ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 13 JUIN 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/01725 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OSDA
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 20 DECEMBRE 2019
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE RODEZ
N° RG 17/00648
APPELANTE :
S.C.I. SEVIDOL prise en la personne de représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Yann LE DOUCEN de la SCP LE DOUCEN AVOCATS, avocat au barreau d'AVEYRON
INTIMES :
Monsieur [O] [Y] [IG]
né le 31 Décembre 1931 à [Localité 27]
de nationalité Française
[Adresse 25]
[Localité 27]
Représenté par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Christophe BRINGER de la SELARL BBMT, avocat au barreau d'AVEYRON, avocat plaidant
Monsieur [H] [P]
né le 30 avril 1930 à [Localité 23]
de nationalité Française
[Adresse 22]
[Localité 27]
Représenté par Me Elian GAUDY de la SCP GAUDY GALANDRIN, avocat au barreau d'AVEYRON substitué par Me Christine AUCHE HEDOU, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame [W] [DR]
née le 21 Mars 1934 à [Localité 29]
de nationalité Française
[Adresse 18]
[Localité 29]
Représentée par Me Elian GAUDY de la SCP GAUDY GALANDRIN, avocat au barreau d'AVEYRON substitué par Me Christine AUCHE HEDOU, avocat au barreau de MONTPELLIER
Monsieur [C] [I]
né le 15 Juillet 1983 à [Localité 29]
de nationalité Française
[Adresse 19]
[Localité 29]
Représenté par Me Laure BRUNEL, avocat au barreau d'AVEYRON
Madame [U] [XH]
née le 27 Février 1985 à [Localité 29]
de nationalité Française
[Adresse 19]
[Localité 29]
Représentée par Me Laure BRUNEL, avocat au barreau d'AVEYRON
Monsieur [R] [IG]
[Adresse 17]
[Localité 29]
Représenté par Me Laurence FOUCAULT de la SELARL LAURENCE FOUCAULT, avocat au barreau d'AVEYRON substitué par Me Kim VIGOUROUX, avocat au barreau de MONTPELLIER
Monsieur [T] [GZ]
né le 14 Juillet 1968 à [Localité 29]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 20]
Représenté par Me Camille JAMMES, avocat au barreau d'AVEYRON substitué par Me Kim VIGOUROUX, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame [S] [GZ]
née le 12 Septembre 1966 à [Localité 30]
de nationalité Française
[Adresse 26]
[Localité 5]
ALLEMAGNE
Représentée par Me Camille JAMMES, avocat au barreau d'AVEYRON substitué par Me Kim VIGOUROUX, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame [DA] [GZ]
née le 14 Juillet 1968 à [Localité 29]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 21]
Représentée par Me Camille JAMMES, avocat au barreau d'AVEYRON substitué par Me Kim VIGOUROUX, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 28 Février 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 mars 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Thierry CARLIER, conseiller
M. Fabrice DURAND, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Hélène ALBESA
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Hélène ALBESA, greffier
* * * *
FAITS ET PROCÉDURE
Le 8 novembre 1932, un acte notarié a été dressé par Maître [D], notaire à [Localité 29], concernant la vente par M. [A] [IG] et Mme [M] [J] à M. [F] [K] [J] d'une partie de pré avec jardin, cour et vieille maison, situés [Adresse 28], confrontant à la route nationale n° 88,commune de [Localité 29].
Cet acte a été transcrit à la conservation des hypothèques de Rodez le 1er décembre 1932.
Suivant acte de vente du 26 janvier 1990, Mme [W] [DR] et M. [H] [P] sont devenus propriétaires de la parcelle cadastrée section AO numéro [Cadastre 7], sur la commune de [Localité 29].
Par acte notarié du 13 janvier 2012, la S.C.I Sevidol a acquis la parcelle cadastrée section AO numéro [Cadastre 6], sur ladite commune.
Par acte du 26 février 2013, Mme [S] [GZ] épouse [WA], Mme [DA] [GZ] épouse [L], et M. [T] [GZ], sont devenus propriétaires des parcelles cadastrées section AO numéros [Cadastre 9] et [Cadastre 16].
M. [O] [IG] est pour sa part propriétaire indivis de la parcelle cadastrée section AO numéro [Cadastre 15], et propriétaire indivis avec son frère, M. [R] [IG], concernant les parcelles numéros [Cadastre 8] et [Cadastre 14].
Le 4 août 2014, M. [F] [G], gérant de la S.C.I SevidoL, a fait délivrer à Mme [S] [GZ], Mme [DA] [GZ], et M. [T] [GZ], sommation interpellative de cesser toute entrave à l'usage du chemin de desserte situé pour partie sur leur parcelle cadastrée section AO numéro [Cadastre 16].
Par courrier en réponse du 26 juillet 2014 par l'intermédiaire de leur conseil, les consorts [GZ] ont exprimé leur total désaccord avec le contenu de ces sommations.
Par acte authentique du 9 octobre 2016, Mme [S] [GZ], Mme [DA] [GZ], et M. [T] [GZ] ont vendu à M. [C] [I] et Mme [U] [XH] les parcelles cadastrées section AO numéros [Cadastre 16], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11] et [Cadastre 12].
Par actes d`huissier de justice des 19 mai, 20 mai, 29 mai et 7 juin 2017, la S.C.I Sevidol a fait assigner Mme [S] [GZ], Mme [DA] [GZ], M. [T] [GZ], M. [O] [IG] et Mme [W] [DR], devant le tribunal de grande instance de Rodez, aux fins de solliciter du tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire,
Le jugement en date du 20 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Carcassonne a :
- donné acte à M. [H] [P] de son intervention volontaire,
- jugé recevables les demandes formées par la S.C.I Sevidol, Mme [W] [DR] et M. [H] [P], à l`encontre de M. [O] [IG],
- jugé recevables les demandes formées par la S.C.I Sevidol à l'encontre de M. [T] [GZ], de Mme [S] [GZ] et de Mme [DA] [GZ],
- dit que l'acte du 8 novembre 1932 ne crée aucune servitude conventionnelle entre les fonds cadastrés section AO, numéro [Cadastre 15] d'une part, et numéros [Cadastre 6] et [Cadastre 7] d'autre part, sur la commune de [Localité 29],
- débouté la S.C.I Sevidol, Mme [W] [DR] et M. [H] [P], de leur demande en reconnaissance d'état d'enclave et de création de servitude de passage,
- débouté la S.C.I Sevidol de sa demande en revendication concernant une partie de la parcelle cadastrée section AO numéro [Cadastre 16], sur la commune de [Localité 29], appartenant désormais à M. [C] [I] et Mme [U] [XH],
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
-condamné in solidum la S.C.I Sevidol, Mme [W] [DR] et M. [H] [P], à payer à M. [O] [IG] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la S.C.I SEVIDOL, Mme [W] [DR] et M. [H] [P], à payer à M. [C] [I] et Mme [U] [XH] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l`article 700 du code de procédure civile.
1) La SCI Sevidol a relevé appel de ce jugement selon déclaration en date du 1er avril 2020 afin d'obtenir la réformation de l'ensemble des chefs du jugement.
Dans ses dernières conclusions, elle sollicite en statuant à nouveau,
Juger que la parcelle AO [Cadastre 16] en nature de chemin est propriété de la SCI Sevidol pour sa partie d'une largeur d'un mètre cinquante jouxtant le fonds AO [Cadastre 6] elle-même propriété de la SCI SEVIDOL.
Juger que le fonds cadastré Section AO n°[Cadastre 6] propriété de la SCI Sevidol, bénéficie d'une servitude de passage qui s'exerce :
- Sur les fonds Section AO [Cadastre 8] ' [Cadastre 14] - [Cadastre 15] en partie Est (propriété [IG]) sur une largeur de 3 mètres avec pan coupé tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932.
- Sur le fonds Section AO n° [Cadastre 15] en partie sud, sur une largeur de 3 mètres tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932.
- Sur les fonds Section AO n° [Cadastre 7] propriété indivise [DR]-[P] et N° [Cadastre 16] propriété [GZ] au jour de l'introduction de la procédure et désormais propriété [I]-[XH], en partie Sud, sur une largeur de 1,50 m sur chacun desdits fonds en bordure de la parcelle [DR]-[P], puis au delà sur une largeur de 1,50 m sur le fonds section [Cadastre 16] Propriété [GZ] au jour de l'introduction de la procédure et désormais propriété [I]-[XH], et 1,50 m sur ledit fonds [Cadastre 16] alors imputé à tort Propriété [GZ] dont il sera dit que l'assiette est propriété SCI Sevidol.
Désigner tel géomètre expert pour en dresser l'esquisse et procéder aux rectifications cadastrales.
Condamner les consorts [O] [IG] et [I]-[XH] à cesser toute entrave juridique ou matérielle à l'exercice et à la libre jouissance de la servitude.
Condamner Monsieur [O] [IG] à en rétablir l'assiette afin de la rendre accessible aux véhicules, le tout sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.
Déclarer la décision à intervenir opposable à Monsieur [R] [IG], Monsieur [H] [P] et Madame [W] [DR].
Condamner les consorts [O] [IG] et [GZ] in solidum au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommage et intérêt pour la privation de jouissance.
Condamner les consorts [O] [IG] et [GZ] in solidum au paiement de la somme de 5 000 euros en application des articles 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
Condamner les consorts [O] [IG] et [GZ] in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel avec droit de poursuite directe au bénéfice de Maître Yann Le Doucen en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
2) Dans ses dernières conclusions, M. [O] [IG], intimé, en application des articles 637 et suivants du code civil souhaite voir :
Rejeter la demande de la SCI Sevidol, des consorts [DR]- [P] et de Monsieur [R] [IG] tendant à juger que les fonds cadastrés section AO n° [Cadastre 6] et AO n° [Cadastre 7] bénéficient d'une servitude de passage qui s'exerce :
- Sur les fonds section AO n° [Cadastre 8] ' [Cadastre 14] ' [Cadastre 15] en partie Est sur une largeur de 3 mètres avec pan coupé tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932,
- Sur le fonds section AO n° [Cadastre 15] en partie Sud sur une largeur de 3 mètres tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932,
- Sur les fonds Section AO n°[Cadastre 7] propriété indivise [DR]-[P] et n°[Cadastre 16] propriété [GZ] au jour de l'introduction de la procédure et désormais propriété [I]-[XH] en partie Sud, sur une largeur de 1,50 m sur chacun desdits fonds en bordure de la parcelle [DR]-[P], puis au-delà sur une largeur de 1,50 m sur le fonds section [Cadastre 16] Propriété [GZ] au jour de l'introduction de la procédure et désormais propriété [I]-[XH] et 1,50 m sur ledit fond [Cadastre 16] alors imputé à tort Propriété [GZ] dont il sera dit que l'assiette est propriété Sevidol,
Rejeter en conséquence l'intégralité des demandes de la SCI Sevidol, des consorts [DR]-[P], de Monsieur [R] [IG] ainsi que de toutes autres parties.
A titre subsidiaire,
Vu les articles 682 et suivants du code civil,
Juger que la SCI Sevidol, d'une part, et les consorts [DR]- [P] ne peuvent valablement se prévaloir de l'enclavement de leurs parcelles respectives cadastrées section AO n° [Cadastre 6] et n° [Cadastre 7] dans la mesure où cet enclavement trouve son origine dans leurs propres agissements.
Rejeter en conséquence l'intégralité des demandes de la SCI Sevidol, des consorts [DR]-[P] et de Monsieur [R] [IG].
Rejeter de plus fort leur demande quant à l'établissement d'un droit de passage sur les fonds cadastrés section AO n° [Cadastre 8] ' [Cadastre 14] ' [Cadastre 15] en l'état de l'absence de mise en cause du propriétaire de la parcelle section AO n° [Cadastre 13] pouvant desservir les parcelles section AO n° [Cadastre 6] et n° [Cadastre 7].
Rejeter en conséquence l'intégralité des demandes de la SCI Sevidol, des consorts [DR]-[P] et de Monsieur [R] [IG] ainsi que de toutes autres parties.
Rejeter de plus fort encore les demandes de la SCI Sevidol, des consorts [DR]- [P] et de Monsieur [R] [IG] en ce qu'ils n'apportent pas la preuve de ce que le passage sur les fonds section AO n° [Cadastre 8] ' [Cadastre 14] ' [Cadastre 15] constituerait le tracé le plus court et le moins dommageable pour accéder à leurs fonds cadastrés parcelle section AO n° [Cadastre 6] et n° [Cadastre 7].
Rejeter en conséquence l'intégralité des demandes de la SCI Sevidol, des consorts [DR]-[P] et de Monsieur [R] [IG] ainsi que de toutes autres parties.
A titre infiniment subsidiaire,
Juger que les fonds cadastrés section AO n° [Cadastre 6] et AO n° [Cadastre 7] bénéficient d'une servitude de passage qui s'exerce uniquement :
- Sur les fonds section AO n° [Cadastre 8] ' [Cadastre 14] ' [Cadastre 15] en partie Est sur une largeur de 3 mètres avec pan coupé tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932.
- Sur le fonds section AO n° [Cadastre 15] en partie Sud sur une largeur de 1,50 mètres tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932 et s'arrêtant au point « C » tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932.
- A l'exclusion des fonds section AO n° [Cadastre 7] et [Cadastre 16].
En tout état de cause,
Condamner in solidum la SCI Sevidol et les consorts [DR]- [P] à payer à Monsieur [O] [IG] la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner in solidum la SCI Sevidol et les consorts [DR]- [P] aux entiers dépens.
3) Monsieur [C] [I] et Madame [U] [XH] demandent la confirmation du jugement dont appel et de débouter la SCI Sevidol de l'ensemble de ses demandes comme injustes et infondées et :
- dire que l'acte du 8 novembre 1932 ne crée aucune servitude conventionnelle.
- débouter la S.C.I Sevidol, Mme [W] [DR] et M. [H] [P], de leur demande en reconnaissance d'état d'enclave et de création de servitude de passage,
- débouter la S.C.I Sevidol de sa demande en revendication concernant une partie de la parcelle cadastrée section AO numéro [Cadastre 16], sur la commune de [Localité 29], appartenant désormais à M. [C] [I] et Mme [U] [XH],
- débouter les parties du surplus de leurs demandes,
- condamner in solidum la S.C.I Sevidol, Mme [W] [DR] et M. [H] [P], à payer à M. [C] [I] et Mme [U] [XH] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum la S.C.I Sevidol, Mme [W] [DR] et M. [H] [P] aux dépens de l'instance,
Subsidiairement
et pour le cas, par extraordinaire, de reconnaissance d'une quelconque servitude ou condamnation des consorts [I]- [XH] :
- dire et juger qu'aucune servitude de passage ne saurait être opposable aux consorts [I]-[XH], sur les parcelles leur appartenant,
- dire et juger que les consorts [I]-[XH] possèdent en toute bonne foi dans les conditions de l'article 2272 du code civil, et seraient bien fondés à faire valoir la prescription acquisitive de la bande de terrain injustement revendiquée sur leur parcelle AO [Cadastre 16].
- dire et juger, en tout état de cause, que pour le cas de quelconque
condamnation, les consorts [GZ] seraient condamnés à relever et garantir les consorts [I]-[XH] de toutes condamnations pouvant être prises à leur encontre,
En tout état de cause
- condamner la SCI Sevidol, ou qui il appartiendra au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
- condamner la SCI Sevidol, ou qui il appartiendra, en cause d'appel au paiement à de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit Maître Laure Brunel.
4) Madame [DA] [EY] [GZ] épouse [L], Madame [S], [Z] [N], [DA] [GZ] épouse [WA], Monsieur [T], [F] [FS] [GZ] concluent au débouté pur et simple de la SCI Sevidol de l'intégralité de ses demandes et confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Rodez en date du 20 décembre 2019,
- condamner la SCI Sevidol à porter à porter et payer aux consorts [GZ] la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel,
- la condamner aux entiers dépens.
5) Madame [W] [DR], Monsieur [H] [P] formaient appel incident et réformant le jugement :
Dire que le fonds cadastré section AO n° [Cadastre 7] propriété indivise de [W] [DR] et de [H] [P] bénéficie d'une servitude de passage qui s'exerce :
- sur les fonds section AO [Cadastre 8]-[Cadastre 14]-[Cadastre 15] en partie est (propriété [IG]) sur une largeur de 3 mètre avec pan coupé tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932,
- sur le fonds section AO n° [Cadastre 15] en partie sud, sur une largeur de 3 mètres tel que figurant au plan annexé à l'acte de vente du 8 novembre 1932.
Désigner tel géomètre expert pour en dresser l'esquisse et procéder aux rectifications cadastrales.
Condamner les consorts [IG] et les consorts [GZ] à cesser toute entrave juridique ou matérielle à l'exercice et à la libre jouissance de la servitude.
Condamner les consorts [IG] à en rétablir l'assiette afin de la rendre accessible aux véhicules, le tout sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir.
Les condamner à porter et payer solidairement à porter et payer à chacun des concluants la somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
6) M. [R] [IG], intimé, s'accordait à voir dire que le fonds cadastré section AO N°[Cadastre 6] propriété de la SCI Sevidol bénéficie d'une servitude de passage qui s'exerce tel que demandé en appel et désigner tel géomètre expert pour en dresser l'esquisse et procéder aux rectifications cadastrales et constater que M. [IG] n'a commis aucune entrave juridique ou matérielle à l'exercice et à la libre jouissance de la servitude de la SCI Sevidol.
Il conclut au débouté de toute demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile à son égard.
En cas de confirmation du jugement il sollicite la condamnation de la SCI Sevidol à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
- Sur l'analyse de l'acte du 8 novembre 1932 et ses conséquences:
Le contentieux s'est noué autour de l'interprétation de l'acte du 8 novembre 1932 dont seule une copie de son enregistrement auprès de la conservation des hypothèques de Rodez est produite, étant précisé qu'il comporte des ratures et surcharges sans que son contenu soit contesté.
La partie sujette à interprétation est donc la suivante :
« Il est expliqué que sur la partie à l'est le long du pré de M. [E], (ratures), M.[IG] a établi un chemin de trois metres de largeur pour desservir lamaison comprise dans la vente.
M. [J] aura le droit de se servir de ce chemin pour le service de la partievendue et d'établir sous ce chemin telles canalisations et caniveaux qu'il jugerait utiles.
En outre. il est convenu entre les parties qu'il sera créé à l'extrémité de la parcelle conservée par Monsieur [IG] au
sud un chemin de trois mètres allant du chemin dont il est parlé au-dessus vers la propriété de Melle [V] avec pan coupé à l'entrée du chemin. L 'assiette de ce chemin qui sera commun sera fourni moitié par M. [IG] et moitié par M. [J].
Chacun des propriétaires paiera les impôts de la partie des chemins touchant sa propriété. »
Cette mention est incluse dans une acte notarié du 8 novembre 1932 relatif à la vente par M. [A] [IG] et Mme [M] [J] à M. [F] [K] [J] d'une partie de pré avec jardin, cour et vieille maison situés [Adresse 28],confrontant à la route nationale 88, commune de [Localité 29], reçu par Maître [D], notaire, et transcrit à la conservation des hypothèques de Rodez le 1er décembre 1932.
Ainsi, compte tenu du caractère authenthique de ce manuscrit, il est évident que chaque mot ou phrase désigne une situation précise qu'il faut remettre dans le contexte cadastral des parcelles de l'époque sans en dénaturer le sens.
C'est à bon droit que le premier juge a rappelé le texte des articles 637 et 686 du code civil, applicables à l'espèce.
Dans un premier temps, la mention de 1932 prévoit que M. [IG] a réalisé un chemin de trois mètres de largeur, destiné à desservir la maison vendue à M. [F] [K] [J], située sur les parcelles aujourd'hui cadastrées section AO numéros [Cadastre 6] et [Cadastre 7].
Il s'agit d'un droit expressément confié à M. [J] « de se servir de ce chemin » par M.[IG].
La conséquence de cette formulation est qu'elle ne crée aucune servitude réelle, rattachée au fonds vendu.
Comme le remarque le premier juge, il n'est pas fait état de l'instauration d'une servitude entre deux fonds, aucun des deux n'étant d'ailleurs identifié (numéro de cadastre de la parcelle notamment) mais simplement entre deux personnes dont les rapports sont organisés à propos de la création d'un chemin et à aucun moment le rédacteur de l'acte (notaire) n'a mentionné le terme servitude, ce qui au regard de la situation des parcelles à ce moment historique est compréhensible : les parcelles numéros [Cadastre 6] et [Cadastre 7], appartenant aujourd'hui à la S.C.I Sevidol et aux consorts [DR]-[P], n'étaient pas enclavées, les constructions situées en confrontation de la route nationale 88 n'ayant été édifiées que plusieurs décennies plus tard.
L'acte n'a donc pas prévu de servitude, cette situation étant inexistante à l'époque.
En effet, comme le remarque le tribunal mais aussi les intimés, le moyen selon lequel une servitude aurait été créée en vue d`un désenclavement à terme des fonds ne peut être retenu, une servitude visant à faire cesser une enclave déjà existante et non d'anticiper une hypothétique enclave, près de trente avant qu'elle ne survienne.
ll ressort donc des éléments précités qu'il n'existait aucune raison de créer une telle servitude en 1932.
Par ailleurs, outre le fait que l'usage de ce chemin depuis 2012, date d'acquisition de la parcelle numéro [Cadastre 6] par la S.C.I Sevidol, n'est pas de nature à justifier de l'existence d'une servitude conventionnelle et le PV d'huissier ne saurait lui même suffire à justifier son utilisation et il serait plutôt de nature à prouver l'inverse au vu de la situation du portail et du pré adjacent.
Enfin, il est établi qu'aucun acte notarié postérieur à celui de 1932 ne mentionne l'existence d`une servitude entre les fonds visés, à savoir l' acte du 26 février 2013 entre M. [B] et Mme [X] et les consorts [GZ], l'acte du 19 octobre 2016 entre ces derniers, et M. [I] et Mme [XH].
La seule mention qui pourrait se rapporter est celle du 31 janvier 2012 qui est bien hypothétique puis qu'elle stipule « il semble exister depuis de nombreuses années une servitude de passage rejoignant la parcelle A0 [Cadastre 15] au sud puis [Adresse 24] par l'est de cette parcelle » ce qui est bien faible comme mention de création ou de constat de servitude, s'agissant d'une supputation.
Dans un deuxième paragraphe de la clause de 1932 commençant par « en outre », il n'apparaît à aucun moment la mention « servitude » entre un fonds dominant et un fonds servant mais la création d'une chemin commun , chacun des propriétaires incluant une partie de son fonds afin d'en constituer l'assiette.
La création de ce chemin commun exclut totalement la mise en place d'une servitude.
Il est invoqué par la suite l'existence d'une servitude conventionnelle. Celle-ci doit être prouvée et clairement établie.
Mme [DR] et M. [P] pensent en rapporter la preuve par des réferences dans un acte notarié du 26 janvier 1990 qui renvoie à une rectification en limite de propriété en date du 6 octobre 1943, toutefois la cour n'en trouve pas trace de cet acte dans les pièces produites et donc ne peut pas en examiner le contenu ; l'invocation potestative d'une servitude n'est pas suffisante pour en appréhender la réalité et la constater.
En conséquence la cour confirmera les moyens du premier juge et son constat : l'acte du 8 novembre 1932, ne crée pas de servitude réelle, et il n'est pas rapporté de servitude conventionnelle entre les fonds cadastrés section AO numéro [Cadastre 15] et numéros [Cadastre 6] et [Cadastre 7].
B- Sur l'état d`enclave et la création d`une servitude de passage
La S.C.I Sevidol et les consorts [DR]-[P] affirment que leurs fonds sont enclavés, et qu'une servitude de passage doit leur permettre d'y accéder afin d'entretenir la partie située à l`arrière des immeubles bâtis en front de route nationale 88, M. [R] [IG] n'y serait pas opposé.
Toutefois, à juste titre il sera remarqué que lors de l'acquisition de ces fonds par leurs auteurs, auprès de M. [IG], aucun d`eux n`était enclavé, la partie située en bordure de route étant alors constituée de prés. Les constructions édifiées en bord de route l'ont été plusieurs décennies plus tard, de la propre initiative de leurs propriétaires respectifs.
Dès lors, le principe selon lequel celui qui a lui-même obstrué l'issue donnant sur la voie publique ne peut se prévaloir d'un droit de passage pour cause d'enclave, doit trouver à s'appliquer pleinement.
En effet, il sera constaté que malgré la construction d'immeubles, il est possible d'accéder à ces parcelles par l'entrée située en bordure de route, ce que la SCI Sevidol et Mme [DR] et M. [P] connaissaient parfaitement et notamment le PV d'huissier réalisé le 6 juin 2012 permet de constater que le chemin est un accès pédestre eu égard à la taille des portillons et autres accès étroits et inusités, dès lors la prescription par usage trentenaire n'est pas rapportée.
La demande de création de cette servitude repose sur un souci de commodité c'est-à-dire entretenir un terrain à l'arrière de leur immeuble et pour cela y accéder en voiture ce qui n'entre pas les prévisions de l'article 682 du code civil qui dispose que « le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner. »
Enfin, en cas de création d'une servitude de passage, tel que les textes le prévoient, la solution est de choisir le trajet le plus court du fonds enclavé de la voie publique et donc de mettre en cause tous les propriétaires potentiellement concernés, ce qui n'est pas le cas comme le souligne le premier juge.
La demande de reconnaissance d'état d'enclave et de création de servitude de passage de la S.C.I Sevidol et de Mme [W] [DR] et M. [H] [P] sera rejétee, la désignation d'un géomètre étant inutile.
- Sur la revendication d'une partie de la parcelle numérotée [Cadastre 16] par la SCI SEVIDOL
M. [C] [I] et Mme [U] [XH] s'opposent à cette revendication de propriété.
La S.C.I Sevidol invoque l'acte de 1932, toutefois il est difficile de trouver dans la mention incriminée trace d'un transfert de propriété de la parcelle numérotée [Cadastre 16] qui jouxte simplement le chemin commun sur la parcelle [Cadastre 15] et la seule rectification en limite de propriété, datant de 1943, fait état d`un chemin de service à usage de leur auteur, et non d'un transfert de la propriété d`une partie de la parcelle numéro [Cadastre 16].
A défaut d'autres preuves, la SCI Sevidol sera déboutée à ce titre.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
La SCI Sevidol et Madame [W] [DR], Monsieur [H] [P], succombants en totalité seront condamnés à payer les sommes suivantes, au titre de l'article 700 du code de procédure civile :
- la somme de 1000 euros à Monsieur [R] [IG]
- la somme de 2000 euros chacun à Monsieur [C] [I] et Madame [U] [XH]
- la somme de 3000 euros à Madame [DA] [EY] [GZ] épouse [L], Madame [S], [Z] [N], [DA] [GZ] épouse [WA], Monsieur [T], [F] [FS] [GZ]
- la somme de 3000 euros à M. [O] [IG]
La SCI Sevidol et Madame [W] [DR], Monsieur [H] [P] seront condamnés aux entiers dépens avec pour partie application de l'article 699 du code de procédure civile au profit Maître Laure Brunel.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement du 20 décembre 2019 du tribunal de grande instance de Rodez en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne la SCI Sevidol et Madame [W] [DR], Monsieur [H] [P], à payer les sommes suivantes, au titre de l'article 700 du code de procédure civile :
- la somme de 1000 euros à M. [R] [IG]
- la somme de 2000 euros chacun à M. [C] [I] et Madame [U] [XH]
- la somme de 3000 euros à Madame [DA] [EY] [GZ] épouse [L], Madame [S], [Z] [N], [DA] [GZ] épouse [WA], Monsieur [T], [F] [FS] [GZ]
- la somme de 3000 euros à M. [O] [IG]
Condamne la SCI Sevidol et Madame [W] [DR], Monsieur [H] [P] aux entiers dépens avec pour partie application de l'article 699 du code de procédure civile au profit Maître Laure Brunel.
le greffier le président