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10/06/2024 | FRANCE | N°22/02511

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 10 juin 2024, 22/02511


ARRÊT n°2024-



































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 10 JUIN 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/02511 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PNFY





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 25 AVRIL 2022

TRIBUNA

L JUDICIAIRE DE BEZIERS

N° RG 20/01029





APPELANTE :



S.A.S. EDWIGE

inscrite au RCS de BEZIERS sous le numéro 810 522 821

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège sis

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représentée par Me Arnaud LAURENT de la S...

ARRÊT n°2024-

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 10 JUIN 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/02511 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PNFY

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 25 AVRIL 2022

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEZIERS

N° RG 20/01029

APPELANTE :

S.A.S. EDWIGE

inscrite au RCS de BEZIERS sous le numéro 810 522 821

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège sis

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Sophie MAUREL, substituant Me Arnaud LAURENT, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMEES :

AREAS DOMMAGES

société d'assurance mutuelle, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 775 670 466, en sa qualité d'assureur en responsabilité civile de la société SEA CONSTRUCTION, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 7]

[Localité 8]

Représentée par Me Christelle MARINI de la SELARL BCA - BERNIER D'ALIMONTE MARINI AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de BEZIERS, avocat postulant

assistée de Me Coline FRANDEMICHE, substituant Me Christelle MARINI, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

S.A.S. PRAXIS, immatriculée au RCS de MONTPELLIER sous le n°432 805 539, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès-qualités audit siège social

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Héloïse PINDADO, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Christophe QUILIO de la SELARL BEAUVERGER AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

S.A.S. SEA CONSTRUCTION prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par Me Sophie MIRALVES-BOUDET de la SELARL CHATEL BRUN MIRALVES CLAMENS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant,

assistée de Me Pierre CHATEL de la SELARL CHATEL BRUN MIRALVES CLAMENS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant,

Ordonnance de clôture du 15 Avril 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Avril 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Corinne STRUNK, Conseillère, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Estelle DOUBEY

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre, et par Mme Estelle DOUBEY, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

La SAS Edwige est propriétaire d'un fonds de commerce de vêtements de prêt-à-porter haut de gamme et exploite un local commercial situé [Adresse 6] à [Localité 9] (34) faisant partie d'un immeuble composé de trois étages, également occupé par la SAS Praxis.

Se plaignant de travaux dirigés au sein de cet immeuble par la SAS Praxis et confiés à la SAS SEA Construction, qui a assuré les opérations de démolition sur le chantier en cause au motif qu'ils auraient occasionné une dégradation des vêtements de luxe dont elle assure la vente, la SAS Edwige a effectué une déclaration de sinistre en septembre 2016 pour la dégradation de son stock de vêtements imputable à des entrées de poussières cumulées à des entrées d'eau.

Par acte du 8 septembre 2016, un procès-verbal établi par huissier de justice à l'initiative de la SAS Edwige a relevé des traces de poussières ayant imprégné la matière et la fourrure de plusieurs vêtements ainsi que sur le sol.

Un rapport d'expertise amiable a été rendu le 13 janvier 2017 par la société Polyexpert.

Par acte du 29 août 2019, la SAS Edwige a mis en demeure la SAS Praxis de payer la somme de 13.412,60 euros correspondant à la déclaration de sinistre de septembre 2016 évaluant l'ensemble abîmé et invendable du stock dont elle a dû se séparer.

Par actes du 15 juin 2020, la SAS Edwige a fait assigner la SAS Praxis et la SAS SEA Construction devant le tribunal aux fins de voir réparer son préjudice sur le fondement d'un trouble anormal de voisinage. La société Areas dommages est intervenue volontairement à l'instance en qualité d'assureur de la SAS SEA Construction.

Par jugement rendu le 25 avril 2022, le tribunal judiciaire de Béziers :

Déboute les parties de leurs demandes ;

Les demandes en garantie deviennent sans objet ;

Condamne la SAS Edwige aux dépens.

Si le premier juge dit que la gêne occasionnée par les travaux dans la rue s'analyse en un trouble normal du voisinage et rejette en conséquence l'incidence invoquée par la société Edwige quant à la baisse de fréquentation de la rue et donc de son magasin ainsi que l'existence d'une perte d'exploitation, il retient néanmoins l'anormalité des troubles de voisinage occasionnés par le maitre d'ouvrage et le locateur d'ouvrage, la SAS SEA Construction, dans l'exécution de travaux à l'intérieur de l'immeuble en septembre 2016 ayant occasionné des débris et de la poussière ainsi que des infiltrations d'eau dans le local commercial loué par la SAS Edwige.

Il rejette toutefois les prétentions de la SAS Edwige qui ne justifie pas de l'existence d'un préjudice.

Il note en effet l'absence de précision des vêtements dégradés ainsi que l'impossibilité de faire un rapprochement avec factures d'achat non détaillées ne permettant pas d'individualiser les biens. Il déplore également l'absence d'élément justifiant de leur degré de dégradation de sorte qu'il n'exclut pas en effet l'existence éventuelle d'un traitement pouvant remédier aux détériorations et encore moins la vente en l'état ou la perte comptable du stock.

La SAS Edwige, prise en la personne de son représentant légal en exercice, a relevé appel de la décision par déclaration au greffe du 10 mai 2022.

Dans ses dernières conclusions du 3 janvier 2023, la SAS Edwige demande à la cour de :

Déclarer la SAS Edwige recevable et bien fondée en son appel ;

Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Béziers le 25 avril 2022 (GR n°20/01029) en ce qu'il a retenu l'existence d'un trouble anormal de voisinage subi par la SAS Edwige ;

Réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Béziers en ce qu'il a :

Débouté la SAS Edwige de ses demandes tendant au paiement de sommes au titre du préjudice matériel subi par les dégradations des vêtements, en réparation de la perte d'exploitation subie par les dégradations de vêtements entrainant une perte d'exploitation et par la gêne causée par les travaux réalisés et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,

Condamné la SAS Edwige aux dépens ;

Dire et juger que la société Praxis et la société SEA Construction ont engagé leur responsabilité à l'encontre de la SAS Edwige pour les travaux accomplis notamment dans la période comprise entre le mois de mai et le mois de septembre 2016 ;

Fixer les préjudices subis par la société Edwige tendant à la perte des vêtements à hauteur de 13.412,60 euros et à la somme de 28.707,92 euros au titre de la perte économique d'exploitation imputables aux travaux réalisés par la société Praxis et la société SEA Construction et en lien de causalité direct ;

Condamner solidairement la société Praxis et la société SEA Construction à indemniser la requérante de l'intégralité de ses préjudices, à savoir :

La somme de 13.412,60 euros au titre du préjudice matériel subi par les dégradations des vêtements,

La somme de 28.707,92 euros en réparation de la perte d'exploitation subie par les dégradations des vêtements entrainant une perte d'exploitation et par la gêne causée par les travaux réalisés ;

Débouter la société Praxis et la société SEA Construction de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires ;

Condamner solidairement les parties succombantes à payer à la société Edwige la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

La SAS Edwige soutient que les sociétés Praxis et SEA Construction, en tant que maître d'ouvrage et sous-traitant, sont responsables des préjudices subis au titre des troubles anormaux du voisinage, qu'elle a subi tout en précisant qu'il est de jurisprudence constante que le demandeur n'a pas à prouver de faute. Elle produit un rapport d'expertise privée du 13 janvier 2017 et un constat d'huissier du 8 septembre 2016 qui relèvent notamment l'insuffisance de protection des lieux avoisinants les travaux, une entrave à la desserte du local commercial et les projections de poussières ayant imprégné la matière et la fourrure.

La SAS Edwige soutient qu'il ne lui appartient pas, en tant que voisine des travaux, d'avoir à se prémunir de tout trouble éventuel de sorte que, selon elle, elle ne saurait être tenue pour responsable des préjudices subis. Elle ajoute ne pas avoir pris part aux travaux voisins et ignorer les suites en découlant, notamment les infiltrations, poussières et gravats qui ont endommagé le stock et empêché l'accueil des clients. Elle souligne que les nuisances causées par les travaux ont été accrues postérieurement à son installation dans les locaux.

La SAS Edwige sollicite la condamnation des sociétés Praxis et SEA Construction au paiement de la somme de 13.412,60 euros au titre des dégradations subies. En ce sens, elle produit un rapport d'expertise privée du 13 janvier 2017 et un constat d'huissier du 8 septembre 2016 qui, selon elle, relèvent les différents désordres et dégradations, dont elle a été victime , en lien avec les travaux effectués. Elle fournit la liste des biens impactés ainsi que plusieurs factures et précise qu'il est impossible de nettoyer les vêtements détériorés au pressing en ce que même un nettoyage à sec est déconseillé concernant les fourrures. Peu de spécialistes seraient en capacité d'effectuer un tel nettoyage ce qui a contraint la SAS Edwige à se séparer de ses stocks.

La SAS Edwige soutient encore avoir subi un préjudice économique de perte d'exploitation consécutif aux travaux réalisés par les sociétés Praxis et SEA Construction qu'elle chiffre à la somme de 28.707,92 euros. Elle affirme avoir subi une gêne importante concernant l'accueil de sa clientèle due aux travaux qui ont compliqué l'accès au local commercial, les clients faisant demi-tour en raison de la poussière dégagée et avoir réalisé un chiffre d'affaires plus faible sur l'exercice 2017-2018 en raison de la perte de son stock endommagé par les travaux.

Dans ses dernières conclusions du 15 novembre 2023, la SAS Praxis, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demande à la cour de :

A titre principal,

Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Béziers le 25 avril 2022 sous le RG 20/01029 en toutes ses dispositions en ce qu'il a :

Débouté les parties de leurs demandes,

Condamné la SAS Edwige aux dépens ;

Débouter la SAS Edwige de l'ensemble de ses fins, demandes et prétentions ;

Condamner la SAS Edwige au paiement de la somme de 4.000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la SAS Edwige au paiement des entiers dépens ;

A titre subsidiaire,

Ramener les demandes indemnitaires de la SAS Edwige au titre des pièces endommagées à de plus justes proportions ;

Condamner les sociétés SEA Construction et Areas à relever et garantir la société Praxis de toute condamnation au titre des demandes indemnitaires de la SAS Edwige ;

Condamner les sociétés SEA Construction et Areas à verser la somme de 4.000 euros à la société Praxis au visa de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner les sociétés SEA Construction et Areas aux entiers dépens.

La SAS Praxis soutient qu'elle n'est pas responsable d'un trouble anormal du voisinage dès lors que l'appelante ne démontre pas l'anormalité du trouble causé par les travaux qui génèrent naturellement des désordres.

Elle fait valoir que le préjudice irréparable n'est pas démontré alors que les biens prétendument endommagés pouvaient être nettoyés par certains professionnels et qu'il n'est pas justifié de leur destruction. Elle ajoute que ni le rapport d'expertise, ni le constat d'huissier n'énumèrent les pièces détériorées de sorte qu'il serait impossible de chiffrer le préjudice allégué. La SAS Praxis souligne que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire quand bien même la partie adverse y aurait été régulièrement conviée (Civ. 3e, 14 mai 2020, n° 19-16.278).

Subsidiairement, elle conteste la demande de remboursement de la valeur neuve des biens en ce qu'elle affirme que les pièces provenaient d'une ancienne collection, n'avaient jamais été entretenues et devaient donc bénéficier d'une décote du prix de 30%.

La SAS Praxis soutient encore que la SAS Edwige a été à l'origine des désordres invoqués du fait de sa propre négligence en n'informant pas la société SEA Construction de la présence du système d'évacuation et en entreposant ses stocks sans aucune protection dans un local humide, non protégés par des housses et proches dudit système d'évacuation.

L'intimée conteste le préjudice économique allégué par la SAS Edwige en ce que les attestations, non conformes à l'article 202 du code de procédure civile, sont de simples allégations non étayées par des éléments probants. Elle précise que la mise en demeure de Me [B] [X] ne démontre en rien que les travaux auraient généré une perte de chiffre d'affaires de la société Edwige. En outre, elle n'ajoute qu'aucun autre commerçant ne rapporte de baisse significative de leur chiffre d'affaires alors que la SAS Edwige ne produit pas ses bilans postérieurs pour attester du préjudice allégué. La SAS Praxis souligne que l'activité de l'appelante n'a jamais été plus prospère que durant l'année des travaux et que le prêt contracté ne l'a été que 18 mois plus tard.

A titre subsidiaire, la SAS Praxis soutient que la société SEA Construction doit être condamnée à la relever et la garantir de toute condamnation à son encontre dès lors que c'est bien la SEA Construction qui est matériellement à l'origine des travaux et est considérée par la jurisprudence comme un voisin occasionnel. Elle affirme que cette dernière était bien, au moment de la réalisation des travaux, assurée en responsabilité civile par la société Areas pour les travaux de maçonnerie, les prestations de démolition étant minimes et consistant en un accessoire des prestations de maçonnerie du contrat.

Dans ses dernières conclusions du 11 avril 2024, la société Areas, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demande à la cour de :

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

Débouté les parties de leurs demandes,

Les demandes en garantie deviennent sans objet,

Condamné la SAS Edwige aux dépens ;

Débouter la SAS Edwige de ses demandes comme étant infondées tenant la réparation de son préjudice matériel et économique, l'absence de preuve d'un trouble anormal de voisinage qui aurait eu pour conséquence une baisse de fréquentation du magasin de la SAS Edwige occasionnant un préjudice de perte d'exploitation évalué à la somme de 28.707,92 euros ;

Débouter la SAS Edwige de ses demandes compte tenu du contrat n°12095956D 01 intitulé « multirisque des entreprises de la construction pour les activités couverture, maçonnerie et béton armé, charpente en bois et VRD » souscrit le 3 janvier 2013 par la SAS SEA Construction auprès de la compagnie Areas Dommages et à effet au 7 janvier 2013 ne garantissant pas les activités de « démolition » ;

Débouter la SAS Edwige de ses demandes compte tenu du contrat n°12095956D 01 souscrit le 3 janvier 2013 par la SAS SEA Construction auprès de la compagnie Areas Dommages comprenant la garantie au titre de « l'activité occasionnelle de démolition limitée à 5% du CA » prenant effet qu'à compter du 1er janvier 2016 ;

Débouter la SAS Edwige de ses demandes tenant la preuve que les travaux de démolition réalisés par la SAS SEA Construction sont antérieurs au bail conclu par la société Edwige le 10 mars 2015 et antérieurs au 1er janvier 2016, excluant la garantie par la compagnie Areas Dommages ;

Débouter la SAS Praxis de l'intégralité de ses demandes subsidiaires formulées à l'encontre de la compagnie Areas Dommages, notamment eu égard aux conditions particulières du contrat n°12095956D 01 intitulé « multirisque des entreprises de la construction pour les activités couverture, maçonnerie et béton armé, charpente en bois et VRD » souscrit le 3 janvier 2013 par la SAS SEA Construction auprès de la compagnie Areas Dommages et à effet au 7 janvier 2013 ne garantissant pas les activités de « démolition » ;

Débouter la SAS SEA Construction de sa demande formulée à titre infiniment subsidiaire, à l'encontre de la compagnie Areas Dommages au titre d'un relevé et garantie de toutes condamnations qui seraient prononcées à l'égard de la SAS SEA Construction et ce notamment eu égard aux conditions particulières du contrat n°12095956D 01 intitulé « multirisque des entreprises de la construction pour les activités couverture, maçonnerie et béton armé, charpente en bois et VRD » souscrit le 3 janvier 2013 par la SAS SEA Construction auprès de la compagnie Areas Dommages et à effet au 7 janvier 2013 ne garantissait pas les activités de « démolition » ;

En tout état de cause

Condamner la SAS Edwige à payer à la compagnie Areas Dommages la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et en cause d'appel.

La société Areas Dommages soutient que la SAS Edwige n'apporte pas la preuve des préjudices allégués ni du trouble anormal du voisinage, justifiant le rejet de sa demande indemnitaire.

La société Areas soutient qu'elle ne peut garantir le sinistre invoqué. Elle affirme que les travaux de « démolition » mentionnés dans les devis et factures ne sont pas couverts par l'assureur dont le contrat à effet au 7 janvier 2013 bénéficie aux seules activités de « couverture, maçonnerie et béton armé, charpente en bois et VRD ». Selon elle, le second contrat, conclu pour garantir l'activité de démolition et à effet au 1er janvier 2016, ne prend pas en compte les désordres résultant des travaux antérieurs. Elle ajoute que 7 appartements ont fait l'objet de démolition ce qui ne peut, selon Areas, être qualifié de travaux mineurs et accessoires de l'activité de maçonnerie.

La société Areas soutient que les travaux incriminés ont été effectués par la SEA Construction antérieurement à la conclusion du bail commercial de la SAS Edwige le 10 mars 2015 et à l'ouverture du magasin le 27 mai 2015, de sorte que le trouble anormal du voisinage n'est caractérisé en l'absence de preuve de la date de début des travaux.

Elle fait valoir enfin que la SAS Edwige ne rapporte pas la preuve du préjudice matériel allégué dès lors que, selon elle, les photographies de piètre qualité ne permettent pas d'identifier les détériorations des biens ni leur origine et qu'elle n'explique pas précisément quels vêtements ont été dégradés. Selon elle, l'appelante a été négligente dans la conservation de son stock et a participé à son propre préjudice. La société Areas ajoute que la SAS Edwige n'établit pas de lien de causalité entre le trouble invoqué et sa baisse alléguée du chiffre d'affaires.

Dans ses dernières conclusions du 11 avril 2024, la société SEA Construction, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demande à la cour de :

A titre principal, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SAS Edwige de l'ensemble de ses demandes;

A titre subsidiaire,

Juger que la démonstration d'un trouble de voisinage n'est pas faite ;

Débouter la SAS Edwige de ses demandes ;

Juger que la preuve du rôle de la SAS SEA Construction dans les troubles du voisinage n'est pas rapportée ;

Débouter la SAS Edwige de la demande tendant à voir engager la responsabilité de la SAS SEA Construction pour les travaux accomplis notamment dans la période comprise entre le mois de mai et le mois de septembre 2016 ;

Débouter la SAS Edwige de l'ensemble de ses demandes à son encontre à défaut de démontrer son implication dans le préjudice subi ;

Débouter la SA Praixs de demande à être relevée et garantie ;

A titre infiniment subsidiaire, si sa responsabilité est retenue :

Juger que la compagnie AREAS doit la relever et la garantir de toute condamnation ;

Condamner la SAS Edwige à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et en cause d'appel.

Au soutien de ses écritures, la SAS SEA Construction soutient que la preuve de l'existence d'un trouble anormal du voisinage, qui lui serait imputable, n'est pas rapportée par l'appelante. Elle fait valoir que les travaux de démolition réalisés par ses soins le 16 février 2015 ne peuvent être à l'origine des troubles dénoncés survenus à l'été 2016. Elle ajoute dans le même sens qu'elle a réalisé les travaux de démolition avant que la société Edwige ne commence son activité en mai 2015.

L'intimée ajoute que plusieurs entreprises sont intervenues sur le chantier sans qu'elles ne soient mises en cause alors que rien n'exclut leur responsabilité dans la survenance du dommage, s'il est avéré. Sur ce point, elle soutient que l'opération de nettoyage, qui serait à l'origine du dommage, n'a pas été exécutée par ses soins.

Enfin, il n'est pas plus démontré, selon elle, l'existence d'un trouble anormal lié à l'exécution du chantier lié au bruit, à l'entrée d'eau ou à la poussière.

A titre subsidiaire, la SAS SEA Construction soutient que la preuve des préjudices allégués n'est pas démontrée tout en soulignant que le stockage des vêtements de grande valeur a été fait par la société Edwige dans un local sans précaution de la poussière et des entrées d'eau ce qui est de nature à exclure son droit à réparation.

Elle fait valoir enfin qu'il n'est pas possible de connaître avec détail les vêtements endommagés et vérifier s'ils correspondent aux factures produites. Pour finir, l'intimée prétend que la perte d'exploitation n'est nullement établie en présence d'un chiffre d'affaires en constante augmentation.

A titre infiniment subsidiaire, elle demande à être relevée et garantie par son assureur Areas au titre du contrat d'assurance couvrant l'opération de démolition réalisée.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 15 avril 2024.

MOTIFS

1/ Sur le trouble anormal de voisinage :

Selon l'article 544 du code civil, la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou les règlements. Ce droit se trouve limité par l'obligation du propriétaire de ne causer à la propriété d'autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage.

La SAS Edwige revendique en appel l'existence d'un trouble anormal de voisinage qui découle d'une part des conséquences imputables aux travaux de démolition exécutés par la SAS SEA Construction à la demande de la SAS Praxis, maître d'ouvrage, et d'autre part des perturbations résultant de la réalisation du chantier entraînant une baisse de fréquentation du magasin.

Il est de principe que nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage.

Il est constant que ce régime de responsabilité est autonome par rapport au droit commun de la responsabilité. Il s'agit d'une responsabilité objective qui est subordonnée uniquement, la preuve d'une faute n'étant nullement requise, à l'existence d'un trouble anormal qui doit être apprécié in concreto, en fonction des circonstances de temps et de lieu. Le respect des normes, notamment en matière d'urbanisme, n'est pas exclusif de l'existence d'un trouble anormal de voisinage, et inversement, la méconnaissance de ces normes n'implique pas nécessairement un tel trouble.

Dans le cas présent, il est constant que la SAS Praxis, prise en sa qualité de maître d'ouvrage, a confié à la SAS SEA Construction, assurée auprès d'Areas, la réalisation de travaux de rénovation dans son immeuble, comprenant le local commercial occupé par la SAS Edwige, situé [Adresse 6] à [Localité 9].

Ces travaux consistent en des démolitions intérieures sur sept appartements et un commerce situé au rez-de-chaussée de l'immeuble afin de remodeler l'espace, confiées à la société SEA Construction, également chargée du gros 'uvre.

La société Edwige, qui se plaint de nuisances en lien avec l'exécution de ces travaux, a procédé à une déclaration d'assurance aux termes de laquelle elle dénonce l'absence de protection du chantier, notamment dans le patio et à l'intérieur de l'immeuble, outre un défaut d'obstruction des bouches d'aération qui ont rendu possible la diffusion de poussière et gravats dans la réserve servant de lieu de stockage de vêtements, dont elle assure la vente, et dont l'état a été aggravé par l'utilisation d'un nettoyeur à haute pression dans les escaliers intérieurs entraînant des infiltrations. Elle dénonce également l'impact anormal du chantier dans la rue qui a entraîné en raison des nuisances occasionnées une baisse de fréquentation.

Cela étant, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté l'existence d'un trouble anormal s'agissant de la gêne créée dans la rue par la réalisation de ces travaux pour les commerçants, dont fait partie la SAS Edwige, l'appelante ne caractérisant pas en quoi les troubles occasionnés par la réalisation de ces prestations revêtent un caractère anormal et ne démontrant nullement qu'ils auraient entravé l'exploitation de son commerce ou dissuader sa cliente de fréquenter son commerce comme elle le soutient.

Toutefois, la notion de trouble anormal de voisinage ne saurait être totalement écartée au regard des désordres imputables à la réalisation des travaux de démolition à l'intérieur de l'immeuble.

En effet, la société Edwige produit un procès-verbal de constat établi le 8 septembre 2016 par Me [B], commissaire de justice, qui relève :

« Dans l'immeuble [Adresse 4] à [Localité 9], des travaux sont en cours.

Un échafaudage et des matériaux sont positionnés sur le passage desservant la réserve du local commercial. Des petits gravats et poussières sont visibles sur ledit passage. Le local commercial dispose d'une cave.

Sur la protection du néon éclairant l'escalier qui donne accès à la cave, j'ai noté des traces de poussière. Dans la cave, sur plusieurs portants sont disposés divers vêtements de grande valeur' parkas col renard, visons, visons rasés, manteaux tissus, doudounes.

Sur plusieurs vêtements, j'ai constaté la présence de poussières ou autres qui ont imprégné la matière et la fourrure. De la poussière est également visible sur le sol. Sur trois sacs, j'ai noté des traces sur les coutures et accessoires' ».

Ce procès-verbal est complété de plusieurs photographies qui permettent de visualiser la présence de poussière et de petits gravats sur les vêtements comme décrit par le commissaire de justice. Il est à noter que les vêtements entreposés sont pour partie sous des protections plastiques. Par ailleurs, ces photographiques révèlent la présence d'un chantier encore en cours ainsi que l'absence de protection particulière.

L'appelante verse également aux débats un rapport d'expertise amiable contradictoire établi le 13 janvier 2017 par Polyexpert qui confirme l'exécution de travaux de rénovation dans l'immeuble occupé par la société Edwige à compter du mois de juin 2015.

L'expert relève :

«  les entreprises, intervenant pour le compte de la SAS Praxis, n'ont pas suffisamment protégé les lieux et les commerces avoisinants :des projections de poussières, de cailloux et des débris de verre ont été constatées par la société Edwige.

L'escalier a été nettoyé à l'aide d'un jet d'eau haute pression en août 2016. L'eau s'est infiltrée dans la remise du local commercial louée par la SAS Edwige occasionnant des dommages aux vêtements haut de gamme qui ne peuvent plus être vendus ».

L'expert a ainsi vérifié la présence d'ouvertures donnant dans la réserve du magasin ainsi que d'une grille, les trois bouches n'ayant fait l'objet d'aucune protection particulière lors du chantier.

Le rapport d'expertise constate enfin que les vêtements ont été impactés par l'eau mélangée à des résidus de poussière et présentent une odeur nauséabonde.

Ces désordres et leur origine ne sont pas contestés par M. [F], représentant de la société Praxis présent lors des opérations d'expertise réalisées par Polyexpert, lequel confirme la présence de poussières liées aux travaux outre l'absence de protection de la grille.

Cette situation est également confirmée par l'expertise établie le 13 février 2017 par GM Consultant à la demande de la société Praxis relevant que la présence de poussière qui s'est infiltrée dans la réserve du magasin litigieux.

Cela étant, il sera précisé à titre liminaire que la cour fonde son analyse sur les pièces communiquées notamment par la SAS Edwige comprenant le rapport d'expertise amiable dont la valeur probante est acquise pour avoir été établi au contradictoire des parties et soumis à leur libre discussion dans le cadre de l'instance.

Par ailleurs, il n'y a pas lieu d'établir la preuve d'une faute imputable à la société Praxis s'agissant d'une responsabilité de plein droit découlant du seul constat de l'existence de troubles anormaux du voisinage.

En l'état, au vu des constatations faites par le commissaire de justice confirmées par Polyexpert, il est incontestable que les travaux réalisés par la société SEA Construction en août 2016 ont créé un trouble anormal de voisinage.

En effet, s'il s'entend que des travaux de rénovation réalisés au sein d'un immeuble entraînent nécessairement des désagréments, rien ne justifie pour autant qu'ils occasionnent des dégâts affectant des biens situés dans des parties privatives provoqués par la diffusion de poussière et de petits gravas outre des infiltrations d'eau.

Ces désagréments vont au-delà de la simple gêne et ont été rendus possible par un défaut de protection du chantier dans le patio et la partie intérieure de l'immeuble.

C'est donc à bon que les premiers ont retenu l'existence d'un trouble anormal du voisinage.

2/ Sur la responsabilité

Le constat de l'existence de troubles anormaux du voisinage entraîne la responsabilité de plein droit de la société Praxis.

La société Praxis demande à être exonérée de cette responsabilité en invoquant la faute de la victime, qu'elle accuse d'un manque de soins apportés dans le stockage de vêtements de grande valeur dans la réserve litigieuse qui est en outre inadaptée s'agissant d'une cave par nature humide.

En l'état, le dommage résulte non pas d'un défaut de protection des vêtements, puisque les photographies jointes au procès-verbal de constat d'huissier démontrent l'existence de housses en plastique léger recouvrant une partie des vêtements, mais bien d'un manque de précaution dans la réalisation du chantier et ce d'autant que la société Edwige n'a pas eu à souffrir de tels dommages avant le mois d'août 2016.

La faute de la victime n'est nullement justifiée par la société Praxis de sorte que ce moyen sera rejeté.

Il s'ensuit qu'au regard de ces nuisances, l'appelante est fondée à réclamer la réparation de ce trouble anormal de voisinage sans que lui soit opposée une quelconque faute.

3/ Sur la réparation du préjudice

La société Edwige, qui justifie de l'existence d'un trouble anormal du voisinage, est fondée à en solliciter la réparation. Elle réclame à ce propos la prise en charge du préjudice matériel subi lié à la dégradation de vêtements de luxe d'une valeur totale de 13.412,60 euros ainsi que la réparation de la perte d'exploitation, imputable à la destruction du stock et de la gêne occasionnée par les travaux, qu'elle évalue à la somme de 28.707,92 euros.

En l'état, il résulte du procès-verbal de constat du 8 septembre 2016 et des deux rapports d'expertise amiable que des vêtements et accessoires stockés dans la réserve ont subi des dommages résultant de la diffusion de poussière et de traces d'eau.

Ainsi, le commissaire de justice a relevé que « dans la cave, sur plusieurs portants sont disposés divers vêtements de grande valeur' parkas col renard, visons, visons rasés, manteaux tissus, doudounes.

Sur plusieurs vêtements, j'ai constaté la présence de poussières ou autres qui ont imprégné la matière et la fourrure. De la poussière est également visible sur le sol. Sur trois sacs, j'ai noté des traces sur les coutures et accessoires' ».

L'expertise établie le 13 février 2017 par GM Consultant à la demande de la société Praxis que les vêtements concernés par le sinistre sont les suivants :

Une veste vison, onze parkas, trois manteaux-impers, trois capes, une veste, deux ponchos, trois capes longues, un manteau ¿ , des vestes et des sacs.

Polyexpert évalue les dégradations subies par la société Edwige à la somme de 13.412,60 euros HT en se basant sur le prix d'achat, les factures relatives aux pièces jointes, ainsi que la liste des produits impactés et achetés auprès des sociétés San Rone et Axel qui est équivalente à celle dressée par CM Consultant.

Il est donc possible de déterminer les vêtements et accessoires dégradés en lien avec les travaux réalisés par la société SEA Construction, mais également chiffrer leur valeur au regard des factures produites par l'appelante contrairement à ce que retient le premier juge. Le préjudice est donc déterminable.

Par ailleurs, s'agissant de vêtements coûteux (890 euros pour la veste en vison, 1590 euros pour le manteau Sardaigne') s'adressant à une clientèle en droit d'attendre une certaine qualité au regard des prix pratiqués, il est compréhensible que les détériorations relevées constituent un obstacle à leur commercialisation, étant donné que le prix réclamé suppose l'absence de défaut de la marchandise et la vente d'un produit neuf.

Il est donc légitime pour la société Edwige de réclamer la réparation intégrale du préjudice matériel subi qui est arrêté à la somme de 13.412,60 euros HT comme proposé par Polyexpert.

La société Praxis sera donc condamnée au paiement de cette somme au titre du préjudice matériel.

Pour le surplus, la société Edwige, qui revendique une perte d'exploitation, sera déboutée de cette demande, en l'absence de pièces établissant l'existence d'un tel préjudice et du lien de causalité entre le sinistre subi et l'éventuel dommage allégué.

4/ Sur l'appel en garantie :

Sur la mise en cause de la société SEA Construction :

La société Praxis demande à être relevée et garantie par la société SEA Construction et son assureur, la société Areas, de toute condamnation pouvant être mise à sa charge soulignant en effet qu'elle n'est pas matériellement à l'origine des dommages. Elle sollicite à cet égard l'application de la jurisprudence opposable aux entrepreneurs qui sont considérés comme des voisins occasionnels les exposant ainsi à l'indemnisation des victimes de troubles anormaux du voisinage.

En l'espèce, la société Praxis a conclu avec la société SEA Construction au début de l'année 2015 un contrat de marché portant sur la réhabilitation de l'immeuble, situé [Adresse 6] à [Localité 9].

Il est produit un devis daté du 22 janvier 2015 établi par cette entreprise chiffrant les travaux de démolition à la somme de 56.400 euros ttc englobant la prestation « protection et nettoyage ».

Il n'est pas contestable qu'en exécution de ce contrat, la société SEA Construction a procédé aux travaux de démolition et de nettoyage au sein de la résidence.

En l'état, si la facture correspondant aux travaux susvisés a été émise le 16 février 2015 et si un document dénommé « Lot 1 Situation » a été établi le 19 février 2015 par le maître d''uvre, l'atelier W architectures, certifiant « qu'il peut être payé à l'entreprise SEA la somme de 56.400 euros », pour autant il ne peut être déduit que les travaux litigieux étaient réalisés et terminés à la date d'émission de la facture et avant le début d'activité de la société Edwige, qui a ouvert sa boutique le 27 mai 2015.

La réalisation des travaux de rénovation par la société SEA Construction au sein de l'immeuble à la demande de la société Praxis n'est pas discutable au regard du procès-verbal de constat d'huissier, qui note en effet la présence d'échafaudages en septembre 2016 et qui comporte plusieurs photographies attestant de la réalisation d'un chantier encore en cours.

Il résulte par ailleurs des rapports d'expertise amiable produits à savoir Polyexpert et CMC Consultant que la prestation confiée à la société SEA Construction a débuté le 10 juin 2015, soit postérieurement à l'entrée dans les lieux par l'appelante, et aucune pièce n'atteste d'une fin de travaux avant le constat des dommages intervenus le 30 août 2016.

Il est donc acquis au regard des pièces susvisées que les troubles subis par la société Edwige sont en relation de cause directe avec la réalisation des missions confiées à la société SEA Construction.

Il est de jurisprudence constante que sont responsables de plein droit vis-à-vis des voisins victimes sur le fondement de la prohibition du trouble anormal de voisinage, le propriétaire de l'immeuble, auteur des nuisances, et les constructeurs à l'origine de celles-ci, ces derniers ayant la qualité de voisins occasionnels des propriétaires lésés (c.cass, 3ème. 22 juin 2005).

Sont réputés voisins tous intervenants à l'acte de construire dont l'entreprise chargée d'un lot de démolition.

Il s'ensuit que la société SEA Construction sera condamnée à relever et garantir la société Praixs de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre.

Sur la mise en cause d'Areas :

Il est justifié que la société SEA Construction s'est assurée auprès d'Areas dans le cadre d'un contrat « multirisque des entreprises de la construction » à compter du 3 janvier 2013. Ce contrat dès l'origine couvre notamment l'activité 113 « maçonnerie et béton armé' travaux accessoires ou complémentaires de démolition et VRD » (page 2 du contrat n°12095956D01) et permet l'indemnisation des dommages matériels consécutifs à la détérioration ou destruction d'une chose.

Il résulte des éléments versés aux débats que la société SEA Construction s'est vue confier par la société Praxis la réalisation des travaux de rénovation et de réhabilitation de sept appartements et un commerce situés dans l'immeuble litigieux, dont elle est propriétaire, impliquant dans un premier temps des démolitions intérieures afin de remodeler l'espace, puis des travaux de gros 'uvre.

Les désordres subis par la société Edwige étant la conséquence de travaux de démolition, qui sont l'accessoire de travaux de gros 'uvre pour être le préliminaire indispensable à la réhabilitation du bâti, sont garantis par le contrat d'assurance dès 2013 dans la limite de la garantie et tenant compte de la franchise de 900 euros.

La société Areas sera donc condamnée à relever et garantir son assurée à indemniser la société Edwige de son préjudice matériel dans la limite de sa garantie et tenant compte de la franchise.

5/ Sur les frais accessoires :

La décision déférée sera infirmée sur la charge des dépens et le montant des frais irrépétibles alloués en première instance.

Les intimés, qui succombent, seront condamnés aux entiers dépens ainsi qu'au règlement d'une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a retenu l'existence d'un trouble anormal de voisinage subi par la SAS Edwige , 

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit que la société Praxis a engagé sa responsabilité à l'encontre de la SAS Edwige pour les conséquences induites par le trouble anormalement subi,

Fixe le préjudice subi par la société Edwige consistant en la perte de vêtements à hauteur de 13.412,60 euros,

Condamne en conséquence la société Praxis à indemniser la société Edwige de la somme de 13.412,60 euros au titre du préjudice matériel subi par les dégradations des vêtements et accessoires,

Condamne la société SEA Construction à relever et garantir la société Praxis de toute condamnation au titre des demandes indemnitaires de la SAS Edwige,

Condamne la société Areas à relever et garantir son assurée à indemniser la société SEA Construction dans la limite de sa garantie et tenant compte de la franchise,

Déboute la société Praxis, la société SEA Construction et la société Areas de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires,

Condamne in solidum la société SEA Construction et la société Areas à payer à la société Edwige la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/02511
Date de la décision : 10/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-10;22.02511 ?
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