ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 21 MARS 2024
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 22/06151 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PUKM
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 24 OCTOBRE 2022
JUGE DE L'EXECUTION DE PERPIGNAN
N° RG 21/02007
APPELANTE :
SOCIETE INTRUM DEBT FRANCE AG, Société Anonyme au capital de 1.000.000 francs suisses (CHF), immatriculée au RCS de ZUG SUISSE sous le n° CHE-100 023 266, dont le siège social est [Adresse 6]
Représentée en France par la Société INTRUM CORPORATE, Société par Actions Simplifiée à associé unique dont le siège social est [Adresse 1], inscrite au Registre de Commerce de Nanterre sous le n° 797 546 769, venant aux droits de La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de l'Anjou et du Maine, société à Capital Variable, immatriculée au RCS du Mans sous le numéro 414 993 998 dont le siège social est [Adresse 3], agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège social
Industriestrasse 13 C CH-6300
ZUG SUISSE
Représentée par Me Fanny MEYNADIER de la SELARL MEYNADIER - BRIBES AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me VERNHES
INTIME :
Monsieur [P] [Z]
né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Morgane BOUCHAN, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me BENBETKA
Ordonnance de clôture du 29 janvier 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 FEVRIER 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre
Madame Nelly CARLIER, Conseiller
M. Jonathan ROBERTSON, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO
Le délibéré initialement prévu le 7 mars 2024 a été prorogé au 21 mars 2024 ; les parties en ayant été préalablement avisés ;
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Nelly CARLIER, conseillère, pour la présidente de chambre empêchée, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE :
Le 6 juillet 2021, la SA Intrum Justicia Debt Finance AG, agissant en vertu de deux jugements rendu le 27 avril 2010 par le tribunal d'instance de Laval et le 18 octobre 2010 par le tribunal de grande instance de Laval, a fait pratiquer une saisie-attribution entre les mains de la société Monabanq sur les comptes ouverts au nom de M. [P] [Z] pour avoir paiement de la somme totale de 162 233, 47 euros.
Cette saisie-attribution a été dénoncée à M. [P] [Z] le 9 juillet 2021.
Par exploit du 2 août 2021, M. [P] [Z] a fait assigner la SA Intrum Debt Finance AG devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Perpignan afin de voir prononcer la nullité du procès-verbal de saisie-attribution et ordonner la mainlevée de cette mesure.
Par jugement en date du 24 octobre 2022 le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Perpignan a :
- dit recevable la contestation du procès-verbal de saisie-attribution ;
- prononcé la nullité du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- prononcé sa mainlevée ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG à payer à M. [Z] la somme de 1 200,00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG aux entiers dépens, en ce compris les dépens de saisie-attribution et de mainlevée ;
La SA Intrum Justicia Debt Finance AG a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la Cour le 8 décembre 2022.
Par arrêt en date du 14 septembre 2023, la présente Cour a :
- ordonné la réouverture des débats à l'audience du 5 février 2024 afin d'inviter les parties à faire valoir toutes observations utiles sur la recevabilité de l'appel,
- fixé la nouvelle clôture au 29 janvier 2024
- réservé l'ensemble des demandes.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 9 mars 2023 avant la clôture du 29 janvier 2024, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SA Intrum Justicia Debt Finance AG demande à la Cour de :
- réformer le jugement du 24 octobre 2022 rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Perpignan en ce qu'il a retenu que la société INTRUM DEBT FINANCE AG ne justifiait pas de façon claire et circonstanciée le fondement de créances certaines, résultant de l'acte de cession de créances du 21 février 2017 et en conséquence prononçait l'annulation du procès-verbal de saisie attribution du 6 juillet 2021.
- valider la saisie-attribution en date du 6 juillet 2021 pratiquée sur le compte bancaire de Monsieur [Z] ouvert auprès de MONABANQ ayant permis de saisir la somme de 984,72 €.
- réformer le jugement du 24 octobre 2022 rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Perpignan en ce qu'il a accordé à Monsieur [Z] une somme de 1 200 € au titre de l'article 700 du CPC.
- débouter Monsieur [Z] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
- condamner Monsieur [Z] au paiement d'une somme de 2 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par la voie électronique le 2 février 2024, après la clôture du 29 janvier 2024, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SA Intrum Justicia Debt Finance AG demande à la Cour :
- d'ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture, la date de clôture étant fixée au jour de l'audience.
- de déclarer recevable l'appel formé par la SA INTRUM DEBT FINANCE AG le 8 décembre 2023.
- de réformer le jugement du 24 octobre 2022 rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Perpignan en ce qu'il a retenu que la société INTRUM DEBT FINANCE AG ne justifiait pas de façon claire et circonstanciée le fondement de créances certaines, résultant de l'acte de cession de créances du 21 février 2017 et en conséquence prononçait l'annulation du procès-verbal de saisie attribution du 6 juillet 2021.
- de valider la saisie-attribution en date du 6 juillet 2021 pratiquée sur le compte bancaire de Monsieur [Z] ouvert auprès de MONABANQ ayant permis de saisir la somme de 984,72 €.
- de réformer le jugement du 24 octobre 2022 rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Perpignan en ce qu'il a accordé à Monsieur [Z] une somme de 1 200 € au titre de l'article 700 du CPC.
- de condamner Monsieur [Z] au paiement d'une somme de 2 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions signifiées par la voie électronique le 10 février 2023, avant la clôture du 29 janvier 2024, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, M. [P] [Z] demande à la cour de :
'' A titre principal, confirmer le jugement du Juge de l'Exécution de PERPIGNAN en date du 24 octobre 2022 en ce qu'il a :
- dit recevable la contestation du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- prononcé la nullité du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- prononcé la mainlevée du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- débouté la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG de sa demande tendant à voir condamner Monsieur [P] [Z] à lui verser la somme de 1 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG à payer à Monsieur [Z] la somme de 1 200,00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG aux entiers dépens, en ce compris les dépens de saisie-attribution et de mainlevée ;
'' A titre subsidiaire, confirmer le jugement du Juge de l'Exécution de PERPIGNAN en date du 24 octobre 2022 en ce qu'il a :
- dit recevable la contestation du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- débouté la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG de sa demande tendant à voir condamner Monsieur [P] [Z] à lui verser la somme de 1 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG à payer à Monsieur [Z] la somme de 1 200,00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG aux entiers dépens, en ce compris les dépens de saisie-attribution et de mainlevée ;
* Et statuant à nouveau, cantonner la saisie-attribution du 6 juillet 2021 à la somme de 124 919,88 euros, hors frais ;
* En tout état de cause,
- accueillir l'appel incident de Monsieur [P] [Z] ;
- et statuant à nouveau, condamner la société INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG, représentée par son mandataire la société INTRUM CORPORATE, à verser à Monsieur [P] [Z] la somme de 3 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
* En tout état de cause,
- condamner la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG, représentée par son mandataire la société INTRUM CORPORATE, à verser à Monsieur [P] [Z] la somme de 3 500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance.
Par conclusions signifiées par la voie électronique le 2 février 2024, postérieurement à la clôture du 29 janvier 2024, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, M. [P] [Z] demande à la cour de :
* A titre liminaire,
- rejeter la demande de rabat de l'ordonnance de clôture fixée au 29 janvier 2024 ;
- juger irrecevables les conclusions et la pièce notifiées par la société INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG, le 02 février 2024 via RPVA ;
* Sur le fond :
'' A titre principal, confirmer le jugement du Juge de l'Exécution de PERPIGNAN en date du 24 octobre 2022 en ce qu'il a :
- dit recevable la contestation du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- prononcé la nullité du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- prononcé la mainlevée du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- débouté la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG de sa demande tendant à voir condamner Monsieur [P] [Z] à lui verser la somme de 1 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG à payer à Monsieur [Z] la somme de 1 200,00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG aux entiers dépens, en ce compris les dépens de saisie-attribution et de mainlevée ;
'' A titre subsidiaire, confirmer le jugement du Juge de l'Exécution de PERPIGNAN en date du 24 octobre 2022 en ce qu'il a :
- dit recevable la contestation du procès-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 ;
- débouté la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG de sa demande tendant à voir condamner Monsieur [P] [Z] à lui verser la somme de 1 500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG à payer à Monsieur [Z] la somme de 1 200,00 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG aux entiers dépens, en ce compris les dépens de saisie-attribution et de mainlevée ;
* Et statuant à nouveau, cantonner la saisie-attribution du 6 juillet 2021 à la somme de 124 919,88 euros, hors frais ;
* En tout état de cause,
- accueillir l'appel incident de Monsieur [P] [Z] ;
- et statuant à nouveau, condamner la société INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG, représentée par son mandataire la société INTRUM CORPORATE, à verser à Monsieur [P] [Z] la somme de 3 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
* En tout état de cause,
- condamner la SAS INTRUM JUSTITIA DEBT FINANCE AG, représentée par son mandataire la société INTRUM CORPORATE, à verser à Monsieur [P] [Z] la somme de 3 500,00 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance.
MOTIVATION
Sur les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et d'irrecevabilité des dernières conclusions de l'appelante et d'une nouvelle pièce
Aux termes de l'article 802 du code de procédure civile, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, à l'exception notamment des demandes de révocation de l'ordonnance de clôture.
L'article 803 du même code prévoit également que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.
L'appelante a signifié ses dernières conclusions le 2 février 2024, soit postérieurement à l'ordonnance de clôture fixée au 29 janvier 2024. Elle sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture, demande à laquelle s'oppose l'intimé qui soulève l'irrecevabilité de ces conclusions, ainsi que d'une nouvelle pièce communiquée par l'appelante après l'ordonnance de clôture.
L'appelante ne fait valoir aucun motif l'ayant conduite à déposer tardivement ses conclusions et la nouvelle pièce litigieuse n° 18.
Elle ne justifie donc pas de l'existence d'une cause grave susceptible de faire droit à sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture.
Il convient donc conformément aux dispositions précitées de rejeter sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 29 janvier 2024 et de déclarer irrecevables ses conclusions signifiées le 2 février 2024, ainsi que la pièce n° 18 de son bordereau communiquée après l'ordonnance de clôture.
Les conclusions de l'intimé signifiées le 2 février 2024 également postérieures à la clôture, si elle sont recevables en ce qu'elles interviennent en réponse à la demande de l'appelante aux fins de révocation de cette clôture, ne peuvent cependant qu'être déclarées irrecevables pour ce qui concerne le fond du litige sur lequel l'intimé conclut à nouveau.
Sur la recevabilité de l'appel
Comme l'a rappelé la présente Cour dans son arrêt de réouverture des débats, en application de l'article R 121-20 du code des procédures civiles d'exécution , le délai d'appel d'une décision rendue par le juge de l'exécution est de quinze jours à compter de sa notitification.
Cependant, cette notification a eu lieu, en l'espèce, au siège social de la société Intrum Justicia Debt Finance AG situé à Zug en Suisse, ainsi qu'il résulte des pièces de notification par le greffe du juge de l'exécution, telles que figurant au dossier de la procédure et elle bénéficiait donc de l'augmentation des délais de procédure prévue à l'article 643 du code de procédure civile, applicable également aux délais d'appel pour les personnes demeurant à l'étranger, l'augmentation des délais prévus aux articles 643 et 644 s'appliquant dans tous les cas où il n'y est pas expressément dérogé, conformément à l'article 645 du même code.
Aucune disposition particulière n'y dérogeant, l'appelante disposait donc d'un délai de deux mois et quinze jours pour relever appel de la décision entreprise et ce, à compter de la réception de la lettre de notification par le greffe du juge de l'exécution, soit à compter du 7 novembre 2022, l'appel formé par elle par la voie électronique le 8 décembre 2022, avant l'expiration du délai d'appel le 7 janvier 2023 à minuit doit ainsi être déclaré recevable.
Sur la demande de nullité de la saisie-attribution
M. [Z] sollicite la nullité de la saisie-attribution à défaut pour la société Intrum Justicia Debt Finance AG de disposer d'un titre exécutoire servant de fondement à cette mesure d'une part, en l'absence de signification des titres visés par le procès-verbal de saisie-attribution et d'autre part, en l'absence d'identification de la créance concernée faisant l'objet de l'acte de cession du 21 février 2017 au profit de la société Intrum.
En application de l'article L 211-1 du même code, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent.
En l'espèce, la saisie-attribution du 6 juillet 2021 est pratiquée en exécution de deux jugements rendus l'un le 27 avril 2010 par le tribunal d'instance de Laval et l'autre par le tribunal de grande instance de Laval le 18 octobre 2010.
S'agissant du premier titre, si le procès-verbal de saisie-attribution mentionne qu'il a été signifié le 21 juin 2010, cette signification n'est pas versée aux débats.
La force exécutoire d'une décision de justice est subordonnée à la justification par le créancier de sa notification en vertu de l'article 503 alinéa 1er du code de procédure civile, à moins que l'exécution n'en soit volontaire et en application de l'article 1353 du code civil qui impose à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver.
Pour s'opposer à la demande de nullité, l'appelante fait valoir qu'elle a fait pratiquer à l'encontre du débiteur préalablement au jugement en cause des saisies conservatoires converties après l'obtention du titre en saisies-attributions le 12 juillet 2011 et dénoncées à M. [Z] le 19 juillet 2011. Néanmoins ces mesures d'exécutions, même non contestées par M. [Z] ne dispensent pas la société Intrum Justicia Debt Finance AG d'établir, dans le cadre de la présente instance, face aux contestations élevées par M. [Z] à ce titre la preuve d'une signification régulière de la décision dont il se prévaut, dès lors que les conversions de saisies invoquées constituent des mesures d'exécution forcée et ne résultent pas d'une exécution volontaire par M. [Z] de la décision en question.
La saisie-attribution pratiquée le 6 juillet 2021 est donc entachée de nullité pour les causes résultant du jugement du tribunal d'instance de Laval du 27 avril 2010.
En revanche, la société Intrum Justicia Debt Finance AG justifie de la signification du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Laval le 18 octobre 2010 selon procès-verbal de recherches infructueuses établi le 15 mars 2011. M. [Z] fait valoir que cette signification ne serait pas valable en l'absence de preuve de l'envoi par l'huissier du courrier recommandé avec avis de réception de la copie du procès-verbal de signification et de la décision concernée.
Or, il résulte des mentions portées sur ce procès-verbal de signification par l'huissier de jutice et qui font foi jusqu'à inscription de faux, qu'il a bien procédé à l'envoi des courriers simple et recommandés prescrits par l'article 659 du code de procédure civile et que ces courriers contenaient copie du procès-verbal de signification et copie de l'acte, objet de la signification, qui ont été expédiés le 15 mars 2011.
La nullité du procès-verbal de saisie-attribution fondée sur l'absence de caractère exécutoire du titre pour ce qui concerne les causes du jugement du 18 octobre 2010 n'est donc pas encourue, la société Intrum Justicia Debt Finance AG justifiant du caractère exécutoire de ce jugement assorti de l'exécution provisoire.
Cependant et quelque soit les nullités entachant le procès-verbal de saisie-attribution au titre de l'absence de signification valable des titres, M. [Z] soutient que la signification de l'acte de cession du 21 février 2017 intervenue au profit de la société Intrum Justicia Debt Finance AG, ne permet pas au regard du seul numéro de référence figurant dans cet acte de faire le lien avec les créances visées dans le procès-verbal de saisie-attribution.
La société Intrum Justicia Debt Finance AG, pour justifier de la cession des créances litigieuses par la Caisse de Crédit Agricole Mutuel de l'Anjou et du Maine, produit seulement le procès-verbal de signification de la cession délivrée à M. [Z] le 5 juillet 2021 et à laquelle est jointe :
- un document intitulé Annexe 3 'Bordereau de cession de créance'daté du 21 février 2017
- un document intitulé Annexe 1 'Liste nominative des créances cédées'
Le bordereau de cession de créance porte sur la cession globale de 104 créances pour un montant global de soldes dus sans aucune individualisation de ces créances, ni mention d'aucune référénce mais renvoie à l'annexe 1 pour la liste des créances transférées.
L'annexe 1 comporte contrairement aux allégations de l'intimé des paraphes permettant d'identifier leurs auteurs et qui sont identifiables par comparaison aux signatures du cédant et du cessionnaire. Cette annexe 1 est un extrait de la liste nominative des créances cédées qui ne comprend que les mentions suivantes :
- Numéro : 103192
- Nom : [Z] [P]
- Encours dû actuel : 124 919, 88 €.
Même si le code monétaire et financier ne prévoit aucun formalisme particulier en ce qui concerne les modalités de désignation et d'individualisation des créances cédées, il appartient néanmoins au cessionnaire d'établir que la créance qui lui a été cédée et qui fonde une mesure d'exécution à son profit est clairement identifiable.
L'appelante soutient que les mentions susvisées sont suffisantes dès lors que le procés-verbal de saisie-attribution rappelle les sommes en principal accordées par les deux jugements et fait référence à des numéros correspondant aux numéros de dossiers au sein de l'étude de l'huissier de justice instrumentaire chargé du recouvrement, ces numéros ainsi que celui visé par l'annexe 1 de l'acte de cession coïncidant avec les mentions de l'attestation établie par le Crédit Agricole Mutuel de l'Anjou et du Maine le 5 décembre 2022 et versée aux débats.
Or, ainsi que l'a relevé le premier juge, les créances visées par le procès-verbal de saisie- attribution portent comme seuls n° de référénce 704043 et 704044, lesquels ne correspondent pas au n°103192 figurant dans l'annexe 1. Les titres exécutoires ne comportent pas davantage la mention d'un numéro de référence quelconque, de même qu'il n'est produit aucune pièce contractuelle ou courrier comportant un n° de référence 103192 permettant de faire le lien avec les créances litigieuses, alors même que celles-ci résultent de titres distincts et de différents prêts ou ouvertures de compte.
Il en est de même en ce qui concerne le montant de l'encours de 124 919, 88 € pour l'ensemble des créances, alors que le procès-verbal de saisie-attribution porte sur un montant total de 162 233, 47 € et que même en ne tenant compte que des condamnations prononcées par les titres, la créance totale devait s'établir à la somme de 121 035, 08 €.
Enfin, en ce qui concerne l'attestation établie par le cédant, M. [Z] sollicite que cette pièce soit écartée des débats à défaut pour elle de ne pas remplir les formes prévues aux articles 202 et suivant du code de procédure civile.
Il convient de rappeler que les dispositions précitées ne sont pas prescrites à peine de nullité et que le juge est libre d'apprécier si un document non conforme aux exigences formelles prévues à l'article 202 du code de procédure civile, présente les garanties suffisantes pour emporter sa conviction.
Il ressort de cette attestation que son signataire certifie au nom du Crédit agricole que la cession en cause portait notamment sur la créance détenue à l'encontre de M. [Z] dont le dossier comportait le n° 103192- référence 6821877613 en vertu de quatre contrats différents pour un montant total arrêté au 30 avril 2016 de 124 919, 88 €.
Or, indépendamment même de l'absence de mention relative à ce qu'elle est établie en vue de sa production en justice, la Cour relève que l'attestation litigieuse ne comporte pas effectivement l'identité de son signataire et n'indique pas en quelle qualité il rédige cette attestation. Par ailleurs, si elle est établie sur un document comportant le logo du Crédit Agricole, elle n'est pas authentifiée par un tampon officiel. Enfin, elle a été établie le 5 décembre 2022, soit plus de cinq ans après la date de la cession, postérieurement au jugement entrepris. Une telle attestation produite seulement en cause d'appel alors même que l'dentification de la créance était sérieusement contestée et contestable dés la procédure de première instance, dont le signataire n'est pas identifiable et ne comportant pas d'élements d'authentification suffisants ne saurait avoir de valeur probante, en l'absence d'autres élements de preuve venant confirmer que les créances en vertu duquel la saisie-attribution a été pratiquée sont bien celles qui ont fait l'objet de la cession du 21 février 2017 sous le n° de référence 103192.
A défaut de pouvoir identifier clairement les créances cédées servant de fondement aux poursuites, la société Intrum Justicia Debt Finance AG n'établit pas agir en vertu de titres exécutoires constatant une créance liquide et exigible à l'encontre de M. [Z] et c'est à juste titre que le premier juge a prononcé la nullité du procs-verbal de saisie-attribution du 6 juillet 2021 et la mainlevée de cette mesure.
Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
M. [Z] fonde cette demande sur le fait pour la société Intrum Justicia Debt Finance AG d'avoir mis en oeuvre sciemment une mesure d'execution forcée en connaissance de l'absence de validité des titres exécutoires dont elle se prévaut et de ce qu'elle était vouée à l'échec.
Aux termes de l'article L 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages et intérêts en cas d'abus de saisie.
En l'espèce, le seul fait que la société Intrum Justicia Debt Finance AG ne soit pas parvenue à justifier au cours de la présente instance de l'exigibilité des créances ne suffit pas à caractériser un abus de saisie, alors même que cette exigibilité porte sur les éléments d'identification de la créance de M. [Z] au sein de l'acte de cession invoqué et que la société Intrum Justicia Debt Finance AG était légitime à s'estimer créancière de M. [Z] en vertu de cet acte de cession, avant les contestations soulevées à ce titre par ce dernier pour la première fois devant le juge de l'exécution, les précédentes mesures d'exécution forcées pratiquées à son encontre en vertu des mêmes titres, n'ayant pas donné lieu à contestations. L'existence d'une mauvaise foi de l'appelante n'est donc pas démontrée.
Cette demande de dommages et intérêts doit ainsi être rejetée.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Il est inéquitable de laisser à la charge de M. [Z] les sommes exposées par lui et non compris dans les dépens. La société Intrum Justicia Debt Finance AG sera donc condamnée à lui payer la somme de 1500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande formée sur le même fondement par la société Intrum Justicia Debt Finance AG qui succombe en son appel sera rejetée.
Pour les mêmes motifs, la société Intrum Justicia Debt Finance AG sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
- rejette la demande formée par la SA Intrum Justicia Debt Finance AG aux fins de révocation de la clôture fixée à la date du 29 janvier 2024 par arrêt de la présente Cour en date du 14 septembre 2023,
- déclare irrecevables les conclusions signifiées par la SA Intrum Justicia Debt Finance AG le 2 février 2024, ainsi que la pièce n° 18 de son bordereau,
- déclare irrecevables les conclusions signifiées par M. [Z] le 2 février 2024 mais uniquement en ce qu'elle porte sur le fond du litige,
- déclare recevable l'appel formé par la SA Intrum Justicia Debt Finance AG,
- confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
- rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par M. [P] [Z],
- condamne la SA Intrum Justicia Debt Finance AG à payer à M. [P] [Z] la somme de 1500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejette la demande formée par la SA Intrum Justicia Debt Finance AG au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamne la SA Intrum Justicia Debt Finance AG aux dépens de l'instance d'appel.
Le greffier La présidente