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16/05/2024 | FRANCE | N°21/01860

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 16 mai 2024, 21/01860


ARRÊT n°



































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 16 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01860 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O5QZ





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 04 MARS 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMME

S - FORMATION DE DEPARTAGE DE NARBONNE

N° RG F 19/00009





APPELANTE :



Madame [E] [K]

née le 17 Janvier 1957 à [Localité 1]

de nationalité Française

Domicilié [Adresse 2]

[Localité 1]



Représentée par Me Sarah MASOTTA de la SELARL ALTEO, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 16 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01860 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O5QZ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 04 MARS 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE NARBONNE

N° RG F 19/00009

APPELANTE :

Madame [E] [K]

née le 17 Janvier 1957 à [Localité 1]

de nationalité Française

Domicilié [Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Sarah MASOTTA de la SELARL ALTEO, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me Céline ROUSSEAU, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

Association SIST - SERVICE INTERENTREPRISES DE SANTE AU TRAVAIL

Domiciliée [Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Marianne MALBEC de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE

Ordonnance de clôture du 12 Février 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, chargé du rapport et Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Naïma DIGINI

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après prorogation de la date du délibéré initialement fixée au 02 mai 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Naïma DIGINI, Greffier.

*

* *

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Engagée le 27 janvier 1986 par l'association Service Interprofessionnel de Santé au Travail (ci-après l'association ou le SIST) en qualité de médecin du travail, Mme [K] a été placée continûment en arrêt de travail à compter du 12 avril 2017.

Après enquête administrative, la caisse primaire d'assurance maladie a refusé, par décision du 10 juillet 2017, de reconnaître le caractère professionnel à l'accident déclaré par la salariée.

Mme [K] a été déclarée inapte à son poste le 15 janvier 2018, le médecin du travail concluant que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. Sur autorisation délivrée par l'inspecteur du travail, qui a notamment retenu que la demande présentée par l'employeur n'était pas liée à la fonction et au mandat de déléguée du personnel de Mme [K], le SIST a licencié cette dernière pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre recommandée avec avis de réception du 17 mai 2018.

Se plaignant d'un manquement à l'obligation de sécurité et contestant son licenciement, Mme [K] a saisi le 14 janvier 2019 le conseil de prud'hommes de Narbonne, lequel, par jugement de départage en date du 4 mars 2021, a statué comme suit :

Révoque partiellement l'ordonnance de clôture de la mise en état intervenue le 14 novembre 2019, uniquement afin d'admettre la pièce n° 36 de la partie demanderesse,

Admet la pièce n° 36 de la partie demanderesse,

Déclare irrecevables les nouvelles conclusions de la partie demanderesse déposées lors de l'audience de départage le 7 janvier 2021,

Dit le licenciement notifié le 17 mai 2018 dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne l'association SIST à payer à Mme [K] les sommes suivantes :

- 21 199,59 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 2 119,96 euros au titre des congés payés afférents ;

- 21 200 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 000 euros de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

Ordonne le remboursement par l'employeur à Pôle Emploi des éventuelles indemnités versées par cet organisme à la salariée, et ce dans la limite de quinze jours d'indemnités de chômage ;

[...]

Rejette les demandes autres ou plus amples des parties,

Condamne l'association SIST aux entiers dépens de l'instance et rejette la demande formulée par les parties au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [K] a interjeté appel de cette décision par déclarations en date des 22 mars 2021 (n° RG 21/01860) et 25 novembre 2021 (n° RG 21/06838).

Statuant en déféré de l'ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état le 15 mars 2022, ayant notamment déclaré irrecevable l'appel interjeté le 25 novembre 2021, la cour a, par arrêt infirmatif du 1er mars 2023 dit que la seconde déclaration d'appel du 25 novembre 2021 n'est pas tardive et s'incorpore régulièrement à la première déclaration d'appel du 22 mars 2021 aux fins d'indiquer les chefs du jugement critiqués.

Le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux instances.

Parallèlement, Mme [K] avait saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une action en contestation de la décision de la caisse primaire d'assurance maladie ayant refusé de reconnaître le caractère professionnel de l'accident déclaré le 12 avril 2017.

Aux termes d'un arrêt rendu le 15 février 2023, la 3ème chambre sociale de la présente cour a confirmé le jugement du 3 décembre 2019, par lequel le pôle social du tribunal de grande instance de Carcassonne a dit que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Aude devait prendre en charge l'accident du 12 avril 2017 dont a été victime Mme [E] [K] au titre de la législation professionnelle.

' suivant ses dernières conclusions en date du 24 mai 2023, Mme [K] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse les faits à l'origine de l'inaptitude étant seuls imputables à l'employeur, mais de l'infirmer, d'une part, sur les montants alloués au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour manquement à l'obligation de sécurité et, d'autre part, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau de condamner l'association SIST à lui payer les sommes suivantes :

- 23 000 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 2 300 euros bruts de congés payés afférents,

- 23 0341,66 (lire 23 341,66) euros nets à titre de reliquat d'indemnité spéciale de licenciement,

- 60 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité,

- 60 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 000 euros net sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

' aux termes de ses conclusions remises au greffe le 19 janvier 2024, l'association SIST demande à la cour de :

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse, en ce qu'il l'a condamnée à régler à Mme [K] 21 200 euros de dommages et intérêts, 1 000 euros pour manquement à l'obligation de sécurité, 21 199,59 euros « d'indemnité compensatrice de préavis », 2 119,96 euros de congés payés afférents et en ce qu'il a débouté le SIST de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejeter toutes les demandes de Mme [K],

Dire et juger irrecevable la demande de règlement d'un complément d'indemnité de licenciement,

Condamner Mme [K] à lui régler 30 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamner Mme [K] à lui verser la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et dire qu'elle supportera les entiers dépens de l'instance.

Par décision en date du 12 février 2024, le conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de l'instance et fixé l'affaire au 11 mars suivant.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux conclusions susvisées.

MOTIFS

Mme [K] qui ne critique le jugement entrepris que sur le montant des indemnités allouées, demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu son exposition à des risques psychosociaux, pour la prévention et le traitement desquels 'l'employeur ne justifie pas avoir agi', caractérisant ainsi la violation par l'employeur de son obligation de sécurité à son égard, et l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement prononcé. Elle sollicite en outre le bénéfice des dispositions de l'article L. 1226-14 du code du travail et le paiement des indemnités de préavis et spéciale de licenciement.

L'association SIST critique la décision entreprise pour ne pas respecter :

- l'article 768 du code de procédure civile en disant le licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors que la demande a été formulée pour la première fois par Mme [K] dans des conclusions que le conseil a déclaré irrecevables,

- les articles 5 et 768 du Code de procédure civile en allouant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse que Mme [K] ne réclamait pas, statuant ainsi ultra petita,

- le principe de la séparation des pouvoirs en disant le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- les dispositions de l'article L.1226-4 du code du travail en allouant une « indemnité compensatrice de préavis » alors que le licenciement a été notifié pour inaptitude consécutive à une maladie simple et que, quand bien même l'indemnité de l'article L.1226-14 du code du travail serait due, son montant ne pourrait excéder celui du préavis légal soit deux mois et non trois comme alloué,

- la jurisprudence constante de la Cour de Cassation en allouant une indemnité compensatrice de congés payés sur l'indemnité improprement dénommée « indemnité compensatrice de préavis ».

Il lui fait également reproche d'avoir alloué à la salariée une somme de 1 000 euros de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité alors qu'il a écarté le mail du 12 avril 2017, seul élément que Mme [K] présentait comme le fait générateur de la souffrance alléguée.

Il est de droit que dans le cas où une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé est motivée par son inaptitude, il appartient à l'administration du travail de vérifier que celle-ci est réelle et justifie son licenciement. Il ne lui appartient pas en revanche, dans l'exercice de ce contrôle, de rechercher la cause de cette inaptitude, y compris dans le cas où la faute invoquée résulte d'un harcèlement moral dont l'effet, selon les dispositions combinées des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 du code du travail, serait la nullité de la rupture du contrat de travail, ou d'un manquement à l'obligation de sécurité.

Ce faisant, l'autorisation de licenciement donnée par l'inspecteur du travail ne fait pas obstacle à ce que le salarié fasse valoir devant les juridictions judiciaires tous les droits résultant de l'origine de l'inaptitude lorsqu'il l'attribue à un manquement de l'employeur à ses obligations, à charge pour le juge judiciaire de rechercher si l'inaptitude repose sur un manquement préalable de l'employeur à ses obligations qu'il l'a provoquée.

Pour autant, en application notamment de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III, lorsqu'un licenciement a été notifié à la suite d'une autorisation administrative de licenciement accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, se prononcer sur le bien-fondé du licenciement. Dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu'il a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Pour allouer à Mme [K] une indemnité compensatrice de préavis et une indemnité 'pour licenciement sans cause réelle et sérieuse', correspondant contrairement à ce que soutient l'employeur aux dommages-intérêts sollicités par la salariée, dans ses dernières conclusions régulièrement remises au greffe du conseil de prud'hommes avant la clôture (pièce employeur n°48), 'en réparation du préjudice subi du fait de la perte injustifiée de son emploi', le conseil a retenu que l'employeur avait manqué à son obligation de sécurité, manquement ayant provoqué l'inaptitude.

Sur l'obligation de sécurité :

En cause d'appel, Mme [K] se prévaut du contexte professionnel délétère documenté par une expertise RPS, du préavis de grève déposé par les médecins en décembre 2015, du mail adressé le 24 novembre 2016 par Mme [X], médecin du travail, à la DIRRECTE, dénonçant la dégradation des conditions de travail, de l'avis d'inaptitude qui vise le fait que le maintien dans son emploi lui serait gravement préjudiciable, ainsi que les avis rendus par l'inspecteur du travail et le médecin inspecteur du travail dans le cadre de la procédure de licenciement, et d'une manière générale la carence de l'employeur qui, malgré ces alertes, n'a mis en oeuvre aucune action pour prévenir les risques et assurer sa sécurité et protéger sa santé. Elle estime avoir été exposée à une maltraitance de 'façon astucieuse', jusqu'à l'accident du travail du 12 avril 2017 qu'elle a subi à réception du message accusateur du directeur, lequel a constitué la 'goutte d'eau'. Elle précise avoir associé, comme certains de ses collègues qui en ont témoigné, la démarche du directeur à des événements survenus quelques années auparavant à l'occasion desquels une de ses collègues, Mme [N], avait été mise en cause pour des agissements de harcèlement moral.

L'association considère que les éléments retenus par le conseil pour retenir un manquement de sa part à son obligation de sécurité ne caractérisent nullement le grief qui lui est fait. Elle indique que la grève à laquelle Mme [K] a participé, un an et demi avant le 'choc émotionnel' dénoncé, ne visait qu'une seule revendication à savoir la revalorisation des salaires au motif d'une surcharge de travail que les médecins reliaient à une diminution d'effectif. Elle ajoute que la salariée n'explique pas en quoi la mesure d'accompagnement sur les risques psychosociaux mise en oeuvre en 2015 aurait pu impacter son état de santé, mesure dont elle indique qu'elle a été contestée par la majorité des salariés, pour être finalement interrompue par le 'groupe projet' ou 'comité de pilotage', composé de médecins, des délégués du personnel et d'un représentant par métier. L'association indique y avoir substitué une démarche de progrès en santé (DPS), certifiée par Afnor, à laquelle les salariés ont été associés par le biais d'un comité de bienveillance, puis du groupe QVT (qualité de vie au travail), dont les résultats ont été restitués le 12 octobre 2018. L'association estime qu'en toute hypothèse, aucun lien n'est caractérisé entre les conditions de travail et l'inaptitude de Mme [K].

Ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

En vertu de ces textes, l'employeur est tenu à l'égard de son salarié d'une obligation de sécurité. Il doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, actions d'information et de formation, mise en place d'une organisation et de moyens adaptés) en respectant les principes généraux de prévention suivants : éviter les risques, évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités, combattre les risques à la source, adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé, tenir compte de l'état d'évolution de la technique, remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux, planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle, donner les instructions appropriées aux travailleurs.

L'article R. 4121-1 prévoit que l'employeur transcrit et met à jour dans un document unique les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs à laquelle il procède en application de l'article L. 4121-3, et l'article R. 4121-2 précise que la mise à jour du document unique d'évaluation des risques est réalisée 1° au moins chaque année 2° lors de toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail 3° lorsqu'une information supplémentaire intéressant l'évaluation d'un risque dans une unité de travail est recueillie.

Dès lors que le salarié invoque précisément un manquement professionnel en lien avec le préjudice qu'il invoque, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve du respect de son obligation de sécurité à l'égard du salarié.

En l'espèce, le constat de difficultés relationnelles au sein de l'association est constant à telle enseigne que dans des conditions qui ne sont précisées par aucune des parties, l'association s'était attachée les services d'un cabinet extérieur, Accent Ergonomie, dont il est communiqué une note élaborée à l'occasion de la 'réunion de restitution du diagnostic' relatif à la prévention des risques psychosociaux du 3 juillet 2015. Il ressort de ce document que l'association était confrontée à des difficultés et des tensions affectant les relations dans le service, attribuées à :

- différents paramètres parmi lesquels figuraient notamment le mode de management du directeur, avec une 'perception d'une reconnaissance différenciée entre les salariés', le 'style de management du directeur : mode d'adresse à l'autre en particulier (entretien annuel, convocations) ou en présence de tiers (réunions), omniprésence dans les projets et la vie quotidienne du service', [...] et une perception 'd'une mise à l'écart et de dépossession des médecins tant d'un point de vue financier, que d'un point de vue symbolique (reconnaissance métier, isolement, sollicitations réduites)',

- différentes personnes ou groupes d'acteurs, le directeur, les médecins, des torts partagés entre directeur et médecins, l'auditeur précisant que 'certains ne se prononcent pas mais notent une détérioration de l'ambiance générale de travail, [...] il est fréquemment question de 'guerre ou d'affrontement', de 'clans et de choisir (ou pas) son camp' et le sentiment 'que la situation ne pourra pas évoluer positivement'.

Le préavis de grève formalisé par les médecins du travail, en date de décembre 2015 ne se limitait pas à une question salariale, mais visait également, 'malgré de multiples alertes, l'impossibilité d'assurer leurs missions envers la santé des salariés et devant la charge de travail augmentée consécutif à la diminution des effectifs médicaux [...] situation s'inscrivant dans un contexte de dégradation des conditions d'exercice des médecins du travail du SIST (présence de risques psychosociaux mis en évidence par l'audit RPS de 2015) [...]'.

Le 24 novembre 2016, la salariée et une de ses collègues entreprenaient d'alerter le médecin inspecteur du travail et l'inspecteur du travail sur la dégradation de leurs conditions de travail. C'est ainsi que Mme [X], médecin du travail adressait le message suivant à l'inspecteur du travail : 'Je suis désolée de ne pouvoir être aux cotés de ma collègue, le docteur [K], pour notre rendez-vous de demain pour vous faire part de ce que nous vivons dans le service. [...] En effet, nous sommes confrontés à un management délétère qui entraîne une souffrance au travail avec certains salariés ciblés plus fréquemment, comme c'est le cas du Docteur [K], les médecins sont particulièrement atteints mais nous savons que cela touche d'autres salariés qui, pour la plupart, préfèrent ne pas s'exprimer n'étant pas protégés. Malgré l'identification de RPS par un cabinet en 2015 qui relevait le management du directeur comme une source de RPS, signalement de l'atteinte à la santé mentale en réunion DP, une rencontre avec la DIRECCTE à [Localité 5] [...], la grève des médecins en janvier 2016, nous ensommes toujours au même point... Pour résumer les RPS, charge de travail des médecins +++ liée à des départs (démissions, retraites, ou arrêts maladie, autoritarisme du Directeur et mise à l'écart des

médecins, [...])'.

Le 25 novembre 2016, le docteur [U] démissionnait en évoquant tout à la fois, un nouveau projet de vie personnel, mais également des 'conditions de travail délétères au sein du service'.

Le 27 avril 2018, le médecin inspecteur du travail émettait l'avis suivant sur la procédure de licenciement pour inaptitude de la salariée : 'ce licenciement (de Mme [K]) pour inaptitude est effectivement comme l'ont rappelé les DP lors de leur consultation, la quatrième procédure similaire en l'espace d'une dizaine d'années. Si la direction du SIST [Localité 1] est restée très discrète sur le sujet lors de notre entrevue, le docteur [K] de son côté a largement évoqué le lourd passé de conflit entre la direction du SIST et un groupe de médecins du travail dont elle fait partie. Ces médecins en majorité ont démissionné ou ont fait l'objet de licenciements.

Le docteur [K] nous a informé avoir déclaré cet arrêt de travail au titre d'un accident du travail [...] une procédure serait en cours au tribunal des affaires de sécurité sociale. [...]

L'historique du service montre que des conflits importants avaient déjà eu lieu notamment en 2008 avec plusieurs plaintes croisées pour harcèlement déposées par une assistante et un médecin du travail. Dans les années suivantes, il semble avoir perduré dans ce service une conflictualité régulière parsemée de crises aigues ayant régulièrement amené des interventions de l'inspecteur du travail des MIT, du conseil de l'ordre des médecins ...

Il est toutefois difficile de dire si la dégradation des conditions relationnelles de travail a pour origine la spécificité de l'exercice en tant que médecin du travail. Le docteur [K] s'est plainte de pressions concernant son exercice (informatisation des dossiers médicaux, nombre de visites jugées insuffisant par la direction, refus de formation...) Mais pas sur les avis individuels rendus en tant que médecin du travail. En conclusion mon avis est que l'inaptitude au poste de médecin du travail prononcée pour le docteur [K] est liée en partie à la dégradation des conditions relationnelles de travail dans lesquelles (elle) a évolué au sein du SIST [Localité 1] [...]'.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'au jour de l'arrêt de travail de la salariée, il existait au sein de l'association depuis plusieurs années des tensions entre certains médecins et la direction ainsi que d'autres employés.

Bien que l'association eut été alertée à plusieurs reprises sur la persistance d'une relation dégradée existant au sein de ses services, il n'est pas justifié par le SIST qu'il se soit mobilisé depuis la décision prise de ne pas donner suite au travail mené par l'organisme Accent Ergonomie.

Certes, l'association objecte, sans être contredite par la salariée, que les conclusions du cabinet Accent Ergonomie ont été contestées par 78% du personnel et que les salariés qui composaient le groupe projet ont décidé de mettre un terme à ce travail, tout en concédant dans ses conclusions 'que l'essentiel des actions restaient à instruire'.

Nonobstant ce constat qui obligeait l'employeur à prendre des mesures pour résoudre cette situation conflictuelle, force est de constater que l'employeur ne justifie pas s'être mobilisé avant l'accident du travail déclaré par la salariée et son arrêt de travail pour mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, les pièces probantes que l'intimée verse aux débats étant postérieures au 12 avril 2017.

En effet, pour justifier du respect de son obligation, l'employeur verse aux débats :

- Une note signée par Mme [G] et M. [I], infirmiers, délégués du personnel, exposant que les salariés ont participé à une démarche sur la prévention des RPS conduite par le cabinet Accent Ergonomie, dans le cadre duquel la participation des salariés a été sollicitée et des groupes de projet créé, mais que devant des incompréhensions et des incohérences relatées dans le compte-rendu sur les causes de dysfonctionnement du service suscitant l'insatisfaction des salariés, la collaboration avec ce cabinet a cessé. Ces délégués du personnel ajoutent que depuis la fin de l'année 2016, et afin d'améliorer les conditions de travail et notre savoir être, nous avons créé un comité de bienveillance composé de tous les DP avec en plus 2 médecins et l'équipe d'encadrement'.

- le compte-rendu de la première réunion du groupe QVT, du 17 mai 2018 précisant en préambule sur les conditions de sa création qu'il s'agit d'une décision prise par le comité de bienveillance lors de sa réunion du 20 janvier 2018 afin de continuer le travail initié et d'améliorer la qualité de vie au sein du SIST,

- un questionnaire QVT 2018,

- une invitation à participer à la réunion du groupe QVT d'octobre 2018,

- une évaluation AFNOR et une auto évaluation de la démarche de progrès en santé qui n'est pas datée,

Devant l'imprécision de la note signée par les délégués du personnel indiquant qu'un 'comité de bienveillance' a été constitué, sans savoir précisément à l'initiative de qui ('nous avons créé [...]'), à quelle date et, surtout, quelles ont été les initiatives concrètes prises par ce groupe afin d'évaluer et de remédier au climat délétère décrit par nombre de collaborateurs, il sera jugé que l'association ne justifie pas, une fois interrompue la mission confiée au cabinet Accent Ergonomie, avoir pris les mesures pour identifier et traiter les questions posées par les salariés sur les risques psycho-sociaux, entre juillet 2015 et le mois d'avril 2017, de sorte que le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité est caractérisée.

Dans ce contexte de manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, le directeur a adressé à la salariée, le 12 avril 2017, un message ainsi libellé :

'[W] [L] vient de nous faire part de son extrême fatigue mentale face à votre comportement. En effet, vous contredisez l'organisation générale du service de façon constante en donnant ordres et contre-ordres à votre secrétaire. Le dernier exemple porte sur les journées organisées à [Localité 4] pour chaque médecin au sujet desquelles vous ne voulez qu'une demi-journée alors qu'il a été exposé en CMT la nécessité d'organiser des journées entières pour tout le monde. Mme [L] demande à changer de poste, déclarant ne plus pouvoir supporter cette situation récurrente. Je demande de vous mettre en rapport avec [P] pour nous organiser un rendez-vous afin de mettre un terme à cette situation'.

La salariée expose l'avoir reçu comme une accusation implicite de harcèlement moral, qui évoquait pour elle, ainsi que pour ses collègues les docteurs [A] et [V], le précédent concernant le litige ayant opposé le docteur [N] à sa secrétaire, l'un des collègues de l'appelante évoquant 'craindre que le scénario déjà utilisé il y a quelques années ne se reproduise [...]' (pièce salarié n°28), incident que la juridiction de sécurité sociale a définitivement jugé comme relevant de la législation des accidents du travail dans le rapport de l'assurée sociale à la caisse primaire d'assurance maladie.

Abstraction faite de l'indemnisation de l'accident du travail, qui ne relève pas de la compétence du juge prud'homal mais relève de la procédure spécifique relevant des juridictions de sécurité sociale, le préjudice subi par Mme [K] en lien avec le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité en s'abstenant de prendre les mesures nécessaires pour identifier et résoudre les difficultés relationnelles et le climat délétère existant au sein de l'association, sera plus justement indemnisé à hauteur de 3 000 euros.

Sur la perte injustifiée de l'emploi :

Le contrôle exercé par l'administration du travail, saisie d'une demande d'autorisation administrative de licenciement pour inaptitude, de l'absence de lien entre le licenciement et les mandats détenus par le salarié, ne fait pas obstacle à ce que le juge judiciaire recherche si l'inaptitude du salarié a pour origine un manquement de l'employeur à ses obligations consistant en un harcèlement moral ou un manquement à son obligation de sécurité.

En l'espèce, faute pour l'association d'avoir satisfait à son obligation de sécurité et de remédier aux risques psycho-sociaux auxquels étaient exposés ses salariés, il est établi un lien entre ce manquement et l'arrêt de travail prescrit à la salariée consécutivement au choc émotionnel subi par Mme [K], parfaitement documenté, à réception du message du directeur, qui conduit à considérer que l'arrêt de travail et l'inaptitude qui en a découlé sont en lien avec ce manquement.

La preuve d'un manquement de l'employeur ayant provoqué l'inaptitude étant établie, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la salariée est bien fondée à solliciter outre l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnisation de la perte injustifiée de son emploi.

Sur l'indemnisation :

Sur la demande en paiement des indemnités prévues par l'article L. 1226-14 du code du travail :

Quant à la recevabilité :

A juste raison, l'employeur objecte que la demande en paiement de l'indemnité spéciale de licenciement est nouvelle en cause d'appel, la salariée ne l'ayant formulée qu'à l'occasion de ses conclusions déposées devant le conseil de prud'hommes après la clôture, ce qui a conduit les premiers juges, du reste, à déclarer ces dernières irrecevables.

Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

L'article 565 du même code prévoit quant à lui, que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent et l'article 566 que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

La demande tendant au paiement des indemnités prévues à l'article L. 1226-14 du code du travail et notamment à l'indemnité spéciale de licenciement, régulièrement formulée pour la première fois en cause d'appel, est recevable en ce qu'elle constitue un accessoire de la demande d'indemnisation du licenciement. La fin de non recevoir sera écartée.

Quant au fond :

Dans la mesure où la salariée demande le bénéfice des indemnités prévues par l'article L. 1226-14 du code du travail, il appartient au juge prud'homal de rechercher en conséquence si l'inaptitude de la salariée avait pour origine un accident du travail comme allégué par la salariée.

Les salariés victimes d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail bénéficient d'une protection renforcée contre le licenciement pendant et à l'issue de l'arrêt de travail, lesquelles s'appliquent dès lors que l'inaptitude, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée a, au moins partiellement, pour origine cette maladie ou cet accident du travail et que l'employeur en a connaissance au moment du licenciement. Il en est ainsi même si l'employeur a été informé d'un refus de prise en charge au titre du régime des accidents du travail.

En l'espèce, il est constant que Mme [K], qui a été arrêtée par son médecin généraliste le 12 avril 2017 pour accident du travail a déclaré à son employeur avoir subi un choc émotionnel à réception du courriel adressé par le directeur de l'association le même jour ainsi libellé.

Deux des collègues de la salariée, M. [S] et Mme [A] ont été témoin de la répercussion de ce message chez la salariée et ont attesté de l'état d'angoisse dans lequel se trouvait Mme [K] à réception du mail litigieux, le premier ayant déclaré avoir constaté qu'elle était 'en larmes, toute rouge, les yeux bouffis, très angoissée et dans un état de sidération très inhibant (incapable de travailler)' et ayant rapporté cet événement auprès de ses confrères en dénonçant le fait que le directeur mette en cause l'intéressée 'd'une manière très choquante', la seconde ayant été destinataire en copie du mail litigieux avant de personnellement constater que Mme [K] se mettait à pleurer quand elle relisait ce mail. Il est constant que ce choc est survenu au lieu et au temps du travail.

L'employeur, informé le soir même, a déclaré le lendemain l'accident du travail dans les termes suivants 'la salariée déclare avoir été victime d'un choc émotionnel à la lecture d'un mail adressé par son directeur' en énonçant les noms des deux témoins ci-avant cités.

Certes, la caisse primaire d'assurance maladie a, suivant décision du 10 juillet 2017, et au vu de l'enquête administrative diligentée, refusé de prendre en charge cet accident au titre de la législation professionnelle. Toutefois, par jugement du 3 décembre 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de Carcassonne a dit que la caisse primaire d'assurance maladie de l' Aude devait prendre en charge l'accident du 12 avril 2017 dont a été victime Mme [E] [K] au titre de la législation professionnelle, cette décision ayant été confirmé par arrêt rendu le 15 février 2023, par la 3ème chambre sociale de la présente cour.

À compter du 12 avril 2017, la salariée sera continûment placée en arrêt maladie pour accident du travail dans un premier temps et jusqu'à la décision de la CPAM du 10 juillet 2017, puis pour maladie simple jusqu'à l'avis d'inaptitude.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que non seulement l'inaptitude a au moins partiellement pour origine l'accident du travail dont Mme [K] a effectivement été victime le 12 avril 2017, mais que l'employeur, qui était à l'origine du courriel litigieux et de la répercussion qu'il pouvait susciter dans le contexte ci-avant décrit, avait connaissance au jour du licenciement que la salariée invoquait le caractère professionnel de cet accident, de l'arrêt de travail qui s'en est suivi, et de l'origine professionnelle de l'inaptitude de la salariée.

La salariée est en conséquence bien-fondée à requérir le bénéfice des dispositions de l'article L. 1226-14 du code du travail.

Conformément au salaire perçu au jour du licenciement, à savoir 7 414,77 euros, l'association SIST sera condamnée à verser à Mme [K] la somme de 14 829,54 euros au titre de l'indemnité d'un montant égal à l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1226-14 du code du travail, laquelle est calculée sur le préavis légal de deux mois compte tenu de l'ancienneté.

Cette indemnité ayant une nature indemnitaire, Mme [K] sera déboutée en revanche de sa demande en paiement des congés payés afférents.

Conformément au calcul détaillé figurant dans ses conclusions, que la salariée a basé sur l'indemnité légale et non l'indemnité conventionnelle, plus favorable, et compte tenu de son ancienneté de 32 années et de son salaire, Mme [K] est bien-fondée à percevoir une indemnité spéciale de licenciement de 145 823,80 euros. Déduction faite de la somme de 127 423 euros d'ores et déjà perçue, il lui sera alloué de ce chef un rappel de 18 400,80 euros.

Le jugement sera réformé de ces chefs.

Sur l'indemnisation de la perte injustifiée de son emploi :

Au jour de la rupture, Mme [K] âgée de 61 ans bénéficiait d'une ancienneté de 32 ans et 4 mois au sein de l'association SIST qui employait plus de dix salariés. Elle percevait avant son arrêt maladie un salaire mensuel brut de 7 326,85 euros, indemnité de coordonnatrice de l'équipe pluri disciplinaire comprise, le salaire mensuel brut ayant été revalorisé au jour de la rupture, à 7 414,77 euros, indemnité comprise.

La salariée critique le montant de l'indemnité allouée par les premiers juges en faisant valoir que, le simple fait qu'elle a retrouvé un emploi 5 mois après son licenciement, ne suffit pas, au regard des efforts consentis pour retrouver un emploi, du dépaysement généré par l'acceptation de ce nouveau poste dans le département du Var, qui a nécessité un changement de région ainsi qu'un déménagement, du préjudice moral significatif subi, à lui allouer le plancher des indemnités prévues par le barème issu de l'ordonnance du 22 septembre 2017.

En vertu de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, la salariée peut prétendre au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimal de 3 mois de salaire brut et un montant maximal de 20 mois de salaire brut.

Si l'association ne justifie pas ses allégations selon lesquelles la salariée aurait préparé son licenciement afin de se rapprocher de sa fille installée en région PACA, il est constant que la salariée a été engagée dès le mois d'août 2018 par une association de médecine du travail.

Conformément aux dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail le juge prud'homal peut tenir compte de l'indemnité de licenciement versée, laquelle s'est établie en l'espèce à 127 300 euros, majorée par la présente décision de 18 400,80 euros.

En l'état de l'ensemble de ces éléments, le préjudice subi par la perte injustifiée de son emploi sera évalué à la somme de 45 000 euros. Le jugement sera réformé sur le quantum.

Le licenciement pour inaptitude reposant sur une inaptitude professionnelle, les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail ne sont pas applicables. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a ordonné à l'association SIST de rembourser à pôle emploi les indemnités chômages, les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail n'étant pas applicables lorsque le licenciement injustifié repose sur une inaptitude professionnelle.

L'action de Mme [K] étant partiellement fondée, l'employeur sera débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi que de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné l'association SIST aux dépens de première instance,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Vu les dispositions de la loi des 16-24 août 1790 et le principe de séparation des pouvoirs, dit n'y avoir lieu à statuer sur le licenciement de Mme [K], autorisé par l'inspecteur du travail,

Juge Mme [K] bien-fondée en sa demande d'indemnisation de la perte injustifiée de son emploi et de bénéfice des dispositions de l'article L. 1226-14 du code du travail,

Condamne l'association SIST à verser à Mme [K] les sommes suivantes :

- 3 000 euros de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

- 45 000 euros d'indemnité pour la perte injustifiée de son emploi,

- 14 829,54 euros à titre d'indemnité égale à l'indemnité compensatrice de préavis prévue par l'article L. 1226-14,

- 18 400,80 euros de rappel d'indemnité spéciale de licenciement,

Déboute Mme [K] de sa demande en paiement de l'indemnité compensatrice de congés payés sur l'indemnité d'un montant égal à l'indemnité compensatrice de préavis,

Dit que les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail ne sont pas applicables,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

Déboute l'association SIST de ses demandes reconventionnelles,

Condamne l'association SIST à verser à Mme [K] la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'association SIST aux dépens d'appel.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par, Madame Naïma Digini, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/01860
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;21.01860 ?
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