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14/03/2024 | FRANCE | N°21/04155

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 14 mars 2024, 21/04155


Grosse + copie

délivrées le

à











COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 14 MARS 2024







Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04155 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PB4N





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 01 JUIN 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE PERPIGNAN

N° RG 18/00512





APPELANT :



Monsieur [K] [R]

né le 08 Août

1973 à [Localité 5]

de nationalité Française

Domicilié[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Charles SALIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Eve BEYNET, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMEE :



S.A...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 14 MARS 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04155 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PB4N

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 01 JUIN 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE PERPIGNAN

N° RG 18/00512

APPELANT :

Monsieur [K] [R]

né le 08 Août 1973 à [Localité 5]

de nationalité Française

Domicilié[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Charles SALIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Eve BEYNET, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

S.A.S.U. VANDEMOORTELE BAKERY PRODUCTS FRANCE

Domiciliée [Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Cécile CAILLON, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 11 Décembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Janvier 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant MONSIEUR Thomas LE MONNYER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère

Madame Magali VENET, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Naïma DIGINI

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Naïma DIGINI, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

M. [K] [R] a été engagé, en qualité d'agent technique de maintenance, par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein, à compter du 8 décembre 2003, par la Société Pavani, devenue la Société Vandemoortele Bakery Products France, spécialisée dans la fabrication de produits de boulangerie.

Par lettre recommandée avec avis de réception en date du 4 août 2016, la société a licencié M. [R] pour motif économique, avec dispense d'exécuter son préavis d'une durée de deux mois, la lettre de rupture lui précisant qu'il lui serait versé l'indemnité compensatrice de préavis au mois le mois.

Dans le cadre du congé de reclassement auquel il a adhéré le 9 août 2016, le salarié a été mis à disposition de la société Générale Pâtissière à compter du 29 août 2016. Cette société l'a engagé définitivement, par contrat à durée indéterminée ayant pris effet le 2 novembre 2016.

La société Générale pâtissière, la société Vandemoortele Bakery Products France a délivré le solde de tout compte à la fin du mois de février 2017 et procédé au versement d'une somme de 5 394, 92 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis.

Soutenant avoir, par erreur, versé deux fois l'indemnité compensatrice de préavis, en septembre et octobre 2016, puis en février 2017, la société Vandemoortele Bakery Products France a vainement réclamé au salarié le remboursement de cette somme, aux termes de plusieurs courriers, à compter du 29 mars 2017.

Par acte en date du 11 décembre 2018, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Perpignan aux fins d'entendre condamner M. [R] à lui verser les sommes suivantes:

- 4 159, 85 euros à titre de répétition de l'indu,

- 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Par jugement du 1er juin 2021, le conseil de prud'hommes a statué comme suit :

Dit que l'action en paiement ou en répétition de l'indu est non prescrite et recevable,

Condamne M. [R] à payer à la société la somme de 4 159,85 euros à titre de trop perçu après solde de tout compte,

Déboute M. [R] de sa demande tendant à prétendre au doublement de l'indemnité compensatrice de préavis,

Déboute la société de ses demandes à titre de dommages et intérêts pour résistance manifestement abusive et injustifiée, paiement des intérêts aux taux légaux, et au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Déboute M. [R] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [R] aux entiers dépens y compris aux actes éventuels de procédure.

Le 28 juin 2021, M. [R] a relevé appel de cette décision par voie électronique.

Par ordonnance rendue le 11 décembre 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 15 janvier 2024.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 23 juillet 2021, M. [R] demande à la cour de :

Infirmer le jugement,

Dire que les demandes de la société sont prescrites,

Débouter la société de l'intégralité de ses demandes,

Condamner la société à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamner aux entiers dépens.

' Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 19 octobre 2021, la Société Vandemoortele Bakery Products France demande à la cour de :

Infirmer le jugement uniquement en ce qu'il a débouté la société de ses demandes à titre de dommages et intérêts pour résistance manifestement abusive et injustifiée, paiement des intérêts aux taux légaux, et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

Accueillir l'appel incident de la société,

Assortir la condamnation des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception du 4 mai 2017,

Condamner M. [R] à lui payer les sommes suivantes :

- 2 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Confirmer le jugement pour le surplus.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

MOTIFS

Sur l'action en répétition de l'indu :

Sur la prescription

M. [R] conclut à l'infirmation du jugement qui a jugé l'action de la société en répétition de l'indu non prescrite et recevable au visa de l'article L. 3245-1 du code du travail. Il sollicite l'application du délai de prescription de douze mois prévu par l'article L. 1471-1 alinéa 2 du code du travail considérant que la demande est relative à la rupture du contrat de travail.

Pour solliciter la confirmation du jugement, la société fait valoir qu'il s'agit d'une action en répétition du salaire, et non d'une action relative à la rupture du contrat de travail.

En application de l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu,

sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

En l'espèce, la société sollicite le remboursement d'une indemnité compensatrice de préavis, laquelle a une nature salariale, qu'elle estime avoir versée par erreur. S'agissant d'une action en répétition de salaire, c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a fait application du délai de prescription de trois ans prévu par l'article L. 3245-1 du code du travail et jugé la demande non prescrite et recevable. Il y a lieu de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes sur ce point.

Sur le fond

Le salarié conclut à l'infirmation du jugement et refuse de payer la somme sollicitée par la société dont il ne s'estime pas redevable. Il fait valoir que les sommes versées en septembre et en octobre 2016 correspondaient à une allocation de reclassement et non au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis. Il soutient n'avoir perçu qu'une seule fois l'indemnité compensatrice de préavis, en février 2017.

La société soutient au contraire avoir réglé deux fois l'indemnité compensatrice de préavis : une première fois en septembre et octobre 2016 et une deuxième fois au mois de février 2017.

En application de l'article L. 1233-72 du code du travail, le congé de reclassement est pris pendant le préavis, que le salarié est dispensé d'exécuter.

Lorsque la durée du congé de reclassement excède la durée du préavis, le terme de ce dernier est reporté jusqu'à la fin du congé de reclassement.

Le montant de la rémunération qui excède la durée du préavis est égal au montant de l'allocation de conversion mentionnée au 3° de l'article L. 5123-2. Les dispositions de l'article L. 5122-4 sont applicables à cette rémunération.

Il est de droit que l'erreur n'est pas créatrice de droit.

En l'espèce, M. [R] a été licencié pour motif économique par lettre du 4 août 2016, aux termes de laquelle, il lui était indiqué qu'en cas d'acceptation du congé de reclassement proposé, celui-ci serait pris pendant le préavis qu'il était dispensé d'exécuter et qu'il percevrait, au mois le mois, l'indemnité compensatrice correspondante.

Le salarié a adhéré à ce congé de reclassement et a trouvé un emploi ayant donné lieu à la signature d'une convention de mise à disposition auprès de la société Générale Pâtissière à compter du 29 août 2016.

Conformément à l'article L. 1233-72 du code du travail, le salarié a pris son congé de reclassement pendant son préavis, au cours duquel il était mis à disposition de ladite société.

Pour démontrer avoir payé deux fois l'indemnité compensatrice de préavis, la société produit aux débats:

- les bulletins de salaire des mois de septembre et d'octobre 2016 desquels il ressort que le salarié a perçu en septembre et en octobre 2016 sa rémunération mensuelle normale. Les bulletins indiquent la mention du préavis payé et non effectué, par l'ajout du commentaire : 'PP PREAVIS N. EFF PAYE',

- le bulletin de salaire du mois de février 2017 qui fait apparaître, de nouveau, le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 5 394, 92 euros, le salarié ne contestant pas avoir perçu cette somme.  

La société démontre ainsi s'être acquittée, par erreur, à deux reprises du paiement de l'indemnité compensatrice de préavis, une première fois dans le cadre du congé de reclassement et une seconde dans le cadre du solde de tout compte.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [R] à restituer la somme de 4 159,85 euros au titre du trop perçu.

Sur les intérêts au taux légal :

La société demande, au visa de l'article L. 1231-6 du code du travail, d'assortir la condamnation au paiement des intérêts au taux légal à partir du 4 mai 2017, date de la première mise en demeure adressée par lettre recommandée au salarié.

En application de l'article 1231-6 du code civil, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.

Par ailleurs, celui qui a reçu de bonne foi une somme qui ne lui était pas due, doit la restituer avec les intérêts moratoires à compter de la demande dès lors que le montant de ladite somme peut être déterminé par l'application des dispositions légales ou réglementaires.

En l'espèce, la société justifie avoir mis en demeure le salarié de rembourser la somme indûment perçue par courrier recommandé du 4 mai 2017.

Par infirmation du jugement de ce chef, il convient d'assortir la condamnation à paiement des intérêts au taux légal à compter de cette date.

Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive :

La société sollicite l'infirmation du jugement qui l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive à hauteur de 2 000 euros.

Elle soutient qu'elle a tenté de parvenir à un règlement amiable du litige en adressant au salarié de nombreux courriers lui réclamant le paiement de la somme due et qu'elle s'est confrontée à une inertie de sa part ne donnant suite à aucun des courriers.

La résistance abusive du défendeur se définit par la contrainte pour le demandeur d'intenter une action en justice pour parvenir à ses fins, et ne se traduit pas par une simple résistance qui ne peut constituer un abus de droit.

L'abus de droit exige un acte de mauvaise foi caractérisé et démontré, et il ne suffit pas d'évoquer un préjudice subi.

En l'espèce, le défaut de réponse par M. [R] aux courriers qui lui ont été adressés et son refus de rembourser la somme demandée dont il ne s'estimait pas redevable ne suffit pas à caractériser un abus de droit de sa part.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société de sa demande.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions déférées à la Cour sauf en ce qu'il a débouté la Société Vandemoortele Bakery Products France de sa demande visant à assortir la condamnation des intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2017,

Statuant à nouveau du chef ainsi infirmé et y ajoutant,

Dit que la créance de 4 159, 85 euros au titre de l'indu produit intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2017,

Condamne M. [K] [R] à verser à la Société Vandemoortele Bakery Products France la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [K] [R] aux entiers dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par Madame Naïma Digini, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/04155
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;21.04155 ?
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