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12/03/2024 | FRANCE | N°23/03599

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 12 mars 2024, 23/03599


ARRÊT n°















































Grosse + copie

délivrées le

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5e chambre civile



ARRÊT DU 12 Mars 2024





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/03599 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P4P5





©cision déférée à la Cour : Jugement du 15 JUIN 2023 TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX DE MONTELLIER

N° RG51-21-11





APPELANTE :



SCA [Adresse 7]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Frédéric DABIENS de l'AARPI DABIENS, KALCZYNSKI, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant





INTIME :



Monsieur [J] [E]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Repr...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

5e chambre civile

ARRÊT DU 12 Mars 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/03599 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P4P5

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 JUIN 2023 TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX DE MONTELLIER

N° RG51-21-11

APPELANTE :

SCA [Adresse 7]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Frédéric DABIENS de l'AARPI DABIENS, KALCZYNSKI, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIME :

Monsieur [J] [E]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentant : Me Thomas BRUNEL de la SCP BRUNEL/PIVARD/REGNARD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 JANVIER 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la Cour composée de :

Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRÊT :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Françoise FILLIOUX, Présidente de chambre, et par Madame Sylvie SABATON, greffier.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte sous seing privé du 1er janvier 2005, M. [R] [B] a consenti à M. [J] [E] un contrat de bail à ferme portant sur les parcelles en nature de vignes cadastrées section RO n° [Cadastre 2] et [Cadastre 3] situées sur la commune de [Localité 8].

Suivant acte authentique reçu le 15 mai 2017 par Me [P], notaire à [Localité 6], la SCA du [Adresse 7] a fait l'acquisition de ces parcelles.

Par acte d'huissier délivré le 24 juin 2021, annulé et remplacé par un nouvel acte remis le 25 juin 2021, la SCA du [Adresse 7] a délivré à M. [E] un congé pour reprise avec effet au 31 décembre 2022 afin de permettre à Mme [D] [M], associée et gérante de la SCA, d'exploiter les parcelles.

Par requête du 14 octobre 2021, M. [E] a fait convoquer le bailleur devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Montpellier en vue d'une conciliation et à défaut obtenir la nullité du congé pour reprise au visa de l'article L411-60 du code rural et de la pêche maritime.

Le jugement rendu le 15 juin 2023 par le tribunal paritaire des baux ruraux de Montpellier a :

- constaté la nullité du congé pour reprise en date du 25 juin 2021 donné par la SCA du [Adresse 7] à M. [J] [E] ;

- constaté en conséquence le renouvellement du bail rural dont M. [J] [E] est titulaire à la date du 1er janvier 2023 et ce pour une nouvelle période de 9 ans ;

- condamné la SCA du [Adresse 7] aux dépens ;

- condamné la SCA du [Adresse 7] à payer à M. [J] [E] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Après avoir constaté la recevabilité de la demande introduite par M. [J] [E], ce dernier ayant qualité à agir pour être titulaire d'un bail à ferme, le tribunal a prononcé la nullité du congé pour reprise donné le 25 juin 2021 considérant qu'il ne remplissait pas les conditions légales posées par l'article L 411-60 du code rural et de la pêche maritime lesquelles prévoit l'exercice du droit de reprise par les personnes morales sur les biens qui leur ont été apportés en propriété ou en jouissance neuf ans au moins avant la date du congé.

Le tribunal a jugé que la SCA du [Adresse 7] ne pouvait pas revendiquer le bénéfice de l'exception prévue par le même article, n'étant pas un GAEC ni une société de famille du fait de la présence de M. [L] [N], M. [Y] [I] et la SAS Financière [M] qui ne sont pas des conjoints, partenaires d'un pacte de solidarité, parents ou alliées jusqu'au 4ème degré inclus.

Cette juridiction a par ailleurs considéré que l'acquisition et l'apport en propriété sont assimilables à l'acquisition de parcelles.

En conséquence, sur le constat de l'acquisition des parcelles concernées par le bail le 15 mai 2017 et de la délivrance d'un congé pour reprise le 25 juin 2021, la juridiction a constaté que le congé a été délivré moins de 9 ans après la vente pour retenir sa nullité et constater le renouvellement du bail rural à la date du 1er janvier 2023.

La société SCA du [Adresse 7] a relevé appel du jugement en toutes ses dispositions par déclaration au greffe du 11 juillet 2023.

Les dernières écritures pour la société appelante ont été déposées le 5 octobre 2023.

Les dernières écritures pour M. [J] [E] ont été déposées le 13 décembre 2023.

Le dispositif des écritures de la SCA du [Adresse 7] énonce :

Au visa des articles L411-59 et L411-60 du code rural et de la pêche maritime,

- Infirmer le jugement du 15 juin 2023 en l'ensemble de ses dispositions ;

- Juger valable et régulier le congé pour reprise délivré le 25 juin 2021 par la SCA du [Adresse 7] à M. [J] [E] à effet du 1er janvier 2023 avec toutes conséquences de droit ;

- Débouter M. [J] [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions irrecevables et non fondées ;

- Condamner M. [J] [E] à payer à la SCA du [Adresse 7] la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La SCA du [Adresse 7] déplore à titre préliminaire l'absence d'accord amiable en dépit de nombreuses propositions adressées à M. [E] consistant en un échange de parcelles situées à proximité en contrepartie de la restitution des terres litigieuses, option non retenue par son fermier.

Sur la validité du congé, la société fait valoir que l'exception prévue à l'article L411-60 du code rural et de la pêche maritime lui est applicable puisque que les parcelles litigieuses ne lui ont pas été apportées en propriété ou en jouissance, seules hypothèses prévues par ledit article, mais à l'issue d'un acte d'acquisition en date du 15 mai 2017. Il ne peut donc lui être imposé un délai de détention de neuf ans.

Elle soutient par ailleurs le respect des dispositions de l'article L411-59 du même code, Mme [D] [M], titulaire de parts sociales dans la SCA et gérante de la société, devant exploiter directement les biens et droits immobiliers à usage agricole à compter du 1er janvier 2023 comme l'autorise la DDTM.

Le dispositif des écritures de M. [E] énonce :

Au visa des articles L 331-1, L311-1, L411-54, L411-59 et L411-60 du code rural et de la pêche,

-Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

-Condamner la SCA du [Adresse 7] à lui payer la somme de 5.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

M. [E] soutient que le congé ne respecte pas les conditions posées par l'article L411-60 puisqu'il a été délivré avant l'expiration du délai de neuf ans opposable aux personnes morales ayant un objet agricole. Selon lui, la société intimée ne peut prétendre au bénéfice de l'exception prévue par le texte tenant l'extrait K-Bis de la SCA lors de la délivrance du congé, celle-ci n'étant ni un GAEC ni une société familiale soulignant que le 25 juin 2021, étaient associés au sein de la société M. et Mme [M] et leur fille, ainsi que M. [L] [N] et la SAS Financière [M].

Il fait valoir en outre que la capacité du bailleur à exercer son droit de reprise s'apprécie à la date de délivrance du congé.

Enfin, il soutient que selon une jurisprudence constante, le délai de détention de neuf années est opposable aux parcelles acquises à titre onéreux par les sociétés (cass. soc.16 juin 1966 et 20 novembre 1969, n°67.163).

S'agissant de l'application de l'article L411-59, il soutient que Mme [D] [M] ne justifie pas répondre aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnées aux articles L 331-2 à L 311-5, et que l'autorisation d'exploiter donnée par la DDTM n'intègre pas les parcelles litigieuses.

MOTIFS

1/ Sur la validité du congé pour reprise :

Selon l'article L411-60 du code rural et de la pêche maritime, les personnes morales, à la condition d'avoir un objet agricole, peuvent exercer le droit de reprise sur les biens qui leur ont été apportés en propriété ou en jouissance, neuf ans au moins avant la date du congé. Ces conditions ne sont pas exigées des groupements agricoles d'exploitation en commun ou de sociétés constituées entre conjoints, partenaires d'un pacte de solidarité, parents ou alliés jusqu'au quatrième degrés inclus. L'exploitation doit être assurée conformément aux prescriptions des articles L411-59 et L411-63 par un ou plusieurs membres des sociétés mentionnées au présent article. Toutefois, les membres des personnes morales mentionnées à la première phrase du présent article ne peuvent assurer l'exploitation du bien repris que s'ils détiennent des parts sociales depuis neuf ans au moins lorsqu'ils les ont acquises à titre onéreux.

Le 25 juin 2021, la SCA du [Adresse 7] a signifié à M. [E] un congé pour reprise des terres acquises le 15 mai 2017 en vue de les exploiter à compter du 1er janvier 2022.

La SCA, qui ne revendique pas en appel la qualité de GAEC ou société familiale, prétend que l'acquisition de terres intervenue à titre onéreux n'est pas assimilable à un apport en propriété ou en jouissance ce qui justifie l'inopposabilité du délai de neuf ans.

Or, comme l'a justement indiqué le tribunal paritaire des baux ruraux, il est de jurisprudence constante que la limitation du droit de reprise des personnes morales est également applicable à des sociétés qui sont devenues propriétaires de parcelles à la suite d'une acquisition à titre onéreux (c.cass chbre sociale, 16 juin 1966 ; c.cass chbre civile, 20 novembre 1969).

Il s'ensuit que le délai de neuf ans est opposable à la SCA du [Adresse 7], qui au moment de la délivrance du congé, n'est pas un groupement agricole d'exploitation en commun ni une société familiale constituée entre conjoints, partenaires d'un pacte de solidarité, parents ou alliés jusqu'au quatrième degrés inclus comme l'établit l'extrait K-bis produit aux débats.

Il en résulte la nullité du congé litigieux qui a été délivré avant l'expiration du délai de neuf ans comme l'a justement jugé le tribunal paritaire des baux ruraux dont la décision entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions.

2/Sur les demandes accessoires :

La décision entreprise sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, il y a lieu de condamner la SCA du [Adresse 7], qui succombe, à la charge des dépens.

L'équité commande enfin de la condamner à payer à M. [E] la somme de 2.000 euros en application des dispositions au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après en avoir délibéré conformément à la loi, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 15 juin 2023 par le tribunal paritaire des baux ruraux de Montpellier en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SCA du [Adresse 7] à payer à M. [J] [E] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SCA du [Adresse 7] aux dépens d'appel.

Le greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/03599
Date de la décision : 12/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-12;23.03599 ?
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