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27/03/2024 | FRANCE | N°21/04014

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 27 mars 2024, 21/04014


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à





























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 27 MARS 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04014 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PBT3





Décision déférée à la Cour : Jugement du 1

0 MAI 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE RODEZ - N° RG F 19/00081







APPELANT :



Monsieur [V] [G]

né le 02 Juin 1975 à [Localité 7] (12)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]



Représenté par Monsieur [J] [W],

Défenseur syndical Occitanie

[Adresse 3]

[Localité 7]



...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 27 MARS 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04014 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PBT3

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 MAI 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE RODEZ - N° RG F 19/00081

APPELANT :

Monsieur [V] [G]

né le 02 Juin 1975 à [Localité 7] (12)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Monsieur [J] [W],

Défenseur syndical Occitanie

[Adresse 3]

[Localité 7]

INTIMEE :

S.A. GROUPE LA DEPECHE DU MIDI

Prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Philippe GARCIA de la SELARL CAPSTAN - PYTHEAS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assisté par Me Mathilde MOLINIER KOUASS, substituant Me Stéphane LEPLAIEUR, avocats au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 03 Janvier 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 JANVIER 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

Madame Magali VENET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

De décembre 1999 à janvier 2019, M. [G] a fourni à la société Groupe La Dépêche du Midi des reportages photos en contrepartie d'une rémunération sous forme d'honoraires.

Le 11 juillet 2019, il a saisi le conseil de prud'hommes de Rodez afin d'obtenir la requalification de la relation contractuelle en un emploi salarié à temps complet de journaliste, le paiement d'un rappel de salaire sur la période du 1er août 2016 au 30 mars 2019, sous déduction des rémunérations nettes perçues, et des indemnités de rupture.

La société Groupe La Dépêche du Midi a soulevé l'incompétence de la juridiction prud'homale au profit du tribunal judiciaire de Rodez et, subsidiairement a plaidé le rejet de l'ensemble des prétentions du requérant en objectant que l'intéressé avait exercé son activité de manière indépendante en qualité de correspondant local de presse.

Par jugement du 10 mai 2021, le conseil a débouté M. [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, débouté la société Groupe La dépêche du Midi de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné le requérant aux dépens.

Suivant déclaration en date du 14 juin 2021, M. [G] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 19 mai précédent.

' suivant ses conclusions remises au greffe par lettre recommandée avec avis de réception le 13 septembre 2021, l'appelant demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :

Requalifier la relation de travail en emploi salarié à temps complet de journaliste photographe professionnel,

Lui accorder :

- A titre de rappels de salaire du 1er avril 2016 au 30 mars 2019 (dont majoration pour ancienneté, prime d'appareil photo et 13ème mois) sous déduction de la somme de nette de 27 093,14 euros perçue sur la période, la somme de 76 017,62 euros bruts,

- A titre d'indemnité de congés payés sur rappel de salaire la somme de 6 908,86 euros bruts,

Déclarant la rupture du contrat de travail dépourvue de cause réelle et sérieuse et condamnant la société Groupe La dépêche du Midi à lui payer les sommes suivantes :

- A titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 35 404,05 euros net,

- A titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement : 35 404,05 euros net,

- A titre d'indemnité compensatrice de préavis : 4 510,30 euros bruts outre 435,70 euros au titre des congés payés afférents,

- A titre de dommages-intérêts liés aux frais résultant de la procédure engagée : 1 000 euros.

Condamner la société Groupe La dépêche du Midi aux éventuels dépens.

Au soutien de son action, M. [G] expose que si, dans un premier temps la collaboration consistait uniquement en la remise de la collecte d'informations pour le compte du journaliste professionnel de service, progressivement les tâches qui lui ont été confiées et les conditions dans lesquelles il les a accomplies, ont caractérisé une relation salariale inhérente à celle d'un journaliste professionnel. C'est ainsi qu'il fait valoir que la société lui confiait, en les lui programmant, la couverture photographique d'événements sportifs se déroulant dans le département et au-delà, lui fournissait du matériel, lui attribuait des accréditations et des matériels d'identification nécessaires au suivi de clubs sportifs, ainsi qu'un 'log' de journaliste prof. Il ajoute que suite au départ du second photographe de l'agence de [Localité 7], qui exerçait, lui, ses fonctions en qualité de salarié, son activité s'est accrue de 2013 à 2018, la rémunération annuelle servie par la société s'établissant sur les 3 dernières années 2016/2018 à un montant de l'ordre de 10 000 euros.

Rappelant les dispositions légales applicables, à savoir outre celles édictées par la loi du 27 janvier 1993 qui définit la qualification de correspondant local de presse, celles énoncées par le code du travail sous les articles L. 7111-1 et suivants relatives aux journalistes, M. [G] soutient que dès lors que les conditions légales d'exercice des fonctions de correspondant local de presse ne sont pas remplies dans la mesure où le matériel est fourni par le journal, les lieux de travail et plannings sont imposés et les articles sont mis en forme par le correspondant lui même, et que les revenus procurés au travailleur vont au-delà d'un simple complément de ressources, il est fondé à solliciter le bénéfice de la présomption de salariat posée par l'article L. 7111-2 du code du travail et la requalification de la relation de travail en contrat de travail de journaliste professionnel. Il se prévaut en outre de la délivrance d'une carte de presse par la société Groupe La dépêche du Midi pour l'année 2005.

M. [G] considère ainsi devoir bénéficier de la présomption de salariat et de l'existence d'un contrat de travail, présomption qui ne pourra être renversée au regard des conditions réelles dans lesquelles il exerçait son activité et dont indique justifier.

' aux termes de ses conclusions remises au greffe le 17 novembre 2021, la Société Groupe La dépêche du Midi demande à la cour de :

A titre principal, infirmer le jugement entrepris en ce qu'il s'est déclaré compétent pour trancher le litige,

Statuant à nouveau :

Constater l'incompétence du conseil de prud'hommes au profit du tribunal judiciaire de Rodez et débouter M. [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

A titre subsidiaire, confirmer le jugement pour le reste, et en ce qu'il a débouté M. [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions et l'a condamné aux éventuels dépens.

En tout état de cause, le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dans le cadre de la procédure d'appel.

La société objecte que M. [G] a exercé sa collaboration avec le Groupe La dépêche du Midi en qualité de correspondant local de presse, qui, à l'inverse du journaliste n'a pas de lien de subordination avec l'éditeur et n'a donc pas le statut de salarié, ainsi que le prévoit l'article 16 de la loi du 27 janvier 1993. Elle fait valoir que l'appelant percevait des honoraires calculés en fonction de ses interventions et que ses revenus étaient variables d'un mois sur l'autre. Elle souligne également que, parallèlement, M. [G] exerçait une activité de photographe professionnel, qu'il a créé sa propre société et qu'il est inscrit au répertoire SIRENE depuis 2002.

Elle conclut que M. [G] ne peut invoquer la présomption de salariat mentionnée à l'article L.7111-2 du code du travail pour obtenir la requalification de sa relation professionnelle en contrat de travail, en omettant qu'un texte spécial issu de la loi du 27 janvier 1987 définit le correspondant local de presse comme un salarié indépendant et que l'activité présumée salariée définie par le code du travail ne s'adresse qu'à des journalistes professionnels qui exercent leur activité principale dans une entreprise de presse alors qu'il est démontré qu'il exerçait son activité principale pour le compte de la société qu'il a créée. Elle plaide encore que la simple détention d'une carte de journaliste professionnel n'est pas suffisante à établir la qualité de journaliste salarié et donc de justifier sa demande de requalification en contrat de travail. Elle souligne enfin, que sa rétribution n'était pas fixe, mais calculée en fonction des missions réalisées.

Par décision en date du 3 janvier 2024, le conseiller de la mise en état a clôturé l'instruction du dossier et fixé l'affaire à l'audience du 24 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux conclusions susvisées.

MOTIFS :

Sur l'exception d'incompétence :

Selon l'article L. 1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient et juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti.

L'existence d'une relation de travail ne dépendant ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs, la juridiction prud'homale doit d'abord rechercher la véritable nature de la relation contractuelle avant de se prononcer sur sa compétence.

Par suite, dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, la demande a pour objet premier de faire constater l'existence d'un contrat de travail entre les parties, le conseil de prud'hommes est compétent.

La société Groupe La dépêche du Midi n'est pas fondée à reprocher au conseil de ne pas avoir statué sur son exception d'incompétence avant d'avoir analysé la relation contractuelle litigieuse.

Sur la demande de requalification de la relation contractuelle en contrat de travail de journaliste professionnel :

M. [G], qui précise s'être vu remettre par la société Groupe La dépêche du Midi à la date de son engagement, le 3 décembre 1999, une carte de correspondant local de presse, statut dont il précise qu'il était parfaitement conforme aux conditions initiales d'exercice de son activité en ce ses tâches initiales consistait en une simple collecte d'informations remises à des journalistes professionnels, soutient que les fonctions confiées par la société intimée et les modalités d'exercice de celles-ci n'ont plus été progressivement adaptées à ce statut. Se prévalant de la présomption de travail salarié lié à sa qualité alléguée de journaliste professionnel, il sollicite la requalification de la relation de travail en un emploi salarié et le bénéfice de la convention collective des journalistes, qu'il s'agisse de sa demande en paiement de rappel de salaire que de celles en paiement des indemnités de rupture.

Le contrat de travail, caractérisé par l'existence d'une prestation de travail en contrepartie d'une rémunération, repose sur le critère essentiel de la subordination du salarié à l'égard de son employeur : cette subordination détermine l'existence du contrat de travail, en ce qu'elle permet de le distinguer du contrat d'entreprise. Le lien de subordination est défini comme l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

L'article 10 de la loi n 87-39 du 27 janvier 1987 portant diverses dispositions d'ordre social, dans sa rédaction applicable du 30 janvier 1993 au 23 décembre 2015, dispose que :

« I. - Le correspondant local de la presse régionale ou départementale contribue, selon le déroulement de l'actualité, à la collecte de toute information de proximité relative à une zone géographique déterminée ou à une activité sociale particulière pour le compte d'une entreprise éditrice.

Cette contribution consiste en l'apport d'informations soumises avant une éventuelle publication à la vérification ou à la mise en forme préalable par un journaliste professionnel.

Le correspondant local de la presse régionale et départementale est un travailleur indépendant et ne relève pas au titre de cette activité du 16° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale ni de l'article L. 761-2 du code du travail.

II. - Lorsque le revenu tiré de leur activité n'excède pas 15 p. 100 du plafond annuel de la sécurité sociale au 1er juillet de l'année en cours, les correspondants locaux de la presse régionale et départementale visés au I ne sont affiliés aux régimes d'assurance maladie-maternité et d'assurance vieillesse des travailleurs non salariés que s'ils le demandent.

III. - Lorsque le revenu tiré de leur activité reste inférieur à 25 p. 100 du plafond mentionné au II, les correspondants locaux de la presse régionale et départementale visés au II bénéficient d'un abattement de 50 p. 100 pris en charge par l'Etat sur leurs cotisations d'assurance maladie-maternité et d'assurance vieillesse. »

L'article L.7111-3 du code du travail dispose que :

« Est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources.

Le correspondant, qu'il travaille sur le territoire français ou à l'étranger, est un journaliste professionnel s'il perçoit des rémunérations fixes et remplit les conditions prévues au premier alinéa. »

Selon l'article L. 7112-1, toute convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant rémunération, le concours d'un journaliste professionnel est présumée être un contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties.

L'article L.7111-4 du code du travail précise que sont assimilés aux journalistes professionnels les reporters-photographes.

Le journaliste professionnel, qui est celui remplissant les conditions énoncées à l'article L. 7111-3 du code du travail, bénéficie de la présomption de salariat prévue par l'article L. 7112-1. L'employeur peut la renverser en établissant que le salarié exerce son activité en toute indépendance et en toute liberté.

Il est de droit que M. [G] qui a exercé ses fonctions en qualité de correspondant local de presse, ne peut revendiquer l'existence d'un contrat de travail en tant que journaliste professionnel, dont le statut est protégé, que dans les conditions prévues par l'article L. 7111-3 du code du travail, c'est à dire en établissant qu'il perçoit des rémunération fixes et remplit les conditions prévues au premier alinéa de ce texte à savoir d'avoir pour activité principale, régulière et rétribuée l'exercice de sa profession dans une entreprise de presse et d'en tirer le principal de ses ressources.

([L], [U], juste pour info les références suivantes : sociale 18 mai 2005 n 02-44.075, Soc 14 mai 1997, n 94 43.966, Soc 23 juin 1998 n 96-42.085, Soc 20 décembre 2006, n 06-40.799, Soc 2 mars 2016, n 14-23.211

Dans un arrêt récent du 30 mai 2018 ( n 16-26.415, en cours de publication), concernant un journaliste professionnel qui travaillait également en collaboration avec la société [Localité 6] matin mais qui était qualifié de correspondant local dans sa relation avec cette société, la chambre sociale a même retenu que l'existence d'un contrat de travail avec [Localité 6] matin ne pouvait être caractérisée que dans les conditions de l'article L.7111-3 du code du travail. L'arrêt qui avait fait application de la présomption de salariat au motif que l'intéressé avait la qualité de journaliste professionnel a été cassé au motif que la cour d'appel n'a pas recherché si, dans sa relation avec la société [Localité 6] matin, le correspondant local percevait une rémunération fixe.)

Suivant un arrêt récent en date du 15 novembre 2023 (N° 23-14.979), la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu à transférer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ainsi libellée :

« Le second alinéa de l'article L. 7111-3 du code du travail n'est-il pas contraire au principe d'égalité devant la loi garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, d'une part, en ce qu'il crée une inégalité de traitement entre le correspondant de presse et le journaliste professionnel en exigeant du correspondant pour qu'il puisse être assimilé à un journaliste professionnel et bénéficier de la présomption de contrat de travail posée par l'article L. 7112-1 du code du travail qu'il justifie non seulement remplir les conditions posées par l'alinéa 1 de l'article L. 7111-3 pour être journaliste professionnel mais aussi de la fixité de ses revenus, et, d'autre part, en ce que, tel qu'il est interprété de façon constante par la Cour de cassation, il crée une inégalité de traitement entre le correspondant local de presse et les personnes physiques dont l'activité donne lieu à immatriculation sur les registres ou répertoires énumérés par l'article L. 8221-6 du code du travail dès lors que le correspondant local de presse ne peut revendiquer l'existence d'un contrat de travail que dans les conditions prévues par l'article L. 7111-3 du code du travail tandis qu'il suffit pour les personnes physiques immatriculées aux registres du commerce ou des métiers de prouver, pour renverser la présomption de non-salariat, qu'elles fournissent des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard du donneur d'ordre '

Or, en l'espèce, il ressort des éléments parcellaires communiqués par l'appelant et notamment de décomptes d'activité (pièce n°3) et de quelques relevés bancaires (pièce n°5), d'une part, que sa rémunération, qui était calculée selon un barème de points - dont les modalités ne sont pas précisées -dépendait essentiellement du nombre de photos facturées, et, d'autre part, que sa rémunération perçue  variait fortement d'un mois sur l'autre. En effet, à l'examen de ces pièces, M. [G] établit, par ordre antéchronologique des seules pièces versées aux débats sur ce point, que la société Groupe La dépêche du Midi lui a versé :

- 939 euros en mai 2019,

- 1 165,26 euros en mars 2019,

- 875,27 euros en mars 2018,

- 142 euros pour le mois de février 2018,

- 751,92 euros en avril 2017,

- 1 363,20 euros en mai 2016 [...].

M. [G], correspondant local de presse ne justifie donc pas de la condition légale requise qu'il percevait de la société Groupe La dépêche du Midi une rémunération fixe pour bénéficier du statut de journaliste professionnel, qu'il revendique.

En conséquence, il ne peut se prévaloir de la présomption de salariat énoncée à l'article L. 7311-2 du code du travail.

Alors que la relation contractuelle a duré près de 20 années, le fait que M. [G] a obtenu pour la seule année 2005, une carte de presse, laquelle est destinée à lui faciliter l'exercice de sa profession et non à prouver son statut social, est dépourvue de portée. La remise de carte professionnelle cette année là n'exonère pas l'appelant de son obligation de justifier qu'il remplissait la condition requise par le second alinéa de l'article L. 7111-3, à savoir qu'il percevait une rémunération fixe.

À l'examen des pièces communiquées, M. [G] établit avoir collaboré au journal en fournissant des articles et photographies de manifestations sportives locales, sans alléguer pour autant, ni a fortiori justifier qu'il a participé à la politique rédactionnelle du journal, à la hiérarchisation et à la vérification de l'information.

Le fait qu'il a bénéficié de supports, d'accréditations et de moyens matériels et qu'il pouvait travailler au sein des locaux dont il disposait des clés, pour exercer son activité de correspondant est inopérant. Les témoignages versés aux débats décrivent l'activité d'un correspondant local chargé de photographier les manifestations sportives locales. De même l'attestation de Mme [M] qui précise qu'il était en contact régulier avec les journalistes de l'agence de [Localité 7] pour la fourniture d'images demandées par la rédaction ne saurait caractériser l'accomplissement des fonctions d'un journaliste professionnel ni davantage l'existence d'un contrat de travail.

Alors que la société Groupe La dépêche du Midi rapporte la preuve que M. [G], parallèlement à son activité de correspondant local de presse, développait une activité de photographe professionnel dans le cadre d'une société qu'il avait constituée, force est de relever que l'appelant ne fournit aucun élément comptable relativement à l'activité dégagée par cette société.

Enfin, en toute hypothèse, il ne ressort d'aucun élément probant que M. [G] a exercé son activité de correspondant local de presse sous un lien de subordination juridique à l'égard de la société Groupe La dépêche du Midi.

Par suite, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [G] de ses demandes de requalification de la relation contractuelle en contrat de travail de journaliste professionnel, et en paiement d'un rappel de salaire et des indemnités de rupture.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Condamne M. [G] à verser à la société Groupe La dépêche du Midi la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/04014
Date de la décision : 27/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-27;21.04014 ?
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