La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/04/2024 | FRANCE | N°21/05274

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 02 avril 2024, 21/05274


ARRÊT n°



































Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 02 AVRIL 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/05274 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PEBA



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 MARS 2021

TRIBUNAL DE PROXIMITE DE SETE
r>N° RG 11-20-0333





APPELANT :



Monsieur [U] [Y]

né le 03 Mai 1967 à [Localité 3] (01)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Morad LAROUSSI ROBIO, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/009791 du 28/...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 02 AVRIL 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/05274 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PEBA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 MARS 2021

TRIBUNAL DE PROXIMITE DE SETE

N° RG 11-20-0333

APPELANT :

Monsieur [U] [Y]

né le 03 Mai 1967 à [Localité 3] (01)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Morad LAROUSSI ROBIO, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/009791 du 28/07/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

Madame [R] [P] épouse [H]

née le 04 Septembre 1935 à [Localité 2] (34)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Denis BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Léa DELORME, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Denis BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 29 Janvier 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Février 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Corinne STRUNK, Conseillère, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON

Greffier lors du prononcé :Madame Estelle DOUBEY

ARRET :

- contradictoire;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre, et par Mme Estelle DOUBEY, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 8 août 2014, M. [B] [H], aux droits duquel Mme [R] [H] se trouve subrogée, a donné à bail à M. [U] [Y] un appartement, sis [Adresse 1] à [Localité 4] (34), moyennant un loyer mensuel de 400 euros outre une provision sur charges de 40 euros.

Le 4 février 2020, Mme [R] [H] a fait signifier à son locataire sa volonté de ne pas renouveler le contrat de location, motivant le congé par des manquements répétés à son obligation de jouir paisiblement des lieux loués, invoquant des injures, insultes et menaces à l'encontre des résidents de l'immeuble.

Par acte d'huissier signifié à personne le 24 août 2020, Mme [R] [H] a fait assigner M. [U] [Y] aux fins notamment de voir valider ce congé pour troubles de jouissance et voir ordonner l'expulsion du preneur.

Le jugement réputé contradictoire rendu le 26 mars 2021 par le tribunal de proximité de Sète :

Valide le congé délivré à M. [U] [Y] le 4 février 2020 et déclare le requis occupant sans droit ni titre du logement sis [Adresse 1] à [Localité 4] depuis le 8 août 2020 ;

Ordonne son expulsion ainsi que celle de tout occupant de son chef ;

Condamne M. [U] [Y] à payer à Mme [R] [H] une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant égal à celui du loyer indexé et des charges depuis la date de résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux ;

Condamne M. [U] [Y] à payer à Mme [R] [H] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire ;

Condamne M. [U] [Y] aux dépens.

Le premier juge a relevé que le congé signifié le 4 février 2020 à M. [U] [Y] répondait bien aux exigences de forme posées par l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989.

Le premier juge a retenu qu'il était établi par les nombreux témoignages produits, faisant état de menaces et autres incivilités très fréquentes ainsi que de la peur ambiante des résidents âgés, que M. [U] [Y] a créé de nombreux troubles de jouissance graves et répétés à l'égard de plusieurs résidents et des dégradations multiples rendant impossible la cohabitation et par là même, la poursuite des liens contractuels, justifiant ainsi la délivrance d'un congé pour manquement à ses obligations.

M. [U] [Y] a relevé appel de la décision par déclaration au greffe du 23 août 2021.

Dans ses dernières conclusions du 19 novembre 2021, M. [U] [Y] demande à la cour de :

In limine litis,

Prononcer la nullité du jugement dont appel ;

Infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

Débouter Mme [R] [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Condamner Mme [R] [H] à lui payer la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

Condamner Mme [R] [H] aux entiers dépens.

In limine litis, M. [U] [Y] somme Mme [R] [H] de produire l'assignation initiale datée du 24 août 2020 afin de vérifier la date d'audience à laquelle il a été assigné et les conditions dans lesquelles il a été jugé, en l'absence de quoi le jugement devra être déclaré nul du fait de l'absence de respect du principe du contradictoire.

A titre subsidiaire, M. [U] [Y] soutient qu'il revient à Mme [R] [H] de fournir la preuve des troubles invoqués en produisant l'ensemble des éléments utiles à les démontrer, à défaut de quoi le congé donné à M. [U] [Y] ne peut être reconnu comme valable.

Dans ses dernières conclusions du 26 novembre 2021, Mme [R] [H] demande à la cour de :

Rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et en tous cas, mal fondées ;

Déclarer irrecevable, au visa des articles 114, 562 et 901 du code de procédure civile, la demande d'annulation du jugement formé par M. [U] [Y] ;

Dire et juger infondé l'appel qu'il a interjeté ;

Rejeter l'ensemble des prétentions de l'appelant ;

Confirmer en toutes ses dispositions la décision attaquée ;

Condamner M. [U] [Y] au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel par Mme [R] [H] née [P], à lui régler la somme de 1.800 euros, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement direct au profit de Me Denis Bertrand, avocat soussigné en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.

Mme [R] [H] soutient que la demande en nullité du jugement doit être rejetée dès lors que l'acte d'assignation est produit et a été remis à M. [U] [Y] en main propre par l'huissier. Par ailleurs ce dernier n'invoque aucun grief et ne peut donc se prévaloir des dispositions des articles 9 et 114 du code de procédure civile.

Mme [R] [H] soutient également que c'est à juste titre que le congé a été délivré à M. [U] [Y] dont de nombreuses pièces comprenant des courriers, pétitions, plaintes pénales, rappels à l'ordre et attestations, justifient du caractère sérieux des troubles causés par M. [U] [Y] et du sérieux du congé donné.

Mme [R] [H] fait valoir que M. [U] [Y] ne forme pas la moindre critique sur le fond à l'égard de la décision attaquée et, de ce fait, son appel ne peut qu'être considéré comme non soutenu et irrecevable.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 29 janvier 2024.

MOTIFS

1/ Sur la nullité du jugement :

M. [U] [Y] réclame en appel la nullité du jugement car il prétend ne pas voir été valablement assigné devant le premier juge.

Or, il résulte que l'assignation délivrée le 14 août 2020, pour une première audience tenue le 4 novembre 2020 devant le juge des contentieux de la protection de Sète, a été remise à M. [Y] en personne.

Il a donc été valablement convoqué et lui appartenait de se présenter à l'audience.

Le moyen exposé est donc inopérant de telle sorte que l'appelant sera débouté de sa demande de nullité.

2/ Sur le bien-fondé du congé pour reprise :

Selon l'article 15 I de la loi du 6 juillet 1989, « lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant. A peine de nullité, le congé donné par le bailleur doit indiquer le motif allégué ' En cas de contestation, le juge peut, même d'office, vérifier la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues au présent article ».

L'article 15 I de la loi du 6 juillet 1989 autorise le bailleur à délivrer un congé à son locataire notamment en cas d'inexécution de l'une des obligations lui incombant tels qu'un défaut répété de paiement du loyer à la date convenue, un usage non paisible des lieux, un défaut d'assurance'

La délivrance du congé par le bailleur se fait au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, d'une signification par voie de commissaire de justice ou par remise en main propre contre récépissé ou émargement pour produire son plein effet. Enfin, le congé doit être délivré au moins six mois avant le terme du bail.

Au cas d'espèce, un congé pour motif sérieux et légitime a été délivré et régulièrement notifié au locataire le 4 février 2020 par acte d'huissier de justice, dans le délai légal, soit six mois avant la fin du bail qui devait se terminer le 7 août 2020.

Le motif du congé a été spécifié en ces termes :

« Ce congé est justifié par des manquements répétés à votre obligation de jouir paisiblement des lieux loués à savoir :  injures à l'encontre des résidents de l'immeuble, insultes et menaces verbales et physiques à l'encontre d'une voisine ayant donné lieu à plusieurs mains courantes et un dépôt de plainte auprès du commissariat de [Localité 4] ce qui trouble la tranquillité de l'immeuble et constitue un motif légitime et sérieux comme prévu à l'article 15 I de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ».

Au soutien du congé, Mme [R] [H] produit diverses pièces :

Un courrier adressé le 8 avril 2016 par M. [Z] [H], locataire du même immeuble, à l'agence Gaillard Immobilier, pour se plaindre du comportement de M. [Y] tant en raison des agressions verbales (insultes, menaces) dont lui et son épouse ont été victimes que du caractère bruyant de leur voisin peu respectueux de la tranquillité du voisinage ;

Une lettre de pétition établie par 8 propriétaires ou locataires de l'immeuble dénonçant l'agressivité et l'attitude menaçante de l'intéressé, chacun faisant part d'altercation virulente subie personnellement, de son comportement bruyant troublant la quiétude de la résidence, du manque de civisme du fait d'un non-respect des parties communes ;

Un compte-rendu d'infraction suite à une plainte déposée le 11 avril 2016 par M. [U] [V], résident, pour des faits de menace avec arme, dans lequel est exposé le comportement déplacé de M. [Y], tenant à des menaces et agressions verbales répétées, une utilisation des parties communes pour consommer des produits stupéfiants ;

Une mise en demeure adressé à M. [Y] le 23 mai 2016 par l'agence Gaillard Immobilier l'invitant à mettre fin à ces troubles tout en respectant la tranquillité du voisinage sous peine de ne pas renouveler le bail ;

Un courrier de pétition daté du 27 mars 2018 émanant de 8 locataires et copropriétaires dénonçant à diverses autorités un « problème de violence grave » et plus précisément l'agressivité de l'appelant, sa violence, son comportement inadapté au sein de la résidence (tapage, insultes, usage de cannabis dans les parties communes, tapage nocturne, fracture de la porte d'entrée sous un état d'ébriété avéré') ;

Main-courante en date du 5 avril 2018 déposée par une locataire dénonçant les troubles de voisinage subis depuis près de 5 années émanant de M. [Y] reprenant des griefs similaires ;

Un courrier adressé à M. le procureur de la république le 14 mai 2018 par l'agence Gaillard Immobilier sollicitant la résiliation du contrat de bail suite à l'incarcération de M. [Y] en avril 2018 pour des faits en lien avec un trafic de stupéfiants ;

Un dépôt de plainte en date du 12 novembre 2019 par une résidente pour des faits de violation de domicile dont elle accuse M. [Y];

Mains-courantes déposées les 12 novembre 2019 et 7 janvier 2020 par une résidente pour des faits d'injures et menaces dont elle accuse M. [Y].

Selon les articles 1728 1 ° du code civil et 7 b) de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé d'user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location.

Enfin, en application de l'article 1729 du code civil « si le preneur n'use pas de la chose louée raisonnablement ou emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou dont il puisse résulter un dommage pour le bailleur, celui-ci peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail.»

En l'espèce, l'agence Gaillard Immobilier, chargée de la gestion de l'immeuble, a été saisie d'une première plainte adressée le 8 avril 2016 par un locataire lequel reprochait à M. [Y] des nuisances sonores ainsi qu'un comportement agressif et menaçant.

Ce courrier a été relayé dans les quatre années qui ont suivi par des pétitions du voisinage, des dépôts de main-courante et divers courriers dénonçant tous de manière concordante et circonstanciée des faits de nature à troubler la tranquillité du voisinage tels que des insultes, l'usage de cannabis dans les parties communes, tapage nocturne, fracture de la porte d'entrée sous un état d'ébriété avéré'

Il apparaît que les moments d'accalmie sont à mettre en lien avec les périodes durant lesquelles M. [Y] a été incarcéré.

Il n'est pas contesté qu'en dépit d'un rappel à l'ordre adressé à l'appelant le 23 mai 2016 par l'agence Gaillard Immobilier, les troubles de voisinage n'ont pas cessé comme en attestent les signataires de deux pétitions ainsi que d'autres locataires de la résidence qui ont déposé plusieurs mains-courantes, confirmant la persistance du tapage, l'usage des parties communes comme lieu de consommation de produits stupéfiants ainsi que l'agressivité de cet occupant, et ce de manière continue du mois d'avril 2016 au mois de janvier 2020, date du dernier dépôt de main-courante, étant relevé que M. [Y] a été incarcéré sur une période postérieure, son adresse était fixée au centre pénitentiaire de [Localité 5].

Ces pièces confirment la persistance des troubles de voisinage subis depuis le mois d'avril 2016 et du comportement inadapté de M. [Y] qui fait régner au sein de la résidence un climat insupportable de nature à nuire à la tranquillité du voisinage, et une insécurité pour les autres locataires.

Les difficultés personnelles de M. [Y] ne peuvent justifier la persistance des troubles dénoncés pendant près de quatre années.

Ces manquements répétés et graves à l'obligation du preneur de jouir paisiblement des lieux loués justifient la résiliation du bail.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

3/Sur les demandes accessoires :

La décision entreprise sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles. L'exécution provisoire étant de droit, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, il y a lieu de condamner l'appelant aux dépens.

L'équité commande de faire application des dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner l'appelant, qui succombe, à payer à l'intimée la somme de 800 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après en avoir délibéré conformément à la loi, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Déboute M. [U] [Y] de la demande aux fins d'annulation du jugement,

Confirme le jugement rendu le 26 mars 2021 par le tribunal de proximité de Sète en toutes ses dispositions,

Condamne M. [U] [Y] à payer à Mme [R] [H] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [U] [Y] aux entiers dépens avec droit de recouvrement direct au profit de Me Denis Bertrand, avocat soussigné en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/05274
Date de la décision : 02/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-02;21.05274 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award