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07/05/2024 | FRANCE | N°21/02746

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 07 mai 2024, 21/02746


ARRÊT n°2024-



































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 07 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02746 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O7GN





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 26 MARS 2021

JUGE DES CONTENTI

EUX DE LA PROTECTION DE PERPIGNAN

N° RG 11-19-000798





APPELANTE :



Madame [H] [S]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Harald KNOEPFFLER de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant

assistée de Me Emi...

ARRÊT n°2024-

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 07 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02746 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O7GN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 26 MARS 2021

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE PERPIGNAN

N° RG 11-19-000798

APPELANTE :

Madame [H] [S]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Harald KNOEPFFLER de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant

assistée de Me Emily APOLLIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMES :

Monsieur [L] [X] [Z]

né le 22 Mai 1967 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Aziza TRAIAI, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant non plaidant

Madame [O] [K] épouse [X] [Z]

née le 28 Juin 1964 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Aziza TRAIAI, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant non plaidant

Ordonnance de clôture du 21 Août 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Emmanuel GARCIA, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Estelle DOUBEY

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre, et par Mme Estelle DOUBEY, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Le 1er juillet 2013, Mme [H] [S] a donné à bail aux époux [L] et [O] [X] [Z], à compter du 1er août 2013, un appartement situé à [Localité 6] (66).

Le 29 août 2013, les locataires ont constaté l'apparition d'une fuite d'eau importante au niveau du plafond du garage, lequel est situé sous l'appartement, et qu'elle était due à la rupture d'un tuyau qui conduisait l'eau chaude sanitaire depuis la chaudière de la cuisine jusqu'à la salle de bain.

Le 27 janvier 2014, la direction d'hygiène et de la santé publique de [Localité 6] a adressé un courrier à la bailleresse, valant injonction de prendre toutes les dispositions nécessaires pour faire réparer les dégâts générés par le sinistre.

Les locataires ont quitté les lieux début février 2017.

Le 14 mars 2017, un rapport d'expertise a relevé des problèmes de condensation et de ventilation dans le logement.

Le 29 avril 2019, les époux [X] [Z] ont fait assigner Mme [H] [S] aux fins notamment d'obtenir sa condamnation à leur payer une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, en indemnisation de leur préjudice de jouissance consécutif aux désordres ayant affecté l'appartement loué du fait de l'humidité anormale du logement.

Le jugement rendu le 26 mars 2021 par le juge des contentieux de la protection de Perpignan :

Déclare l'action recevable ;

Condamne Mme [H] [S] à payer aux époux [X] [Z] la somme de 6 181,74 euros à titre de dommages-intérêts ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Condamne la défenderesse à payer aux demandeurs principaux la somme de 1 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la défenderesse aux dépens.

Le premier juge a relevé que le logement présentait notamment d'importantes traces d'humidité avec l'apparitions de moisissures, en dépit de travaux réalisés en 2014, que ces désordres contrevenaient aux exigences relatives au logement décent, que si toutefois la cause de l'humidité avait été difficile à déceler et que la bailleresse s'était heurtée à l'inertie de plusieurs intervenants en cause, ces circonstances ne caractérisaient pas la force majeure exonératoire de responsabilité et ce d'autant plus que la bailleresse n'avait pas voté, lors de l'assemblée générale des copropriétaires de mai 2016, pour les deux solutions proposées pour remédier à la ventilation défaillante, de sorte que la bailleresse avait manqué à ses obligations.

Le premier juge a retenu que la bailleresse ne justifiait pas des dégradations locatives dont elle se prévalait, qu'il n'était pas établi que la réfection des revêtements avait une autre cause que les désordres dont elle répondait et que l'état des lieux de sortie ne permettait pas d'imputer les autres désordres aux locataires. A l'inverse, le décompte détaillé produit par la bailleresse, et non sérieusement contesté par les requérants, permettait de constater qu'ils restaient devoir la somme de 2 918,26 euros à leur départ des lieux, au titre des loyers et charges locatives, soit 2 318,26 euros après déduction du dépôt de garantie, les deux créances pouvant se compenser.

Mme [H] [S] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 27 avril 2021.

Dans ses dernières conclusions du 25 novembre 2021, Mme [H] [S] demande à la cour de :

Réformer le jugement du 26 mars 2021 ;

Débouter les époux [X] [Z] de l'intégralité de leurs demandes ;

Condamner solidairement les époux [X] [Z] à verser à Mme [H] [S] 8 814,36 euros à titre de dommages-intérêts en indemnisation de son préjudice matériel au titre des frais de remise en état, 2 948,82 euros au titre de l'arriéré de loyers et de charges au 16 février 2017 et 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner solidairement les époux [X] [Z] aux entiers dépens.

Mme [H] [S] fait valoir la prescription d'une partie de l'action. Elle avance que le préjudice des consorts [X] [Z] a commencé à courir à la date d'apparition des moisissures, soit a minima en 2014, date de la réponse des services de la commune de [Localité 6], que le départ de la prescription doit être l'apparition du préjudice subi par les locataires et non celle des échanges de correspondances de 2016, retenu par le juge, et que l'assignation ayant été délivrée le 29 avril 2019, toute action au titre d'un préjudice antérieur au 29 avril 2016 serait nécessairement prescrite. La bailleresse souligne que les locataires ont chiffré leur préjudice à 235,30 euros par mois, qu'ainsi, ils ne peuvent donc solliciter que 2 235,29 euros, soit 235,30 euros x 9 mois et demi correspondant à la période du 29 avril 2016 au 17 février 2017.

Subsidiairement, Mme [H] [S] estime que le préjudice n'a pu commencer qu'à la date du 18 mai 2015, date où les époux [X] [Z] l'ont informée de la réapparition des traces de moisissures, ce qui permet d'en déduire qu'elles avaient disparu jusqu'à cette date, de sorte que leur action ne pourrait porter que sur la somme de 4 823,65 euros, soit 235,30 euros x 20, 5 mois.

A titre infiniment subsidiaire, Mme [H] [S] fait valoir que rien ne justifie que l'article 7-1 de la loi du 7 juillet 1989 ne soit pas applicable. En tout état de cause, si la prescription triennale n'était pas applicable, elle estime qu'il convient néanmoins d'appliquer la prescription quinquennale, ce qui permet à l'action des époux [X] [Z] d'être recevable à compter du 29 avril 2014.

Mme [H] [S] soutient qu'elle n'est pas responsable au titre de son obligation d'entretien. Elle précise que bien que l'expertise a conclu à la prise en charge des travaux par l'assurance de la copropriété, elle a elle-même pris l'initiative de mandater un artisan pour poser des grilles d'aération haute sur les fenêtres et sur les portes fenêtres de chaque pièce de l'appartement. Elle précise qu'elle a également fait d'importants travaux avant l'arrivée dans les lieux des époux [X] [Z], qu'elle n'avait donc ainsi aucune volonté de louer un appartement qui n'aurait pas été décent. L'appelante souligne que ses locataires précédents, restés près de dix ans dans le logement, n'ont jamais eu de problèmes d'humidité, tout comme les locataires qui ont suivi les époux [X] [Z], à compter du mois d'août 2018.

L'appelante explique que les deux résolutions proposées au syndic en mai 2016 pour faire cesser les désordres dans son logement ont été rejetées par l'assemblée générale, qu'il s'agissait de la pose d'une VMC collective et d'une VMC individuelle dans son appartement. Elle précise qu'elle a sollicité à nouveau le syndic pour que des travaux de recherches complets soient effectués et que l'origine des dégâts puisse être trouvée puisque la réparation sans connaissance de l'origine du problème n'aurait pas mis fin aux désordres.

Elle précise que la direction de l'hygiène et de la santé publique a pu constater l'absence de ventilation sur le puit d'aération de la conduite des WC et de la salle de bain, celui-ci étant obstrué et qu'elle a demandé la réouverture de cette aération, sans succès. Elle estime qu'elle ne peut donc pas être tenue responsable de cette situation puisque c'est l'immeuble qui souffre d'une mauvaise ventilation et que les facteurs à l'origine des problèmes ne sont pas clairement identifiés.

Mme [H] [S] fait valoir que le logement était en bon état lors de l'emménagement des époux [X] [Z], ainsi qu'en témoigne l'état des lieux d'entrée, qui démontre que le logement n'avait pas de graves problèmes d'insalubrité dès la prise de possession des lieux, comme l'affirment les locataires. Elle précise qu'elle avait effectué de nombreux travaux avant leur entrée dans les lieux et que les premières traces d'humidité sont apparues du fait d'un dégât des eaux immédiatement réparé, les travaux d'embellissement n'ayant pas été réalisés par l'assureur du locataire et de la copropriété puisque ces derniers n'avaient pas validé le principe des travaux. En ce qui concerne la problématique du tableau électrique, l'appelante souligne qu'elle a immédiatement fait le nécessaire puisque, cette fois, elle était seule décisionnaire.

Mme [H] [S] soutient que les intimés n'ont subi aucun préjudice de jouissance du fait des traces de moisissures localisées dans certaines pièces, qu'ils ne produisent que des certificats médicaux indiquant qu'ils doivent vivre dans une habitation non humide, ce qui est le cas de tout individu. Elle soutient que le premier juge n'a pas pu caractériser l'intensité des désordres et du trouble de jouissance subi. La bailleresse avance que les photos produites par les époux [X] [Z] concernent l'infiltration de 2013, dont les causes ont été réparées.

Mme [H] [S] sollicite le remboursement des frais de remise en état de l'appartement suite au départ des locataires et produit une facture correspondant aux travaux effectués pour réparer les désordres locatifs relevés par l'huissier de justice. Elle précise que le jour de l'état des lieux de sortie, l'huissier de justice n'a pu examiner le compteur gaz qui était plombé et donc le bon fonctionnement de la gazinière et de la chaudière qui se sont ultérieurement avérées hors service. Elle affirme que la responsabilité des désordres invoqués incombe aux époux [X] [Z], du fait d'un défaut de ventilation des lieux loués.

L'appelante sollicite également la somme de 2 948,82 euros au titre de l'arriéré de loyers. Elle conteste l'argument des intimés, fondé sur une ordonnance de référé du 30 mars 2016, qui les a condamnés à verser à titre provisionnel un arriéré de loyers de 380,24 euros au 1er janvier 2016, outre une indemnité mensuelle d'occupation. Elle rappelle qu'une ordonnance de référé n'a pas autorité de la chose jugée au fond et elle verse aux débats un décompte précis des sommes dues.

Dans leurs dernières conclusions du 24 septembre 2021, les époux [X] [Z] demandent à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu'il constate l'état d'indécence du logement loué aux époux [X] [Z] ;

Débouter Mme [H] [S] de l'ensemble de ses prétentions ;

Condamner Mme [H] [S] à verser aux époux [X] [Z] la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice de jouissance subi ;

Condamner Mme [H] [S] à verser aux époux [X] [Z] la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [X] [Z] contestent la prescription de leur action. Ils font valoir que l'article 7-1 dont se prévaut la bailleresse est issu de la loi du 24 mars 2014 et non applicable aux contrats en cours lors de son entrée en vigueur. C'est donc bien la prescription quinquennale qui s'applique. Selon eux, le départ du délai de prescription est le 2 décembre 2016, ce qui correspond à la date où ils ont été informés de l'étendue des désordres affectant le logement.

Les époux [X] [Z] soutiennent que la bailleresse est responsable des préjudices subis et rappellent qu'elle est tenue d'une obligation de résultat quant à la délivrance d'un logement décent. Or, le contrôle réalisé le 4 septembre 2015 met en évidence la non-conformité du tableau électrique, d'importantes traces d'humidité avec apparition de moisissures et plusieurs autres désordres. La seconde visite effectuée en décembre 2015 constate qu'aucun travaux n'a été entrepris. Les intimés font valoir que ces désordres ont eu de graves conséquences sur leur santé et celle de leur fils, leur médecin ayant établi que leur état de santé nécessitait une habitation non humide suite à une allergie respiratoire. Ils ajoutent avoir été contraints de se reloger pour ne plus subir les nuisances et qu'ils ont donc bien subi un préjudice de jouissance.

Les époux [X] [Z] estimant que les moisissures étant réapparues en mai 2015, font valoir que leur préjudice s'étend de cette date, à leur départ des lieux. Ils estiment ce préjudice à 500 euros par mois.

Les époux [X] [Z] s'opposent à la demande de Mme [H] [S] au titre de la remise en état. Selon eux, elle n'est pas due à un défaut d'entretien du logement par eux mais à la présence de moisissures sur les murs. Ils avancent que la bailleresse ne démontre pas le disfonctionnement de la chaudière et de la plaque de cuisson ni que cela serait dû aux locataires et affirment que les frais d'entretien de la chaudière étaient inclus dans les charges locatives.

En ce qui concerne les arriérés de loyers, les époux [X] [Z] avancent que l'ordonnance rendue le 30 mars 2016 les a déjà condamnés au paiement des arriérés de loyer et que le 27 avril 2017, que le juge de l'exécution a constaté la disparition de la dette locative. Ils contestent également la somme demandée par la bailleresse à ce titre puisque leur solde apparait débiteur de 9 331,38 euros, soit 2 348,82 euros une fois les frais de remise en état enlevés, et non pas 2 948,82 euros. Ils ajoutent que ce décompte ne tient pas compte des sommes versées par l'assurance garantie loyers impayés, qui correspond à 1 205,82 euros, alors que rien ne justifie une double indemnisation de la bailleresse.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 21 août 2023.

MOTIFS

1. Sur la prescription de l'action des époux [X] [Z]

En application de l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, modifiée par la loi du 24 mars 2014, dite loi Alur, toutes actions dérivant d'un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit.

La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite loi Macron, dispose, en son article 82 II, 2°, que l'article 7-1 précité est applicable, dans les conditions fixées à l'article 2222 du code civil, aux termes duquel « en cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ».

Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les époux [X] [Z], la réduction à trois ans du délai de prescription des actions dérivant d'un contrat de bail d'habitation s'applique aux contrats en cours à compter du 27 mars 2014, date d'entrée en vigueur de la loi Alur, peu importe que l'application immédiate de la réduction du délai n'ait été posée que par la loi Macron du 6 août 2015.

Il ressort des pièces versées au débat que les époux [X] [Z] ont constaté l'apparition d'une fuite d'eau importante dès le 29 août 2013, que la direction d'hygiène et de la santé publique de [Localité 6] a adressé un courrier à la bailleresse le 27 janvier 2014, valant injonction de prendre toutes les dispositions nécessaires pour faire réparer les dégâts générés par le sinistre, et qu'un rapport d'expertise établi le 14 mars 2017 a relevé des problèmes de condensation et de ventilation dans le logement.

En application des dispositions précitées, il en résulte que l'assignation des époux [X] [Z] en réparation de leur trouble de jouissance ayant été délivrée le 29 avril 2019, leur demande relative au trouble de jouissance antérieur au 29 avril 2016 est donc prescrite, de sorte que leur action ne peut porter que sur le préjudice subi du 29 avril 2016 au 17 février 2017, date à laquelle ils ont quitté les lieux, soit sur 9,5 mois.

2. Sur la responsabilité de Mme [H] [S], bailleresse

Mme [H] [S] soutient qu'elle a satisfait à l'obligation de résultat qui lui incombait quant à la délivrance d'un logement décent et se prévaut de la force majeure au motif que l'origine des dégâts n'a pu être déterminée et d'une mauvaise ventilation de l'immeuble, de sorte qu'elle estime ne pouvoir être tenue pour responsable du trouble de jouissance supporté par les époux [X] [Z].

En application de l'article 1719 du code civil, le bailleur est tenu, concernant la chose louée, d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail. Si cette chose louée est le logement principal du locataire, ledit logement doit être décent.

L'article 6 de la loi 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs confirme que le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent, dont les critères sont établis par le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002.

Dès lors que l'un de ces critères est absent et qu'un préjudice en découle pour le locataire, une indemnisation est due par le bailleur.

Dans le cas d'un logement humide et présentant des moisissures, l'obligation du bailleur d'assurer au preneur une jouissance paisible de la chose louée ne cesse qu'en cas de force majeure.

L'article 1219 alinéa 1 du code civil prévoit qu'il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur.

Au cas d'espèce, si comme l'a relevé le premier juge, la cause de l'inondation du logement en litige a été difficile à déceler et si Mme [H] [S] s'est heurtée à l'inertie des divers intervenants en cause, s'agissant de dégâts des eaux mettant en jeu les assurances et un immeuble collectif géré par un syndic de copropriété, il n'en demeure pas moins que les infiltrations provenant des parties communes ou une mauvaise ventilation de l'immeuble n'échappent pas au contrôle des copropriétaires et qu'en sa qualité de copropriétaire, comme l'a justement retenu le premier juge, il lui appartenait de prendre des mesures pour pallier ces carences, d'autant que lors de l'assemblée générale des co-propriétaires de mai 2016, elle n'a pas voté pour les deux solutions proposées pour remédier à la ventilation défaillante, de sorte que Mme [H] [S] ne peut se prévaloir d'une cause exonératoire et, par conséquent, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a retenu sa responsabilité dans le trouble de jouissance subi par les époux [X] [Z].

3. Sur la réparation du préjudice de jouissance des époux [X] [Z]

En considération des pièces versées au débat et de l'argumentation de chacune des parties, la cour, dans son appréciation souveraine, estime qu'au regard de la nature des désordres relevés et de leurs répercussions sur les conditions de vie des époux [X] [Z], leur préjudice de jouissance doit être indemnisé sur une base mensuelle de 100 euros, soit pour 9,5 mois, la somme totale de 950 euros.

4. Sur les réparations locatives

Le premier juge a rejeté les prétentions indemnitaires formées par Mme [H] [S] au motif qu'elle n'établissait pas que la réfection des revêtements avait une autre cause que les désordres dont elle répondait en sa qualité de bailleresse et que les mentions de l'état des lieux de sortie ne permettaient pas de constater une dégradation de la chaudière et de la plaque de gaz, qui soient imputables aux époux [X] [Z].

En cause d'appel, Mme [H] [S] n'apporte pas de critique utile à ces motifs, la cour relevant que les réparations locatives dont il est demandé condamnation au paiement consistent pour l'essentiel en la présence de moisissures sur les murs, comme en attestent le procès-verbal de constat et le devis réalisé par l'entreprise de M. [N] [V], dont la prestation proposée consiste pour l'essentiel en l'élimination des champignons présents sur les murs, qu'en outre, elle échoue à démontrer le prétendu disfonctionnement de la chaudière et de la plaque de cuisson, étant relevé que l'entretien de la chaudière était inclus dans les charges locatives, de sorte que le jugement dont appel sera confirmé en ce qu'il a rejeté ses prétentions indemnitaires à ce titre.

5. Sur l'arriéré locatif

Au soutien de sa demande en paiement de l'arriéré locatif, Mme [H] [S] verse au débat un relevé de compte précis des loyers et charges à devoir, arrêté au 16 février 2017, pour la somme totale de 2 948,82 euros.

Les consorts époux [X] [Z] se prétendent libérés de cette somme et versent notamment au débat une ordonnance de référé du 30 mars 2016, une décision du juge de l'exécution du 24 avril 2017 et une citation en conciliation du 15 octobre 2019 devant le juge d'instance aux fins de saisie des rémunérations.

Or, ces seuls éléments sont insuffisant à rapporter la preuve, qu'ils supportent, de ce qu'ils auraient effectivement apuré cette arriéré locatif, étant relevé que le montant des sommes réclamées dans le cadre de la saisie sur rémunérations est arrêté au 1er janvier 2016 et non pas au jour du départ des époux [X] [Z], au 16 février 20217, de sorte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il les a condamnés au paiement de la somme de 2 318,26 euros, au titre des loyers et charges locatives, après déduction de la somme de 600 euros, correspondant au dépôt de garantie.

Il s'ensuit qu'après compensation, 2 318,26 euros - 950 euros, les époux [X] [Z] restent à devoir à Mme [H] [S] la somme 1 368,26 euros.

Il suit de ce qui précède, que le jugement rendu le 26 mars 2021 par le juge des contentieux de la protection de [Localité 6] sera infirmé en ce qu'il a condamné Mme [H] [S] à payer aux époux [X] [Z] la somme de 6 181,74 euros à titre de dommages-intérêts.

Statuant à nouveau, les époux [X] [Z] seront condamnés solidairement à payer à Mme [H] [S] la somme de 1 368,26 euros au titre de l'arriéré locatif.

6. Sur les dépens et les frais non remboursables

Le jugement sera confirmé en ce qui concerne les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [X] [Z] seront condamnés solidairement aux dépens de l'appel.

Les époux [X] [Z] seront en outre condamnés à payer à Mme [H] [S] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement rendu le 26 mars 2021 par le juge des contentieux de la protection de [Localité 6], sauf en ce qu'il a condamné Mme [H] [S] à payer aux époux [X] [Z] la somme de 6 181,74 euros à titre de dommages-intérêts ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE solidairement les époux [X] [Z] à payer à Mme [H] [S] la somme de 1 368,26 euros au titre de l'arriéré locatif ;

CONDAMNE solidairement les époux [X] [Z] à payer à Mme [H] [S] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non remboursables d'appel ;

CONDAMNE solidairement les époux [X] [Z] aux dépens de l'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/02746
Date de la décision : 07/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-07;21.02746 ?
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