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24/04/2024 | FRANCE | N°21/02224

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 24 avril 2024, 21/02224


ARRÊT n°





























Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 24 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02224 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O6GE



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 MARS 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SETE - N°

RG F 19/00089







APPELANT :



Monsieur [W] [Y]

né le 15 Février 1989 à [Localité 5] (54)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Anne SEILLIER de la SELARL SEILLIER ANNE, avocat au barreau de BEZIERS, substituée par Me Ev...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 24 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/02224 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O6GE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 MARS 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SETE - N° RG F 19/00089

APPELANT :

Monsieur [W] [Y]

né le 15 Février 1989 à [Localité 5] (54)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Anne SEILLIER de la SELARL SEILLIER ANNE, avocat au barreau de BEZIERS, substituée par Me Eve BEYNET, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/013574 du 11/01/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

Madame [S] [R]

née le 12 Octobre 1965 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Yannick MAMODABASSE, substituée par Me Laëtitia RETY-FERNANDEZ, avocats au barreau de MONTPELLIER,

Ordonnance de clôture du 22 Janvier 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Magali VENET, Conseiller et Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Madame Magali VENET, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

assistée de Madame Mathilde SAMY, greffier stagiaire

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

Mme [S] [R], qui est devenue tétraplégique suite à un accident de la voie publique, a engagé M. [W] [Y] le 5 janvier 2015 en qualité d'assistant de vie selon contrat à durée indéterminée prévoyant un temps de travail de 35h par semaine, en contrepartie d'une rémunération versée dans le cadre du Cesu déclaratif de 12,30 euros bruts de l'heure, congés payés inclus.

Le 31 janvier 2019, M. [Y] a été placé en arrêt maladie et n'a pas repris son poste jusqu'à la rupture du contrat de travail.

Par courrier du 4 mai 2019, Mme [R] a convoqué M. [Y] a un entretien préalable à un licenciement devant se dérouler le 13 mai 2019.

Par lettre recommandée du 16 mai 2019, M. [Y] a été licencié pour faute grave.

Le 25 juillet 2019, M. [Y] a saisi le conseil de prud'homme de Sète afin de contester la cause de son licenciement et voir condamner l'employeur au paiement de diverses sommes.

Par jugement du 02 mars 2021, le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes et condamné Mme [R] au paiement de la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration en date du 07 avril 2021, M. [W] [Y] a relevé appel de la décision.

Dans ses dernières conclusions en date du 18 janvier 2023 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, le salarié demande à la cour de :

- juger que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse.

- condamner Mme [R] à lui payer:

- 8915€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- 3566 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis.

- 1783 € à titre d'indemnité de licenciement.

- 3301,44 € à titre de rappel de salaire.

- 10 698 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé.

- condamner Mme [R] à délivrer les documents sociaux conformes à l'arrêt à intervenir.

- condamner Mme [R] à verser directement à Maître Anne Seillier exerçant en SELARLU la somme de 2000€TTC(à minima 1684,08€ TTC) en application de l'article 37 de la loi 91-647.

- condamner l'intimé aux dépens.

Dans ses dernières conclusions en date du 19 janvier 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, Mme [R] demande à la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Sète en date du 2 mars 2021 et débouter M. [Y] de l'ensemble de ses demandes.

- juger que le licenciement de M. [Y] repose sur une faute grave.

- condamner M. [Y] à verser à Mme [R] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 22 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le rappel de salaire :

L'employeur a l'obligation de fournir du travail au salarié et de le payer. Si le salaire n'est dû que pour le travail accompli, le salarié qui est resté à la disposition de l'employeur pendant les horaires de travail tels que prévus au contrat, a droit à l'intégralité de la rémunération prévue à ce même contrat.

M. [Y] fait valoir que son contrat de travail prévoyait un temps de travail de 35 heures par semaine, soit 151,67 heures par mois, alors que son employeur ne l'a payé, certains mois, que sur une base de 140 heures de travail mensuel. Il sollicite à ce titre un rappel de salaire d'un montant de 3301,44 euros.

Mme [R] objecte que M. [Y] a été payé en fonction des heures de travail qu'il réalisait effectivement et précise que si son contrat de travail prévoyait un temps de travail de 35 heures par semaine, soit 151,67euros par mois, il ne travaillait en réalité que 140 heures par mois.

Il est constant que le contrat de travail de M. [Y] prévoyait un temps de travail de 151,767 heures par mois alors qu'il ressort de l'analyse de ses bulletins de salaires qu'il n'a été payé certains mois que sur la base de 140 heures de travail.

L'employeur, soutient que le salarié a été payé en fonction des heures de travail réellement réalisées, sans cependant établir que M. [Y] n'était pas à sa disposition pendant l'intégralité des heures de travail prévues au contrat, de sorte que le rappel de salaire est dû, au vu des justificatifs produits, à hauteur du montant sollicité.

Mme [R] sera en conséquence condamnée à verser à M. [Y] la somme de 3301,44 euros à titre de rappel de salaire.

Sur le travail dissimulé :

En application des articles L.8221-3 et L.8221-5 du code du travail, le fait pour l'employeur de se soustraire intentionnellement aux déclarations qui doivent être effectuées aux organismes de sécurité sociale ou à l'administration fiscale, est réputé travail dissimulé, ainsi que le fait de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement des formalités de délivrance d'un bulletin de paie ou de déclaration préalable à l'embauche. De même est réputé travail dissimulé le fait de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.

L' article L.8223-1 prévoit en cas de rupture du contrat de travail, l'octroi au salarié en cas de travail dissimulé, d'une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le caractère intentionnel du travail dissimulé ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie et il incombe au salarié de rapporter la preuve d'une omission intentionnelle de l'employeur.

En l'espèce, la preuve d'une omission intentionnelle n'est pas rapportée au seul motif que le salarié n'a pas été payé selon les horaires prévus au contrat de travail, la demande formée au titre du travail dissimulé sera en conséquence rejetée.

Sur la rupture du contrat de travail :

La faute grave est définie comme la faute qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise .

En l'espèce, M. [Y] a été licencié pour faute grave par courrier du

16 mai 2019 rédigé en ces termes:

'...je vous informe par la présente de ma décision de vous licencier pour les motifs suivants :

- vous ne m'avez pas adressé vos arrêts de travail depuis le 31/01/2019 si ce n'est par sms ou mail et après rappel de ma part.

- vous ne vous êtes pas présentés à votre poste de travail depuis le 02 mai 2019

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien à votre poste est impossible....'

Sur les difficultés liées à la transmission des arrêts de travail :

Lorsqu'un salarié ne peut pas travailler pour cause de maladie, ce dernier doit informer l'employeur de son absence et s'expliquer sur les raisons de celle-ci dans des délais raisonnables, par l'envoi du certificat médical d'arrêt de travail établi par le médecin traitant, ou par tous moyens.

La violation par le salarié de son obligation d'information constitue, en effet et en principe, une cause réelle et sérieuse de licenciement, ou dans certains cas une faute grave. En revanche, il n'y a pas de motif réel et sérieux de licenciement lorsque l'employeur agit avec précipitation.

En l'espèce, Mme [R] reproche à M. [Y] de ne pas lui avoir adressé ses arrêts de travail depuis le 31 janvier 2019, ou plutôt de ne les lui avoir adressés que par sms ou mails suite à des 'rappels'.

Les échanges de messages téléphoniques, les mails, et l'attestation de Mme [B], compagne de M. [Y], produits aux débats établissent que ce dernier a avisé Mme [R] de son absence pour maladie dès la date de son arrêt initial, soit le 31 janvier 2019, ainsi que des prolongations dont il a fait l'objet, en lui transmettant régulièrement les arrêts de travail y afférent, sauf pour une période de trois jours entre le 28 février et le 3 mars2019.

Il ne peut être reproché à M. [Y], qui ne connaissait pas l'origine de sa pathologie ni la durée probable de ses arrêts, et qui a dû se soumettre à des analyses médicales, de ne pas avoir informé son employeur de ses possibilités de pouvoir ou non reprendre le travail avant l'issue de chaque période d'arrêt, alors que seul son médecin avait compétence pour décider ou non de la poursuite de son congé maladie.

Ainsi, il ressort des pièces produites que le salarié a suffisamment justifié de son état de santé auprès de son employeur par l'envoi régulier de ses arrêts de travail, de sorte que le grief lié à l'absence d'information de l'employeur n'est pas fondé.

Sur le défaut de présentation au poste de travail à compter du 2 mai 2019 :

L'employeur reproche à M. [Y] de ne plus s'être présenté à son poste de travail à compter du 2 mai 2019, alors que le dernier arrêt arrêt de travail porté à sa connaissance se terminait le 30 avril 2019.

Cependant, Mme [R] qui connaissait la situation médicale de M. [Y] lorsqu'elle a initié une procédure de licenciement dès le 4 mai 2019 au motif qu'il avait omis de lui transmettre son nouvel arrêt de travail 2 jours après l'expiration du dernier, a agi avec précipitation , et ce, d'autant plus qu' une visite de pré-reprise était organisée à son initiative le 13 mai 2019 dont elle a finalement sollicité l'annulation après avoir décidé entre-temps de licencier son salarié.

Il apparaît ainsi que le grief lié à l'abandon du poste du travail par le salarié n'est pas établi.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que l'employeur ne rapporte pas la preuve d'une carence du salarié dans la transmission des justificatifs afférents à ses arrêts de travail, ni d'un défaut de présentation injustifié à son poste de travail, de sorte que le licenciement, qui repose sur ces seuls motifs, est dénué de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail :

Sur les dommages intérêts :

En application de l'article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, et que la réintégration du salarié n'est pas possible, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur comprise entre un minimum et un maximum qui varie en fonction du montant du salaire, de l'ancienneté du salarié et de l'effectif de l'entreprise.

En l'espèce, M. [Y] dont le salaire s'élevait à 1783 euros disposait d'une ancienneté de 4 ans et son employeur employait habituellement moins de 11 salarié. Il a droit à une indemnité minimale de un mois de salaire et ne produit pas d'élément relatif à sa situation postérieurement à son licenciement.

Il convient en conséquence de lui allouer la somme de 1783 euros à titre de dommages intérêts consécutifs au licenciement.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

En application de l'article L1234-1, M. [Y] ouvre droit à une indemnité compensatrice de préavis équivalente à deux mois de salaire, soit la somme de 3566 euros

Sur l'indemnité légale de licenciement :

En application des article L1234-9 et R1234-2 du code du travail, il convient d'allouer à M. [Y] la somme de 1783 euros à titre d'indemnité légale de licenciement.

Sur les documents sociaux de fin de contrat :

Il convient de condamner Mme [R] à remettre à M. [Y] les documents sociaux rectifiés conformes à la présente décision.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Il convient de condamner Mme [R] à verser à Maître Seillier la somme de 2000 euros en application de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Sète le 2 mars 2021 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté la demande au titre du travail dissimulé.

Statuant à nouveau :

- Dit que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse

- Condamne Mme [S] [R] à verser à M. [W] [Y] les sommes suivantes :

- 3301,44 euros bruts à titre de rappel de salaire,

- 1783 euros bruts de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3566 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1783 euros nets à titre d'indemnité de licenciement.

- Condamne Mme [S] [R] à délivrer à M. [W] [Y] les documents de fin de contrat rectifiés.

- Condamne Mme [S] [R] à verser directement à Maître Anne Seillier la somme de 2000 euros en application de l'article 37 de la loi 91-647.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/02224
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;21.02224 ?
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