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14/03/2024 | FRANCE | N°20/04214

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 14 mars 2024, 20/04214


Grosse + copie

délivrées le

à











COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 14 MARS 2024



N° :



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04214 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OWRO





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 21 SEPTEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE

N° RG F 19/00164





APPELANT :



Monsieur [U] [Y]

né le

12 Janvier 1974 à [Localité 5]

de nationalité Française

Domicilié [Adresse 4]

[Localité 1]



Représenté par Me David VAYSSIE de la SCP DAVID VAYSSIE, avocat au barreau de NARBONNE







INTIMEE :



SASU SODIVA

Domiciliée [Adresse 2...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 14 MARS 2024

N° :

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04214 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OWRO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 21 SEPTEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE

N° RG F 19/00164

APPELANT :

Monsieur [U] [Y]

né le 12 Janvier 1974 à [Localité 5]

de nationalité Française

Domicilié [Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me David VAYSSIE de la SCP DAVID VAYSSIE, avocat au barreau de NARBONNE

INTIMEE :

SASU SODIVA

Domiciliée [Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Yannick CAMBON de la SELARL ELEOM BEZIERS-SETE, avocat au barreau de BEZIERS, substitué par Me Lucie DEBRUYNE, avocat au barreau de BEZIERS

Ordonnance de clôture du 27 Décembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Janvier 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, chargé du rapport et Madame Magali VENET, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

MonsieurThomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Magali VENET, Conseiller

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Naïma DIGINI

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Naïma DIGINI, Greffier.

*

* *

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée déterminée, en date du 30 octobre 2006, M. [Y] a été engagé par la société Sodiva, spécialisée dans la fabrication et la pose de menuiseries aluminium. La relation de travail s'est poursuivie à durée indéterminée était soumise à la convention collective nationale du Bâtiment moins de onze salariés.

Au dernier état de la relation contractuelle, il occupait le poste de compagnon professionnel en qualité de miroitier professionnel, niveau 3, position 2, coefficient 230.

Placé continûment en arrêt de travail pour maladie simple à compter du 1er novembre 2018 jusqu'au 11 janvier 2019, puis en rechute de maladie professionnelle à compter du 12 janvier 2019, le salarié a été déclaré inapte à son poste à l'issue de la visite de reprise du 28 juin 2019.

Suivant lettre recommandée avec avis de réception en date du 11 septembre 2019, la société le licenciait pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Reprochant à l'employeur de ne pas lui avoir payé les indemnités prévues par l'article L. 1226-14 du code du travail, M. [Y] saisissait le 4 décembre 2019 la formation des référés du conseil de prud'hommes de Narbonne laquelle constatait par ordonnance en date du 4 décembre 2019 que la situation avait été régularisée.

Par requête en date du 17 février 2020, M. [Y] a saisi le bureau de jugement du conseil de prud'hommes de Narbonne aux fins d'entendre juger le licenciement abusif faute pour l'employeur d'avoir consulté les représentants du personnel, dont il aurait dû disposer tenant l'effectif de 11 salariés mentionné à la déclaration pôle emploi, et la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 21 septembre 2020, le conseil a statué comme suit :

Juge que la prime de salissure est nulle et non avenue, que les indemnités de trajet domicile-lieu de travail et siège social lieu de travail ne sont pas dues en l'état, que le licenciement pour inaptitude est justifié,

Déboute M. [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Condamne M. [Y] à payer à la société Sodiva les sommes de 10 789,95 euros au titre du remboursement du doublement de l'indemnité de licenciement et du préavis, et de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la société Sodiva du surplus de ses demandes,

Condamne M. [Y] aux entiers dépens.

Suivant déclaration en date du 7 octobre 2020, M. [Y] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

' suivant ses conclusions en date du 4 novembre 2020, M. [Y] demande à la cour de réformer le jugement, et statuant à nouveau de condamner la société Sodiva à lui payer les sommes suivantes :

- 23 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

- Confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle lui a alloué le doublement de l'indemnité légale de licenciement à hauteur de 6 968,45 euros ainsi que l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents pour une somme de 4 028 euros et l'article 700, (en) reformant le jugement rendu par le conseil de prud'hommes qui a alloué ces sommes à l'employeur par demande reconventionnelle,

- 1 309,75 euros d'indemnité de trajet domicile-lieu de travail dans la limite de trois ans,

- 473,46 euros d'indemnité de trajet siège social-chantier de juillet 2016 à septembre 2017,

- 2 684,60 euros de prime de salissure dans la limite de la prescription triennale ;

- 1 000 euros de dommages-intérêts,

- 2 000 euros d'article 700 du code de procédure civile.

' aux termes de ses conclusions remises au greffe le 28 janvier 2021, la société Sodiva demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et donc de débouter M. [Y] de l'intégralité de ses demandes en cause d'appel et le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux entiers dépens. 

Par décision en date du 27 décembre 2023, le conseiller de la mise en état a clôturé l'instruction du dossier et fixé l'affaire à l'audience du 16 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues oralement à l'audience.

MOTIFS

Sur les indemnités de déplacement :

Selon l'article 8-17 de la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment du bâtiment occupant jusqu'à 10 salariés,

L'indemnité de trajet a pour objet d'indemniser, sous une forme forfaitaire, la sujétion que représente pour l'ouvrier, la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d'en revenir.

L'indemnité de trajet n'est pas due lorsque l'ouvrier est logé gratuitement par l'entreprise sur le chantier ou à proximité immédiate du chantier.

L'article 8.18 stipule :

Les montants des indemnités journalières de petits déplacements sont forfaitaires et fixés en valeur absolue selon les règles suivantes.

8.181. Indemnité de repas.

Le montant de l'indemnité de repas, qui est le même quelle que soit la zone concentrique dans laquelle se situe le chantier, est fixé par accord paritaire régional (1).

Si l'entreprise utilise un système de titres-restaurants, le montant de sa participation est déduit du montant de l'indemnité de repas.

8.182. Indemnité de frais de transport.

Son montant journalier, qui est un forfait, doit être fixé en valeur absolue de telle sorte qu'il indemnise les frais d'un voyage aller et retour du point de départ des petits déplacements au milieu de la zone concentrique dans laquelle se situe le chantier. Pour déterminer ce montant, il doit être tenu compte du tarif voyageur des différents modes de transport en commun existant localement et du coût d'utilisation des moyens de transport individuels.

8.183. Indemnité de trajet.

Son montant doit être fixé en valeur absolue de telle sorte que le forfait, qui indemnise la sujétion que représente pour l'ouvrier la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d'en revenir, soit évalué en fonction de la distance entre le point de départ des petits déplacements et la circonférence supérieure de la zone où se situe le chantier.

De nouvelles stipulations conventionnelles, ont été adoptées le 7 mars 2018 aux termes desquelles il était stipulé que 'l'indemnité n'est pas due [...] lorsque le temps de trajet est rémunéré en temps de travail'. Entrées en vigueur au 1er juillet 2018, ces stipulations ont été annulées par un arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 1er mars 2019, de sorte que les anciennes dispositions demeurent applicables.

La jurisprudence constante de la chambre sociale, antérieure à l'adoption de cette réforme entre-temps annulée, juge que cette indemnité de trajet est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé.

Le salarié distingue sa réclamation et formule deux demandes au titre des indemnités de trajet :

- la première porte sur les déplacements entre son domicile et le siège de l'entreprise, qu'il évalue moyennant 60 trajets pour l'année 2016 (à compter du mois de juillet), 171 pour l'année 2017 et 94 pour l'année 2018, à une somme de 1 309,75 euros,

- la seconde vise 'les indemnités de trajet pendant le temps de trajet' relatives au trajet séparant le siège de l'entreprise du lieu du chantier, pour la période de juillet 2016 à septembre 2017 pour un montant de 473,46 euros, le salarié précisant que l'employeur l'a indemnisé de ce chef d'octobre 2017 à septembre 2018.

L'employeur concède que l'indemnité de trajet est due à partir du calcul de zone concentrique et est systématiquement versée puisqu'il s'agit d'une indemnité qui a pour objet d'indemniser forfaitairement l'amplitude que représente pour l'ouvrier le trajet nécessaire pour se rendre sur le chantier, même s'il utilise un véhicule de l'entreprise.

Il précise que M. [Y] se rend le matin au dépôt pour prendre son service, qu'à 8 heures il lui est donné les instructions de la journée puis il prend le camion et se rend sur les différents chantiers et ramène le soir le véhicule. L'intimé conteste le calcul auquel procède le salarié en ce que celui est fondé sur la base de la zone 3, tenant l'éloignement de son domicile alors que la convention collective ne prévoit pas l'indemnisation du trajet pour se rendre du domicile au siège de l'entreprise, ce temps ne constituant pas un temps de travail effectif de travail.

Pour les déplacements siège de l'entreprise/chantier et retour, la société indique les avoir pris en charge d'octobre 2017 à septembre 2018 avant d'en suspendre le paiement en raison de la nouvelle rédaction de la convention collective, et considère que pour les périodes revendiquées par le salarié de juillet 2016 à septembre 2017 puis depuis l'annulation de la nouvelle convention, l'imprécision de son décompte ne saurait permettre la détermination d'une éventuelle créance de ce chef.

Les parties évoquent une réponse fournie par l'inspecteur du travail que ni l'une ni l'autre ne verse aux débats.

En ce qui concerne les déplacements aller/retour entre le siège de l'entreprise et le domicile, que le salarié a fixé en l'espèce sur une commune située à 28 km du siège de l'entreprise, ce qui devrait conduire, à suivre son raisonnement, à l'indemniser sur la base de la zone 3, la réclamation n'est pas fondée dans la mesure où la cause de cette indemnité conventionnelle repose sur la sujétion que représente pour l'ouvrier, la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d'en revenir.

Or, il n'est pas discuté par M. [Y] qu'il prenait son service au siège de l'entreprise, de sorte qu'il n'est fondé à revendiquer le bénéfice de cette indemnité de trajet que les jours où il se rend sur un chantier, le calcul s'opérant en fonction de la distance entre le point de départ des petits déplacements, à savoir en l'espèce au siège de l'entreprise, et la circonférence supérieure de la zone où se situe le chantier.

La demande portant sur les trajets 'domicile-siège social' sera donc rejetée.

L'employeur disposant des éléments permettant de discuter la réclamation fournie par le salarié relativement à l'indemnisation 'siège de l'entreprise/chantier', que ce dernier fonde sur la base des indemnisations versées par l'employeur sur la période d'octobre 2017 à septembre 2018, sa réclamation sera accueillie à hauteur de 415 euros pour les indemnités de trajet de juillet 2016 à septembre 2017 et pour le mois d'octobre 2018. Le jugement sera réformé en ce sens.

Sur l'indemnité de salissure :

M. [Y] qui soutient, sans être contredit sur ce point par l'employeur, être tenu porter les tenues professionnelles mises à sa disposition par l'employeur sollicite une indemnité de 2 684,60 euros au titre de 31 mois d'activité - dans la limite de la prescription triennale et sous déduction de ses absences - sur la base de 20 euros par semaine multiplié par 4,33 puis par le nombre de mois travaillé.

La société qui concède requérir l'utilisation d'une tenue professionnelle qu'il met à disposition de ses salariés ne conteste pas dans son principe son obligation, mais objecte, d'une part, que ce dernier s'est révélé incapable de justifier des frais exposés à ce titre (teinturerie) et, d'autre part, que depuis le mois de septembre 2018, elle met à la disposition des salariés un baril de poudre, ce que la Cour de cassation a jugé suffisant au titre de sa participation au frais de nettoyage.

Les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier.

Le port de la tenue professionnelle étant obligatoire et inhérent à l'emploi, l'employeur qui doit assurer la charge de cet entretien, ne pouvait limiter son obligation au seul remboursement des factures de pressing. Il y contribue depuis le mois de septembre 2018, en mettant à la disposition de ses salariés des barils de lessive. Il convient de juger que c'est par des motifs erronés que les premiers juges ont débouté M. [Y] de sa réclamation.

Le salarié verse aux débats l'attestation de son épouse exposant qu'elle lavait deux fois par semaine la tenue professionnelle de son époux. Le nombre de tenues mises à disposition des salariés n'est pas connue mais Mme [Y] en évoque plusieurs dans son témoignages ('t-shearts, polos et pantalons' étant cités au pluriel).

Sur la base du coût de nettoyage évalué à 15 euros par mois dont 5 euros au titre du coût de la lessive, il sera alloué à M. [Y] la somme de 455 euros de ce chef.

Sur la cause du licenciement :

Les parties s'accordent pour considérer que le licenciement pour inaptitude reposait sur une inaptitude d'origine professionnelle.

Sur le caractère réel et sérieux du licenciement :

Au soutien de sa demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié fait valoir qu'en raison de l'effectif de l'entreprise, supérieur à 10, à savoir 11 ainsi que mentionné sur l'attestation pôle emploi délivrée par l'employeur, ce dernier qui n'a pas consulté la délégation unique du personnel sur son licenciement, doit justifier avoir vainement organisé des élections professionnelles ce qu'il ne fait pas.

La société Sodiva objecte que son effectif n'a jamais dépassé les 10 salariés.

L'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, prévoir que lorsqu'un salarié est déclaré inapte à son emploi consécutivement à un accident du travail ou une maladie professionnelle, « l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise (...). »

L'employeur ne peut se soustraire à l'obligation de consultation des représentants du personnel dès lors que la mise en place de tels délégués est obligatoire en application de l'article L. 2312-2 du code du travail et qu'aucun procès verbal de carence n'a été établi, seul un procès-verbal de carence dressé à l'issue du second tour de scrutin est de nature à établir le respect par l'employeur de ses obligations en matière d'organisation d'élections de délégués du personnel. En effet, conformément aux dispositions de l'article L.2314-5 du code du travail, lorsque l'institution n'a pas été mise en place ou renouvelée, un procès verbal de carence est établi par l'employeur qui l'affiche dans l'entreprise et le transmet dans les quinze jours à l'inspecteur du travail qui en envoie une copie aux organisations syndicales de salariés du département concerné.

L'inobservation des formalités relatives au procès-verbal de carence n'est pas sanctionnée par la nullité du licenciement mais le prive de cause réelle et sérieuse, comme un manquement à l'obligation de reclassement.

Il appartient à l'employeur qui soutient ne pas être tenu de procéder à la consultation des délégués du personnel prévue par l'article L 1226-10 du code du travail, d'établir la réalité des effectifs de son entreprise.

L'article L. 2312-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable jusqu'au 29 décembre 2017, prévoyait que la mise en place des délégués du personnel n'est obligatoire que si l'effectif d'au moins 11 salariés est atteint pendant 12 mois consécutifs ou non au cours des 3 années précédentes.

Depuis la réforme de la représentation du personnel, issue de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, entrée en vigueur le 30 décembre 2017, l'article L. 2311-2 du code du travail énonce désormais que le comité social et économique est mis en place dans les entreprises d'au moins 11 salariés, laquelle n'est obligatoire que si l'effectif d'au moins 11 salariés est atteint sur 12 mois consécutifs.

Par ailleurs, il ressort de l'article L. 1111-3, que ne sont notamment pas pris en compte dans le calcul des effectifs de l'entreprise les apprentis.

En l'espèce, pour preuve de ce qu'elle n'était pas tenue d'organiser des élections professionnelles, la société Sodiva verse aux débats, outre une attestation de son expert-comptable précisant que sur les exercices 2017 à 2019 l'effectif équivalent temps plein de l'entreprise était inférieur à 11 salariés, la liste des 9 salariés composant l'effectif au jour du licenciement, non compris M. [Y] , laquelle n'est pas discutée par le salarié et enfin le registre du personnel.

Rappel fait que selon l'article L. 1111-3 du code du travail, les apprentis ne sont pas pris en compte dans l'effectif de l'entreprise pour apprécier l'obligation de l'employeur ou non d'organiser les élections professionnelles, il ressort de ces éléments, d'une part, que l'effectif de la société n'a effectivement pas dépassé 10 salariés sur une durée de 12 mois au cours des 3 années précédant l'entrée en vigueur de la nouvelle réforme issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017, soit du 1er janvier 2015 au 30 décembre 2017, mais que depuis l'entrée en vigueur de la réforme, l'effectif n'a pas dépassé 10 salariés sur 12 mois continus, observation faite que M. [I] étant apprenti sur toute l'année 2018, il n'entrait pas dans les effectifs dont il doit être tenu compte pour apprécier si l'employeur est ou non tenu d'organiser les élections professionnelles.

Si M. [Y] objecte que l'attestation pôle emploi qui lui a été délivrée porte mention au 31 décembre de l'année précédente, soit en l'espèce au 31 décembre 2018, d'un effectif de 11 personnes, M. [K] compris, qui a quitté l'entreprise au 31 mars 2019, ce nombre de 11 est correct si l'on prend en compte la présence de l'apprenti.

La preuve de l'effectif inférieur à onze étant rapportée par l'employeur, le moyen soulevé à ce titre par le salarié n'est pas fondé.

Par ailleurs, compte tenu de l'effectif limité de l'entreprise ne comprenant, hormis l'assistante administrative, le directeur général et le chauffeur (à temps partiel), que des fabricant poseur ou poseurs, poste pour lequel le salarié était déclaré inapte, l'employeur justifie avoir satisfait à son obligation de rechercher loyalement une solution de reclassement en créant un poste à temps partiel de 24 heures hebdomadaires comportant diverses tâches d'accueil des clients, de contrôle de la marchandise, de gestion des outillages et de nettoyage des locaux, que la société justifie avoir soumis à M. [Z], médecin du travail de l' AIST, qui l'a effectivement validé (pièce n°7) contrairement à ce que prétend l'appelant.

L'employeur justifiant ainsi avoir loyalement satisfait à son obligation de rechercher une solution de reclassement conforme aux capacités résiduelles du salarié, le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a débouté M. [Y] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif.

Sur le droit du salarié à bénéficier des indemnités prévues à l'article L. 1226-14 du code du travail :

Selon le deuxième alinéa de l'article L. 1226-14 du code du travail, les indemnités prévues au premier alinéa, à savoir l'indemnité spéciale de licenciement et l'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis, ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.

M. [Y] a refusé le poste d'accueil/magasinier/agent de nettoyage ainsi proposé par l'employeur à titre de reclassement.

Si la recherche de l'employeur a été loyale, le refus du salarié n'apparaît pas pour autant abusif dès lors que M. [Y] se voyait proposer un emploi certes conforme à ses capacités physiques résiduelles et rémunéré au même taux horaire (13 euros) que celui qu'il occupait jusqu'à présent, mais qui comportait une modification importante du contrat de travail, au-delà des fonctions, en ce que la durée de travail était réduite de 35 à 24 heures hebdomadaires.

Compte tenu de cette modification et de l'incidence de celle-ci sur sa rémunération à venir, c'est sans abus que M. [Y] a refusé cette proposition, de sorte que c'est par des motifs erronés que les premiers juges ont débouté le salarié de ce chef et l'ont condamné à rembourser à la société le doublement de l'indemnité de licenciement et l'indemnité compensatrice d'un montant équivalente au préavis.

Son refus du reclassement proposé n'étant pas abusif, sa demande en paiement de la somme de 4 028 euros au titre de l'indemnité compensatrice prévue par l'article L. 1226-14 du code du travail laquelle n'ouvre pas droit aux congés payés, ainsi que la somme de 6 968,45 euros au titre du doublement de l'indemnité de licenciement, sera accueillie.

Sur la demande de dommages-intérêts :

Conformément aux dispositions de l'article 1153 du code civil, désormais codifiées sous l'article 1231-6 du dit code, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages et intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans une condamnation aux intérêts au taux légal, le créancier auquel le débiteur a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard pouvant obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance à charge de justifier de ce préjudice.

En l'espèce, à l'appui de sa demande en paiement de 1 000 euros de dommages-intérêts, M. [Y] indique que s'il est clair qu'il lui incombe de rapporter la preuve de l'existence d'un préjudice, le fait de ne pas lui payer les salaires ou les indemnités dues a pour conséquence une possibilité moindre pour lui d'effectuer des achats.

Faute pour le salarié d'établir l'existence d'un préjudice indépendant de celui qui sera réparé par l'allocation des intérêts de retard sur les sommes dues, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a jugé que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a débouté M. [Y] de sa demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement injustifié et de sa demande d'indemnités de trajet pour les trajets 'domicile - siège social',

L' infirme pour le surplus,

Et statuant à nouveau des chefs ainsi infirmés,

Dit que le refus par M. [Y] de la proposition de reclassement n'est pas abusif,

Condamne en conséquence la société Sodiva à verser à M. [Y] les sommes de 4 028 euros au titre de l'indemnité compensatrice d'un montant égal à l'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 6 968,45 euros au titre de l'indemnité spéciale de licenciement,

Déboute M. [Y] de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés sur l'indemnité compensatrice prévue par l'article L. 1226-14 du code du travail,

Condamne la société Sodiva à verser à M. [Y] la somme de 415 euros au titre de l'indemnité de petit déplacement et celle de 455 euros au titre de l'indemnité de salissure due pour la période antérieure au mois de septembre 2018,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Dit que les créances de nature contractuelle sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date, et à compter de chaque échéance devenue exigible, s'agissant des échéances postérieures à cette date, et que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant,

Condamne la société Sodiva à verser à M. [Y] la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par, Madame Naïma Digini, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/04214
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;20.04214 ?
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