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02/05/2024 | FRANCE | N°20/03730

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 02 mai 2024, 20/03730


ARRÊT n°



































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1re chambre sociale



ARRET DU 02 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03730 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OVUC





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 24 JUILLET 2020 du CONSEIL DE PRUD'HOMMES

- FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS - N° RG F 19/00314





APPELANT :



Monsieur [G] [W]

[Adresse 3]

Représenté par Me Jean-François MOSSUS, avocat au barreau de BEZIERS



INTIMEES :



Me Vincent AUSSEL - Mandataire liquidateur de l'Association LIEU DE VIE L'EQUINOXE

[Adresse 1]

Représenté ...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 02 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03730 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OVUC

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 24 JUILLET 2020 du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS - N° RG F 19/00314

APPELANT :

Monsieur [G] [W]

[Adresse 3]

Représenté par Me Jean-François MOSSUS, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMEES :

Me Vincent AUSSEL - Mandataire liquidateur de l'Association LIEU DE VIE L'EQUINOXE

[Adresse 1]

Représenté par Me Anaïs ROUSSE, avocat au barreau de MONTPELLIER (postulant)

Représenté par Me Camille DE BAILLEUL de la SARL DE BAILLEUL AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER (plaidant), substituée pa Me CROS, avocate au barreau de Montpellier

Association AGS (CGEA-[Localité 4])

[Adresse 2]

[Adresse 2]

non représentée, assignée par signification de la déclaration d'appel et des conclusions le 28/08/2023 à personne habilitée

Ordonnance de clôture du 14 Février 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Mars 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

M. Jean-Jacques FRION, Conseiller

Mme Anne MONNINI-MICHEL, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Marie BRUNEL

ARRET :

- réputé contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

[G] [W] a été engagé le 9 mai 2017 par l'association Lieu de vie l'Equinoxe, actuellement en liquidation judiciaire, en qualité d'éducateur. Il percevait en dernier lieu une rémunération brute mensuelle de 2 442,44€.

Le 21 novembre 2018, ce contrat a fait l'objet d'une rupture conventionnelle.

Le 8 août 2019, sollicitant le paiement de diverses sommes et indemnités, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Béziers qui, par jugement en date du 24 juillet 2020, a condamné l'association l'Equinoxe au paiement de :

- la somme de 2 577,12€ brut à titre de rappel d'heures supplémentaires pour l'année 2017, outre 257,71€ au titre des congés payés afférents,

- la somme de 6 051,76€ brut à titre de rappel d'heures supplémentaires pour l'année 2018, outre 605,17€ au titre des congés payés afférents,

- les sommes de 356,12€ brut à titre d'indemnité compensatrice de repos pour l'année 2017 et de 1 725,46€ pour l'année 2018,

- la somme de 64,51€ au titre de rappel d'indemnité de rupture conventionnelle,

- 1 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Il a également été ordonné la remise de documents sous astreinte et les parties ont été déboutées de leurs autres demandes.

Le 7 septembre 2020, [G] [W] a interjeté appel. Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 22 août 2023, il conclut à la réformation et à l'octroi de :

- la somme de 38 421,39€ brut à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre une indemnité compensatrice de congés payés de 3 842,14€ brut, pour l'année 2017,

- la somme de 83 005,56€ brut à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre une indemnité compensatrice de congés payés de 8 300,56€ brut, pour l'année 2018,

- les sommes de 11 625,23€ brut à titre d'indemnité compensatrice de repos pour l'année 2017 et de 30 723€ brut pour l'année 2018,

- la somme de 1 500€ à titre de dommages et intérêts pour la violation des dispositions relatives à la durée du travail et aux repos journaliers et hebdomadaires,

- la somme de 1 500€ à titre de dommages et intérêts relatifs de la violation des dispositions légales concernant les congés payés,

- la somme de 907,78€ à titre de rappel d'indemnité de rupture conventionnelle,

- la somme de 2 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il demande de juger que le mandataire liquidateur devra lui remettre sous astreinte un bulletin de paie récapitulatif ainsi qu'une attestation Pôle emploi rectifiée.

Dans ses conclusions déposées par RPVA, Me [P], ès-qualités de mandataire liquidateur de l'association Lieu de vie l'Equinoxe, demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement, de rejeter les prétentions adverses et de lui allouer la somme de 2500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre infiniment subsidiaire, il demande de confirmer le jugement, sauf sur la remise des documents et la condamnation à une astreinte, et de condamner le salarié à lui verser la somme de 2 500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 4], à qui [G] [W] a fait signifier la déclaration d'appel et ses conclusions le 28 août 2023, n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il y a lieu de se reporter au jugement du conseil de prud'hommes et aux conclusions déposées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la convention de forfait en jours :

Le contrat de travail du salarié prévoyait que la durée de travail était fixée à 258 jours par an.

Les parties s'accordent pour dire que cette convention de forfait jours entrait dans le cadre de l'article L. 433-1 du code de l'action sociale et de la famille.

Aux termes de cet article, dans sa version résultant de la loi du 8 août 2016, « les permanents responsables et les assistants permanents des lieux de vie et d'accueil ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la durée du travail, à la répartition et à l'aménagement des horaires des titres Ier et II du livre Ier de la troisième partie du code du travail ni aux dispositions relatives aux repos et jours fériés des chapitres Ier et II ainsi que de la section 3 du chapitre III du titre III de ce même livre.

Leur durée du travail est de 258 jours par an.

Les modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés sont définies par décret... ».

A la date d'exécution de la prestation de travail, le décret d'application auquel renvoie l'article L. 433-1 susvisé, pour la détermination des modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés, nécessaire à la garantie du droit à la santé et au repos par une amplitude et une charge de travail raisonnables assurant une bonne répartition dans le temps du travail du salarié, n'était pas intervenu ;

Cependant, le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles mais aussi européennes puisque si l'aménagement du temps de travail des activités de garde, de surveillance et de permanence est prévu la directive n°2003/88/CE du 4 novembre 2003, il résulte néanmoins des articles 17, § 1, et 19 de cette directive que les Etats membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur.

Ainsi, l'absence de décret d'application concernant les modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés a pour conséquence de priver d'effet la convention de forfait, ce qui permet au salarié de prétendre au paiement d'heures supplémentaires dont il convient de vérifier l'existence et le nombre.

Sur les heures supplémentaires :

Il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Outre un décompte des heures supplémentaires qu'il prétend avoir accomplies, [G] [W] fournit un planning annuel sur lequel il a mis en évidence les jours qu'il dit avoir travaillé ainsi que plusieurs attestations qui affirment qu'il avait la charge de quatre enfants et qu'il travaillait de manière continue « jour et nuit ».

Il fait ainsi ressortir que sa demande est fondée sur des éléments suffisamment précis.

Le mandataire liquidateur rappelle que le principe du lieu de vie est la présence d'enfants au domicile de l'éducateur ce qui n'empêche pas le salarié de vaquer à ses obligations personnelles dès lors que les enfants sont occupés et sont, à titre d'exemple, à l'école.

Il critique les attestations qui émanent de salariés également en contentieux.

Il est rappelé que le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord de l'employeur, fût-il implicite, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

Ainsi, après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, il y a lieu de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes qui a exactement évalué à 2 577,12€ le montant dû au salarié à titre d'heures supplémentaires pour l'année 2017 et à 6051,76€ pour l'année 2018, augmentés des congés payés afférents.

Sur les repos compensateurs :

La contrepartie en repos est due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel, lequel, en l'absence d'accord, est fixé par décret. Elle s'ajoute à la rémunération des heures au taux majoré ou au repos compensateur de remplacement.

La convention relative aux établissements médico-sociaux de l'union intersyndicale des secteurs sanitaires et sociaux fixe le contingent d'heures supplémentaires annuel à 110 heures.

[G] [W], qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur, a droit à l'indemnisation du préjudice subi.

Le conseil de prud'hommes a, au vu des pièces produites et tenant compte des heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent, exactement fixé celui-ci à la somme de 356,12€ pour l'année 2017 et à la somme de 1 725,46€, celles-ci comportant à la fois le montant de l'indemnité calculée comme si le salarié avait pris son repos et le montant des congés payés afférents ;

Sur les repos journaliers et hebdomadaires :

Selon les articles L. 3132-1 et L. 3132-2 du code du travail, un salarié ne peut en principe être occupé plus de six jours par semaine et doit disposer d'un repos hebdomadaire minimum de vingt-quatre heures consécutives, ce qui signifie qu'il doit bénéficier d'au moins un jour complet de repos chaque semaine.

Le salarié doit également bénéficier d'un repos journalier de onze heures consécutives.

Le mandataire liquidateur, ès-qualités, à qui incombe la charge de la preuve, n'apporte aucun élément de nature à établir que l'employeur aurait respecté ses obligations en matière de repos quotidien et hebdomadaire.

Il ne discute d'ailleurs pas les décomptes fournis par le salarié selon lesquels, à de nombreuses reprises, il aurait travaillé entre douze et vingt-trois jours consécutifs, sans repos.

Le salarié peut prétendre en conséquence à des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la violation des dispositions légales qui, au des pièces soumises à l'appréciation de la cour, seront évalués à la somme de 1 500€.

Sur les congés payés :

Il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement.

L'inclusion de l'indemnité de congés payés dans la rémunération, justifiée par des circonstances particulières tenant à l'emploi, ne permet pas de suppléer la prise effective des congés payés.

En l'espèce, alors que le salarié conteste avoir bénéficié de congés payés, s'appuyant sur les attestations qu'il produit, le mandataire liquidateur se borne à soutenir que la première année de travail, [G] [W] ne pouvait prendre de congés et que les jours en dehors du forfait constituent des congés payés, sans démontrer leur prise effective.

Au vu des éléments soumis à la cour, le préjudice du salarié sera justement indemnisé par l'octroi de la somme de 1 000 €.

Sur l'indemnité de rupture conventionnelle :

Au regard du montant des heures supplémentaires rappelées, le conseil de prud'hommes a exactement évalué le rappel d'indemnité de rupture conventionnelle.

Sur les autres demandes :

Il convient de condamner Maître [Z] [P], ès-qualités, à reprendre les sommes allouées à titre de rappel de salaire et d'indemnités de rupture sous forme d'un bulletin de paie et à rectifier, conformément au présent arrêt, l'attestation destinée au Pôle emploi, sans qu'il ne soit nécessaire d'assortir les mesures d'une astreinte.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirmant le jugement et statuant à nouveau :

Fixe la créance de [G] [W] au passif de l'association Lieu de vie l'Equinoxe à :

- la somme de 1 500 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives à la durée du travail ;

- la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives aux congés payés ;

Dit n'y avoir lieu à assortir la décision de remise des documents rectifiés d'une astreinte ;

Confirme le jugement pour le surplus, sauf à fixer les sommes dues à titre de créance ;

Rejette toute autre demande ;

Dit que la créance de [G] [W] comportera les dépens de première instance et d'appel ;

Déclare le présent arrêt opposable à l'Unedic délégation AGS-CGEA de [Localité 4] en application des articles L. 3253-6 et suivants du code du travail, dans les limites fixées par l'article D. 3253-5, cette garantie ne s'étendant ni à la somme allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ni aux dépens.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/03730
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;20.03730 ?
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