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24/04/2024 | FRANCE | N°21/01346

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 24 avril 2024, 21/01346


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 24 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01346 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O4SR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 JANVIER 2021 CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELL

IER - N° RG F 17/01206







APPELANT :



Monsieur [L] [H]

né le 28 Février 1959 en ALGÉRIE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représenté par Me Coline FRANDEMICHE substituant Me Christelle MARINI de la SELARL BCA - BERNIER D'ALIMONTE MARINI AVOCAT...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 24 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01346 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O4SR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 JANVIER 2021 CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 17/01206

APPELANT :

Monsieur [L] [H]

né le 28 Février 1959 en ALGÉRIE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Coline FRANDEMICHE substituant Me Christelle MARINI de la SELARL BCA - BERNIER D'ALIMONTE MARINI AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMES :

Maître [O] [I], ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL GROUPE CHECK POINT EXPERTISES

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 4]

Non constitué, ni représenté

UNEDIC DELEGATION AGS - CGEA de TOULOUSE

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Julien ASTRUC substitué par Me FONTAINE de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER,

Ordonnance de clôture du 22 Janvier 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 FEVRIER 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Magali VENET, conseiller

Madame Véronique DUCHARNE, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE :

M. [L] [H] a été engagé, en qualité d'ingénieur sécurité, statut cadre, par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, à compter du 22 avril 2013, par la société Groupe Checkpoint Expertises.

Par courrier du 12 octobre 2016, le salarié a sollicité la rupture conventionnelle de son contrat de travail en invoquant ses difficultés financières en lien avec le défaut de paiement de ses salaires malgré plusieurs mise en demeure.

Le 2 novembre 2016, les parties ont conclu une rupture conventionnelle, qui a été homologuée par l'autorité administrative, le contrat de travail prenant fin au 13 décembre 2016.

Le 26 octobre 2017, le salarié a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes aux fins de solliciter le règlement de ses salaires impayés.

Par ordonnance du 21 décembre 2017, le conseil de prud'hommes a fait droit à ses demandes et l'AGS a procédé à l'avance des sommes dues au salarié le 25 avril 2019 pour une somme totale de 43 427, 97 euros.

Le 31 octobre 2017, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes au fond de diverses demandes en lien avec l'exécution et la rupture de son contrat de travail.

Le 24 octobre 2018, la société a été placée en redressement judiciaire, puis, par jugement du 15 janvier 2020, en liquidation judiciaire.

Par jugement du 25 janvier 2021, le conseil a statué comme suit :

Dit que la rupture conventionnelle est régulière et ne souffre pas d'un vice du consentement,

Fixe la créance de M. [H] au passif de la Société Groupe Checkpoint Expertises, représentée par Maître [I], es qualité de mandataire liquidateur aux sommes suivantes :

- 34 731 euros à titre de rappels de salaire,

- 2 155, 23 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1 544, 75 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en deniers ou quittances,

Constate que l'AGS a déjà avancé au salarié les sommes qu'il réclame au titre de l'exécution de son contrat : salaires, congés payés et dommages et intérêts et le montant de l'indemnité conventionnelle de rupture qu'il réclame,

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,

Déboute les parties de toutes les autres demandes,

Dit que les dépens seront à la charge de chacune des parties à concurrence de leurs propres engagements.

Le 1er mars 2021, M. [H] a relevé appel de cette décision par voie électronique.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 28 juin 2023, M. [L] [H] demande à la cour de :

Confirmer le jugement uniquement en ce qu'il a fixé au passif de la procédure collective de la Société Checkpoint Expertises les sommes suivantes :

- 34 731 euros brute à titre de rappels de salaire,

- 2 155,23 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1 544,75 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la réparation du préjudice subi compte tenu du retard dans le paiement du salaire.

Le réformer pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Requalifier la rupture conventionnelle du 2 novembre 2016 en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Requalifier l'indemnité de rupture conventionnelle en indemnité légale de licenciement,

Fixer au passif de la procédure collective de la Société Checkpoint Expertises les sommes suivantes:

- 2 975 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement,

- 5 950 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 595 euros au titre des congés payés afférents,

- 17 850 euros à titre de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (6 mois),

- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la réparation du préjudice subi du fait du défaut d'information de la portabilité et de la gratuité de la prévoyance.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 30 juin 2021, l' AGS demande à la cour de :

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes,

Rejeter son appel et le condamner à verser la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

' Maître [I], à qui l'appelant a fait signifier la déclaration d'appel et ses conclusions d'appelant par acte d'huissier du 21 avril 2021, ès qualités de mandataire liquidateur de la Société Groupe Checkpoint expertises, n'a pas constitué avocat. Il est réputé s'approprier les motifs du jugement déféré, conformément aux dispositions de l'article 954, dernier alinéa, du code de procédure civile.

Par ordonnance rendue le 22 janvier 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 19 février 2024.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIVATION :

A titre liminaire, force est de constater que la créance de M. [H] à titre de rappel de salaire, indemnité conventionnelle de licenciement, indemnité compensatrice de congés payés et dommages et intérêts au titre du retard dans le paiement des salaires, qui a fait l'objet d'un règlement par l'AGS le 25 avril 2019, n'est pas contestée en cause d'appel.

Sur la rupture du contrat :

Aux termes de l'article L.1237-11 du code du travail, l'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat qui les lie. La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. Elle résulte d'une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté de consentement des parties.

L'existence, au moment de sa conclusion, d'un différend entre les parties au contrat de travail n'affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture. Toutefois, et conformément à la théorie générale des contrats, leur consentement ne doit pas être vicié.

En l'espèce, le contrat de travail conclu entre M. [L] [H] et la SOCIÉTÉ Groupe Checkpoint Expertises a été rompu par une convention de rupture signée le 2 novembre 2016, effective au 13 décembre 2016, faisant suite à la demande écrite du salarié du 12 octobre 2016 rédigée en ces termes :

' Objet : Contrat de travail JP [H] en date du 22/04/2013/ Non paiement des salaires/demande de rupture conventionnelle et de versement

Cher Monsieur,

Titulaire d'un contrat de travail dans votre société depuis le 22/04/2013, je me trouve aujourd'hui dans une situation extrêmement délicate due aux sommes que vous me devez sur le paiement de mes salaires et frais. Vous n'avez pris en compte aucune de mes multiples demandes et relances faites ces derniers mois, et de ce fait, ma situation financière n'a fait qu'empirer et est devenue plus que dramatique à ce jour à savoir :

- Obligation pour moi de déposer en urgence un dossier de surendettement à la Banque de France, consécutif aux retards importants de salaires non versés,

- Risque de saisie de mon appartement,

- Situation financière généralement extrêmement difficile compte tenu de l'accroissement des retards depuis plus d'un an avec à ce jour une dette en ma faveur de plus de 20 000 euros.

Je demande donc ce jour, conformément à nos récentes conversations, une rupture conventionnelle, avec date effective de la fin de contrat au plus tôt compte tenu des délais réglementaires inhérents à cette procédure. Je vous demande également de me verser dès à présent l'intégralité des sommes dues pour salaires et frais. Néanmoins, conscient des difficultés que vous rencontrez actuellement et en cas d'impossibilité, je vous demanderai de me verser au moins la moitié et de me proposer un échéancier raisonnable pour le reste des sommes dues.

Sachez pour terminer que, par votre désinvolture, je suis confronté tous les jours à des relances d'huissiers, je suis épuisé moralement et physiquement par cette situation totalement indépendante de mon fait.

Je vous demande en conséquence, un entretien au plus vite afin de résoudre cette situation de manière amiable car cette situation ne peut perdurer plus longtemps et je ne peux continuer à travailler sans être payé.

Dans l'attente de cet entretien et de vos propositions, je vous prie d'agréer, Monsieur, mes salutations distinguées'.

Les premiers juges ont rejeté la demande du salarié tendant à annuler la convention de rupture en relevant que le salarié avait été à l'initiative de la demande de rupture conventionnelle et que la preuve d'un vice du consentement n'était pas rapportée.

Le salarié, qui conclut à la réformation du jugement sur ce point, fait valoir qu'il a été contraint de solliciter la rupture conventionnelle de son contrat pour pouvoir s'inscrire à Pôle emploi et bénéficier d'indemnités de chômage, dans un contexte de salaires impayés, malgré plusieurs mise en demeure, à l'origine de sa détresse économique. A l'appui de son appel, il invoque un vice du consentement indirect tenant à son état de détresse en raison du non-paiement de ses salaires.

L'AGS réplique que le salarié ne rapporte pas la preuve d'un vice du consentement dès lors qu'il a pris l'initiative de la rupture en étant informé des difficultés financières de la société, qu'il ne conteste pas la régularité de la procédure de rupture conventionnelle et qu'il ne s'est pas rétracté dans le délai qui lui était imparti. Elle ajoute qu'il n'a ni pris acte de la rupture du contrat ni sollicité la résiliation judiciaire du contrat, ni fait état de la rupture dans le cadre de la procédure de référé initiée le 26 octobre 2017.

Il est établi que la situation économique de la société était compromise depuis l'année 2015, engendrant de multiples retards et défaut de paiement des salaires de M. [H] dont la créance salariale a été reconnue par la société et régularisée par l'AGS. Il est également acquis que le manquement de l'employeur à son obligation de payer le salaire a causé un préjudice financier et moral au salarié qui n'a pu faire face à ses propres échéances financières.

Cependant, ces considérations économiques tenant à la situation financière de la société et à la celle de M. [H] n'affectent pas en elles-mêmes la validité de la convention de rupture en l'absence de vice du consentement.

Le salarié qui n'a pas pris l'initiative de rompre le contrat de travail aux torts de l'employeur, par le biais d'une prise d'acte ou d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, a proposé à l'employeur la conclusion d'une rupture conventionnelle de son contrat en exprimant sa compréhension des difficultés rencontrées par la société et en parfaite connaissance de cause de la répercussion du non paiement régulier du salaire sur sa situation personnelle, au titre de laquelle le seul élément communiqué consiste en l'assignation que la Caisse régionale de crédit agricole lui a délivrée le 31 mars 2017, en paiement de la somme de 107 251,34 euros arrêtée ai 28 décembre 2016 au titre d'un prêt immobilier pour lequel la banque a prononcé la déchéance du terme le 21 octobre 2016.

Il n'est pas établi que cette demande de rupture conventionnelle du contrat de travail a été effectuée sous contrainte ou pressions, étant observé que le salarié n'a pas fait usage de son droit de rétractation et ne conteste pas la régularité de la procédure.

Au surplus, le salarié, qui ne justifie nullement de son inscription à Pôle emploi postérieurement à la rupture, ne conteste pas avoir exercé une activité de consultant et de photographe à titre indépendant, parallèlement à son emploi au sein de la société.

Aucun élément n'établit ainsi l'existence de contrainte, violence ou pressions exercées à l'encontre du salarié, ni d'une fraude à la loi lors de la conclusion de la rupture conventionnelle, de sorte qu'en l'absence de vice du consentement aucun motif ne justifie d'annuler la convention de rupture.

En outre, le retard apporté au règlement de l'indemnité conventionnelle n'est pas de nature à remettre en cause la validité même de la convention de rupture intervenue en application de l'article L. 1237-11 du code du travail, observation faite que le salarié n'a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes que le 26 octobre 2017 près d'un an après la conclusion de la rupture.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la convention de rupture et ses demandes subséquentes.

Sur la portabilité :

Au soutien de sa demande en paiement de la somme de 1 000 euros de dommages-intérêts de ce chef, M. [H] rappelle que selon l'article L. 911-8 du Code de la sécurité sociale, la portabilité est obligatoire en cas de chômage et que l'employeur doit signaler ce maintien dans le certificat de travail et informer l'organisme assureur de la cessation du contrat de travail, sous peine d'engager sa responsabilité.

L'AGS objecte que le salarié ne justifie d'aucun préjudice de ce chef.

Faute pour le salarié de justifier qu'il s'est inscrit à pôle emploi et de produire le moindre élément relativement à sa couverture sociale, l'appelant ne justifie pas d'un préjudice en lien avec ce manquement. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires :

L'équité commande de rejeter les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens seront considérés comme frais privilégiés dans le cadre de la procédure collective.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [H] aux dépens d'appel.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par Marie-Lydia Viginier, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/01346
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;21.01346 ?
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