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29/05/2024 | FRANCE | N°21/03571

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 29 mai 2024, 21/03571


ARRÊT n°

































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 29 MAI 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/03571 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PAYX



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 MAI 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PAR

ITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 19/00435







APPELANT :



Monsieur [N] [K]

né le 12 mai 1976

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté sur l'audience par Me Charles SALIES, substitué par Me Eve BEYNET, avocats au barreau de MONTPELLIER



(bénéficie d'une aide...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 29 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/03571 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PAYX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 MAI 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 19/00435

APPELANT :

Monsieur [N] [K]

né le 12 mai 1976

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté sur l'audience par Me Charles SALIES, substitué par Me Eve BEYNET, avocats au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/009163 du 30/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

S.A.S. NATIONAL CALSAT

agissant poursuites et diligences de son représentant légal, son Président, dûment habilité et domicilié en cette qualité audit Etablissement

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Cécilia LASNE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assistée sur l'audience par Me Vincent REMAURY de la SCP D'AVOCATS REMAURY-FONTAN-REMAURY, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 20 Novembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique DUCHARNE, Conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Véronique DUCHARNE, Conseiller

Monsieur Jean-Jacques FRION, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après prorogation de la date du délibéré initialement prévue le 27 mars 2024 à celle du 29 mai 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

M. [N] [K] a été engagé en qualité de conducteur poids lourds, coefficient 138 M, groupe 6, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 17 novembre 2011, par la SAS National Calsat, qui développe une activité de transport de marchandises relevant de la convention collective nationale des transports routiers.

Le salarié a été convoqué le 6 février 2019, à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 14 février suivant, avec mise à pied à titre conservatoire, puis licencié par lettre datée du 19 février 2019, pour faute grave.

Contestant son licenciement, le salarié a saisi, le 12 avril 2019, le conseil de prud'hommes de Montpellier.

Par jugement du 5 mai 2021, le conseil de prud'hommes a statué comme suit :

Dit et juge que le licenciement de M. [K] est justifié par une faute grave,

Déboute M. [K] de ses demandes à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

Déboute M. [K] de l'intégralité de ses demandes,

Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Le 3 juin 2021, M. [K] a relevé appel de cette décision par voie électronique.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 20 juillet 2021, M. [N] [K] demande à la Cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :

Dire et juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamner la société à lui payer les sommes suivantes :

3 392,18 euros net à titre d'indemnité de licenciement

3 743,10 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 374,31 euros au titre des congés payés y afférents,

873,39 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied outre 87,33 euros au titre des congés payés y afférents,

15 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamner la société à payer à M. [K] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La condamner aux entiers dépens.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 15 octobre 2021, la SAS National Calsat demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, débouter M. [K] de l'intégralité de ses demandes et le condamner au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance rendue le 20 novembre 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 9 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS

I - Sur la cause du licenciement :

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée :

'Monsieur,

Nous faisons suite à notre convocation du 06 février 2019 à un entretien préalable à une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement qui s'est déroulé le jeudi 14 février 2019 auquel vous vous êtes présenté accompagné du délégué syndical Mr [V] [C].

Vous occupez un poste de conducteur PL au sein de notre entreprise à compter du 17 novembre 2011 et vous êtes en charge de réaliser des prestations de transport routier et de livraison de marchandise pour le compte de l'entreprise au moyen d'un véhicule de plus de 3.5T dans le respect des règles de sécurité, des règlements, du manuel conducteur GCA, dans un souci de satisfaction client.

Nous avons été informés le vendredi 01 février 2019 de la part de votre responsable hiérarchique d'un manquement à vos obligations professionnelles.

Suite à un retard en clientèle, nous avons été avertis par le client Baurès de votre arrivée à 13h57. Celui-ci avait laissé plusieurs messages depuis 13h30 au responsable d'exploitation. Vous n'étiez pas joignable et votre responsable vous a laissé un message pour justifier votre absence.

Le planning de votre journée était :

Déchargement d'une Taut liner à [Localité 4] (pour 8h00) pour le client IKEA (dépôt leader service).

A la suite, retour sur [Localité 3] pour raccrocher un plateau et un rendez-vous prévu pour un chargement à 13h30 chez Baurès à [Localité 2].

Le détail de votre journée a été :

Vous êtes arrivé à 06h14 (alors que l'exploitation vous avait demandé de partir pour 6h00) sur le site de [Localité 3] et vous êtes parti à 6h20 : soit 20 minutes de retard.

Vous avez conduit 26 minutes puis vous vous êtes arrêté 6 minutes (pause-café' mais votre compteur chronotachygraphe est resté en travail ').

Vous arrivé chez le client à [Localité 4] : vous êtes resté 65 minutes de travail, 17 minutes de repos et 5 minute de disponibilité.

Départ de [Localité 4] à 10h18 (vous n 'avez pas appelé votre exploitant pour signalé votre départ).

Votre exploitant vous a contacté dans la matinée pour prendre des nouvelles et pas de réponse de votre part.

Vous êtes arrivé à [Localité 3] à 12h09 et vous vous êtes mis en coupure 31 minutes.

Vous êtes parti à 12h45 et avait conduit 33 minutes.

Vous vous êtes mis en travail 12 minutes de 13h18 à 13h30 (et vous n 'étiezpas chez le client).

Vous êtes repartit à 13h30 et conduit 27 minutes pour arriver chez le client Baurès à 13h57. Soit 27 minutes de retard.

A votre retour, votre responsable d'exploitation après avoir récupéré vos données de votre carte chronotachygraphe vous a reçu pour avoir des explications. Vous lui avez confirmé avoir fait un détour de 15 km pour pratiquer votre religion. De plus pendant cette pratique vous vous êtes mis en position de travail et non de repos sur votre chronotachygraphe.

Vous avez clairement avoué l'avoir fait plusieurs fois. Nous avons pu le vérifier et le constater.

Dans le cadre de votre intégration au sein de l'entreprise, il vous a été clairement précisé les conditions d'uti1isation du matériel roulant de 1'entreprise, ainsi qu'une neutralité par le salarié d'une conviction religieuse qui affecterait une prestation de travail.

De même nous vous rappelons les conditions du règlement intérieur de l'entreprise

Article 8 - Comportement au travail et neutralité en entreprise

L'existence d'une collectivité de travail impose à chacun d'adopter un comportement poli, courtois et respectueux de son environnement de travail.

En vertu de l'article L. 1321-2-1 du code du travail, le règlement intérieur peut contenir des dispositions inscrivant le principe de neutralité et restreignant la manifestation des convictions des salariés si ces restrictions sont justifiées par l'exercice d'autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché.

En application du principe de neutralité et de l'interprétation qui en est faite par la CJUE, il est fait interdiction au salarié de porter un quelconque signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail ou dans le cadre de ses activités professionnelles, l'entreprise poursuivant en effet, notamment dans ses relations avec ses clients, une politique de neutralité politique, philosophique et religieuse.

En conséquence, la manifestation par chaque salarié de ses convictions, notamment, religieuses ou politiques ne peut en aucun cas, justifier, ou lui permettre de porter atteinte, de quelque manière que ce soit:

- au fonctionnement de l'entreprise ;

- à ses libertés et droits fondamentaux et à ceux des autres travailleurs ;

- aux conditions d'hygiène sur le lieu de travail ;

- à sa propre sécurité et à celle des autres travailleurs.

De plus, la manifestation par le salarié de ses convictions religieuses ou politiques ne peut en aucune façon avoir pour effet que le salarié n'exécute pas sa prestation de travail. L'exercice d'un culte au sein de l'entreprise,durant le temps de travail ou sur son lieu de travail, n'est pas autorisé.

Article 12 - Consignes particulières aux personnels roulants

Tout salarié dont les attributions comportent l'utilisation d'un véhicule de l'entreprise dans le cadre d'une prestation de transport de marchandises doit respecter, en plus des obligations rappelées à l'article 11 du présent règlement intérieur, les obligations particulières suivantes :

- respecter les programmes de travail établis par le service exploitation ou la direction ;

- se conformer strictement aux stipulations législatives et réglementaires concernant la circulation automobile, la coordination des transports et la réglementation sociale (en particulier, se livrer à la manipulation correcte du sélecteur chrono tachygraphe dont est équipé le véhicule) ;

- se conformer aux instructions du manuel conducteur de l'entreprise ;

Le conducteur doit prendre toutes les dispositions utiles en vue de la garde et de la préservation du véhicule et de sa cargaison. ll sera notamment responsable du bon verrouillage des serrures, cadenas et mise en fonction des dispositifs antivol.

De plus ces consignes sont également reprise dans le manuel conducteur qui vous a été remis et commenté lors de votre entrée dans l'entreprise.

Ces faits s'analysent en un détournement de biens appartenant à l'entreprise pour des usages personnelle, ce qui est totalement prohibé.

Vous n'êtes pas sans savoir que l'équilibre économique de nos activités est très fragile, et les conséquences financières de ces manquements sont préjudiciables à l'entreprise.

Une telle attitude, outre le fait qu'elle est révélatrice d'un manque évident de précaution du matériel et d'un comportement non respectueux, caractérise une volonté délibérée de ne pas se soumettre à la discipline collective de l'entreprise.

Votre comportement est inacceptable au regard de vos obligations professionnelles et de l'attitude que nous sommes en droit d'attendre de nos collaborateurs et de la confiance que nous vous portons à cet effet.

Cette attitude peut être à l'origine d'une perte d'exploitation et désorganiser gravement le service.

Lors de cet entretien, vous reconnaissez les faits reprochés et les explications que vous nous avez fournies ne nous permettent pas de modifier la gravité de votre comportement.

En conséquence, nous nous voyons dans l'obligation de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour faute grave. De même nous vous confirmons la mise à pied à titre conservatoire qui vous a été notifié le 06 février 2019.

Compte tenu de la gravité de votre conduite et de ses conséquences, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible.

Le licenciement prend donc effet immédiatement, dès présentation de cette lettre et votre solde de tout compte sera arrêté à cette date, sans indemnité de préavis ni de licenciement'.

Selon l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et la poursuite du contrat. Il incombe à l'employeur qui l'invoque d'en apporter la preuve.

L'employeur reproche au salarié les cinq griefs suivants :

- la falsification des heures par manipulation du chronotachygraphe : le salarié se place en position travail sans que cette période se rapporte à l'exécution de son contrat de travail,

- la réalisation de plus de 30 kilomètres avec son camion sans que cela soit pour les besoins de son contrat de travail,

- La violation des instructions de l'employeur et l'arrivée chez le client avec 30 minutes de retard,

- Le manquement au principe de neutralité,

- la falsification de la lettre de voiture.

L'employeur soutient que les griefs sont établis par les données issues du chronotachygraphe, la lettre de voiture et le courriel du chef d'exploitation rapportant les faits survenus le 01 février 2019. Il ajoute que la gravité de la faute s'évince de plusieurs rappels à l'ordre antérieurs, de son expérience en qualité de conducteur ainsi que des formations dont il a bénéficié.

Il verse aux débats :

- un courriel du 1er février 2019, adressé par M. [W], responsable d'exploitation, à sa hiérarchie, demandant à ce que M. [K] soit sanctionné en raison du non-respect de son itinéraire et d'un retard injustifié de 30 minutes chez un client, les faits datant du jour d'envoi du courriel.

- Le relevé chronotachygraphe pour la journée du 1er février 2019 qui mentionne notamment :

* Un temps de conduite de 33 minutes, de 12h45 à 13h18, sur 32 kilomètres,

* Un temps de 'travail' de 12 minutes, de 13h18 à 13h30, sans déplacement,

* Un temps de conduite de 27 minutes, 13h30 à 13h57, sur 26 kilomètres,

- Une lettre de voiture nationale du 1er février 2019, mentionnant une heure prévue de chargement à 13h30 sur le site Baurès à [Localité 2], portant la mention manuscrite d'une heure d'arrivée à 13h45,

- Deux attestations de :

* M. [C], conseiller du salarié lors de l'entretien, qui atteste que celui-ci a reconnu les faits suivants au cours de l'entretien : 'détournement d'itinéraire, kilomètres parasitaires, mauvaise manipulation du chronotachygraphe, retard chez le client' et aurait reconnu 'avoir fait cela plusieurs fois dans les mois précédents',

* M. [W], responsable d'exploitation, qui rapporte les faits survenus le 1er février 2019 (même s'il indique une date erronée) ainsi que l'entretien avec le salarié qui s'en est suivi, dans des termes identiques à ceux utilisés dans le courriel envoyé à sa hiérarchie.

Aucun manquement au principe de neutralité inscrit à l'article 8 du règlement intérieur n'est établi. La circonstance que le salarié se serait rendu à la mosquée de 13h18 à 13h30 est contestée en cause d'appel, résulte uniquement des déclarations de M. [W] et n'est corroborée par aucun élément objectif.

En tout état de cause, ce fait ne caractérise pas un manquement au principe de neutralité dès lors que le salarié était seul et n'a pas manifesté ses convictions religieuses à l'égard des tiers.

En revanche, les autres griefs sont démontrés :

- le salarié reconnaît avoir fait un détour d'itinéraire de 33 minutes de 12h45 à 13h18, sans lien avec sa destination, conduisant l'employeur à supporter des kilomètres supplémentaires, de sorte que l'utilisation du matériel à des fins personnelles et le non respect de son itinéraire sont établis.

- il ressort des données issues des relevés du chronotachygraphe que le salarié s'est positionné en 'travail' de 13h18 à 13h30 alors que son véhicule était immobilisé. Il soutient avoir pris une pause déjeuner pendant ce laps de temps, et reconnaît ainsi qu'il a sélectionné le mode 'travail' alors qu'il vaquait à ses occupations personnelles ; ce qui établit lLa manipulation frauduleuse du sélecteur chronotachygraphe.

- l'analyse du relevé chronotachygraphe démontre qu'il est arrivé sur le site Baurès à 13h57 alors que le rendez-vous était prévu à 13h30. Les allégations du salarié selon lesquelles il serait arrivé à 13h45, comme cela résulte de la mention manuscrite figurant sur la lettre de voiture, sont contredites par les données issues du chronotachygraphe, qui démontre un temps de conduite jusqu'à 13h57. Le retard, et la tentative de dissimulation par le salarié de son retard, lequel a indiqué une heure d'arrivée erronnée sur la lettre de voiture, sont ainsi établis.

Ces faits constituent des manquements fautifs aux obligations professionnelles du salarié, en violation des articles 9 et 12 du règlement intérieur.

Le moyen tiré du fait que le salarié aurait déjà été verbalement alerté par l'employeur le 7 décembre 2018 au motif qu'il aurait falsifié ses données de décompte horaire, aurait fait des kilomètres étrangers à sa tournée et aurait abandonné son véhicule pour se rendre sur un lieu de prière, n'est pas démontré, aucune sanction n'ayant d'ailleurs été prononcée à ce titre.

Dès lors, les faits fautifs ainsi avérés imputables au salarié, ne rendaient pas impossible son maintien dans l'entreprise et constituent une faute simple.

Le jugement sera infirmé et le licenciement pour faute grave de M. [N] [K] requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

II - Sur l'indemnisation :

La mise à pied conservatoire pour la période du 6 au 19 février 2019 étant dépourvue de cause, M. [K] est fondé à solliciter la condamnation de la société National Calsat à lui payer la somme de 873,39 euros brut à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire, ainsi que 87,33 euros au titre des congés payés afférents.

Au jour de la rupture, le salarié bénéficiait d'une ancienneté de 7 ans et deux mois. Son salaire de référence le plus favorable calculé sur les trois derniers mois s'établit à la somme de 1 871, 55 euros.

Son licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, le salarié a droit au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, qui conformément à l'article L. 1234-5 du code du travail doit correspondre à la rémunération brute qu'il aurait perçue si il avait travaillé pendant la période du délai-congé, augmentée des congés payés afférents.

La société sera condamnée à lui verser la somme de 3 743,10 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, ainsi que 374,31 euros brut au titre des congés payés afférents, correspondant à deux mois de préavis.

En ce qui concerne l'indemnité légale de licenciement, la somme réclamée par la salariée est conforme à ses droits en application des dispositions de l'article R. 1234-1 du code du travail dans sa rédaction applicable. La société sera condamnée à lui verser la somme de 3 392,18 euros de ce chef.

Le jugement sera en revanche confirmé en ce que le salarié a été débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, étant précisé qu'en cause d'appel, le salarié ne présente pas de demande au titre du licenciement vexatoire et brutal.

III - Sur les demandes accessoires.

L'employeur sera tenu aux dépens de première instance et d'appel.

Il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] [K] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour licenciement vexatoire et brutal ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant de nouveau des chefs ainsi infirmés,

Requalifie le licenciement et dit qu'il repose sur une cause réelle et sérieuse, mais pas sur une faute grave ;

Condamne la SAS National Calsat à verser à M. [N] [K] les sommes suivantes :

- 3 392,18 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 3 743,10 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, ainsi que 374,31 euros brut au titre des congés payés afférents,

- 873,39 euros brut à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire, ainsi que 87,33 euros brut au titre des congés payés afférents;

Y ajoutant,

 

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SA National Calsat aux dépens de première instance et d'appel ;

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/03571
Date de la décision : 29/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-29;21.03571 ?
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