de procédure civile.

Les intimés soutiennent, sur le fondement de l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, qu'ils sont recevables à agir en nullité de la résolution dès lors qu'il résulte du procès-verbal de l'assemblée générale du 23 septembre 2020 qu'ils étaient tous absents et non représentés.

Les consorts font valoir qu'ils ne peuvent se voir imputer les charges au titre de l'utilisation de l'ascenseur, car ils n'y ont pas accès et que ces charges ne présentent pas de critère d'utilité. Ils affirment ne pas détenir la clé permettant à l'ascenseur de monter dans les étages de l'immeuble, ce qui a été constaté par huissier de justice, et ne pas pouvoir descendre par ce dernier, faute de badge pour accéder à la porte de l'immeuble au rez-de-chaussée. En outre, ils affirment que le critère d'utilité n'est pas rempli dès lors que, ne pouvant emprunter l'ascenseur ni pour entrer, ni pour sortir, un escalier avec garde-fou a été aménagé le long de la rampe d'accès aux véhicules et permettraient aux copropriétaires de places de parking, munis d'un badge spécifique, de sortir directement sur la voie publique sans passer par l'immeuble. Ils ajoutent que c'est le syndicat des copropriétaires qui aurait fait installer cet aménagement, fléché le parcours et remis les badges de sorte que les copropriétaires ne pourraient se rendre coupable d'un « mauvais usage des parties communes ».

Les consorts soutiennent que l'application par le syndicat de l'article 17 du règlement de copropriété, portant sur les charges de l'ascenseur, est sans emport sur le présent litige, ne pouvant déroger à l'application d'ordre public de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 exigeant que les charges présentent un critère d'utilité. Ils affirment donc que la demande de contribution aux charges d'ascenseur n'est pas conforme au règlement de copropriété. Ils ajoutent que le règlement de copropriété prévoit bien que seuls les propriétaires utilisateurs des ascenseurs sont redevables des charges afférentes. Ils soutiennent que la résolution n°16 doit donc être annulée dès lors qu'ils n'ont pas d'utilité à utiliser l'ascenseur auquel ils n'ont pas accès.

Les intimés font valoir que la demande en paiement de dommages-intérêts formée par le syndicat est dénuée de sérieux. Ils estiment que le syndicat ne rapporte pas le caractère abusif de l'action engagée par les intimés et ajoutent ne pas avoir retardé le remplacement de l'ascenseur dès lors que ce retard ne serait pas établi et que l'action n'était pas susceptible de causer ce retard. Les consorts précisent que les copropriétaires ayant subi des préjudices allégués ne peuvent prétendre à voir ces derniers réparés dès lors qu'ils ne sont pas parties au procès et que nul ne plaide par procureur.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 22 avril 2024.

MOTIFS

1/ Sur la production de pièces

Conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il en résulte que les conclusions doivent contenir, en-dehors de l'objet de la demande et de la cause juridique qui lui est donnée, un exposé des moyens de fait et de droit sur lesquels les prétentions sont fondées. N'est saisie d'aucune prétention la cour qui relève l'absence de moyens utilement formés.

En l'occurrence, les intimés demandent à la cour d'infirmer le jugement rendu le 16 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Montpellier en ce qu'il a écarté leur demande tendant au rejet des débats de lettre confidentielles entre avocats, mais ne développent aucun moyen dans le corps de leurs conclusions au soutien de cette prétention.

Il sera considéré que la cour d'appel n'est pas valablement saisie de cette demande.

2/ Sur l'annulation de la résolution n°16 de l'assemblée générale du 23 septembre 2020 :

En application de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entrainées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de leur utilité « objective » que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot dès lors que ces charges ne sont pas individualisées.

Au cas d'espèce, les intimés sont uniquement propriétaires d'emplacements de stationnement situés au premier sous-sol de l'un des deux bâtiments (« E » [Adresse 15]) composant la résidence « Les [12] » à [Localité 6].

Lors de l'assemblée générale du 23 septembre 2020, le syndicat des copropriétaires a voté une résolution n°16 aux termes de laquelle le coût total des travaux afférents au remplacement de l'ascenseur desservant le bâtiment « E », soit la somme de 89.715,10 euros, sera réparti « selon les millièmes attachés aux lots concernés par la dépense, soit la clé de répartition des charges ascenseurs » et a donc décidé que ce coût sera supporté par tous les copropriétaires intimés à hauteur de 34/10.000ièmes par lot.

Il en résulte la réclamation du paiement des charges suivantes :

Mme [W] [K] épouse [X] = 616,86 euros (lots 30 et 31);

M. [R] [V] = 308,43 euros ( lot 8);

M. [Y] [L] = 308,43 euros ( lot 45);

Mme [P] [U] = 308,43 euros (lot 88) ;

M. [O] [T] = 308,43 euros ( lot 21);

M. [Y] [T] = 308,43 euros ( lot 15);

Cette résolution a été votée en application des dispositions du règlement intérieur de la copropriété et plus spécifiquement de son article 17 ter relatif aux « charges d'ascenseur » énonçant que celles-ci font l'objet d'une répartition spéciale entre les copropriétaires utilisateurs conformément au tableau colonne n°5 correspondant à une grille de répartition.

L'examen de ce tableau met en évidence une répartition des travaux d'entretien et de réparation voire de remplacement de l'ascenseur entre tous les copropriétaires, incluant ceux qui sont propriétaires des lots 1 à 93 correspondant à des parkings, les charges d'ascenseur étant exprimées les concernant en 10.000èmes, soit 34/1000ème.

Les copropriétaires intimés, qui sont propriétaires de parkings, contestent cependant l'opposabilité de cette disposition du règlement intérieur considérant que selon la cour de cassation, les charges d'ascenseur sont réparties en fonction du critère d'utilité (cass 9 mai 2019 n° 18-17.334) et que toute stipulation d'un règlement de copropriété dérogeant à cette règle est réputée non écrite (cass 22 septembre 2016 n° 15-20086).

Ils ajoutent en outre ne pas disposer d'accès à cet ascenseur lequel fonctionne avec un badge qui n'est pas en leur possession, et qu'ils rejoignent le parking par une voie d'accès indépendante prévue à cet effet située sur la rampe d'accès donnant sur la voie publique. Ils produisent des photos ainsi qu'un procès-verbal de constat établi le 25 novembre 2020 par un commissaire de justice signalant en effet cet accès matérialisé par un escalier muni d'une rampe donnant sur l'extérieur avec une porte jouxtant le portail d'accès au parking.

En l'état, il résulte de l'arrêt rendu le 9 mai 2019 par la troisième chambre civile de la cour de cassation qu'est contraire au critère d'utilité, énoncé à l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, une répartition par parts égales des charges d'ascenseur entre les lots.

L'article 10 alinéa 1er envisage en effet les charges « entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun » et prévoit que la participation des copropriétaires s'effectue en fonction de l'utilité que ces services et ces éléments présentent à l'égard de chaque lot.

Il a ainsi été jugé que l'ascenseur étant un élément d'équipement commun, les frais de fonctionnement, d'entretien et éventuellement de remplacement ne peuvent être répartis égalitairement entre des lots situés à des étages différents ni même selon l'usage effectif par chaque copropriétaire (civ 3ème 22 septembre 2016, n°15-20.086).

Néanmoins, selon l'arrêt rendu le 23 juin 2020 par cette même chambre, il importe peu que le copropriétaire, qui a accès à l'ascenseur, ne l'utilise pas, par convenance personnelle. L'utilité objective d'un élément d'équipement s'entend alors de la possibilité pour le copropriétaire de l'emprunter ou de s'en servir qu'il fasse ou non l'usage de cette possibilité.

Il s'agit d'une utilité potentielle et dès l'instant, où un copropriétaire a la possibilité juridique et matérielle, de par la situation de son lot, d'utiliser l'ascenseur, il doit participer aux charges qu'il entraîne alors même qu'il n'assurerait pas l'accès direct ou le plus commode à son lot.

Si les intimés, qui ne sont pas propriétaires d'appartements situés dans l'immeuble, font le choix de se rendre au parking situé au sous-sol par la porte jouxtant le portail d'accès au parking en empruntant un escalier muni d'une rampe donnant sur l'extérieur, il est néanmoins démontré que l'ascenseur présente une utilité objective pour les lots des intimés car ils ont la possibilité, s'ils le souhaitent, de l'emprunter pour y accéder en passant par le hall d'entrée de l'immeuble situé en rez-de-chaussée et accessible au moyen du badge dont ils sont munis.

Il a été en effet constaté par un commissaire de justice (procès -verbal du 2 février 2021) que le parking situé en sous-sol de la résidence est accessible par ascenseur et qu'il appartient aux copropriétaires intimés de solliciter une clé auprès du syndic, qui la tient à disposition, pour en faire usage comme l'établissent les pièces produites par l'appelant.

Il n'est donc pas contestable que l'ascenseur a une utilité objective pour les lots des intimés et que les charges ont été réparties entre les lots litigieux en fonction du critère légal d'utilité objective.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a accueilli favorablement la prétention présentée par les intimés en prononçant la nullité de la répartition des charges telles que votées par l'assemblée générale du 23 septembre 2020 dans sa résolution n°16 en ce qui concerne les charges d'ascenseur.

3/ Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive :

Le syndicat appelant dénonce l'abus des intimés dans l'exercice de leur droit d'ester en justice et se prévaut d'un préjudice découlant de la paralysie des travaux imputables à l'opposition abusive manifestée par Mme [W] [K] épouse [X],

M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] à leur obligation de paiement.

L'abus d'ester en justice n'est nullement démontré, l'action engagée par les intimés, qui se justifie par un différend relatif à l'interprétation de la notion d'utilisation objective d'un élément d'équipement et la non-imputabilité des charges qui en découlent, n'étant ni dilatoire, ni abusive.

Le syndicat des copropriétaires sera débouté de cette prétention.

4/ Sur les frais accessoires :

Le jugement déféré sera infirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.

Les intimés, qui succombent, seront condamnés aux entiers dépens.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à l'appelante une somme de 1.500 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe ;

Infirme le jugement rendu le 16 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Montpellier sauf en ce qu'il a débouté Mme [W] [K] épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] de leur demande de rejet de pièces,

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [W] [K] épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] de l'ensemble de leur demande,

Déboute le syndicat des copropriétaires de la résidence « Les [12] » de la demande présentée à titre de dommages et intérêts,

Condamne in solidum Mme [W] [K] épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence Les [12] la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum Mme [W] [K] épouse [X], M. [R] [V], M. [Y] [L], Mme [P] [U], M. [O] [T] et M. [Y] [T] au paiement des entiers dépens.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/03981
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;22.03981 ?
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