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14/03/2024 | FRANCE | N°17/00489

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 14 mars 2024, 17/00489


Grosse + copie

délivrées le

à











COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 14 MARS 2024



N° :



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/00489 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NDUI





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 22 MARS 2017

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS

N° RG F 16/00213





Maître [M] [Z] es qualité de commissaire à l'exécution du p

lan de la SA SOLATRAG

Domicilié [Adresse 5]

[Localité 4]



Représenté par Me Fabienne MIGNEN-HERREMAN de la SCP JURISEXCELL, avocat au barreau de BEZIERS, substitué par Me Raphaële HIAULT SPITZER, avocat au barreau de BE...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 14 MARS 2024

N° :

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/00489 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NDUI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 22 MARS 2017

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS

N° RG F 16/00213

Maître [M] [Z] es qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SA SOLATRAG

Domicilié [Adresse 5]

[Localité 4]

Représenté par Me Fabienne MIGNEN-HERREMAN de la SCP JURISEXCELL, avocat au barreau de BEZIERS, substitué par Me Raphaële HIAULT SPITZER, avocat au barreau de BEZIERS

SA SOLATRAG Plan de continuation

Domiciliée [Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Fabienne MIGNEN-HERREMAN de la SCP JURISEXCELL, avocat au barreau de BEZIERS, substitué par Me Raphaële HIAULT SPITZER, avocat au barreau de BEIERS

INTIME :

Monsieur [U] [V]

né le 09 Août 1972

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 3] / FRANCE

Représenté par Me Xavier LAFON de la SCP LAFON PORTES, avocat au barreau de BEZIERS, substitué par Me Laurent PORTES, avocat au barreau de BEZIERS

Ordonnance de clôture du 27 Décembre 2023, révocation de l'ordonnance de clôture par ordonnance du 16 janvier 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Janvier 2024,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, chargé du rapport et Madame Magali VENET, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Thomas LE MONNYER, Président de chambre

Madame Magali VENET, Conseiller

Monsieur Patrick HIDALGO, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Naïma DIGINI

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président de chambre, et par Madame Naïma DIGINI, Greffier.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 1er mars 2004, M. [U] [V] a été engagé par la SA SOLATRAG selon contrat à durée indéterminée en qualité d'ouvrier d'exécution niveau 2 position 1 de la convention collective nationale des ouvriers des travaux publics pour une durée hebdomadaire du travail de 38,5h.

Le 16 janvier 2014, M. [V] a été victime d'un accident du travail à la suite duquel il a été placé en arrêt de travail le 17 janvier 2014 jusqu'au 4 mai 2014, puis du 16 juillet 2014 au 13 septembre 2014, et enfin après une nouvelle rechute, du 24 novembre 2014 au 02 février 2016.

Le 02 février 2016, à l'issue de ce dernier arrêt de travail, et après deux visites de reprises, le médecin du travail l'a déclaré inapte à la reprise de son poste, en précisant cependant qu'il pouvait occuper un poste sans station debout prolongée, ni déplacements sur terrain irrégulier.

Par courrier daté du 15 février 2016, la société SOLATRAG a convoqué M. [V] à un entretien préalable à un licenciement fixé au 26 février 2016.

Le1er mars 2016, la société lui a notifié par courrier recommandé son licenciement pour inaptitude avec impossibilité de reclassement.

Par jugement du 09 mars 2016, le tribunal de commerce de Béziers a placé la société SOLATRAG en redressement judiciaire.

M. [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Béziers par requête du 29 mars 2016 afin de solliciter diverses indemnités au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 12 octobre 2016, le tribunal de commerce de Béziers a prononcé l'homologation du plan de redressement de la société et désigné Me [M] [Z] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Par jugement du 22 mars 2017, le conseil de prud'hommes de Béziers a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société au paiement des sommes suivantes :

- 32 000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 12 020,22 euros au titre des rappels de salaire ;

- 1 202,02 euros au titre des congés payés y afférents ;

- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 07 avril 2017, Me [Z] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan et la société SOLATRAG ont interjeté appel du jugement.

Dans leurs dernières conclusions en date du 05 janvier 2024, Me [Z] et la société demandent à la cour de :

- infirmer le jugement du 22 mars 2017 en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse et accordé à M. [V] le paiement d'heures supplémentaires.

- infirmer le jugement précité en ce qu'il a inscrit au passif de la société la somme de 46 222,24 euros au profit de M. [V] ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société à remettre à M. [V] une attestation pôle emploi ainsi qu'un bulletin de salaire rectifiés.

À titre subsidiaire,

- ramener à de plus justes proportions les sommes allouées à M. [V] en première instance tenant l'absence de préjudice financier.

En tout état de cause,

- condamner M. [V] au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions en date du 12 janvier 2024, M. [V] demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnité au titre du travail dissimulé et condamné la société à payer 32 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau,

- condamner la société à payer à M. [V] les sommes suivantes :

40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

12 885,90 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé.

À titre subsidiaire,

- dire et juger que l'employeur n'a pas notifié par écrit au salarié antérieurement au licenciement, les motifs qui s'opposaient à son reclassement ;

- dire et juger que M. [V] était contraint tous les matins de passer au siège de l'entreprise avant de se rendre sur les chantiers et d'y revenir le soir après avoir quitté les chantiers ;

- condamner la société à payer à M. [V] les sommes suivantes :

12 020,22 euros à titre de rappels de salaires ;

1 202,02 euros au titre des congés payés y afférents ;

12 885,90 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

5 000 euros à titre de dommages et intérêts liés au préjudice résultant du défaut de notification par écrit antérieurement au licenciement des motifs qui s'opposaient à son reclassement.

En tout état de cause,

- condamner la société à remettre à M. [V] une attestation pôle emploi ainsi qu'un bulletin de salaire rectifiés et conformes à l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard qui commencera à courir passé un délai de 15 jours suivant la notification du jugement ;

- dire et juger que les sommes allouées porteront intérêts, à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation, celle-ci valant sommation de payer au sens de l'article 1344-1 du code civil ;

- dire et juger opposable à Me [Z] es qualité de commissaire à l'exécution du plan.

- condamner la société au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture est en date du 16 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'exécution du contrat de travail:

Sur les heures supplémentaires:

Il résulte des dispositions de l'article L.3171-4 du code du travail , qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur , qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.

M. [V] sollicite le paiement d'heures supplémentaires à compter du 1er janvier 2012, soit la somme de 12020,22 euros, correspondant au temps passé entre l'arrivée au siège de la société à 6h30 et l'arrivée sur les différents chantiers auxquels il était affecté, soit un total de 744 heures de travail supplémentaires depuis 2012.

L'action en paiement des salaires se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil et en vertu de l'article L.3245-1 du code du travail avant la promulgation de la loi du 14/06/2013 qui a prévu un dispositif transitoire pour que des actions antérieurement ouvertes par la prescription quinquennale ne se retrouvent pas prescrites du simple fait de la promulgation de la loi.

Selon l'article 21 de cette loi , le nouveau délai s'applique à compter de cette date, sans pouvoir porter la durée totale de prescription au delà de cinq ans.

En l'espèce, M. [V] ayant saisi le conseil de prud'hommes le 29 mars 2016, il est recevable à solliciter des rappels de salaire à compter du 01 janvier 2012, conformément à sa demande.

Il fait valoir que son employeur ne le rémunérait qu'à compter de l'arrivée sur les chantiers à 8h00 , alors qu'il avait l'obligation de se rendre tous les matins à 6h30 au dépôt de l'entreprise afin de conduire le camion de la société pour amener sur les chantiers les matériaux nécessaires à la réalisation des tâches qui lui étaient confiées .

Il sollicite en conséquence un rappel de salaire correspondant à 1,5 heure par jour travaillé.

Il verse aux débats :

- l'attestation de M. [S] [Y] ancien salarié rédigé en ces termes: 'durant toute ma présence en tant qu'employé à la SOLATRAG, j'ai été obligé par la direction à être présent à 6h30 au dépôt pour prendre mon service et je faisait chemin commun avec le véhicule de l'entreprise avec M. [V] [U]. La fin de service était faite sur le chantier et le retour était ...avec obligation de passer au dépôt ce qui faisait un horaire de travail de 6h30 à 12h et de 13h à...on arrivait à la maison accompagné par la navette de la société.'

- l'attestation de M. [X] [O], ancien salarié, qui témoigne ainsi: 'durant toute la durée de mon contrat avec la Solatrag de 2005 à 2015 nous étions obligé de se présenter au dépôt à 6h30 tous les matin sous peine de sanctions.'

- le témoignage de M. [K] [N], ancien salarié, ainsi rédigé: 'durant mon emploi effectué à la Solatrag de 2004 à 2010 nous devions nous présenter tous les jours de travail au dépôt à 6h30 en [Localité 2] pour être sur le chantier à 8h00. Les heures de travail était de 8h00 à 12h00 et 13h00 à 17h00.'

faisant ainsi ressortir que sa demande est fondée sur des éléments suffisamment précis.

L'employeur et Maître [Z] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la société objectent qu'il n'existait aucune obligation pour les salariés de se rendre chaque matin au dépôt afin d'utiliser la navette pour se rendre sur les chantiers, mais qu'il ne s'agissait que d'une faculté qui leur était proposée. Ils ajoutent que M. [V] n'était pas chauffeur de camions pour la société, ni de la navette chargée d'accompagner les salariés sur les chantiers.

Ils précisent en outre que le trajet du siège de l'entreprise au lieu de chantier n'a pas à être considéré comme du temps de travail effectif conformément aux dispositions de l'article L.3121-1 du code du travail et des dispositions de la fiche n°9 de la circulaire DRT 06 en date du 1er mars 2003 . Ils ajoutent que les salariés perçoivent une indemnité dite 'de trajet' prévue par la convention collective des Travaux Publics pour compenser ce temps de déplacement. Ils produisent enfin un accord d'aménagement du temps de travail en date du 20 mars 2013 qui prévoit que seules les heures effectuées au-delà de 42h par semaine ouvriront droit à des heures supplémentaires.

Concernant les témoignages produits par M. [V], ils font valoir, sans cependant en justifier , que M. [O] a été licencié pour faute grave après avoir conduit un engin sous emprise de stupéfiant ayant entraîné une blessure corporelle sur un autre employé de la société. Ils précisent en outre que les salariés qui ont témoigné de l'obligation de se présenter à 6h30 au siège de l'entreprise n'ont jamais sollicité pour leur propre compte de rappel de salaire au titre d' heures non rémunérées pour la période de 6h30 à 8h00.

Ils produisent aux débats:

- l'attestation de M. [E] , salarié et délégué syndical au sein de l'entreprise qui témoigne ainsi: 'étant délégué syndical au moment des accords, il était clair que les navettes sont une faculté offerte aux salariés qu'ils pouvaient utiliser ou pas. De plus, une note de service est affichée et visible par tous les salariés sur les tableaux à plusieurs endroits dans l'entreprise'.

- la note de service en date du 14 avril 2004, signée du président directeur général, M. [H] [L], mentionnant que 'la direction rappelle que les salariés peuvent, s'ils le souhaitent, être transportés jusqu'au chantier par les véhicules de l'entreprise(ou emprunter un des véhicules de l'entreprise pour se rende au chantier).'

- l'attestation de M. [C] [P], ouvrier dans l'entreprise: 'je soussigné [P] [C] atteste qu'il n'est pas obligatoire d'être présent à l'entreprise à 6h30 le matin et qu'il n'est pas obligatoire de prendre la navette de l'entreprise pour venir au travail, les horaires de travail sont affichés à la base de vie dans l'entreprise'

- le témoignage de M. [R] [A] et de M. [D] [W] ainsi rédigé: 'J'atteste qu'il n'est pas obligatoire et que cela ne l' jamais été d'être présent à 6h30 au siège de l'entreprise. Ces horaires de travail sont connus et affichés sur les panneaux à l'attention des salariés(réfectoire etc) Il n'est pas obligatoire de prendre la navette pour venir à l'entreprise.'

- L'attestation de M. [J] [B] qui mentionne: 'j'atteste qu'il n'est pas imposé et que cela ne l'a jamais été d'être présent à 6h30 au siège de l'entreprise. Les salariés doivent être présents sur leur lieu de travail 'camion' à l'horaire de début de travail. Les horaires sont connus et affichés (réfectoire, accueil). L'utilisation des navettes mises à disposition des salariés pour venir à l'entreprise est facultative'.

- des fiches de chantiers, documents internes de l'entreprise, sur lesquels figure notamment le temps de travail quotidien effectué par chaque salarié, document qui était renseigné par M. [V] lui même en sa qualité de responsable de chantier laissant apparaître en ce qui le concerne, un temps de travail quotidien de 7 ou 8h sur certaines journées en 2012 et 2013.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les témoignages produits par M. [V], émanant de trois anciens salariés , concernant l'obligation de se présenter chaque jour à 6h30 au siège de l'entreprise, pour prendre une navette le conduisant sur les chantiers où il débutait son travail à 8h00, sont utilement combattues par la production de la note de service du 14 avril 2004, dont rien n'indique qu'il s'agirait d'un faux, à laquelle s'ajoutent les documents internes de l'entreprise produits par les appelants et les témoignages versés aux débats par ces derniers rappelant que le transport en navette n'était qu'une simple faculté offerte aux salariés , sachant qu'aucun élément ne permet d'établir que M. [V] était chargé de conduire la navette qui accompagnait les salariés sur leur lieu de travail.

Ainsi l'analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, ne permet pas d'établir l'existence d'heures de travail supplémentaires non rémunérées, de sorte que la demande de M. [V] sera rejetée, la décision sera infirmée en ce sens.

La demande indemnitaire fondée sur le travail dissimulé étant consécutive à la demande d'heures supplémentaires, elle sera également rejetée, la décision sera confirmée sur ce point.

Sur la rupture du contrat de travail:

En application de l'article L.1226-10 du code du travail en sa version applicable au litige: ' lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.'

Par ailleurs, l'avis des représentants du personnel sur le reclassement du salarié prévu par l'article L1226-10 du code du travail doit être recueilli après que l'inaptitude du salarié a été constatée dans les conditions prévues aux articles R.4624-31 et R4624-32 de ce code et antérieurement à une proposition effective au salarié d'un poste de reclassement.

La méconnaissance par l'employeur de l'obligation prévue par l'article L.1226-10 du code du travail, de consultation pour avis des représentants du personnel implique par application de l'article L1226-15 du même code en sa version applicable au litige, l'octroi au salarié d'une indemnité qui ne peut être inférieure à 12 mois de salaire.

En l'espèce, le 2 février 2016 M. [V] a fait l'objet de l'avis d'inaptitude suivant à l'issue d'une deuxième visite de reprise: 'inapte à la reprise au poste antérieurement occupé. Pourrait occuper un poste ou emploi sans station debout prolongée ni déplacements sur terrain irrégulier. Poste et conditions de travail connues.'

Le 15 février 2016, l'employeur a initié une procédure de licenciement en convoquant le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement dans un courrier rédigé ainsi: 'nous vous informons que nous envisageons de mettre fin au contra de travail qui vous lie à notre entreprise. Avant de prendre une décision et conformément à la loi, nous souhaitons avoir un entretien avec vous. Pour ce faire, nous vous demandons de venir le vendredi 26 février 2016 à 8h00 en nos bureaux d'[Localité 2]...'

Le 18 février 2016, une réunion a été organisée avec les délégués du personnel . Il ressort du compte rendu de cette réunion que ces derniers ont constaté à l'unanimité l'impossibilité d'envisager le reclassement de M. [V] et aucun des délégués du personnel n'a émis un avis défavorable à son licenciement.

Le 01 mars 2016 le licenciement de M [V] lui a été notifié par courrier rédigé en ces termes:

'...nous vous informons que nous sommes contraints de vous licencier pour les raisons suivantes: Le 2 février 2016, le Docteur [F], médecin du travail vous a déclaré :'2ème visite de reprise art R46-24-3: inapte à la reprise au poste antérieurement occupé. Pourrait occuper un poste ou emploi sans station debout prolongée ni déplacements sur terrain irrégulier. Poste et conditions de travail connues'.

Après recherche, les restrictions imposées par votre état de santé ne nous permettent malheureusement pas d'envisager votre reclassement ou un aménagement de votre poste.

En conséquence, nous vous notifions votre licenciement au motif d'inaptitude à votre poste de travail. L'envoi de la présente notification marquera la cessation de notre relation contractuelle....'

Il ressort de ces éléments que les délégués du personnel ont été consultés sur la possibilité de reclassement le 18 février 2016, soit postérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement le 15 février 2016.

Dès lors, la méconnaissance par l'employeur de l'obligation prévue par l'article L.1226-10 du code du travail, de consultation pour avis des représentants du personnel avant d'engager la procédure de licenciement ouvre droit au salarié aux indemnités prévues à l'article L1226-15 du code du travail et rend le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Lors du licenciement M. [V] disposait d'une ancienneté de 12 ans dans l'entreprise et il était âgé de 43 ans. Suite à la rupture du contrat de travail, il a continué à être en arrêt de travail et a perçu, jusqu'au 16 juin 2018, des indemnités journalières. Il a par la suite perçu des prestations pôle emploi au tire de l'ARE de juillet 2018 à octobre 2019. A compter de novembre 2019 , il a été mis à la disposition de la société Brault dans le cadre de contrats de travail temporaire conclus avec la société SAMSIC . Il bénéficie de la reconnaissance du statut de travailleur handicapé pour la période du 01/10/2015 au 30/09/2020 et perçoit une pension d'invalidité d'un montant de 5656,77 euros par an.

Il apparaît ainsi que suite à son licenciement M. [V] dont les capacités physiques sont amoindries , n'a retrouvé que des emplois précaires.

Au regard de ces éléments , il convient de lui allouer en application de l'article L1226-15 du code du travail la somme de 40 000 euros. La décision sera en conséquence réformée en son quantum et sans qu'il ne soit nécessaire d'analyser les autres moyens tendant à établir que l'obligation de reclassement n'a pas été respectée et que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse , le montant de l'indemnité sollicitée par le salarié lui ayant été accordé à hauteur de sa demande.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens:

Il convient de condamner l'employeur à verser à M. [V] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de la procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la société Solatrag à verser à M. [V] les sommes de :

- 32 000 euros au titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 12 020,02 euros au titre de rappels de salaire outre 1202,02 euros au titre des congés payés y afférents ;

Statuant à nouveau des chefs ainsi infirmés :

- Condamne la société Solatrag à verser à M. [U] [V] la somme de 40 000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Rejette la demande formée au titre de rappel de salaire ;

- Dit n'y avoir lieu à délivrance d'une attestation pôle emploi rectifiée ;

- Confirme le jugement pour le surplus,

- Dit que les créances de nature salariale produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et les créances à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

- Condamne la société Solatrag à payer à M. [V] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

- Condamne a société Solatrag aux dépens de l'instance.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17/00489
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;17.00489 ?
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