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14/03/2024 | FRANCE | N°18/00936

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 14 mars 2024, 18/00936


Grosse + copie

délivrées le

à











COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 14 MARS 2024



N° :



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/00936 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N2FQ





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 30 AOUT 2018

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE BEZIERS

N° RG F15/00184





APPELANTE :



Madame [B] [I]

née le 01 A

oût 1960 à [Localité 2]

de nationalité Française

Domiciliée [Adresse 5]

[Localité 3]



Représentée par Me Xavier LAFON de la SCP LAFON PORTES, avocat au barreau de BEZIERS, substitué par Me Laurent PORTES, avocat au barreau de BEZIERS...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 14 MARS 2024

N° :

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/00936 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N2FQ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 30 AOUT 2018

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE BEZIERS

N° RG F15/00184

APPELANTE :

Madame [B] [I]

née le 01 Août 1960 à [Localité 2]

de nationalité Française

Domiciliée [Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Xavier LAFON de la SCP LAFON PORTES, avocat au barreau de BEZIERS, substitué par Me Laurent PORTES, avocat au barreau de BEZIERS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/003096 du 10/04/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEES :

S.E.L.A.R.L. OCMJ, représentée par Me [V] [Y], es qualité de Mandataire Liquidateur de l'Association SESAM 34

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Isabelle BAILLIEU de la SCP JUDICIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me Louis-Marie CABRILLAC, avocat au barreau de MONTPELLIER

Association AGS (CGEA-[Localité 2])

Domiciliée [Adresse 1]

[Localité 2]

Ordonnance de clôture du 13 Juin 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Janvier 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre et Madame Magali VENET, Conseiller, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Magali VENET, Conseiller

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Naïma DIGINI

ARRET :

- réputé contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Naïma DIGINI, Greffier.

*

* *

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée à temps partiel, en date du 1er novembre 2005, Mme [I] a été engagée par l'association Sesam 34, en qualité d'agent à domicile.

Suivant avenant en date du 1er mars 2013, les parties convenaient de réduire la durée mensuelle de travail de 90 à 70 heures.

La salariée s'est vue reconnaître à compter du 1er août 2014, une invalidité de 2ème catégorie.

Placée en arrêt maladie du 13 janvier au 31 juillet 2014, Mme [I] était reçue en visite de reprise le 4 août 2014 par le médecin du travail qui la déclarait apte à son poste d'aide à domicile, le médecin du travail précisant que son état de santé ne lui permettait toutefois plus d'effectuer des tâches de ménage, mais que 'la salariée est apte aux aides aux repas, à l'accompagnement relationnel des personnes âgées. À revoir dans un délai de 3 mois'.

L'employeur ayant sollicité des précisions par lettre du 20 août 2014, le médecin du travail recevait de nouveau la salariée et émettait le 16 septembre 2014 un avis d'inaptitude, qu'il réitérait le 2 octobre 2014.

Convoquée le 24 octobre 2014 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 7 novembre suivant, Mme [I] a été licenciée par lettre du 17 novembre 2014 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par requête en date du 23 mars 2015, Mme [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Béziers aux fins d'entendre juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 30 août 2018, le conseil a débouté Mme [I] de l'ensemble de ses demandes, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en laissant les dépens à sa charge.

Suivant déclaration en date du 19 septembre 2018, Mme [I] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

' suivant ses conclusions en date du 13 décembre 2018, Mme [I] demande à la cour de réformer le jugement, et statuant à nouveau de :

Au principal :

Dire et juger la constatation de l'inaptitude irrégulière du fait du défaut d'étude de poste.

Dire et juger qu'en l'absence de constatation d'inaptitude régulière, son licenciement a été prononcé en raison de son état de santé.

Dire et juger nul le licenciement.

Au subsidiaire :

Dire et juger que l'association Sesam 34 n'a pas exécuté loyalement l'obligation de recherche de reclassement à laquelle elle était tenue suite à l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail.

Dire et juger dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement.

En tout état de cause,

Condamner l'association Sesam 34, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme [B] [I] les sommes suivantes :

- 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse,

- 2 048,12 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 204,81 euros à titre d'indemnité de congés payés y afférents.

Condamner l'association Sesam 34 à lui remettre une attestation Pôle-Emploi et un certificat de travail rectifiés et conformes à l'arrêt à intervenir,

Dire et juger que les sommes ayant une nature salariale auxquelles sera condamnée à payer l'Association Sesam 34 porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, celle-ci valant sommation de payer en application de l'article 1344-1 du code civil.

Condamner l'association Sesam 34 à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dire et juger qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir et en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues pas l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par la défenderesse en sus de l'indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par actes d'huissier délivrés le 16 mars 2022, Mme [I] a fait signifier la déclaration d'appel et ses conclusions modifiées à la Selas OCMJ, représentée par Maître [V] [Y], ès qualité de mandataire liquidateur de l'association Sesam 34 et à l' AGS, l'appelante portant sa réclamation au titre de l'indemnité pour licenciement injustifié à 16 000 euros et renonçant à sa demande en paiement d'une somme au titre des frais irrépétibles.

' aux termes de ses conclusions remises au greffe le 27 avril 2022, la Selas OCMJ, ès qualités de mandataire liquidateur de l'Association SESAM 34, demande à la cour de :

Statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel interjeté par Mme [I] à l'encontre de la décision rendue par le juge départiteur du conseil de prud'hommes de Béziers le 30 août 2018,

Sur le fond, confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

En conséquence,

Dire et juger que le licenciement de Mme [I] notifié le 17 novembre 2014 pour inaptitude et impossibilité de reclassement est parfaitement justifié,

Débouter Mme [I] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande relative à l'indemnité compensatrice de préavis.

La débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Statuant à nouveau,

Déclarer irrecevable la demande nouvelle formée par Mme [I] visant à obtenir la nullité de son licenciement,

La juger en tout état de cause infondée,

La débouter de toute demande formée à ce titre,

La débouter de toutes ses demandes fins et conclusions,

En tout état de cause,

Condamner Mme [I] à lui verser, ès qualités, la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

' L' AGS, n'a pas constitué avocat.

Par décision en date du 13 juin 2023, le conseiller de la mise en état a clôturé l'instruction du dossier et fixé l'affaire laquelle a été reportée au 16 janvier 2024.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures déposées et soutenues oralement à l'audience.

MOTIFS

L'article L. 1226-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable, dispose que, lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités (al. 1). Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise (al. 2). L'emploi proposé est aussi comparable que possible à celui précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

Il appartient à l'employeur de justifier de l'impossibilité de reclassement.

En l'espèce, à l'issue d'une visite de reprise faisant suite à un arrêt maladie, le médecin du travail a indiqué sur la fiche de visite de reprise du 4 août 2014, que Mme [I] était apte mais que son 'état de santé ne lui permet plus d'effectuer des tâches de ménage. La salariée est apte aux aides au repas, à l'accompagnement relationnel des personnes âgées'.

Suivant courrier du 20 août 2014, l'employeur s'est étonné de la teneur de cet avis et a sollicité du médecin du travail plus de précisions pour adapter le poste de Mme [I] aux préconisations du médecin du travail, en lui précisant que les tâches définies par la convention collective du 11 mai 2010 précise que la finalité des fonctions de l'agent à domicile consiste à 'réaliser et aider à l'accomplissement des activités domestiques et administratives simples essentiellement auprès des personnes en capacité d'exercer un contrôle et un suivi de celles-ci' et que ses principales activités consistent à 'réaliser les travaux courants d'entretien de la maison et d'assister la personne dans les démarches administratives simples'. L'association précisait qu'elle ne disposait pas de contrat comportant uniquement de l'accompagnement relationnel ou de l'aide au repas sans tâches ménagères. Il interrogeait le médecin du travail dans les termes suivants : 'la salariée était-elle apte à son poste de travail qui comporte comme tâche principale le ménage du logement ou inapte à son poste de travail ''

Suite à cette correspondnance, la salariée était soumise le 16 septembre 2014, à une nouvelle visite médicale auprès de la médecine du travail qui rendait l'avis suivant :

« Procédure d'inaptitude : article 4624-31 du code du travail : l'état de santé de Mme [I] [B] ne lui permet plus d'effectuer des tâches de ménage. Avis à confirmer après étude de poste et des conditions de travail. Propositions de reclassement à un poste sans gestes répétitifs ni manutention de charges : la salariée souhaite s'orienter vers l'accompagnement des personnes et plus spécifiquement en fin de vie. Une VAE pour la qualification des tâches d'aide aux repas et d'accompagnement (gardes promenades, accompagnement relationnel) qu'elle dit effectuer depuis 2005 dans l'entreprise pourrait lui être salutaire pour son avenir professionnel. Mme [I] reste apte à ces tâches et elle est apte à effectuer une formation qualifiante dans le domaine de l'accompagnement ».

Le 30 septembre, l'employeur a sollicité des précisions au médecin du travail en lui faisant part de ses difficultés à respecter l'avis médical dès lors que le coeur de son activité est constitué de prestations de ménages [...], que les interventions demandées par le Conseil général dans le cadre des plans d'aide APA sont très souvent constituées de prestations ménages et ne prévoient pas uniquement des tâches d'aide au repas et d'accompagnement (gardes, promenades, accompagnement relationnel) et qu'il n'existe pas au sein de la structure de postes prévoyant le seul accompagnement de la vie sociale. L'employeur ajoutait qu'il n'existe aucun diplôme spécifiquement consacré à l'accompagnement des personnes en fin de vie et que cette tâche serait encore plus dangereuse pour la santé et la sécurité de Mme [I] dès lors qu'elle comprend forcément une manutention de charges, des personnes, des gestes répétitifs et des efforts physiques importants.

A l'issue de la visite du 2 octobre 2014, le médecin du travail rendait l'avis suivant (pièce n° 6) :

« Procédure d'inaptitude 2ème avis selon l'article R 4624-31 du code du travail après étude de poste et des conditions de travail, confirmation de l'inaptitude aux tâches de ménage. Propositions de reclassement à un poste sans manutention de charges ni gestes répétitifs, reste apte à des tâches comme l'accompagnement relationnel, la surveillance, la préparation et l'aide aux repas (tâches qu'elle a déjà effectuées dans l'entreprise). Une formation qualifiante dans ce domaine pourrait être entreprise ».

Sur la nullité du licenciement :

Rappelant que dans un premier temps et dans le cadre de la visite de reprise, elle avait été déclarée apte, et que l'employeur a sollicité un réexamen en attirant l'attention du médecin du travail sur le fait que l'emploi comportait comme fonction celle de procéder à des tâches ménagères, Mme [I] critique l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail les 16 septembre et 2 octobre 2014.

L'appelante soutient qu'à défaut d'avoir procédé, préalablement à l'avis d'inaptitude à une étude de poste, l'inaptitude que le médecin du travail a finalement retenue a été irrégulièrement constatée. L'irrégularité de cette constatation doit conduire la cour à considérer que le licenciement repose sur son état de santé et à prononcer sa nullité en raison de son caractère discriminatoire.

Toutefois, il résulte des dispositions de l'article L. 4624-1 du code du travail dans sa rédaction applicable, qu'en l'absence de recours, exercé devant l'inspecteur du travail, contre les avis du médecin du travail, ceux-ci s'imposent au juge.

Faute pour la salariée d'avoir contester l'avis d'inaptitude du 2 octobre 2014, elle n'est pas fondée à en critiquer la portée au motif que le médecin du travail n'aurait pas réalisé d'étude de poste. Cet avis s'impose au juge prud'homal.

Si la salariée affirme qu'elle exerçait depuis 2015 des tâches d'accompagnement social, il ressort du compte-rendu de son entretien de deuxième partie de carrière, sous la rubrique 'contenu de son travail', l'entretien du logement et du linge, la préparation des repas'.

Pris dans leur ensemble, les éléments de fait invoqués par Mme [I] ne laissent pas supposer l'existence d'une discrimination en raison de son état de santé. Ce moyen sera rejeté et le jugement sera confirmé en ce qu'il a jugé que la demande de nullité du licenciement n'était pas fondée.

Sur la recherche de reclassement :

L'employeur à qui il appartient de rapporter la preuve d'avoir vainement recherché une solution de reclassement établit les éléments suivants :

Suite au second avis d'inaptitude ci-avant reproduit, il a interrogé le médecin du travail le 7 octobre en lui soumettant l'ensemble des postes existants au sein de l'association et en lui demandant de préciser s'il existe des possibilités de reclassement sur les postes existants mais non disponibles.

Le 10 octobre l'employeur demandait à la salariée de lui adresser un curriculum vitae actualisé.

Suivant correspondance en date du 10 octobre 2014, le médecin du travail répondait à la sollicitation de l'employeur en lui reproduisant son second avis du 2 octobre etn lui précisant de nouveau 'que la salariée peut occuper un poste aménagé comprenant l'accompagnement en fin de vie et qu'il serait souhaitable dans ce cas qu'elle puisse bénéficier d'une formation complémentaire. Elle peut aussi occuper un poste administratif.'

L'employeur justifie avoir par ailleurs sollicité le 17 octobre 2014 des associations situées sur le département de l' Hérault et communique leur réponse négative.

Par lettre du 17 novembre 2014, l'association a notifié à Mme [I] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement en indiquant notamment que 'nous avons réceptionné votre CV le 30 octobre 2014 et nous constatons que les formations et votre parcours professionnel que nous vous connaissons ne permettent pas un reclassement sur les postes existants dans l'association. En effet, les postes disponibles au sein de la structure ne sont pas conformes aux préconisations du médecin dès lors que nos interventions comportent toutes des tâches ménagères. De plus, tous nos postes administratifs sont actuellement indisponibles'.

L'intimée communique également le registre du personnel duquel il ressort qu'aucun poste administratif n'était disponible.

Toutefois, alors que dans sa correspondance du 30 septembre 2014, l'employeur ne contestait pas que des tâches conformes aux capacités résiduelles de la salariée était susceptibles d'exister ['que les interventions demandées par le Conseil général dans le cadre des plans d'aide APA sont très souvent constituées de prestations ménages et ne prévoient pas uniquement des tâches d'aide au repas et d'accompagnement (gardes, promenades, accompagnement relationnel) et qu'il n'existe pas au sein de la structure de postes prévoyant le seul accompagnement de la vie sociale'], force est de constater que l'employeur ne justifie pas avoir recherché une solution alternative combinant une transformation de son emploi en lui confiant exclusivement des tâches pour lesquelles le médecin du travail la considérait apte à les assumer (accompagnement à la vie sociale, courses etc...), nonobstant la reconnaissance de son invalidité de 2ème catégorie, à l'exception des tâches ménagères qu'elle n'était plus en capacité d'exercer, et ce en complément d'intervention de collègues lesquelles se consacreraient au ménage chez les personnes bénéficiaires, et un aménagement assorti d'une réduction de sa durée de travail.

Faute pour l'employeur de justifier d'une recherche en ce sens, le jugement sera infirmé en ce qu'il a jugé que Mme [I] avait satisfait à son obligation de recherche de reclassement et le licenciement sera jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement injustifié :

Alors âgée de 54 ans, percevant un salaire mensuel brut de 682,72 euros, Mme [I] détenait une ancienneté de 9 ans. Elle bénéficiait du statut de travailleur handicapé et avait fait l'objet d'une reconnaissance d'invalidité de 2ème catégorie. Elle ne fournit aucun élément sur l'évolution de sa situation professionnelle.

Si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude.

Compte tenu de son statut de travailleur handicapé, par application de l'article L. 5213- 9 du code du travail, et le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, Mme [I] est fondé à solliciter le doublement de l'indemnité compensatrice de préavis dans la limite de 3 mois.

Il sera fixé au passif la somme de 2 048,12 euros brut d'indemnité compensatrice de préavis outre 204,81 euros au titre des congés payés afférents.

Il lui sera alloué en réparation de la perte injustifiée de son emploi une indemnité de 5 000 euros, qui constitue une juste indemnisation de son préjudice.

Sur les demandes accessoires :

Sous réserve des dispositions des articles L 622-28 et L 641-3 du code de commerce, il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil prévoyant que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal, à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date et à compter de chaque échéance devenue exigible, s'agissant des échéances postérieures à cette date, les créances à caractère indemnitaire produisant intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

Il sera ordonné au représentant de la société liquidée de délivrer au salarié les documents de fin de contrat. En revanche, la demande d'assortir cette injonction d'une astreinte n'étant pas nécessaire à en garantir l'exécution, elle sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [I] de sa demande de nullité du licenciement pour discrimination,

l'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Juge le licenciement de Mme [I] injustifié,

Fixe ainsi que suit la créance de Mme [I] au passif de l'association SESAM 34 :

- 2 048,12 euros brut d'indemnité compensatrice de préavis, outre 204,81 euros au titre des congés payés afférents.

- 5 000 euros d'indemnité pour licenciement injustifié,

Ordonne à la Selas OCMJ prise en la personne de Maître [V] [Y], de remettre à Mme [I] les documents de fin de contrat (attestation Pôle-emploi, solde de tout compte et certificat de travail) conformes à la présente décision dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt.

Rejette la demande d'astreinte.

Dit que les créances de nature contractuelle sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date, et à compter de chaque échéance devenue exigible, s'agissant des échéances postérieures à cette date, et que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, sous réserve toutefois des dispositions des articles L. 622-28 et L.  641-3 du code de commerce, en vertu desquelles le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête définitivement à sa date le cours des intérêts au taux légal des créances salariales nées antérieurement,

Déclare la présente décision opposable à l'AGS qui devra sa garantie conformément aux dispositions des textes légaux et réglementaires applicables tant au plan de la mise en 'uvre du régime d'assurances des créances des salaires que de ses conditions et étendues de garantie, plus précisément des articles L. 3253-8 , L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,

Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront considérés comme frais privilégiés dans le cadre de la procédure collective.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thomas Le Monnyer, Président, et par Madame Naïma Digini, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18/00936
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;18.00936 ?
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