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24/04/2024 | FRANCE | N°21/01027

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 24 avril 2024, 21/01027


ARRÊT n°

































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 24 AVRIL 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01027 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O37U



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 JANVIER 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATI

ON PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 19/00673









APPELANTE :



Société CM A ESTHETIC SAS (anciennement dénommée SAS DINOUZ)

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par Me Xavier GERBAUD, avocat au barreau de PARIS













INTIMEE :



Madame [D] [O]

née le 27 Mars 1968 en AL...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 24 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/01027 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O37U

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 JANVIER 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 19/00673

APPELANTE :

Société CM A ESTHETIC SAS (anciennement dénommée SAS DINOUZ)

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Xavier GERBAUD, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

Madame [D] [O]

née le 27 Mars 1968 en ALGÉRIE

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Charles SALIES substitué par Me Eve BEYNET, avocats au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 22 Janvier 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 FEVRIER 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Magali VENET, conseiller

Madame Véronique DUCHARNE, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE :

Mme [D] [O] a été engagée en qualité de responsable marketing, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 1er octobre 2015, par la société Dinouz (devenue la SAS CM Aesthetic) qui développe une activité de fabrication de matériel médico-chirurgical et dentaire. La convention collective applicable est celle de la fabrication et du commerce des produits à usage pharmaceutique, parapharmaceutique et vétérinaire.

A compter du 1er décembre 2017, la salariée a été placée en arrêt de travail prolongé jusqu'au 31 mars 2019.

Par courrier du 30 mars 2019, elle a vainement sollicité l'organisation d'une visite médicale de reprise auprès de son employeur.

Le 6 juin 2019, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur en raison de retards répétés de paiement de ses salaires, de l'absence d'organisation de sa visite médicale de reprise et du défaut de paiement de son salaire à compter du 1er avril 2019.

Le 11 juin 2019, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins de solliciter des rappels de salaire, des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et la requalification de sa prise d'acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 26 janvier 2021, le conseil a statué comme suit :

Dit que la prise d'acte du 6 juin 2019 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit que le non-paiement des salaires est constitutif d'une faute grave,

Dit qu'il n'y a pas d'exécution déloyale,

Condamne la  société Dinouz à verser à la salariée les sommes suivantes :

- 2 967,80 euros bruts à titre de rappel de salaire outre 296,78 euros bruts de congés payés afférents,

- 10 427,60 euros à titre de dommages- intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 335,34 euros bruts au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 5 213,80 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 521,38 euros bruts au titre de congés payés afférents,

- 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute Mme [O] de sa demande d'indemnité au titre de l'exécution déloyale,

Dit que la société Dinouz devra établir et délivrer à Mme [O] tous les documents de fin de contrat conformes au jugement, et ce, sous astreinte de 10 euros par jour de retard à partir du 30ème jour suivant le prononcé du présent jugement,

Ordonne l'exécution provisoire de droit,

Fixe la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2 606,90 euros brut,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes non fondées ou insuffisamment justifiées,

Condamne la société Dinouz aux dépens.

Le 15 février 2021, la société a relevé appel de cette décision par dépôt au greffe.

Le 11 juin 2021, un avis de caducité de la déclaration d'appel a été adressé à Maître Gerbaud, représentant de la société.

Par ordonnance du 22 juin 2021, le conseiller chargé de la mise en état a dit n'y avoir lieu à caducité de la déclaration d'appel, compte tenu des conclusions adressées par l'appelant au greffe le 11 mai 2021.

' Selon ses premières conclusions, remises au greffe le 11 mai 2021, la SAS CM Aesthetic, demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté Mme [O] de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail et statuant à nouveau, de débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes, et de la condamner à payer à la société la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 5 juillet 2021, Mme [D] [O], demande à la cour de :

Confirmer le jugement,

Y ajoutant,

Ordonner la remise des documents de fin de contrat conformes à l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir,

Condamner la société à lui verser la somme complémentaire de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ordonnance rendue le 22 janvier 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 19 février 2024.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS :

Sur le rappel de salaire :

La société, qui conclut à la réformation du jugement, conteste le défaut de paiement du salaire. Elle soutient avoir indemnisé la salariée au titre du chômage partiel à compter du 1er avril 2019 et qu'elle n'était pas tenue à l'organisation d'une visite médicale en l'absence de reprise effective du travail. Elle verse son bulletin de paie pour le mois d'avril 2019 qui mentionne le paiement d'une somme de 2 238,54 euros net à titre d'allocations de chômage partiel.

La salariée, qui conclut à la confirmation du jugement, conteste avoir perçu ses salaires à compter du 1er avril 2019 alors qu'elle soutient s'être tenue à la disposition de son employeur à compter de cette date.

En application de l'article R. 4624-31 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce, le travailleur bénéficie d'un examen de reprise par le médecin du travail, notamment après une absence d'au moins trente jours pour cause de maladie.

Dès lors que l'employeur a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail, il saisit le service de santé au travail qui organise l'examen de reprise le jour de la reprise effective du travail par le travailleur, et au plus tard dans un délai de huit jours qui suivent cette reprise.

Le salarié qui se tient à la disposition de l'employeur pour passer la visite de reprise a droit au paiement de son salaire, dont la charge de la preuve du versement effectif lui incombe.

En l'espèce, la salariée, qui démontre avoir sollicité par lettre recommandée avec avis de réception du 30 mars 2019 (avis de réception signé le 3 avril) l'organisation d'une visite de reprise à l'issue d'un arrêt de travail pour maladie non professionnelle, d'une durée supérieure à trente jours, lequel a pris fin le 31 mars 2019, justifie qu'elle se tenait à la disposition de l'employeur, ce que l'employeur ne conteste pas sérieusement, ce dernier affirmant avoir sollicité et obtenu la concernant le bénéfice de l'activité partielle.

Toutefois, l'employeur qui a établi un bulletin de paie faisant état d'une prise en charge pour chômage partiel ne justifie ni du bénéfice de ce dispositif ni du versement de la somme visée au bulletin de paie d'avril 2019.

Dès lors, l'employeur était redevable du paiement des salaires à compter du 1er avril 2019, et ce, même en l'absence de reprise effective du travail.

Par confirmation du jugement, l'employeur sera condamné à lui verser la somme de 2 967,80 euros à titre de rappel de salaire, outre 296,78 euros de congés payés afférents pour la période du 1er avril au 6 juin 2019.

Sur la prise d'acte de la rupture :

En l'espèce, par courrier du 6 juin 2019, la salariée a notifié à la société la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail qui est ainsi rédigée :

'Monsieur,

J'ai été embauchée à compter du 1er octobre 2015 au sein de votre entreprise en qualité de responsable Marketing.

Dès le début de mon contrat, je rencontrais des difficultés considérables et inacceptables concernant le paiement de mes salaires.

Afin de percevoir mes salaires, j'étais dans l'obligation de vous relancer systématiquement.

Outre le fait qu'il y a eu des périodes pendant lesquelles je n'ai pas été payé pendant plusieurs mois, les chèques que vous m'adressiez étaient refusés, pour défaut ou insuffisance de provision.

Ces absences de paiement et ces retards systématiques ont eu des effets catastrophiques dans ma vie personnelle.

Le fonctionnement de ma carte bancaire a été suspendu de nombreuses fois, j'ai même fait l'objet d'une mise en demeure d'huissier de justice pour des factures que je ne pouvais régler, faute de paiement de mes salaires.

Ces événements m'ont bouleversé et ont été une source de stress critique.

Je suis en arrêt de travail depuis près d'un an et demi pour épisode dépressif majeur.

Par ailleurs, mon arrêt de travail se terminait au 31 mars 2019.

Je vous ai envoyé un courrier en LRAR pour effectuer une visite de reprise auprès de la médecine du travail.

Vous n'avez pourtant pas estimé nécessaire de remplir vos obligations.

La situation n'est plus tolérable.

C'est la raison pour laquelle par la présente je prends acte de la rupture de mon contrat de travail et ce, à vos torts exclusifs'.

La salariée qui justifie avoir subi en 2016 de nombreux retards de paiement de son salaire ainsi que le paiement de salaires par chèque sans provision (pièces n°2 à 5), établit l'absence d'organisation d'une visite médicale de reprise à l'issue de son arrêt de travail et le défaut de paiement de son salaire à compter du 1er avril 2019. Le cumul de ces manquements, avérés, rendait impossible la poursuite du contrat de travail et sont suffisamment graves pour justifier de la prise d'acte.

Par suite, le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au jour de la rupture, la salariée, âgée de 51 ans bénéficiait d'une ancienneté de 3 ans et 7 mois au sein de la société Dinouz qui employait moins de onze salariés. Elle percevait un salaire mensuel brut de 2 606,90 euros bruts.

Compte tenu de son ancienneté et de sa rémunération, le conseil a justement évalué les montants de l'indemnité légale de licenciement à la somme de 2 335,34 euros bruts au titre de l'indemnité légale de licenciement, et celle d'indemnité compensatrice de préavis à 5 213,80 euros bruts, outre 521,38 euros bruts au titre de congés payés afférents. Le jugement sera confirmé sur ces points.

S'agissant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en vertu de l'article L. 1235- 3 du code du travail, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance nº 2017-1387 du 22 septembre 2017, le montant de cette indemnité, compte tenu de l'ancienneté de la salariée (3 ans) et de l'effectif de la société employant habituellement moins de onze salariés, est compris entre un mois et quatre mois de salaire brut.

Compte tenu de la situation professionnelle de Mme [D] [O], qui exerce une activité libérale d'esthéticienne dans un centre médical de soins esthétiques de la peau au sein d'une clinique privée, qu'elle exerçait déjà en parallèle de son activité salariée, lui permettant de percevoir des ressources distinctes, le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera plus justement évalué à la somme de 6 000 euros bruts.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour, sauf s'agissant du quantum de l'indemnité de licenciement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la SAS CM Aesthetic à verser à Mme [O] la somme de 6 000 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

y ajoutant,

Condamne la société CM Aesthetic à verser à Mme [D] [O] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel et aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par Marie-Lydia Viginier, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/01027
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;21.01027 ?
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