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03/04/2024 | FRANCE | N°20/04322

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 03 avril 2024, 20/04322


ARRÊT n°





























Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 03 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04322 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OWXW





Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 SEPTE

MBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS - N° RG F 18/00495







APPELANTE :



CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE (CPR) du personnel Ferroviaire (anciennement dénommée CPR du personnel de la Société Nationale des Chemins de Fer)

Prise en la personne de son directeur en exercice sis

[Adr...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 03 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04322 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OWXW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 SEPTEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS - N° RG F 18/00495

APPELANTE :

CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE (CPR) du personnel Ferroviaire (anciennement dénommée CPR du personnel de la Société Nationale des Chemins de Fer)

Prise en la personne de son directeur en exercice sis

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Nicolas PERROUX de la SCP JUDICIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assistée par Me Isabelle BOUSQUET-BELLET, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

INTIMEES :

Madame [G] [L]

née le 20 Juillet 1968 à [Localité 7] (92)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Sandrine DUMAS, substituée par Me Sandrine ESPOSITIO de la SELARL ACTIUM AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de BEZIERS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/001330 du 17/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

S.A.S MANPOWER France

prise en la personne de son représentant légal sis

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Fanny LAFORTE substituant Me Yann GARRIGUE, de la SELARL LX MONTPELLIER, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assistée par Me Fiona SALOMON substituant Me Anne-Laurence FAROUX, de la SAS OLLYNS, avocats au barreau de PARIS, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 15 Janvier 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 FEVRIER 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Monsieur Jean-Jacques FRION, Conseiller

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat de mission, Mme [G] [L] a été engagée par la société Manpower afin d'être mise à disposition de la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société Nationale des Chemins de Fer Français (ci-après CPR de la SNCF) pour la période du 9 août 2016 au 29 décembre 2017 et affectée au Centre des archives régionales de la SNCF à [Localité 6] dans le cadre d'un accroissement temporaire d'activité lié au transfert de ces archives.

Invoquant le non respect de l'employeur aux obligations édictées par l'article L. 1251-18 du code du travail et du principe d'égalité de traitement, la salariée a saisi, avec 3 de ses collègues, le conseil de prud'hommes de Béziers aux fins d'entendre condamner solidairement la société Manpower et l'entreprise utilisatrice au paiement d'un rappel de salaire au titre de la gratification annuelle et de la prime de vacances et des tickets restaurant.

Par jugement du 11 septembre 2020, le conseil a statué comme suit :

Applique la convention collective UCANSS aux contrats de travail temporaire de Mme [L],

Constate, dit et juge que les dispositions de cette convention n'ont pas été volontairement appliquées par la société Manpower et CPR,

Juge que tenant la collusion frauduleuse des deux entreprises, ces dernières sont condamnées in solidum,

Condamne in solidum la société Manpower et la Caisse de prévoyance de retraite du personnel SNCF à verser à Mme [L] les sommes suivantes :

- 2 130,44 euros brut au titre de la gratification annuelle(article 21 de la CCN UCANSS)

- 2 397,74 euros brut au titre de l'allocation vacances (art 22 bis de la CCN UCANSS)

- 452,79 euros brut au titre du solde de l'indemnité de fin de mission,

- 498,07 euros brut au titre de l'indemnité de congés payés afférente à l'ensemble des sommes dues.

Déboute Mme [L] de la demande de titres restaurant non fournis,

Renonce d'assortir le versement de ses sommes de l'intérêt légal depuis la date de mise en demeure en date du 19 décembre 2018,

Condamne in solidum la société Manpower et la Caisse de prévoyance de retraite du personnel SNCF à verser à Mme [L] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

Suivant déclaration en date du 12 octobre 2020, la CPR de la SNCF a régulièrement interjeté appel de cette décision.

' suivant ses conclusions remises au greffe le 7 janvier 2021, la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société Nationale des Chemins de Fer Français demande à la cour de réformer le jugement sauf en ce qu'il a débouté Mme [L] de sa demande relative aux tickets-restaurants, et statuant à nouveau de :

La mettre, purement et simplement, hors de cause ;

Débouter Mme [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner Mme [L] au paiement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'appelante précise que :

- instituée par décret n° 2007-730 du 7 mai 2007, prenant effet au 30 Juin 2007, elle est un organisme de sécurité sociale de droit privé, doté de la personnalité morale et investi d'une mission de service public.

- Jusqu'alors, la gestion de la prévoyance et de la retraite était assurée par une branche interne de la SNCF, dont les salariés peuvent, depuis le 1er janvier 2008, poursuivre leur activité au sein de la CPR de la SNCF, dans le cadre de conventions de mise à disposition individualisées.

- Suivant décret du 7 mai 2007, il a été décidé que la SNCF n'assurerait plus sa propre activité de prévoyance et de retraite, étant, par définition, un établissement public industriel et commercial de transport ferroviaire.

- régie par le code de la sécurité sociale, elle assure désormais la gestion du régime spécial de sécurité sociale des cheminots.

La caisse de prévoyance, rappelant qu' elle n'est que l'entreprise utilisatrice, objecte que le salarié n'est pas fondé à rechercher son obligation au titre des salaires dès lors qu'en application des dispositions légales et de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation la société de travail temporaire demeure le seul employeur de l'intéressé.

' aux termes de ses conclusions remises au greffe le 5 juillet 2021, la société Manpower demande à la cour de réformer le jugement sauf en ce qu'il a débouté Mme [L] de sa demande relative aux tickets-restaurants, et statuant à nouveau de :

Juger qu'elle a parfaitement respecté ses obligations contractuelles et notamment celles en matière de rémunération,

Juger que les demandes de Mme [L] sont infondées et injustifiées, et qu'en tout état de cause, aucune condamnation in solidum ne pourra être prononcée à son encontre,

Débouter en conséquence Mme [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Condamner en tout état de cause Mme [L] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

La société de travail temporaire s'oppose à l'action du salarié et soutient justifier s'être libérée de son obligation légale et contractuelle.

' aux termes de ses conclusions remises au greffe le 6 avril 2021, Mme [L] demande à la cour de :

Confirmer les termes du jugement du conseil de prud'hommes en qu'il a reconnu l'application des dispositions de la convention UCANSS et en ce qu'il a condamné la CPR de la SNCF à s'acquitter in solidum avec la société Manpower les sommes de :

- 2 130,44 euros brut au titre de la gratification annuelle(article 21 de la CCN UCANSS)

- 2 397,74 euros brut au titre de l'allocation vacances (art 22 bis de la CCN UCANSS)

- 452,79 euros brut au titre du solde de l'indemnité de fin de mission,

- 498,07 euros brut au titre de l'indemnité de congés payés afférente à l'ensemble des sommes dues.

A titre incident, condamner la CPR de la SNCF à s'acquitter in solidum avec la société Manpower de la somme de 1933,20 euros au titre de l'indemnité des tickets restaurant.

En tout état de cause, confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Manpower à lui payer les sommes susvisées,

Y ajoutant à titre incident, condamner la société Manpower à lui payer la somme 1933,20 euros au titre de l'indemnité des tickets restaurant.

Assortir le versement de ces sommes de l'intérêt légal depuis la date de mise en demeure en date du 19 décembre 2018.

Condamner la CPR de la SNCF et la société Manpower à acquitter la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code procédure civile pour la procédure dont s'agit, ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme [L] fonde son action au visa des articles L. 1251-18 et 1251-43 du code du travail et du principe de l'égalité de rémunération entre les intérimaires et les salariés permanents. Elle soutient le caractère bien fondé de ses réclamations fondées sur les dispositions de la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale dite Ucanss, du 8 février 1957.

Par décision en date du 15 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a clôturé l'instruction du dossier et fixé l'affaire à l'audience du 5 février suivant.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux conclusions susvisées.

MOTIFS :

Le recours au travail temporaire a pour objet la mise à disposition temporaire d'un salarié par une entreprise de travail temporaire au bénéfice d'un client utilisateur pour l'exécution d'une mission. Chaque mission donne lieu à la conclusion :

1° D'un contrat de mise à disposition entre l'entreprise de travail temporaire et le client utilisateur, dit " entreprise utilisatrice " ;

2° D'un contrat de travail, dit " contrat de mission ", entre le salarié temporaire et son employeur, l'entreprise de travail temporaire.

Sur l'obligation au paiement des rémunérations et accessoires :

Par application des dispositions de l'article 1315 du code civil, devenu 1353, s'il appartient à celui qui se prévaut d'une obligation d'en justifier, il revient à celui qui prétend s'en être libéré de justifier du paiement ou du fait extinctif. Par l'effet de ce texte, sous réserve pour le salarié de justifier du principe de l'obligation contractuelle ou conventionnelle dont il se prévaut, il appartient à l'employeur de justifier du paiement ou du fait extinctif de son obligation.

Il résulte des articles L. 1251-2, L. 1251-18 et L. 3221-3 du code du travail que l'obligation de verser au travailleur temporaire mis à la disposition d'une entreprise des salaires conformes aux dispositions légales ou conventionnelles ou aux stipulations contractuelles qui lui sont applicables, pèse sur l'entreprise de travail temporaire laquelle demeure l'employeur, à charge pour elle, en cas de manquement à cette obligation, de se retourner contre l'entreprise utilisatrice dès lors qu'une faute a été commise par cette dernière.

Faute pour Mme [L] de justifier de l'obligation dont elle se prévaut à l'égard de la CPR de la SNCF, qui n'est pas son employeur, et de rapporter la preuve d'une fraude liant les deux sociétés, laquelle ne ressort d'aucun élément, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné l'entreprise utilisatrice au paiement de sommes in solidum avec la société Manpower, employeur du salarié.

L'entreprise utilisatrice sera mise hors de cause.

Sur l'application de la convention collective de l 'UCANSS :

Mme [L] et la CPR de la SNCF rappellent que le décret n° 2007-730 du 7 mai 2007 qui a institué cette caisse de prévoyance prévoit en son article 15-3 qu'elle « a recours [...] Sur décision du directeur, à d'autres catégories de personnel en tant que de besoin. Pour l'application des articles L.123-1 et L.123-2 du code de la sécurité sociale à ces personnels, les conventions collectives applicables sont celles prévues pour les organismes dudit régime général de Sécurité sociale » et s'accordent pour dire que l'appelante a décidé d'appliquer et faire bénéficier ces salariés des dispositions individuelles de la convention collective de L'UCANSS du 8 février 1957.

Pour autant, dans la mesure où elle gère un régime spécial de retraite et non le régime général ni le régime des indépendants, la CPR de la SNCF objecte utilement qu'elle n'est pas tenue par l'intégralité des stipulations de cette convention collective laquelle n'a pas été étendue et notamment celles dont le salarié se prévaut relativement aux tickets-restaurants. Le jugement sera réformé en ce qu'il a jugé appliquer sans réserve la convention collective aux contrats de travail temporaire du salarié.

Sur les rappels de primes :

Au soutien de son action, Mme [L] reproche à l'employeur de ne pas lui avoir versé les primes de gratification et de vacances auxquelles elle pouvait prétendre en application des stipulations de la convention collective de l' UCANSS.

La société Manpower objecte s'être libérée de son obligation conformément aux indications fournies par l'entreprise utilisatrice. La CPR de la SNCF conclut avoir décidé, unilatéralement, de faire bénéficier ses salariés des dispositions individuelles et transposables de la convention collective du 8 février 1957 et s'être strictement conformée au décret.

Selon les dispositions des articles L. 1251-18, alinéa 1er, et L. 1251-43 du code du travail, la rémunération, au sens de l'article L. 3221-3 du même code, perçue par le salarié intérimaire, ne peut être inférieure à celle prévue au contrat de mise à disposition, telle que définie au 6° de l'article L. 1251-43 du même code, que percevrait dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification professionnelle équivalente occupant le même poste de travail.

Selon l'article L. 3221-3 du code du travail, constitue une rémunération le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier.

En l'espèce, il ressort du contrat de travail conclu par Mme [L] avec la société Manpower que la salariée a été engagée pour exercer les fonctions de 'gestionnaire' moyennant un salaire mensuel brut de 1 626,28 euros pour 151,67 heures de travail.

Alors que la salariée verse aux débats, le bulletin de paie d'un agent de la CPR de la SNCF, entré au service le 1er février 2017, soit au cours de la même période qu'elle, dont le salaire mensuel de base s'établissait, hors prime de vacances et annuelles, à 1 617 euros, Mme [L] apporte des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une inégalité de salaire relativement à ces primes.

Il incombe dès lors à l'employeur de justifier par des éléments objectifs cette différence de traitement.

Force est de constater que la société Manpower ne communique pas de contrat de mise à disposition, censé être 'établi pour chaque salarié et comporter le montant de la rémunération avec ses différentes composantes, y compris, s'il en existe, les primes et accessoires de salaire que percevrait dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification professionnelle équivalente occupant le même poste de travail', mais le 'cahier des clauses particulières du 30 juin 2014 du marché public' dressé par l'entreprise utilisatrice ayant pour objet 'la mise à disposition de personnels intérimaires', auquel la société Manpower a souscrit.

Il ressort de l'annexe 3 intitulée, 'grille des salaires mensuels bruts des agents de la CPR SNCF' que la rémunération de 1 626,28 euros correspondant au positionnement ATTOPB (pr5) comprend outre le salaire de base de 1 247,11 euros, une indemnité de résidence de 13,39 euros, une prime de travail de 210,66 euros, une gratification d'exploitation de 11,69 euros, une gratification de vacances de 20,83 euros et une prime de fin d'année de 122,60 euros, portant le total mensuel à 1 626,28 euros, pour un taux horaire de 10,72 euros.

Si la société Manpower justifie avoir fixé la rémunération de Mme [L] conformément à cette grille salariale communiquée par l'entreprise utilisatrice 24 mois avant le début de la relation contractuelle, comprenant diverses primes, force est de constater que cette rémunération correspond à quelques euros près au salaire perçu par un employé exerçant les même fonctions, hors primes de vacances et de gratification annuelle, de sorte qu'il n'est pas démontré par l'employeur que la salariée a été remplie de ses droits au titre de ces primes conventionnelles auxquelles elle pouvait prétendre et ne justifie pas objectivement cette différence de traitement.

Par suite, c'est à bon droit et par de justes motifs que le conseil de prud'hommes a accueilli de ces chefs la réclamation salariale de Mme [L], ainsi que des incidences sur l'indemnité de fin de mission et l'indemnité compensatrice de congés payés, dont les montants ne sont pas critiqués, à titre subsidiaire, par l'employeur. Le jugement sera confirmé sur ces points.

Sur les tickets restaurants :

Mme [L], qui travaillait sur le site de la Caisse de prévoyance situé à [Localité 6] (34), soutient qu'elle aurait dû bénéficier de tickets-restaurants pour un montant de 1 933,20 euros en exposant verser aux débats un document permettant de confirmer la fermeture d'un restaurant SNCF CPR situé à [Localité 8] (13). Elle fait notamment valoir que les salariés qui en bénéficiaient n'ont certainement pas dû accepter sa fermeture sans compensation.

Critiquant le jugement du conseil de prud'hommes qui l'a déboutée de ce chef au motif qu'elle se référait à un protocole de la convention collective de l' UCANSS de mars 2019, entré en vigueur postérieurement à la relation contractuelle, Mme [L] réplique que le protocole d'accord relatif à la participation des organismes de sécurité sociale aux tickets-restaurants du 30 juin 2015 précisait déjà en son article 1er que les salariés auxquels les dispositions de la convention UCANSS sont applicables sont en droit de prétendre à l'acquisition de tickets-restaurant.

Le cahier des clauses particulières du 30 juin 2014 du marché public auquel la société Manpower a souscrit ne prévoit rien à ce titre.

La CPR de la SNCF a objecté 'n'avoir jamais mis en place un système d'attribution de tickets-restaurant auprès de son personnel'. Elle réfute les allégations de la salariée concernant la fermeture du restaurant d'entreprise situé à [Localité 8], dont elle indique avoir confié la gestion jusqu'au mois de juillet 2019 au Comité des activités sociales et culturelles de la CGT Cheminots en région PACA.

L'avenant du 30 juin 2015 de la convention collective de L'UCANSS, dont se prévaut la salariée, non étendu, prévoit les dispositions suivantes :

Article 1er

Le présent accord fixe le montant de la part patronale à l'acquisition des titres-restaurant alloués aux salariés relevant des conventions collectives nationales de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale, du 25 juin 1967 des agents de direction et des agents comptables des organismes de sécurité sociale et d'allocations familiales, et du 4 avril 2006 des praticiens-conseils du régime général de sécurité sociale.

Article 2

Le montant de la participation de l'employeur à l'acquisition de titres-restaurant est fixé à 5,36 euros.

Article 3

Le présent accord est conclu à durée indéterminée.

Il s'applique sous réserve de l'agrément prévu par le code de la sécurité sociale et ne vaut en aucun cas engagement unilatéral de l'employeur.

Il est d'application impérative à l'ensemble des organismes du régime général de sécurité sociale.

Il se substitue à toute disposition conventionnelle contraire qui pourrait exister par ailleurs.

Ses dispositions entrent en vigueur au premier jour du mois suivant son agrément.

Cet avenant, postérieur à l'entrée en vigueur du décret n° 2007-730 du 7 mai 2007 qui a institué la CPR, n'a pas été étendu par arrêté ministériel.

La CPR de la SNCF gérant un régime spécial de sécurité sociale, l'avenant n'est pas d'application impérative la concernant. Il n'est pas justifié par la salariée que la CPR ait décidé de l'appliquer volontairement, ce que réfute expressément la caisse de prévoyance. Faute pour Mme [L] de justifier de l'obligation conventionnelle dont elle se prévaut et que celle-ci soit opposable à la CPR de la SNCF, elle n'est pas fondée à solliciter son bénéfice à l'égard de son employeur.

Par ailleurs, la salariée ne fournit aucun élément de nature à corroborer ses allégations selon lesquelles les salariés de la CPR de la SNCF bénéficieraient des tickets-restaurants, son argumentation ne reposant, du reste, que sur une hypothèse, à savoir celle que les salariés de la CPR de la SNCF travaillant sur [Localité 8] n'auraient pas renoncé au bénéfice d'un restaurant d'entreprise sans réagir, observation faite que l'entreprise utilisatrice justifie que ce restaurant n'a pas fermé (pièces n°10 et11) mais qu'il a simplement changé de gérance.

Aucune inégalité de traitement au regard des tickets-restaurants n'étant établie, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [L] de ce chef.

Sur les demandes accessoires :

Il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil prévoyant que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal, à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date et à compter de chaque échéance devenue exigible, s'agissant des échéances postérieures à cette date, les créances à caractère indemnitaire produisant intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

Il sera ordonné à l'employeur de remettre au salarié un bulletin de paie de régularisation et l'attestation pôle emploi conformes à la présente décision, mais sans astreinte laquelle n'est pas nécessaire à assurer l'exécution de cette injonction.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a dit appliquer la convention collective de l' Ucanss aux contrats de travail temporaire de Mme [L], en ce qu'il a condamné la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société Nationale des Chemins de Fer Français solidairement avec la société Manpower au paiement de sommes et dit n'y avoir lieu à application des intérêts au taux légal à compter de la date de mise en demeure en date du 19 décembre 2018,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que la salariée n'est pas fondée à invoquer le bénéfice de l'avenant du 30 juin 2015 de la convention collective de l' Ucanss,

Déboute Mme [L] de l'ensemble de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées contre la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la Société Nationale des Chemins de Fer Français et met hors de cause l'entreprise utilisatrice,

Le confirme pour le surplus,

y ajoutant,

Dit que les créances de nature contractuelle sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date, et à compter de chaque échéance devenue exigible, s'agissant des échéances postérieures à cette date, et que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant,

Ordonne à la société Manpower de remettre à la salariée un bulletin de paie de régularisation et l'attestation pôle emploi conformes à la présente décision dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt.

Rejette la demande d'astreinte.

Condamne la société Manpower à payer à Mme [L] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

Condamne la société Manpower aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par Marie-Lydia Viginier, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/04322
Date de la décision : 03/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-03;20.04322 ?
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