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07/05/2024 | FRANCE | N°18/01631

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 07 mai 2024, 18/01631


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 07 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/01631 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NTBA





Décision déférée à la Cour : Jugement du 01

MARS 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 15/02148





APPELANTS :



Madame [B] [M]

née le [Date naissance 6] 1968 à [Localité 10]

[Adresse 1]

[Localité 12]

Représentée par Me Philippe CALAFELL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant



Monsieur [X] [M]

né le [Date naissance...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 07 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/01631 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NTBA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 MARS 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 15/02148

APPELANTS :

Madame [B] [M]

née le [Date naissance 6] 1968 à [Localité 10]

[Adresse 1]

[Localité 12]

Représentée par Me Philippe CALAFELL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Monsieur [X] [M]

né le [Date naissance 5] 1969 à [Localité 10]

[Adresse 3]

[Localité 11]

Représenté par Me Philippe CALAFELL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMEE :

SARL [18] immatriculée au RCS de MONTPELLIER, prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès qualités au siège

[Adresse 13]

[Localité 10]

Représentée par Me Cyrille CAMILLERAPP, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Ordonnance de clôture du 21 Février 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 MARS 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre, et par Madame Sylvie SABATON, greffier.

*

* *

Exposé du litige

[D] [M] est décédé le [Date décès 4] 2007 laissant pour lui succéder, selon l'acte de notoriété successorale dressé le 2 novembre 2007 par Me [E], notaire à [Localité 17], son épouse, Mme [I] [M], et ses deux enfants, [X] et [B] [M]. La succession comprenait plusieurs biens immobiliers.

Mme [B] [M], affirmant que la gestion des biens dépendants de la succession a été confiée à l'agence [18], a fait assigner, par acte d'huissier délivré le 1er avril 2015, cette agence ainsi que la SAS [15] et la SARL [19] devant le tribunal de grande instance de Montpellier sur le fondement des articles 595 al 2 et 1382 du code civil aux fins d'obtenir en substance la condamnation de la société [18] au paiement d'une somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité délictuelle, ainsi que voir prononcer l'inopposabilité à son égard des contrats de location consentis au profit des occupants du rez de chaussée concernant les locaux situés dans l'immeuble, sis [Adresse 7] à [Localité 10], ainsi que les renouvellements des baux commerciaux consentis en son absence, tout en réservant les droits de l'indivision et enfin en déclarant le jugement à intervenir opposable à ces mêmes occupants.

Par actes d'huissier signifiés les 25 et 29 février 2016, Mme [B] [M] a appelé en la cause Me [F] [U], ès qualités d'administrateur judiciaire de la SAS [15], et Me [J] [Y], ès qualités de mandataire judiciaire de cette société placée en redressement judiciaire.

Au soutien de son assignation, Mme [B] [M] reproche à l'agence [18] plusieurs fautes commises dans la gestion de locaux commerciaux situés sis [Adresse 7] à [Localité 10], appartenant à l'indivision [M]. Elle lui fait grief notamment :

d'avoir assuré la gestion de ces biens immobiliers sans mandat consenti par les nus-propriétaires et de s'être abstenue de vérifier la qualité de propriétaire de la personne qui lui a confié les mandats;

de ne pas avoir réalisé de reddition de comptes, ni l'avoir informée du suivi de la gestion ;

d'avoir consenti un bail commercial en présence d'une personne qui n'avait pas la qualité de propriétaire de l'immeuble [Adresse 7] à [Localité 10], et d'avoir accordé des droits supplémentaires non prévus au bail, modifiant ainsi le contrat sans en informer ni les nus-propriétaires ni l'usufruitière ;

d'avoir laissé renouveler un bail commercial au profit de la Sarl [19] sans la présence des nus-propriétaires.

Par ordonnance du 18 décembre 2017, le juge de la mise en état a constaté le désistement de Mme [B] [M] à l'égard de la société [19].

En cours de procédure, Me [U] et le conseil de la société [15] ont fait part du placement en liquidation judiciaire de ladite de société, qui n'est plus intervenue à l'instance.

Me [Y] n'a jamais comparu.

M. [X] [M] est intervenu volontairement dans la procédure au côté de Mme [B] [M].

Par jugement en date du 1er mars 2018, le tribunal de grande instance de Montpellier :

Déclare irrecevables les demandes formées par Mme [B] [M] et M. [X] [M] à l'encontre de la SARL [18] ;

Rejette la demande de dommages et intérêts de la SARL [18] ;

Condamne in solidum les consorts [M] à payer à la SARL [18] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Ordonner l'exécution provisoire.

Le premier juge retient que la consistance des biens dépendant de la succession de [D] [M] n'était pas déterminée.

Il précise à cet égard qu'aucun acte ne démontre que l'immeuble, situé [Adresse 7] à [Localité 10], fait partie de la succession de [D] [M] en présence d'un inventaire dressé le 23 novembre 2007 par Me [E] reprenant uniquement deux immeubles, le premier situé [Adresse 9] à [Localité 23] et le deuxième [Adresse 14] à [Localité 24].

Le premier juge constate en conséquence l'irrecevabilité des demandes, les consorts [M] ne justifiant pas de leur droit à agir à l'encontre de la société [18].

Pour finir, il déboute la société défenderesse de la demande en dommages et intérêts fondée sur l'article 32-1 du code de procédure civile en l'absence de preuve d'un comportement abusif susceptible de générer un préjudice.

M. [X] [M] et Mme [B] [M] ont relevé du jugement par déclaration au greffe du 26 mars 2018.

Par ordonnance du 15 novembre 2022, la conseillère de la mise en état a fait injonction aux parties de s'expliquer sur l'effet dévolutif et la recevabilité de l'appel en l'état de la déclaration d'appel du 26 mars 2018 ainsi rédigée : « Appel total et demande de nullité du jugement pour ne pas avoir répondu sur les insultes ».

Par ordonnance du 21 novembre 2022, le magistrat en charge de la mise en état a ordonné la révocation de l'ordonnance du 2 novembre 2022 prononçant la clôture des débats pour la prononcer à nouveau avec effet au 21 novembre 2022.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 21 février 2024.

Dans leurs dernières écritures en date du 19 novembre 2022, M. [X] [M] et Mme [B] [M] demandent :

Juger l'appel recevable ;

Annuler le jugement entrepris lequel n'a pas répondu aux écritures des concluants et n'a pas statué sur les demandes des requérants ;

Pour le surplus,

Dire recevable les appelants en leur action ;

Infirmer la décision déférée ;

Statuant à nouveau,

Vu les écritures de la société [18],

Dire que certains écrits n'ont rien à voir avec le litige :

Ordonner, au besoin sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, le retrait des écrits suivants :

« L'extorsion est définie par l'article 312-1 du code pénal comme « le fait d'obtenir par violence, menace de violences ou contrainte soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d'un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d'un bien quelconque » ;

Si cette définition est rappelée en-tête des présentes c'est parce que l'assignation que Mme [B] [M] a fait délivrer à la SARL [18], à la SAS [15] et à la SARL [19] le 1er avril 2015 ne tendait en rien d'autre qu'à essayer d'obtenir par la contrainte que la SARL [18] lui remette des fonds ;

L'action est d'autant plus douteuse que pour augmenter la pression sur la concluante, Mme [B] [M] a sciemment dissimulé au tribunal des pièces pourtant essentielles au débat.

Le silence de ces deux comparses pendant toutes ces années est assez révélateur de la volonté des enfants [M] de ne se manifester qu'au bout de longues années pour essayer tirer profit d'une situation dont ils sont les principaux responsables.

Et l'on comprend que si Mme [B] [M] souhaitait que les locataires soient présentés à l'instance c'est parce qu'elle entendait, dans sa stratégie d'extorsion de fonds, faire savoir aux locataires que les baux étaient potentiellement inopposables.

Consciente de cette situation et de la difficulté qui se poserait lorsque cette pièce serait produite, Mme [B] [M] essaiera par le biais de son conseil de contraindre la SARL [18] à conclure avant la SARL [19] espérant ainsi arracher à cette société une transaction consistant dans le versement d'une indemnité pécuniaire conséquente » ;

Vu les articles 595, 1984 et 1382 devenu 1240 du code civil,

Vu la loi Hoguet,

Tant la gestion sans mandat à l'égard des appelants,

Juger que l'agence [18] a géré un bien appartenant à l'indivision [M], sans mandat consenti pour les nus propriétaires, et en particulier les locaux commerciaux ;

Juger qu'elle a géré sans mandat sur les biens immobiliers appartenant aux nus propriétaires et en particulier des baux d'une durée de neuf ans ;

Juger qu'en qualité de coindivisaire, les concluants non liés par un contrat sont fondés à connaître les conditions dans lesquelles les biens sont gérés ;

Juger que l'intimée ne s'est pas assurée de la qualité de propriétaire de la personne qui lui confiait les mandats ;

Juger qu'elle a manqué à son obligation de vérifier la qualité de propriété des personnes qui se présentent pour gérer ses biens ;

Juger que les actes de gestion effectués sur les locaux commerciaux et l'immeuble par la SARL [18] sont inopposables aux requérants ;

Mais d'ores et déjà, dire et juger que l'intimée a consenti

Un bail commercial entre un locataire en titre et une personne qui n'avait pas la qualité de propriétaire de l'immeuble [Adresse 7] ;

De surcroit en l'absence du nu-propriétaire ;

Et en accordant des droits supplémentaires non prévus au bail et en modifiant la convention sans en informer les propriétaires et éventuellement l'usufruitière ;

Sur les actes de gestion,

Vu la loi du 17 juin 2008,

Réserver les droits des concluants à réclamer au terme de l'indivision, les pièces concernant la gestion de la requise et réserver les droits des nus-propriétaires à engager une action en responsabilité contre la SARL [18] et notamment :

Les éléments comptables du dossier de gestion de l'ensemble des biens immobiliers appartenant à l'indivision [M] avec pièces justificatives des dépenses et en général la réédition annuelle des comptes pour les exercices depuis que [18] gère les biens de l'indivision ;

Eventuels avenants conclus par l'intermédiaire de Conseil [20] ;

Justificatifs des règlements des loyers et provisions sur charges appelées 2012/2017 et années suivantes ;

Justificatifs quittancements adressés par [18] ;

Echanges de correspondances entre la société [19] et Conseil Invest 34, 2012/2017 et les années suivantes ;

Courriers adressés par [18] à Fournil, 2012/2017 et les années suivantes ;

Contrats de location conclus entre elle-même, [15] et [19] 2012/2017 et les années suivantes ;

Justificatifs charges appelées auprès des locataires 2012/2018 et les années suivantes ;

Justificatifs travaux réalisés dans les locaux des locataires et sur l'immeuble [Adresse 7] 2012/2017 et les années suivantes ;

Factures travaux sur l'immeuble réalisés en 2012/2017 et les années suivantes ;

Correspondances adressées à chacun des locataires pour les révisions des loyers pour 2012/2017 et les années suivantes ;

Courriers adressés à Mme [P] épouse [M] suite à renouvellement de bail [19] pour déplafonnement de loyer, augmentations du loyer, fixation du loyer ou autres 2012/2017 ;

La déclaration de créance suite à la liquidation judiciaire, qui aurait été omise suite à la liquidation judiciaire de la SAS [15] ;

L'accord pour les travaux réalisés par [15] avant son dépôt de bilan ;

Mais d'ores et déjà, vu les erreurs commises et non contestées, mandat, erreur sur le nom du bailleur du local de l'agence, et à ses écrits vexatoires, injurieux :

Condamner la SARL [18] à payer à chacun des concluants la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Vu l'article 1240 du code civil,

Juger les observations écrites de la requise comme étant vexatoires, injurieux ;

Condamner la SARL [18] à payer à chacun des concluants 10.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Condamner la SARL [18] aux entiers dépens ainsi qu'à 5.000 euros sur le fondement de l'article du code de procédure civile ;

Condamner l'intimée à rembourser les sommes versées au titre de l'article 700 du code de procédure civile suite à l'exécution forcée du jugement dont appel.

Les consorts [M] exposent à titre liminaire que le patrimoine du défunt comprenait plusieurs immobiliers à savoir un chalet sur Palavas, un immeuble composé de commerces et d'habitation situé [Adresse 2] à [Localité 10], ainsi qu'un immeuble à usage locatif comprenant deux commerces au rez-de-chaussée et des habitations aux étages situé [Adresse 7] à [Localité 10] et enfin sur la commune de [Localité 23], plusieurs parcelles de terrain ainsi qu'un immeuble à usage d'habitation situé [Adresse 8] occupé par Mme [I] [M].

Ils précisent par ailleurs que la gestion des biens a été confiée par [A] [R], mère de [D] [M], à la société [16] en vertu d'un mandat signé le 9 janvier 1998. Au décès de [A] [R], la gestion des biens a été poursuivie par cette agence devenue depuis la société [18] sans pour autant qu'un nouveau mandat de gestion n'ait été signé et ce en méconnaissance de la loi Hoguet, irrégularité qui s'est poursuivie après le décès de [D] [M] survenu le [Date décès 4] 2007.

Enfin, ils ajoutent que l'agence a développé à leur égard des écritures « malsaines » et désobligeantes dont ils avaient saisi le premier juge, qui n'a pas statué sur la demande tendant à obtenir le retrait des paragraphes litigieux faisant fi de leurs autres prétentions, raison pour laquelle ils ont sollicité l'annulation du jugement dans la déclaration d'appel au visa des articles 455 et 458 du code de procédure civile.

S'agissant de la déclaration d'appel, ils font valoir que celle-ci porte sur les éléments qui n'ont pas été jugés par le tribunal et les demandes auxquelles il n'a pas répondu. Ainsi, si l'appel principal porte sur l'annulation du jugement entrepris, il est mentionné dans le corps de la déclaration d'appel l'ensemble des éléments sur lesquelles ils entendent qu'ils soient jugés.

Sur la recevabilité de leurs demandes, les appelants se prévalent de leurs qualités de nus-propriétaires, leur mère ayant opté pour l'usufruit, et soutiennent avoir un droit légitime à préserver l'intérêt patrimonial de l'indivision.

S'ils ne contestent pas le fait que leur père a pu confier de son vivant la gestion des biens à cette agence et que leur mère peut continuer à percevoir les loyers, ils font valoir cependant que la propriétaire commerciale engage le nu propriétaire au visa des articles 595, 604 à 606 du code civil. Ils précisent à cet égard que l'usufruitier ne peut seul, sans le concours du nu propriétaire, donner à bail un local commercial.

Ils réclament en conséquence la mise en cause de la responsabilité de l'agence à laquelle ils reprochent plusieurs fautes de gestion :

la gestion de l'immeuble situé [Adresse 7] à [Localité 10] sans vérifier la qualité de propriétaire du mandant ;

le mandat de gestion n'autorise pas l'agence à renouveler les baux commerciaux ;

l'absence de mandat de gestion conforme aux dispositions de la loi Hoguet qui précisent les modalités selon lesquelles le mandat doit être conclu à peine de nullité ;

la conclusion de baux commerciaux par la seule usufruitière, sans implication des nus propriétaires, est fautive tout comme leur renouvellement ;

l'agence a assuré la gestion des locaux commerciaux en se substituant à Mme [I] [M] et sans aucun mandat de gestion ;

l'agence n'a pas informé Mme [I] [M] de la gestion de l'immeuble par la remise d'un compte-rendu ; ils ont ainsi appris le renouvellement du bail commercial le 18 décembre 2013 au bénéfice de la société [15] sans mandat de gestion et sans aucune intervention d'un membre de l'indivision [M] faisant état dans le bail de [W] [M], s'ur du défunt mais non héritière;

l'agence a modifié les clauses du bail commercial sans aucune autorisation.

Les appelants soutiennent encore que l'agence intimée a une parfaite conscience de ses fautes puisqu'elle a régularisé la situation en 2014 en faisant signer deux mandats de gestion portant sur les deux lots à usage de commerce de l'immeuble sis [Adresse 7] à [Localité 10].

Ils relèvent par ailleurs l'opposition dont a fait preuve l'agence qui a refusé de produire l'ensemble des pièces relatives à la gestion de l'immeuble malgré les sollicitations présentées en première instance.

Ainsi, ils s'interrogent sur la gestion du local donné en location à la société [15] aujourd'hui en liquidation judiciaire et notamment sur une éventuelle déclaration de créance, sur l'organisation d'un état des lieux, le sort du dépôt de garantie'l'intimée ne fournissant aucune réponse. Il en est de même pour le local commercial occupé par la société [22] qui a été donné en location sans leur accord. La question se pose notamment de l'application de l'indexation du loyer.

Ils soutiennent qu'aujourd'hui, si leur préjudice matériel ne peut être évalué en l'absence de production d'éléments relatifs à cette gestion, ils peuvent solliciter l'indemnisation de leur préjudice moral puisqu'ils ont été évincés de la gestion de l'immeuble par la faute de la société intimée qui a adopté à leur encontre une attitude vexatoire, agressive et injurieuse ce que reflètent d'ailleurs les conclusions produites de sa part en première instance.

Ils réclament enfin la condamnation de la société [18] à la production de divers documents en lien avec la gestion des biens dont ils sont propriétaires.

Dans ses dernières conclusions déposées le 18 novembre 2022, la SARL [18] demande :

Vu les articles 9, 31, 32-1, 122, 125, 15, 132, 562, 901 et 954 du code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance d'injonction de Madame la conseillère de la mise en état du 15 novembre 2022 ;

Vu l'article 1382 ancien du code civil (article 1240 nouveau) ;

Vu l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;

Vu le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Montpellier le 1er mars 2018 ;

Vu l'appel inscrit par Madame [B] [M] et Monsieur [X] [M] à l'encontre de ce jugement,

Retenir que l'effet dévolutif n'a pu jouer et que la cour n'est pas saisie ;

Rejeter même d'office l'appel de Madame [B] [M] et de Monsieur [X] en ce qu'il est injuste, irrecevable et mal fondé ;

Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions en ce compris celles relatives à l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouter Madame [B] [M] et Monsieur [X] [M] de l'intégralité de leurs demandes fins et prétentions,

Et, plus particulièrement :

Rejeter l'action de Madame [B] [M] et Monsieur [X] [M] qui est irrecevable en ce qu'ils n'ont pas d'intérêt à agir puisqu'ils prétendent exercer une action délictuelle mais ne rapportent pas la moindre preuve d'un préjudice certain et actuel en lien avec la litanie de prétendues fautes dont ils demandent à la cour de dresser la liste ;

Opposer l'incompétence et l'autorité de chose jugée à la demande de communication de pièces en ce qu'une telle demande relève de la compétence du juge de la mise en état et désormais du conseiller de la mise en état (article 770 du code de procédure civile) et en ce que le juge de la mise en état a déjà statué sur cette demande par une ordonnance qui n'a pas fait l'objet de recours ;

Débouter Monsieur [X] [M] et Madame [B] [M] de leurs demandes de communication de pièces et plus encore de leurs demandes tendant à ce que leurs prétendus droits à obtenir la communication de ces pièces soient réservés alors que ce droit n'est ni certain ni actuel ;

En toutes hypothèses,

Constater que Madame [B] [M] soutient qu'elle n'est pas liée par mandat à la SARL [18], et que Monsieur [X] [M] ne produit pas plus de mandat ;

Débouter en conséquence Monsieur [X] [M] et Madame [B] [M] de leurs demandes tendant à obtenir la condamnation de la SARL [18] à procéder à la reddition de compte, reddition qui, au demeurant, concerne l'usufruitier et non le nu-propriétaire ;

Statuer ce que de droit sur l'amende civile ;

Condamner solidairement les consorts [M] à payer à la SARL [18] la somme de 5 000 € en réparation du préjudice que la procédure abusive engagée par eux pour lui nuire ;

Condamner solidairement les consorts [M] à lui payer la somme de 5 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, somme venant en plus de celle déjà allouée par le premier juge, ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

Au soutien de ses conclusions, la société [18] fait valoir que l'assignation délivrée en première instance par Mme [B] [M] doit s'analyser comme une tentative d'extorsion de fonds.

Elle explique à titre liminaire qu'un mandat de gestion a été signé le 24 novembre 2010 avec Mme [I] [M] sans que cette dernière ne l'avise de l'existence de l'indivision successorale et des difficultés afférentes. L'intimée s'étonne de l'absence de réaction de Mme [B] [M] qui a laissé sa mère gérer seule les biens sans pour autant aviser l'agence de l'existence de ses droits sur l'immeuble litigieux et engager après sept années une action dont la seule finalité est d'obtenir des fonds.

En premier lieu, en réponse à l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 novembre 2022, et tenant le libellé de la déclaration d'appel, l'intimée considère que l'existence d'un appel nullité est contestable dans la mesure où les conclusions des appelants ne comportent aucun élément en lien avec cette prétention. Sur ce, elle rappelle que « lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas ».

Il s'ensuit qu'en l'absence d'un appel nullité, la cour doit juger que l'appel interjeté par les consorts [M] est dépourvu d'effet dévolutif et qu'elle n'en est pas saisie.

Sur le défaut de qualité à agir des consorts [M], la société intimée fait valoir que Mme [B] [M] ne justifie pas de ses droits sur l'immeuble litigieux, la seule remise d'un acte de notoriété étant à ce jour insuffisant, et ne produit aucune pièce permettant de savoir si la succession a bien été réglée. Elle réclame donc la confirmation du jugement sur ce point.

Sur la mise en cause de sa responsabilité, l'agence relève l'absence de preuve d'une quelconque faute à son encontre et de dommage en lien avec les griefs relevés. Elle considère pour sa part que dans le cadre du mandat de gestion confié par Mme [I] [M], elle n'avait pas à tenir informer les appelants de la gestion de l'immeuble en cause à charge pour eux de réclamer des renseignements auprès de leur mère.

Sur la production de pièces, elle rappelle que l'ordonnance du juge de la mise en état, qui n'a pas été contestée, a rejeté cette demande considérant l'absence de relation contractuelle entre l'agence et Mme [B] [M], qui ne dispose d'aucun mandat de représentation de l'indivision [M].

Sur le renouvellement du bail au profit de la société [22], elle précise que la demande a été adressée directement par le preneur à Mme [I] [M] sans qu'elle n'intervienne et qu'elle ne soit sollicitée par l'intéressée étant relevé que Mme [B] [M] a également été avisée de ce renouvellement par le locataire lui-même.

Sur le renouvellement du bail au profit de la société [15], elle précise que ce bail a été renouvelé par tacite reconduction jusqu'au 25 mars 2016, date à laquelle une demande de renouvellement a été présentée par le locataire à Mme [B] [M].

Il en résulte que l'inopposabilité des baux, telle que sollicitée par les appelants, n'est nullement justifiée.

Cet appel, qu'elle considère comme abusif, justifie l'allocation de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile.

MOTIFS

1/ Sur la recevabilité de l'appel:

Selon l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction de premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.

L'article 901 énonce que « la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le « cinquième » alinéa de l'article 57, et à peine de nullité : '

4° les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet est indivisible ».

Le 26 mars 2018, les consorts [M] ont interjeté appel à l'encontre du jugement rendu le 1er mars 2018 par le tribunal de grande instance de Montpellier.

Cette déclaration d'appel est ainsi rédigée :

« Appel total et demande de nullité du jugement pour ne pas avoir répondu sur les insultes et

Vu les articles 595, 1984 et 1382 devenu 1240 du code civil,

Vu la loi Hoguet,

Dire et juger que l'agence [18] gère un bien appartenant à l'indivision [M] sans mandat consenti pour les nus propriétaires,

Dire et juger que l'agence immobilière n'a effectué à l'égard du nu-propriétaire aucune reddition de compte,

Dire et juger qu'elle a consenti un bail commercial entre un locataire en titre et une personne qui n'avait pas la qualité de propriétaire de l'immeuble [Adresse 7], de surcroît en l'absence de nu-propriétaire, et accordant des droits supplémentaires non prévus au bail et en modifiant la convention sans en informer les propriétaires et éventuellement l'usufruitière,

Dire et juger qu'elle a laissé renouveler un bail commercial au profit du Fournil sans informer le locataire de la présence de nus propriétaires et effectuer ainsi le renouvellement régulier à l'égard de l'ensemble des propriétaires de l'immeuble [Adresse 7] pour la partie locaux loués à la Sarl [21],

Dire et juger en conséquence inopposable les baux renouvelés ou la demande de renouvellement effectuée par les locataires en l'absence du nu-propriétaire,

Réserver les droits de la requérante à pouvoir réclamer le moment venu, la fin des contrats et l'expulsion des locataires sans droit ni titre à son égard,

Sur l'agence immobilière :

Dire et juger qu'elle a agi sans mandat sur les biens immobiliers appartenant à l'indivision,

Dire et juger qu'elle ne s'est pas assurée de la qualité de propriétaire de la personne qui lui confiait les mandats,

Dire et juger qu'elle a manqué à son obligation de vérifier la qualité de propriétaire des personnes qui se présentent pour gérer ses biens,

En conséquence,

Tenant l'absence de réédition de comptes,

Tenant l'absence d'information sur le suivi de la gestion et de la faute reconnue à travers la production d'un mandat tardivement après avoir rejeté la requérante comme étant prétendument non héritière de ses parents, a discuté vainement de la qualité de propriétaire des biens, objet du litige,

Tenant le comportement de l'agence et les infractions commises, le non-respect de la loi Hoguet, le non-respect des dispositions sur le mandat, et les arguments vexatoires,

Condamner l'agence [18] à payer à la requérante la somme de 20.000 euros à titre de préjudice moral,

Réserver les droits de la requérante à l'encontre de l'agence, une fois que seront produits les comptes, les mandats donnés par Mme [P] à l'agence immobilière et tous éléments de gestion non produits à ce jour ».

Les consorts [M] réclament la nullité du jugement entrepris au motif que les premiers juges n'ont pas statué sur la demande tendant à obtenir le retrait des paragraphes litigieux faisant fi également de leurs autres prétentions.

L'appel-nullité est réservé au seul cas d'excès de pouvoir qui est retenu lorsque le juge adopte un comportement ou prend une décision qu'aucun juge ne peut adopter ou prendre dans une situation similaire. L'appel-nullité est recevable dès lors qu'est mise en évidence la violation d'un principe essentiel de procédure.

Le fait de ne pas répondre à une prétention caractérise une omission de statuer et non un excès de pouvoir de telle sorte que l'appel-nullité n'est pas recevable.

De surcroît, l'appel annulation prescrit à l'article 542 du code de procédure civile permet d'obtenir la nullité du jugement en cas de violation des dispositions énoncées aux articles 447 et suivants et notamment dans l'hypothèse de la violation du principe du contradictoire, d'une nullité de l'assignation' En aucun cas, l'omission de statuer ne saurait motiver l'annulation du jugement déféré.

L'appel aux fins d'obtenir la nullité du jugement n'est donc pas recevable.

Enfin, les consorts [M] saisissent la cour d'un « appel total ».

Or, la déclaration d'appel, qui ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués, ne permet pas à l'effet dévolutif de jouer. Ainsi, la mention « appel total » ne peut être regardée comme emportant la critique de l'intégralité des chefs du jugement entrepris de telle sorte que la déclaration d'appel doit être déclarée irrecevable.

2/ sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :

L'irrecevabilité de l'appel ne caractérise pas en soi un abus de procédure. Par ailleurs, en l'absence d'élément de nature à établir que les appelants ont agi de mauvaise foi ou dans une intention malicieuse, il convient de débouter la société intimée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

3/ Sur les frais accessoires :

Les consorts [M] doivent être condamnés aux dépens d'appel et à payer à la société [18] une somme de 1.500 euros.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe en dernier ressort,

Prononce l'irrecevabilité de l'appel interjeté par Monsieur [X] [M] et Madame [B] [M] le 26 mars 2018,

Déboute la société [18] de sa demande de dommages et intérêts,

Condamne solidairement Monsieur [X] [M] et Madame [B] [M] à payer à la société [18] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/01631
Date de la décision : 07/05/2024
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-07;18.01631 ?
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