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29/04/2024 | FRANCE | N°21/02304

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 29 avril 2024, 21/02304


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 29 AVRIL 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02304 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O6LA



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 MARS 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIR

E DE MONTPELLIER - N° RG F 18/00953







APPELANTE :



Madame [R] [N]

née le 13 Octobre 1972 à [Localité 9] (MAROC)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]



Représentée par Me Ratiba OGBI, avocat au barreau de MONTPELLIER









INTIMEE ...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 29 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02304 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O6LA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 MARS 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 18/00953

APPELANTE :

Madame [R] [N]

née le 13 Octobre 1972 à [Localité 9] (MAROC)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Ratiba OGBI, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE et intervenant volontaire :

S.A.S. GROUPE NOCIBE, Venant aux droits de la SAS NOCIBE, Venant aux droits de la SAS NOCIBE FRANCE DISTRIBUTION

Prise en la personne de son représentant légal domicilié ès-qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Mélanie MARREC de la SELARL LEXEM CONSEIL, avocat au barreau de MONTPELLIER

Assistée par Me Ludovic RIVIERE de la SELARL LUDOVIC RIVIERE, avocat au barreau de TOULOUSE

Ordonnance de clôture du 26 Février 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence FERRANET, Conseiller, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Florence FERRANET, Conseiller

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [N] a été embauchée par la société Lavigne exploitant les parfumeries de l'enseigne Elytis, selon contrat à durée indéterminée du 30 novembre 1998 avec effet au 1er décembre 1998, en qualité de conseillère de vente, pour une durée de travail hebdomadaire de 39 heures selon les dispositions de la convention de la parfumerie-esthétique. En 2004, le contrat de travail de Mme [N] a été transféré à la société Parfumerie Douglas, son lieu de travail étant situé au [Adresse 4] à [Localité 8].

Le 31 mars 2015, suite au rachat de la société Nocibé par Douglas, les sociétés Parfumerie Douglas France et Nocibé France Distribution fusionnaient ; cette dernière, exploitant sur l'ensemble du territoire national des magasins de parfumerie et cosmétique de l'enseigne Nocibé, a poursuivi l'exécution des contrats de travail des salariés de la société Parfumerie Douglas. Mme [N] a continué à travailler au sein du magasin de la [Adresse 6] à [Localité 8] sans que ses fonctions de conseillère de vente ne soient modifiées.

Le 4 décembre 2017, le lieu de travail de Mme [N] a été modifié et fixé sur le point de vente de l'enseigne Nocibé situé dans le centre commercial [7] à [Localité 8].

Le 23 mars 2018, Mme [N] a été placée en arrêt de travail jusqu'au 29 juin 2018.

Le 16 avril 2018, la responsable de magasin Mme [G] notifiait à Mme [N] un avertissement pour des faits qui se sont déroulés en février et mars 2018.

Le 24 avril 2018, suite à une visite de pré-reprise, le médecin du travail indiquait que Mme [N] « ne peut reprendre son travail actuellement » et le 2 mai 2018, il concluait à une « inaptitude à prévoir ». A l'issue de la visite de reprise du 1er juin 2018, le médecin du travail déclarait Mme [N] inapte à son poste, précisant que « tout maintien de la salariée dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ».

A compter du 1er juillet 2018, le paiement des salaires était repris au profit de Mme [N].

Le 16 juillet 2018, Mme [N] était convoquée à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement, cet entretien étant fixé au 27 juillet 2018. Mme [N] ne s'est pas présentée à l'entretien. Par courrier du 14 août 2018, Mme [N] a été licenciée pour inaptitude.

Par déclaration au greffe du 19 septembre 2018, Mme [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins de voir prononcer la nullité du licenciement et de l'avertissement, et de voir condamner la société Nocibé France Distribution à lui verser les sommes de :

-        70 000 € nets de CSG/CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

-         5 908 € d'indemnité compensatrice de préavis ;

-         590,80 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

-         20 000 € nets de CGS de dommages et intérêts pour le préjudice moral ;

-         2 000 € de dommages et intérêts pour le préjudice moral lié à l'annulation de l'avertissement ;

-         8 000 € nets de CSG à titre de dommages et intérêts pour la perte des droits à la retraite à taux plein ;

-         2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Par jugement rendu le 24 mars 2021, le conseil de prud'hommes a débouté Mme [N] de l'ensemble de ses demandes, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et laissé les dépens à la charge de la partie qui succombe.

**

Mme [N] a interjeté appel de ce jugement le 9 avril 2021, intimant la société Nocibé France Distribution.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe par RPVA le 13 février 2024, Mme [N] demande à la cour de :

Infirmer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau :

Annuler l'avertissement notifié par la société Groupe Nocibé le 16 avril 2018 ;

Condamner la société Groupe Nocibé au paiement de la somme de 2 000 € nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de cet avertissement ;

 Condamner la société Groupe Nocibé au paiement de la somme de 20 000 € nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral découlant de la violation de l'obligation de sécurité de résultat ;

 Prononcer la nullité du licenciement de Mme [N] ;

Condamner la société Groupe Nocibé au paiement de la somme de 70 000 € net de CGS et CRDS à titre de dommages et intérêt pour licenciement nul ;

 Condamner la société Groupe Nocibé au paiement de la somme de 5 908,96 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

 Condamner la société Groupe Nocibé au paiement de la somme de 8 000 € nets de CSG et CRDS à titre de dommages et intérêts pour perte des droits à une retraite à taux plein ;

Assortir de l'intérêt au taux légal lesdites sommes à caractère salarial depuis la demande en justice soit le 19 septembre 2018 ;

Assortir de l'intérêt au taux légal les sommes à caractère indemnitaire à compter de l'arrêt à intervenir ;

A titre subsidiaire, de juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse faute de recherche de reclassement ;

Condamner la société Groupe Nocibé au paiement de la somme de 70 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamner la société Groupe Nocibé à la remise d'un bulletin de paie se rapportant au préavis conforme à la décision à intervenir ;

Condamner la société Groupe Nocibé au paiement d'une somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

**

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe par RPVA le 22 février 2024, la société Groupe Nocibé (venant aux droits de la société Nocibé France venant elle-même aux droits de la société Nocibé France Distribution) demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Elle demande à la cour de condamner Mme [N] au paiement de la somme de 2 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

**

Pour l'exposé des moyens, il est renvoyé aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 26 février 2024 fixant la date d'audience au 11 mars 2024.

 

MOTIFS :

Sur l'avertissement :

L'article L.1331-1 du code du travail prévoit que « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ».

En application des dispositions de l'article L.1333-1 du code du travail, en cas de litige, la juridiction saisie apprécie la régularité de la procédure disciplinaire suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit à la juridiction les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, elle forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'elle estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Mme [N] sollicite l'annulation de l'avertissement qui lui a été notifié le 16 avril 2018. Cet avertissement vise deux séries de griefs à savoir :

- des retards nuisant à l'organisation du magasin (15 minutes le 2 février 2018 et 10 minutes le 22 février 2018) ;

- le non respect le 8 février des consignes relatives au positionnement dans le magasin, le 3 mars des consignes relatives à l'usage du téléphone personnel durant le temps de travail et le 16 mars les consignes relatives aux procédures de caisse.

S'agissant des retards :

Mme [N], d'une part, reconnaît être arrivée en retard de quelques minutes le 2 février 2018 mais fait valoir d'une part que ce grief est prescrit et que ce retard lié à une mauvaise lecture du planning n'a eu aucune incidence sur le commerce et d'autre part reconnaît avoir été en retard de 10 minutes sur le point de vente le 22 février 2018, du fait des difficultés avec les transports en commun. Elle ne produit aucune pièce justifiant de difficultés dans les transports en commune ce 2 février 2018.

Le retard du 2 février 2018 n'est pas prescrit dans la mesure où Mme [N] a réitéré ce comportement le 22 février 2018 dans le délai de deux mois prévu par l'article L.1332-4 du code du travail. Le premier grief est matériellement justifié.

L'employeur soutient que le retard de 15 minutes le 2 février a obligé la responsable à faire appel à une collaboratrice du point de vente voisin, mais ce fait est contesté par la salariée et l'employeur ne produit aux débats aucune pièce en justifiant. Il affirme dans ses conclusions que des retards avaient déjà été constatés le 4 décembre 2017 et le 22 janvier 2018, mais il ne produit aucune pièce à l'appui de son affirmation.

Il est donc établi que Mme [N] a été deux fois en retard le 2 puis le 22 février 2018 sans qu'il ne soit justifié que ces deux retards ont désorganisé le magasin au point d'avoir recours à un salarié extérieur.

S'agissant du non-respect des consignes :

L'employeur reproche à Mme [N] d'avoir le 16 mars à 17 heures encaissé une cliente alors qu'une autre collègue était en charge des encaissements, ce qui a contrainte la responsable adjointe de magasin qui était au téléphone avec une cliente afin de régler un litige lié à une commande express, à la solliciter pour avoir accès à la caisse, que Mme [N] a alors marmonné et râlé ce qui a occasionné des regards insistants et dédaigneux des clients à l'encontre de la directrice adjointe, que la salariée n'a ainsi pas respecté la consigne de n'ouvrir une caisse qu'au-delà de 3 clientes présentes dans le magasin, outre un comportement inapproprié.

Pour justifier de ce fait il produit aux débats l'attestation de Mme [I], responsable de magasin adjointe qui déclare qu'elle a dû téléphoner au service client et informatique pour résoudre un soucis avec une cliente, qu'elle a donc du bloquer une caisse, qu'une autre conseillère était à la caisse d'à coté pour encaisser une cliente, que Mme [N] lui a demandé de libérer la caisse, qu'elle lui a alors dit que ce n'était pas possible et qu'elle devait faire patienter sa cliente, qu'elle a insisté et a marmonné des mots à ses clientes qu'elle n'a pas entendu mais que ces dernières ont eu un regard insistant et dédaigneux à son égard.

Mme [N] conteste cette version des faits affirmant qu'il y avait un flux dense à la caisse, que l'opération qu'elle souhaitait réaliser (modifier le montant d'une réduction) était rapide, que son adjointe lui a dit « c'est bon, vas y » d'un ton désagréable devant tout le monde, qu'elle même s'est excusée et a rapidement libérée la caisse qui était bloquée par l'adjointe depuis 15 minutes sans l'utiliser à 17 heures un vendredi.

Mme [N] tout en faisant état d'un flux dense à la caisse n'indique pas qu'il y avait plus de 3 clientes en attente d'encaissement, ce qui l'autorisait à ouvrir la seconde caisse, il en résulte que le grief est justifié.

Sur les faits du 8 février, savoir que Mme [N] a parlé de façon agressive à sa collègue, étant mécontente d'être placée à l'avant du magasin, l'employeur produit aux débats l'attestation de Mme [V] qui déclare que Mme [N] a refusé d'aller à l'avant du magasin, puis qu'elle est ensuite venue à l'avant et lui a dit « non mais va au fond, je vais à l'avant » puis qu'à l'arrivée de la responsable et alors qu'elle essayait d'expliquer la situation Mme [N] lui a coupé la parole.

Mme [N] soutient que ce grief est prescrit et conteste ce témoignage, toutefois elle reconnaît qu'elle a sollicité sa collaboratrice pour être placée vers le centre du magasin mais soutient que c'est Mme [V] qui a eu un propos agressif à son encontre.

Le grief n'est pas prescrit dès lors qu'il est reproché à Mme [N] un même comportement inadapté envers les autres salariés le 16 mars 2018, dans le délai de deux mois prévu par l'article L.1332-4 du code du travail, toutefois il n'est pas démontré le comportement agressif de Mme [N] à l'encontre de Mme [V] en l'état des versions contradictoires des deux parties et en l'absence de tout autre élément de preuve.

Sur les faits du 3 mars 2018, savoir d'avoir placé son téléphone portable dans sa pochette de maquillage, comportement interdit par l'article 27 règlement intérieur de l'entreprise, « l'usage du téléphone personnel durant le temps de travail est formellement interdit en surface de vente », l'employeur produit l'attestation de Mme [I], responsable adjointe, qui déclare : « J'ai constaté le 3 mars 2018 à ma prise de poste à 11h30 que Mme [N] avait son téléphone portable dans sa trousse de maquillage. Je lui ai donc demandé de le ranger dans son casier en lui précisant que cela était interdit et noté dans le règlement de la société, et elle l'a fait de suite sans rien dire ».

Mme [N] ne conteste pas avoir utilisé son téléphone le 3 mars 2018 et explique s'en être servie, en cette journée de neige, pour montrer à ses collègues de travail l'annonce de la fermeture des boutiques en raison de l'alerte rouge lancée par la Préfecture de l'Hérault. Cette affirmation ne constitue pas un fait justificatif du manquement.

Les griefs justifiés à l'encontre de Mme [N], savoir deux retards les 2 et 22 février 2018, un comportement non respectueux des consignes de caisse le 16 mars 2018 et le non-respect le 3 mars 2018 de l'interdiction de conserver son téléphone sur le lieu de vente, justifient la sanction disciplinaire d'avertissement qui a été notifiée à la salariée, Mme [N] sera déboutée de sa demande d'annulation et de dommages et intérêts consécutive, le jugement sera confirmé de ce chef.

 Sur la violation de l'employeur à son obligation de sécurité :

L'article L 4121-1 du code du travail prévoit que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

Mme [N] soutient que son employeur a violé son obligation de sécurité car elle est devenue « la cible privilégiée » de la nouvelle responsable du point de vente auquel elle a été affectée le 4 décembre 2017, que cette responsable avait un comportement inadapté à son égard tels que des propos déplacés, des reproches sans fondement, un refus injustifié de lui accorder une prise de congés et le fait qu'elle la rabaissait devant les clientes, que ce comportement est à l'origine de son arrêt de travail pour stress anxio-dépressif du 23 mars 2018, qu'elle a en outre reçu un avertissement injustifié le 16 avril 2018. Elle produit pour justifier de ses affirmations son dossier médical de la médecine du travail, trois attestations d'anciennes clientes, l'attestation du docteur [E] du 14 mai 2018 et les avis du médecin du travail.

L'employeur répond que les attestations ne démontrent aucun manquement, que le nom de la responsable incriminée n'est pas précisé, que le dossier médical et les attestations médicales ne font que reprendre des doléances de la salariée sans prouver le moindre fait.

En ce qui concerne l'avertissement il a été statué sur le fait que cette mesure disciplinaire était justifiée. Le compte-rendu de consultation médicale du docteur [C] du 2 mai 2018 ne fait que reprendre les doléances de Mme [N]. Celle-ci fait valoir qu'il ressort de son dossier médical que « Nocibe » souhaitait se séparer de ses anciennes salariées, toutefois elle ne précise pas dans ses conclusions laquelle des pages de ce dossier médical ferait référence à des faits précis dont le médecin aurait été le témoin, le médecin du travail ne faisant que reprendre des doléances de la salariée.

Les témoignages de Mmes [K] et [T], s'ils font référence au fait que Mme [N] ne procédait plus aux encaissements, ne font aucune référence à des propos déplacés, reproches sans fondement, refus injustifié d'accorder de congés, ou propos rabaissant devant les clientes. L'attestation de Mme [D] qui fait mention du comportement désagréable d'une autre salariée qui n'a pas accepté qu'elle attende pour être servie par Mme [N] et d'une autre qui aurait interrompu Mme [N] et lui aurait demandé d'aller en caisse (ce qui est en contradiction avec les deux autres témoignages), ne donne pas plus d'éléments caractérisant à l'encontre de la responsable du magasin des propos déplacés ou rabaissant devant les clientes, des reproches sans fondement ou un refus injustifié d'accorder de congés.

S'il est constant qu'après plusieurs arrêts maladie de courte durée, Mme [N] a fait l'objet d'un arrêt maladie le 23 mars 2018 pour « stress anxio-dépressif réactionnel » avec mise en place d'un traitement par anti-dépresseurs et anxiolytiques, et que suite aux visites de pré-reprise le médecin du travail a conclu le 1er juin 2018 à son inaptitude, il n'est pas justifié que l'état de santé de Mme [N] s'est dégradé du fait du comportement de la responsable du magasin dans lequel Mme [N] travaillait et que son employeur a manqué à son obligation de sécurité.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [N] de sa demande de dommages et intérêts pour non respect par l'employeur de son obligation de sécurité.

 

Sur la nullité du licenciement :

Mme [N], licenciée pour inaptitude le 14 août 2018 soutient que le licenciement est nul car son inaptitude résulte directement des agissements fautifs de la société Groupe Nocibé.

Il vient d'être statué sur le fait qu'aucun comportement fautif n'est démontré à l'encontre de l'employeur, il n'est donc pas établi que l'inaptitude de Mme [N] constatée le 1er juin 2018 est en lien avec une faute de l'employeur, le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [N] de sa demande de nullité du licenciement et des dommages et intérêts sollicités à ce titre.

Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Mme [N] soulève en cause d'appel l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement sur le fondement des articles L.1126-1 à L.1226-12 du code du travail, au motif que son employeur n'a pas effectué de recherche de reclassement alors qu'il n'en était pas dispensé par le médecin du travail.

L'article L.1226-2-1 du code du travail applicable au jour de l'inaptitude prévoit que lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Il ressort expressément de l'avis du Dr [P], médecin du travail, en date du 1er juin 2018 que Mme [N] est inapte à son poste avec dispense de l'obligation de reclassement : « tout maintien de la salariée dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ».

Par conséquent, l'employeur a bien respecté ses obligations, Mme [N] sera déboutée de sa demande tendant à voir déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse et des demandes subséquentes de dommages et intérêts, d'indemnité compensatrice de préavis et de sa demande pour perte de chance d'obtenir une retraite à taux plein.

Sur les autres demandes :

Mme [N] qui succombe sera tenue aux dépens d'appel, il ne sera toutefois pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour :

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes le 24 mars 2021 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Dit que le licenciement pour inaptitude a une cause réelle et sérieuse ;

Déboute Mme [N] de sa demande de dommages et intérêts, d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts pour perte des droits à la retraite subséquentes ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [N] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/02304
Date de la décision : 29/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-29;21.02304 ?
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